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Trajectoires de jeu d'internautes québécois à la suite de l'inauguration du premier site de jeux de hasard et d'argent légal au Québec

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Trajectoires de jeu d’internautes québécois à la suite de

l'inauguration du premier site de jeux de hasard et d'argent

légal au Québec

Mémoire doctoral

Émilie Vézina

Doctorat en psychologie

Docteur en psychologie (D.Psy.)

Québec, Canada

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Résumé

L’exposition à une nouvelle offre de jeu semble promouvoir la participation au jeu dans la population. Ce mémoire illustre les trajectoires de jeu d’internautes (N=729) entre

l’inauguration d’Espacejeux.com (novembre 2010) et janvier 2012 et explore les facteurs (sociodémographiques, habitudes de jeu) associés à sa fréquentation. Un sondage, réalisé aux deux temps de mesure auprès d’adultes québécois, a permis de créer quatre catégories de joueurs (non joueurs, joueurs hors ligne, en ligne avec argent fictif ou avec argent réel). Durant l’étude, 78 % des internautes n’ont pas changé de catégorie de joueurs.

Approximativement 2 % ont parié de l’argent réel sur Espacejeux.com et 64 % d’entre eux visitent d’autres sites de jeu. L’âge, le revenu, le visionnement de publicités, les habitudes de jeu et l’intention de visiter Espacejeux.com constituent les meilleurs prédicteurs du pari d’argent réel sur Espacejeux.com. Malgré le faible engouement observé, un monitorage permettra de documenter l’évolution du phénomène.

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Table des matières

Résumé ... iii

Table des matières ... v

Liste des Tableaux ... vii

Liste des figures ... ix

Remerciements ... xi

Avant-Propos ... xiii

Introduction ... 1

Les problèmes de jeu. ... 2

Portrait des joueurs en ligne. ... 3

Législation du jeu sur Internet dans le monde. ... 4

Portrait et évolution du phénomène au Canada et au Québec. ... 5

L’accessibilité comme facteur de risque. ... 7

Les attraits du jeu en ligne. ... 8

La légalité comme facilitateur. ... 11

La sécurité, un facteur d’importance. ... 14

L’attitude personnelle et sociétale comme prédicteurs. ... 16

Nature et contexte du mémoire. ... 17

Objectifs et Questions de recherche. ... 18

Méthode ... 20

Participants. ... 20

Instruments. ... 21

Questionnaire sociodémographique. ... 21

Questionnaire sur les habitudes et intentions de jeu. ... 21

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vi

Procédure. ... 22

Résultats ... 24

Trajectoires de jeu des internautes entre novembre 2010 et janvier 2012. ... 24

Fréquentation et portrait des utilisateurs d’Espacejeux.com. ... 25

Variables reliées au pari d’argent réel sur Espacejeux.com. ... 26

Discussion ... 29

La légalité, faible moteur de changement. ... 37

Limites et forces du mémoire. ... 39

Recommandations. ... 41

Bibliographie ... 43

Annexe A. Questionnaire sur les habitudes et intentions de jeu. ... 67

Annexe B. Méthodologie détaillée SOM 2010: Avant l’inauguration d’Espacejeux. ... 69

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vii

Liste des Tableaux

Tableau 1. Données sociodémographiques des participants aux deux temps de mesure ... 51 Tableau 2. Répartition de l'échantillon dans les catégories de joueurs aux deux temps de

mesure ... 53 Tableau 3. Proportion des répondants dans les trajectoires de jeu ... 55 Tableau 4. Proportion des répondants dans les trajectoires de jeu impliquant

Espacejeux.com ... 57 Tableau 5. Portrait des joueurs enligne avec argent réel sur Espacejeux.com ou non ... 59 Tableau 6. Coefficients de corrélations des variables du sondage avec le pari d'argent réel

sur Espacejeux.com ... 61 Tableau 7. Variables incluses dans le modèle de régression logistique du pari d'argent réel sur Espacejeux.com ... 63

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Liste des figures

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Remerciements

Rien de mieux que de m'asseoir devant cette page blanche, par un bel après-midi ensoleillé, pour m’imprégner de la réalisation que mon aventure doctorale s’achève. Certains diront «Enfin!» et d’autres «Déjà?», mais malgré les hauts et les bas, les questionnements et les incertitudes, c’est toute qu'une péripétie que j’ai vécu dans les dernières années. Je repense à toutes les personnes impliquées, de près ou de loin, dans mon parcours et je me sens gâtée.

Je tiens d’abord à remercier sincèrement ma directrice de recherche, Isabelle Giroux, pour m’avoir chaleureusement accueillit dans son équipe et m’avoir offert autant de belles opportunités, tant en recherche, qu’en clinique et en enseignement. Merci Isabelle pour ton soutien, merci de m'avoir écouté et encouragé durant ces quatre années. Merci à Serge Sévigny, mon codirecteur de recherche, de m’avoir fait confiance pour ce projet. Ta rigueur scientifique m’a aidé à naviguer avec plus d’aisance les différentes étapes de ma recherche. Je tiens aussi à remercier Christian Jacques, pour son dévouement et son empathie. Plus souvent qu'autrement, ces quelques mots échangés dans ton cadre de porte suffisaient à me déboguer ou juste à dédramatiser. Un gros merci également à Geneviève Belleville, d’avoir accepté de siéger sur mon comité, mais surtout pour votre curiosité bienveillante et vos bons conseils.

Mention spéciale à l'équipe du CQEPTJ, collègues et amis, qui ont contribué à ajouter de la couleur et une touche de folie à cette période de ma vie. Malgré nos différences, il y a plusieurs moments où j'ai eu l'impression que personne ne pouvait réellement comprendre ce que je vivais, sauf l'un d'entre vous. Merci pour ça, mais aussi pour les discussions la porte fermée, en gang au dîner ou devant un verre au pub. Après tout, on a pas juste parlé de nos émotions durant ces trois années! Je quitte avec beaucoup de beaux souvenirs et d'anecdotes mémorables découlant des étés passés au labo, à essayer de travailler, de nos soirées en ville, des partys d'appart et des vins et fromages légendaires au 1313. Méchante belle gang. Un salut spécial aux filles du labo, Andréanne, Bianca, Mélanie, Catherine et Annie. Je vais m'ennuyer des moments passés à jaser de nos amours, nos déceptions, nos projets et des vêtements qu'on a encore achetés (et qu'on n’aurait donc pas dû!).

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xii

Ouf, pas toujours évident de côtoyer une fille dont les études ne semblent jamais se terminer et qui peut (parfois!) avoir des humeurs en dents de scie. Ainsi, un énorme merci à ma famille qui m'a suivi là-dedans jusqu'au bout, mes parents Denis et Hélène, mon frère Nicolas, sa blonde Cynthia et ma sœur Andréanne. Même si, souvent, on mise sur nos différences, les expériences vécues ensemble m'ont donné la persévérance nécessaire pour me rendre jusqu’ici. J'ai une pensée également pour ma grand-mère, Simone. Tes encouragements et ton écoute m'ont motivés à vouloir pousser plus loin et garder espoir. Finalement, je tiens à reconnaitre l'apport de mes beaux-parents, Monique et Rodrigue. Merci pour votre support et votre acceptation qui, à plusieurs moments, ont fait la différence pour moi.

Merci à ma meilleure amie, mon âme sœur féminine, Gabrielle-Émilie, qui, le temps d'une soirée en tête à tête à jaser ou d'un road trip de folies, me permet de reconnecter avec mon insouciance et ma spontanéité. Peu de gens me connaissent aussi bien que toi, merci d'avoir toujours été là et fière de moi. Je t'aime et je te promet d'être une excellente matante pour Milana.

Je ne peux assurément pas achever cette rétrospective sentimentale sans rendre hommage à Guillaume, mon amour, mon meilleur ami, mon psy, mon coloc, ma tornade, mais tellement d'autres choses aussi. Impossible pour moi d'imaginer une meilleure personne à avoir dans ma team. Ta présence à mes côtés dans les dernières années a été une bénédiction. Merci pour ta douceur, ta générosité immense, ton sens de l'humour (toujours douteux!) et ton franc-parler qui m'a aidé tellement de fois à changer ma perspective sur les choses. Je te remercie pour nos trois petits amis poilus qui ensoleillent nos matins et qui, chaque jour, me permettent de réaliser à quel point tu es généreux de ton amour. Je serai toujours présente pour partager et t'appuyer dans tes projets, comme tu l'as si bien été pour moi. On est forts ensemble et je suis heureuse de débuter cette nouvelle étape de ma vie avec toi. Je t'aime.

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xiii

Avant-Propos

Ce mémoire doctoral correspond aux exigences du programme de doctorat en psychologie (D.Psy.) de l’École de psychologie de l’Université Laval. Madame Isabelle Giroux, Ph.D, a été ma directrice de recherche et Monsieur Serge Sévigny, Ph.D, fût mon codirecteur de recherche. La collecte de données, effectuée entre 2010 et 2012, a été financée par le Centre québécois d’excellence pour la prévention et le traitement du jeu (CQEPTJ). Je désire également mentionner l’apport financier fourni par l’Infrastructure de

recherche du Centre de réadaptation en dépendance de Montréal – Institut universitaire

pour me soutenir dans la réalisation de ce mémoire.

Comme auteure principale du document, j'ai été responsable de recenser la littérature scientifique pertinente, élaborer la méthodologie, restructurer la banque de données reçue, effectuer les analyses statistiques et rédiger le mémoire doctoral. Durant tout le processus de rédaction du mémoire, j’ai bénéficié du soutien et de la supervision de Madame Isabelle Giroux. Monsieur Serge Sévigny, a participé à l’encadrement lors de la rédaction. Monsieur Christian Jacques, M. Ps., professionnel de recherche au CQEPTJ, a également contribué à la relecture et la bonification de ce projet par la mise à profit de son expérience en rédaction scientifique et sur les jeux de hasard et d’argent. Finalement, Monsieur David Emond, M. Sc., consultant statistique, a contribué à la qualité de ce mémoire par son implication dans le choix et la réalisation des analyses statistiques.

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Introduction

L’utilisation d’Internet progresse au Québec. En 2012, le taux de branchement des domiciles de la province s’élevait à 81,6 %, comparativement à 74,3 % en 2011, 59,8 % en 2006 et 40,8 % en 2001 (Institut de la Statistique du Québec, 2013). Il est maintenant possible d’accéder à Internet autant à partir d’appareils fixes, tels l’ordinateur ou le téléviseur, qu’à partir d’appareils mobiles comme le téléphone cellulaire ou la tablette électronique. L’accès est possible avec un réseau par câble ou sans fil, mais aussi lors de déplacements grâce aux réseaux de téléphonie mobile (Institut de la statistique du Québec, 2013). À cet effet, en 2012, près d’un ménage québécois sur cinq utilise Internet par l’intermédiaire des réseaux de téléphonie mobile (Institut de la statistique du Québec, 2013). L’utilisation d’Internet au domicile demeure toutefois la plus répandue (94,3 %). Plusieurs individus y naviguent aussi à des fins personnelles au travail (37,5 %), à l’école (19,1 %) et dans des établissements publics tels que les bibliothèques municipales (14,4 %) (Institut de la statistique du Québec, 2012).

Internet se révèle un outil de communication et de distribution particulièrement prisé par des entreprises offrant différents types de services et de divertissements, dont les jeux de hasard et d'argent (JHA). Les JHA constituent toutes les activités nécessitant le pari d’argent ou d’un objet de valeur, dont l’issue repose partiellement ou entièrement sur le hasard et dont la mise est irréversible (Ladouceur, Sylvain, Boutin, & Doucet, 2000). Les JHA sont disponibles hors ligne (casino, salons de jeu, etc.) ou encore en ligne (casinos virtuels, sites de poker, etc.) et peuvent prendre plusieurs formes, dont le bingo, les loteries, les appareils de loterie vidéo, les jeux de cartes, les machines à sous, les paris sportifs, etc. Offerts légalement au Québec depuis plusieurs décennies, les JHA constituent une pratique courante pour la majorité de la population, le taux de participation à vie s’élevant à 84,1 %, tous types de JHA confondus (Kairouz, Nadeau, & Robillard, 2014). En ce qui a trait spécifiquement aux JHA en ligne, le taux de participation annuel dans la population générale du Québec atteint 1,5 %, ce qui correspond à environ 96 000 individus (Kairouz et al., 2014). L’offre de ce type de divertissement virtuel a connu une importante progression depuis les années 1990, comme le dénote le nombre de sites offrant la possibilité de parier de l’argent qui est passé de 30 à 2 296 entre 1994 et 2009 (McMullan & Kervin, 2012). La

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majorité de ces sites sont gérés par des compagnies privées sans affiliations avec de réels établissements de jeu et œuvrant depuis des paradis fiscaux (Woods & Williams, 2009). Les revenus mondiaux de l’industrie des JHA en ligne s’avèrent donc difficiles à déterminer. Toutefois, des mesures de fréquentation des sites de jeu permettent d’estimer que, pour l’année 2008, ils s’élevaient à approximativement 16 milliards de dollars (Woods & Williams, 2009).

Les problèmes de jeu.

Au même titre que les JHA hors ligne, les comportements associés aux JHA en ligne se situent sur un continuum évoluant entre l’abstinence et le jeu d’argent pathologique (gambling disorder), catégorisé dans le Manuel diagnostique et statistique des troubles

mentaux, 5e édition (DSM-5). La littérature désigne également des joueurs à risque, qui

sont les individus présentant des habitudes de jeu préoccupantes et pouvant vivre certaines conséquences, sans pour autant atteindre le seuil diagnostique du DSM-5 (Griffiths, 2004). Les individus souffrant de jeu d’argent pathologique vivent quant à eux plusieurs conséquences négatives significatives associées à leurs habitudes de jeu (American Psychiatric Association [APA], 2013). Le jeu d’argent pathologique est une dépendance sans substance caractérisée par des comportements de jeu récurrents et persistants qui entrainent de la détresse ou une altération du fonctionnement sur une période d’au moins 12 mois consécutifs (APA, 2013). Les manifestations associées sont, entre autres, le besoin de parier des sommes de plus en plus importantes pour obtenir l’excitation désirée, l’irritabilité lors de périodes de diminution ou d’arrêt du jeu, le retour au jeu dans le but de regagner l’argent perdu et les efforts répétés et infructueux pour diminuer ou cesser la pratique du jeu (APA, 2013). Le jeu d’argent pathologique comporte aussi plusieurs conséquences personnelles telles que la dégradation des relations interpersonnelles, la perte d’emploi, les problèmes financiers et même la faillite (APA, 2013).

Dans la version précédente au DSM-5, soit le DSM-IV-TR (APA, 2000), le diagnostic actuel de jeu d’argent pathologique était nommé jeu pathologique. Certains changements ont été apportés entre les deux versions, outre l’appellation. D’abord, il est

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3 possible de noter le retrait d’un critère diagnostique (commission d'actes illégaux pour financer la pratique du jeu; APA, 2000). Également, le nombre minimal de critères diagnostiques à remplir a diminué de cinq à quatre. Un marqueur de temps pour la persistance des symptômes (12 mois ou plus) et des spécificités sur la gravité (légère, modérée ou sévère), la rémission (précoce ou soutenue) et le caractère épisodique ou persistant du trouble ont également été ajoutés. Étant donné la récence des changements et du fait que la revue de littérature du présent mémoire a été réalisée majoritairement avant la publication du DSM-5, les études recensées utilisent donc le diagnostic de jeu pathologique du DSM-IV-TR pour référer à leurs participants. Ainsi, pour maintenir la concordance avec les résultats rapportés par les auteurs, l’appellation du jeu pathologique sera utilisée dans la suite du texte.

Portrait des joueurs en ligne.

La littérature scientifique rapporte que les joueurs en ligne sont habituellement de sexe masculin, avec un niveau de scolarité et un revenu élevés. Lorsque comparés à l’ensemble du bassin des joueurs québécois (toutes modalités confondues), les utilisateurs de JHA en ligne tendent à être plus jeunes (18-44 ans comparativement à 35-74 ans) et plus nombreux à être célibataires ou en union libre (Kairouz et al., 2014). Fait intéressant, une proportion plus importante des joueurs en ligne entretiennent une attitude positive envers les JHA et s’engagent dans plusieurs activités de jeu (Gainsbury, Wood, Russell, Hing, & Blaszczynski, 2012). Brosowski, Meyer et Hayer (2012) ont observé que parmi les joueurs en ligne de leur échantillon, 35 % jouent à trois JHA différents, 4 % quatre JHA et 2 % plus de quatre. La grande majorité des joueurs en ligne s’adonnent également au jeu hors ligne (Kairouz et al., 2014; Wardle, Moody, Griffiths, Orford, & Volberg, 2011). La médiane de l’addition des dépenses annuelles destinées aux JHA pour les joueurs en ligne est aussi significativement plus élevée que pour les joueurs hors ligne uniquement (1300 $ vs 144 $; Kairouz et al., 2014). Conséquemment, la prévalence de jeu à risque et pathologique est significativement plus élevée chez les joueurs en ligne que ce qui est observé chez les individus qui s’adonnent uniquement aux JHA hors ligne (Wardle et al., 2011; Kairouz et al., 2014). Wardle et ses collaborateurs (2011) observent un pourcentage de jeu pathologique d’approximativement 0,4 % chez les joueurs hors ligne, de 0,8 % pour les

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individus qui s’adonnent à un seul JHA (p. ex., poker) à la fois hors ligne et en ligne et 3,4 % pour les individus qui s’adonnent à plusieurs JHA, à la fois hors ligne et en ligne. Au Québec, environ 23 % des joueurs en ligne seraient des joueurs à risque modéré ou pathologiques probables comparativement à 1,8 %, si l’on considère l’ensemble des joueurs québécois (Kairouz et al., 2014). Il est à noter que ces résultats sont basés sur un échantillon plutôt restreint de joueurs en ligne québécois (n= 159). Toutefois, ils renforcent l’importance de s’intéresser aux impacts potentiels d’une offre grandissante de jeu sur Internet sur les comportements des joueurs.

Législation du jeu sur Internet dans le monde.

Malgré l’importance des débats et des enjeux entourant les JHA en ligne, certains pays n’ont encore aucune législation spécifique à ce sujet. Dans un rapport de recherche préparé pour l’Ontario Problem Gambling Research Centre, Woods et Williams (2009) synthétisent les différentes législations disponibles en lien avec les JHA en ligne à travers le monde. Il en ressort que d’un pays à l’autre, il existe plusieurs positions s’étalant sur un continuum entre l’interdiction et la permission complète. À titre d’exemple, la Chine, la Russie et la Grèce s’opposent à tous les JHA sur Internet alors que le Royaume-Uni, Malte, le Panama et les Pays-Bas les tolèrent tous, sans exception. Dans une perspective plus nuancée, certains pays (p.ex., Suède, Nouvelle-Zélande et Allemagne) posent une restriction particulière sur certains JHA, catégories de joueurs ou sites. En ce qui a trait, entre autres, à l’Autriche la Finlande et la Norvège, ces pays émettent des licences pour des sites de JHA mais permettent uniquement aux résidents de leurs pays respectifs de les utiliser. Finalement, dans certains pays (p. ex., Italie, République Tchèque, Danemark), il est illégal pour les résidents d’accéder à des sites de jeu provenant de l’extérieur du pays (Woods & Williams, 2009).

Des changements récents dans la légalisation de certains pays laissent croire à une libéralisation croissante des JHA en ligne. L’un des exemples de ce phénomène a débuté aux États-Unis en 2013. Autrefois fervents partisans de la prohibition de tout ce qui se rapportait à ce type d’activité, certains États américains offrent maintenant officiellement

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5 des opportunités de paris légaux sur Internet. Le Nevada, le New Jersey et le Delaware ont en effet légalisé les JHA en ligne au cours de l’année 2013. En 2015, six autres États américains (Californie, Illinois, Mississippi, New York, Pennsylvanie et Washington) ont présenté des projets de loi visant la légalisation des JHA sur Internet (National Conference of State Legislature, 2015). Étant donné la récence de ces changements, aucune étude empirique n’a pu être recensée pour documenter les impacts de ces changements législatifs aux États-Unis. Toutefois, selon les informations fournies à une source journalistique par l’opérateur d’Ultimate Poker, le premier site légal à être offert aux résidents du Nevada, après seulement deux semaines, un million de mains de poker avaient été jouées sur le site (Yahoo Sports, 2013). Bien qu’il soit impossible de vérifier avec certitude l’information fournie par l’opérateur, il demeure que ces données de fréquentation dépeignent une importante demande pour ce divertissement et le potentiel financier des JHA sur Internet aux États-Unis et en Amérique du Nord.

Portrait et évolution du phénomène au Canada et au Québec.

Pour ce qui est de la situation au Canada, la législation applicable aux JHA sur Internet est la même que pour les JHA hors ligne. Les articles 206 et 207 du Code criminel canadien énoncent que le gouvernement d´une province, seul ou de concert avec celui d´une autre province, peut mettre sur pied et exploiter des JHA en conformité avec la législation (Ministère de la Justice du Canada, 1985). Il est donc permis d’offrir des JHA sur Internet uniquement aux résidents de la province respective du fournisseur (Ministère de la Justice du Canada, 1985). Les individus ou organisations allant à l’encontre de cette loi sont passibles de poursuites judiciaires. Toutefois, étant donné que le jeu est sous la juridiction des gouvernements provinciaux, l’interprétation de certains mots-clés des articles de lois (mettre sur pied et exploiter) s’avère différente, ce qui crée des inconsistances entre la gestion des JHA selon la province (Smith, 2014). Ainsi, certaines provinces (p.ex. Nouvelle-Écosse, Colombie-Britannique) ont mis en place des partenariats avec des compagnies privées pour la gestion de l’offre de jeu. Il existe également un grand nombre de sites offrant la possibilité aux Canadiens de parier de l’argent et qui ne sont pas gérés ou affiliés à une société d’État. Ces derniers constituent donc des sites illégaux en vertu de la loi canadienne. En ce qui a trait à la participation aux JHA sur Internet, une zone

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grise persiste. En effet, bien que les internautes canadiens aient accès à plus de 2000 sites de JHA dits illégaux, la loi n’aborde que l’offre de jeu et ne comprend aucun article référant à une quelconque régulation de la fréquentation de ces sites. Effectuer des paris sur ceux-ci est donc considéré comme une pratique légale (Woods & Williams, 2009).

En 2010, le Québec a vu apparaitre un phénomène nouveau dans l’offre de jeu en ligne, soit la prise en charge gouvernementale d’un site Internet légal offrant différents types de JHA. En effet, en février 2010, le gouvernement québécois a autorisé officiellement Loto-Québec, une société d’État, à offrir des JHA en ligne. Le 1er décembre

de la même année marque l’entrée en opération d’Espacejeux.com (EJ), un site de JHA dirigé par cette société. À son inauguration, le poker, le black jack, la roulette et les jeux de table étaient offerts sur EJ (Loto-Québec, 2013). Avec le temps, se sont ajoutés les paris sportifs, les machines à sous et les loteries virtuelles. Le Québec s’ajoute ainsi à plusieurs provinces canadiennes (Nouveau-Brunswick, Nouvelle-Écosse, Île-du-Prince-Édouard, Terre-Neuve-Labrador, Ontario, Manitoba et Colombie-Britannique) offrant à ce jour des JHA sur des sites légaux.

Suite à l’annonce de la décision du gouvernement québécois de légaliser les JHA sur Internet, de nombreux intervenants, chercheurs et responsables de santé publique ont utilisé la voie médiatique pour soulever leurs préoccupations quant aux impacts de cette nouvelle offre de JHA sur les habitudes des Québécois. À cet effet, en 2010, un moratoire visant à reporter d’au moins un an l’ouverture du site légal a été demandé par les 18 directeurs de la Santé publique du Québec. Ceci aurait permis, selon eux, d'en étudier davantage les impacts potentiels et de créer une politique québécoise sur les JHA sur Internet. Cette requête fût rejetée, car, selon le ministre des Finances de l’époque, il était préférable d’encadrer ce phénomène, car un moratoire ne permettrait pas de freiner l’offre de JHA en ligne illégale déjà à la portée des Québécois (Radio-Canada, 2010). Aussi, la protectrice du citoyen a exprimé ses inquiétudes en proposant certaines recommandations, notamment un appel à la vigilance dans le choix des JHA proposés et un suivi étroit de leurs effets sous l’angle de la santé publique (Le Protecteur du Citoyen, 2011). Certains chercheurs québécois spécialistes des dépendances et des JHA ont aussi exprimé des préoccupations. À

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7 cet effet, Élizabeth Papineau, chercheure à l’Institut national de santé publique du Québec, craignait que la légalité du site ne contribue à initier de nouveaux joueurs (Le Soleil, 2010) alors que de son côté, Isabelle Giroux, chercheure à l’Université Laval, se disait particulièrement préoccupée par la grande accessibilité des JHA en ligne et la possibilité de parier sur plusieurs écrans simultanément (Contact, 2011).

L’accessibilité comme facteur de risque.

La littérature empirique supporte certaines des inquiétudes soulevées précédemment. En effet, certains des facteurs de risque principaux du jeu pathologique occupent un rôle prédominant dans le phénomène des JHA sur Internet. Parmi ceux-ci, la disponibilité et l’accessibilité du jeu ont été ciblées comme faisant partie des caractéristiques situationnelles influençant le plus les comportements de jeu excessif (McCormack & Griffiths, 2013). L’accessibilité au jeu est fortement corrélée à l’augmentation du taux de participation à cette activité (McCormack & Griffiths, 2013) notamment, car l’accessibilité permet aux individus d’y participer, et ce, en limitant l’interférence avec leurs obligations personnelles et professionnelles (Griffiths, Parke, Wood, & Parke, 2006). Dans les recherches scientifiques, l’accessibilité aux JHA est habituellement conceptualisée selon la distance ou le temps nécessaire pour aller jouer ou encore en fonction du nombre d’opportunités de jeu selon le nombre d’habitants d’une région (Thomas et al., 2011).

Une étude menée aux États-Unis, dans l’État du Nevada, souvent considérée comme la capitale des JHA, a démontré que la prévalence de problèmes de jeu y est significativement plus importante que ce qui est observé dans l’ensemble du pays (Volberg, 2002). Welte, Barnes, Wieczorek, Tidwell et Hoffman (2007) observent aussi que les habitants résidant à moins de 16 kilomètres (10 miles) d’un casino éprouvent significativement plus de problèmes de jeu que ceux habitant à une plus grande distance. Une relation positive a aussi été observée entre la proximité d’un établissement de jeu et d’une part, la fréquence de participation au jeu des habitants et d’autre part, la prévalence des problèmes de jeu (Rush, Veldhuizen, & Adlaf , 2007). Des chercheurs québécois ont

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relevé des constats semblables, mais n’ont néanmoins pas observé de lien avec la prévalence des problèmes de jeu (Sévigny, Ladouceur, Jacques, & Cantinotti, 2008). Cox, Yu, Afifi, et Ladouceur (2005) ont observé que les individus qui résident dans une région présentant un grand ratio d’appareils de loterie vidéo par habitant affichent une prévalence plus élevée de problèmes de jeu que celle documentée dans les régions ayant une plus faible densité de ces appareils. Selon cette conceptualisation, il apparait que les JHA en ligne présentent une accessibilité sans précédent, car ils ne nécessitent aucun déplacement et n’impliquent pas de contrainte temporelle.

Il parait néanmoins que le concept d’accessibilité comprend d’autres dimensions qui, bien que moins étudiées, peuvent s’avérer pertinentes à la compréhension des JHA sur Internet. En ce sens, les heures d’ouverture, le nombre de JHA offert dans un même lieu, l’accès facile et la disponibilité de ressources financières sont des indicateurs pouvant aussi être utilisés pour quantifier l’accessibilité d’un environnement de jeu (Thomas et al., 2011). En raison de la disponibilité constante des JHA en ligne, le grand nombre de formes de JHA offerts, la facilité de l’utilisation d’Internet et la possibilité d’accéder à des fonds importants avec la carte de crédit, il est donc possible de définir les JHA en ligne comme fortement accessibles à la population. Ils sont donc plus susceptibles d’entrainer une augmentation du nombre d’utilisateurs et des problèmes de jeu.

Les attraits du jeu en ligne.

Examiner les raisons rapportées par les joueurs pour s’adonner aux JHA sur Internet procure aussi des pistes de réflexion intéressantes sur le phénomène. En effet, qu’est-ce qui pourrait pousser un individu qui ne jouait pas auparavant ou qui s'adonnait uniquement aux jeux hors ligne à visiter EJ et y parier de l’argent ? En ce qui a trait aux individus déjà initiés aux JHA en ligne sur des sites illégaux, quels facteurs pourraient les intéresser sur le site légal?

D’abord, il appert que les sites de JHA comportent plusieurs caractéristiques attrayantes pouvant faciliter l’initiation de nouveaux joueurs en ligne. Un aspect central de

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9 l’attrait de ce type de JHA semble être l’anonymat que procure Internet (Griffiths & Parke, 2002). Cette caractéristique s’applique pour tous les joueurs, mais pourrait s’avérer particulièrement influente pour les joueurs inexpérimentés, car personne ne peut connaitre leur identité, ce qui diminue les interdits sociaux dans le cadre de JHA impliquant plusieurs participants (Parke & Griffiths, 2005). Les joueurs ont l’opportunité d’apprendre et s’adonner au jeu sans gêne ou crainte du jugement des autres participants. Les JHA en ligne permettent aussi un plus grand sentiment de confort, car le joueur débutant ne peut détecter les signes de jugement ou de désapprobation sur le visage de ses partenaires, ce qui est typique des interactions directes (Griffiths, Parke, Wood, & Parke, 2006). Selon Griffiths et Parke (2002), les bénéfices de l’anonymat seraient d’autant plus apparents dans une situation de perte ou de faux pas de la part du joueur et dans les JHA comportant une composante d’habiletés et des règles précises et complexes, comme le poker. D’autres motivations rapportées par plusieurs joueurs concernent le fait qu’Internet est un intermédiaire très pratique pour s’adonner aux JHA, notamment en raison de l’absence de foule (Gainsbury et al., 2012) et du confort de pouvoir parier en demeurant à leur domicile (McCormack & Griffiths, 2012). En raison de ces facteurs, l’utilisation fréquente et prolongée d’Internet pour jouer de l’argent apparait très facilitée.

La familiarité avec les JHA semble aussi un facteur de risque important impliqué dans les JHA en ligne. Plusieurs des sites de JHA offrent la possibilité aux joueurs, par le biais de paris avec de l’argent fictif (mode " démo "), de favoriser cette familiarité. Cette option est disponible sur EJ, mais aussi sur la majorité des sites illégaux. Ces paris avec argent fictif n’impliquent pas de conséquences négatives immédiates pour le joueur, car ils ne comportent aucun investissement monétaire. En utilisant cette option, les utilisateurs ont la possibilité d’apprécier les mêmes jeux et d’acquérir de la confiance, mais sans le risque de perdre de l’argent (McBride & Derevensky, 2009; Griffiths, Parke, Wood, & Parke, 2006). Ils peuvent apprendre à leur rythme, s’acclimater et, particulièrement pour certains JHA comprenant des règles complexes, mieux gérer les règles du jeu avant de passer aux paris avec de l’argent réel, ce qui peut être rassurant et incitatif pour plusieurs (McCormack & Griffiths, 2013). Il semble que la disponibilité d’un mode " démo " sur le site ait un impact dans la décision de jouer en ligne ou non. En effet, Griffith et Barnes (2008) ont

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observé auprès d’un échantillon d’étudiants que la présence d’un mode " démo " était nommée comme motivation pour jouer en ligne par 21 % de leur échantillon. McBride et Derevensky (2009) ont également observé dans un échantillon de joueurs en ligne que 77 % (434 sur 563) avaient parié avec de l’argent fictif dans la dernière année. Les femmes étaient plus susceptibles que les hommes de s’être adonnées au pari avec de l’argent fictif. Il est toutefois pertinent de noter que l'échantillon recruté par McBride et Derevensky (2009) est composé à environ 23 % de joueurs à risque ou pathologiques, selon les critères du DSM-IV-TR. Ce taux est beaucoup plus élevé que celui observé dans la population générale. Le portrait de participation au jeu avec argent fictif pourrait donc différer lorsqu'évalué auprès de joueurs récréatifs ou d'un échantillon représentatif de la population générale. Il demeure néanmoins préoccupant de remarquer que, sur certains sites, les paris avec argent fictif peuvent parfois impliquer des incitatifs au jeu d'argent, notamment des gains en argent à dépenser sur le site et des bonus d’inscription, et ce malgré l’absence d’argent investi par le joueur (McBride & Derevensky, 2009). Également, des messages instantanés, incitant à porter son attention sur les gains et à jouer avec de l’argent réel sont souvent publiés aux joueurs durant l’épisode de jeu (McBride & Derevensky, 2009). Ainsi, il semble qu’au-delà du divertissement, les paris avec argent fictif pourraient permettre de récupérer des joueurs qui s’abstiennent de participer à certains JHA, car ils ne connaissent pas suffisamment les règles (McCormack & Griffiths, 2012) ou n’avaient pas l’intention au préalable d’investir de l’argent.

La familiarité envers les JHA est également un facteur ayant le potentiel d’entrainer des effets nuisibles pour le joueur. Selon Langer (1975), plus un individu se familiarise avec une activité dont l’issue est déterminée par le hasard et la chance, ce qui est le cas des JHA, plus ce dernier aura la croyance de pouvoir contrôler l’issue de l’activité, ce qui est en réalité impossible. Les croyances erronées entretenues par les joueurs sur la chance, le hasard et les possibilités de gains sont omniprésentes dans le jeu pathologique, notamment dans son développement et son maintien dans le temps (Lund, 2011). Elles sont observées à différents niveaux chez plusieurs joueurs, mais l’effet serait plus important chez les joueurs en ligne (Lund, 2011). Certains joueurs visitent les sites de JHA uniquement dans l’intention de se divertir et n’envisagent que l’option de s’adonner à des paris avec de

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11 l’argent fictif, mais peuvent développer un faux sentiment d’efficacité et de contrôle sur l’issue du jeu (Griffiths, Parke, Wood, & Parke, 2006), ce qui pourrait influencer leurs comportements futurs. Il s’agit d’une pratique peu étudiée à ce jour. Toutefois, sur certains sites de JHA, les parties avec argent fictif peuvent donner l’impression aux joueurs que leurs chances de gagner sont plus importantes qu’elles ne le sont en réalité. Lors d’une analyse étendue des gains obtenus lors de paris en ligne en mode " démo " sur plusieurs sites, il est ressorti que le taux de retour, la fréquence et l’importance des lots perçus par les joueurs sont plus élevés que lors de parties avec de l’argent réel (Sévigny, Cloutier, Pelletier, & Ladouceur, 2005). Ceci risque d’inculquer au joueur de fausses attentes par rapport au jeu et aux réelles probabilités de gains. Également, comme les sensations positives et l’activation physiologique associée aux gains ainsi que les cognitions erronées quant au hasard et au jeu sont identifiées comme des éléments reliés à l’acquisition et à la persistance de jeu (Ladouceur et al., 2000; Lund, 2011), ces constats s’avèrent préoccupants. Il est possible que les joueurs tentent de reproduire les gains effectués avec de l'argent fictif dans le cadre de paris avec de l’argent réel et, en tenant compte des probabilités dictées par le hasard, cela risque de ne pas se réaliser. Ultimement, le joueur pourrait être confronté à des pertes d’argent non anticipées, et ce malgré son intention initiale de parier avec de l’argent fictif.

La légalité comme facilitateur.

En tenant compte de la grande accessibilité, des aspects attrayants et des processus psychologiques impliqués dans les JHA en ligne, qu’est-ce qui pourrait expliquer que le taux de participation à cette activité soit toujours relativement faible dans la population du Québec lors de l’étude de Kairouz, Nadeau et Robillard (2011) ?

L’absence de sites de JHA légaux avant l’inauguration d’EJ pourrait fournir une piste d’explication. La légalité du nouveau site gouvernemental constitue en effet un aspect qui pourrait le rendre particulièrement attrayant pour les joueurs et possiblement créer un engouement chez les Québécois. De manière générale, la question de la légalité n’a pas été élaborée de manière extensive dans la littérature scientifique pour ce qui est des joueurs sur

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Internet. Par contre, à l’aide d’une question évaluant les raisons influençant le choix d’un site de jeu, Gainsbury et ses collaborateurs (2012) ont observé que 10,6 % des joueurs de leur échantillon choisissaient un site de JHA en fonction de son statut légal. Plusieurs hypothèses peuvent être émises pour expliquer ce pourcentage particulièrement bas. D’abord, la récence des changements au niveau de la légalité des JHA en ligne implique qu’encore peu de sites légaux sont disponibles. Le fait qu’ils soient peu disponibles et possiblement moins connus pourrait expliquer le fait que cela ait peu d’influence sur le choix des joueurs. Aussi, un facteur important est que cette étude a été menée en Australie, où seulement les loteries et les paris sportifs étaient offerts légalement sur Internet. Par contre, lorsque questionnés sur leurs habitudes de jeu, 100 % des répondants affirmaient s’adonner à des jeux de casinos en ligne et 46,8 % parier à du poker en ligne (Gainsbury et al., 2012), pratiques considérées illégales dans ce pays. Cela pourrait donc contribuer au fait que la légalité du site n’influence pas beaucoup leur choix, étant donné que plusieurs des JHA recherchés sont nécessairement illégaux. Il est possible d’inférer que la légalité du site pourrait avoir plus de poids dans une situation où les JHA préférentiels des répondants sont offerts de manière illégale, mais aussi légale.

Malgré les données suggérant que la légalité importerait dans le choix d’un site de JHA pour une minorité des joueurs, certains auteurs proposent que l'offre de jeu légale aurait une portée considérable sur les comportements de jeu des individus exposés. En effet, Welte, Barnes, Tidwell et Hoffman (2009) ont établi des constats préoccupants à ce sujet dans une étude auprès d’adolescents et de jeunes adultes américains. Il en ressort que le nombre de types différents de JHA légaux disponibles dans l’État de résidence des répondants corrèle positivement avec les chances que ceux-ci jouent au moins une fois dans leur vie, jouent de manière fréquente ou souffrent de jeu pathologique (Welte et al., 2009). Après avoir contrôlé pour l’âge du répondant, le risque de souffrir de jeu pathologique augmente de 39 % chez les 18 - 21 ans avec chaque addition d’un type de JHA légal (Welte et al., 2009). Globalement, ces observations portent à croire que l’aspect légal pourrait avoir un impact important sur les habitudes de jeu de la population, plus spécifiquement sur l’intensité de l’implication dans le jeu.

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13 Aucune étude documentant les impacts sur la population de l’inauguration d’un site de jeu légal n’a pu être recensée. Ce phénomène a cependant fait l’objet d’une étude longitudinale par Jacques, Ladouceur et Ferland (2000) dans un contexte similaire, soit lors de l’inauguration d’un casino dans la région de Hull, au Québec. En 1996, quelques jours avant l'entrée en activités du casino en question, 810 adultes de la région de Hull ont été interrogés par téléphone. Une année plus tard, 457 de ces répondants ont été interrogés à nouveau. L'entrevue téléphonique réalisée investiguait les comportements de jeu et le jeu pathologique mais également, entre autres, l'opinion du répondants quant à l'implantation du casino. La même entrevue a été utilisée aux deux temps de mesure auprès d'un groupe de répondants de la région de Québec, qui ne compte pas de casino, pour servir de groupe contrôle. Les résultats démontrent qu’une année après l’ouverture du casino, le fréquence de participation aux JHA de casino, le montant maximum dépensé au jeu en une même journée et le nombre de JHA pratiqués étaient significativement plus élevés chez les habitants de Hull que lors du prétest (Jacques, Ladouceur, & Ferland, 2000). Les résidents de Hull ont démontré une fréquence de participation aux jeux de casino et un montant maximum dépensé au jeu en une journée significativement plus élevé que les répondants de la région de Québec (Jacques, Ladouceur, & Ferland, 2000). Bien que cette tendance ne se soit pas maintenue lors des suivis de deux et quatre ans, les taux de participation au JHA de casino et le maximum d’argent dépensé en un jour chez les habitants de Hull demeuraient supérieurs à ceux enregistrés lors du prétest, ce qui implique qu’ils jouent plus qu’avant l’inauguration du casino (Jacques & Ladouceur, 2006).

Une étude documentant les impacts de l’inauguration d'un casino dans la région de Niagara Falls en Ontario a également établi des constats similaires. Peu avant l'inauguration d'un casino à Niagara Falls en décembre 1996, des résidents de cette région (n= 1002) ont été interrogés sur différents thèmes, dont leurs comportements de jeu, leur opinion quant à l'inauguration du casino et leurs attentes quant aux impacts de ce dernier sur la communauté (Room, Turner, & Ialomiteanu, 1999). Une proportion d'entre eux (n = 662) ont été interrogés à nouveau environ une année plus tard. Deux sondages sur les habitudes et les attitudes envers le jeu ont été utilisés pour comparer les tendances observée à l'échelle

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de la province compativement à ce qui est observé à Niagara Falls, durant la même période. Les résultats obtenus démontrent, entre autres, que dans l'année suivant l'inauguration du casino, le taux et la fréquence de participation aux jeux de casino était significativement supérieurs chez les résidents de Niagara Falls que lors du prétest. Cette augmentation est significativement supérieure à celle qui a été observée à l'échelle de la province sur la même période de temps (Room, Turner, & Ialomiteanu, 1999).

Les études longitudinales portant sur l'inauguration de casinos offrent un éclairage intéressant sur les impacts de l'ajout d'une opportunité de jeu légale sur la population exposée. Il est donc possible d'établir des liens avec les effets qui pourraient être observés suite à l'inauguration d'EJ au Québec. Toutefois, le phénomène du jeu en ligne comprend de nombreuses complexités qui ne sont pas présente dans les casinos, notamment l'absence de frontières et de limitations en termes de temps et d'argent et tous les aspects facilitateurs. Ainsi, il est pertinent de croire également que le phénomène pourrait se dessiner d'une manière différente. Aucune étude scientifique ne peut toutefois être recensée à ce jour pour rendre compte de ce phénomène.

La sécurité, un facteur d’importance.

L’impact de la légalité sur les comportements de jeu pourrait être potentialisé par le fait que son statut légal favorise la perception que le site est plus sécuritaire qu’un site considéré illégal. À cet effet, dans une étude qualitative auprès d’utilisateurs de JHA en ligne, Thomas et ses collaborateurs (2011) ont observé que, pour les internautes, percevoir un site de JHA comme non menaçant et sécuritaire le rendrait plus accessible. Aussi, la perception du site comme une option sécuritaire digne de confiance et ayant une bonne réputation était souvent rapportée comme une raison pour choisir un site (Thomas et al., 2011), et ce particulièrement par les femmes, qui sont habituellement sous-représentées chez ceux qui parient de l’argent réel en ligne (Gainsbury et al., 2012). Également, il a été documenté que les raisons les plus fréquemment rapportées pour s’abstenir de jouer sur Internet incluent les préoccupations quant à la sécurité des sites de jeu ainsi que le manque de confiance envers les opérateurs (Woodruff & Gregory, 2005).

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15 En ce sens, en plus de son statut légal, le site EJ comporte plusieurs caractéristiques répondant aux inquiétudes des joueurs et permettant de pallier à certaines lacunes perçues en termes de sécurité sur des sites illégaux. La réputation et le pays dans lequel est localisé l’opérateur du site (Gainsbury et al., 2012) et l’existence de services offerts en personne (Kuan & Bock, 2007) ressortent comme des aspects importants pour les joueurs en ligne. En ce sens, Griffiths et Barnes (2008) ont noté, dans leur étude auprès de joueurs en ligne, que la majorité (90 %) d’entre eux favorise des sites associés à des compagnies qui opèrent également des établissements " traditionnels " (p. ex., casinos). À cet effet, EJ est associé à une organisation, Loto-Québec, qui gère plusieurs autres établissements de jeu bien connus. Elle propose également un service à la clientèle accessible selon plusieurs modalités, soit une ligne téléphonique sans frais, 24 heures sur 24 et tous les jours, une adresse courriel et une adresse postale localisée dans la même province que celle des joueurs. Ces derniers peuvent donc avoir confiance de recevoir du service en cas de problème ou de questionnements, comparativement à une compagnie offrant un service à la clientèle situé sur un autre pays et souvent dispensé dans une langue étrangère. Le site comprend aussi une foire aux questions couvrant différents thèmes et questionnements les plus souvent rapportés ainsi que des informations détaillées sur la procédure à suivre en cas de problème.

Des dépôts d’argent et des transactions sécuritaires représentent également un aspect important pour les joueurs (Gainsbury et al., 2012). En ce sens, des écrits sur les antécédents de la confiance des consommateurs envers les transactions financières et services offerts sur Internet démontrent que le sentiment de sécurité, particulièrement lors des transactions financières (Yoon, 2002), et la qualité de la protection des informations privées sont des éléments essentiels (Aiken & Bousch, 2006). À cet effet, le site légal comprend aussi une section complète sur ses mesures de sécurité et son intégrité. On y rappelle la bonne réputation de Loto-Québec, sa présence au Québec depuis plus de 40 ans, la confidentialité des données remises, de même que les mesures de prévention et de vérification mises en place pour assurer la qualité du service. On y met aussi l’accent sur la légalité du site, ce qui est aussi observé dans les publicités radiophoniques aux profits d’EJ.

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Les expériences positives passées avec l’organisation offrant les services ont aussi un impact sur la confiance des gens envers un site. Les gens qui ont eu affaire avec cette organisation auparavant et qui se sont avérés satisfaits du service reçu sont en effet plus portés à réutiliser les services de cette compagnie, sur Internet ou en personne. La satisfaction envers des transactions précédentes, en plus d’avoir un effet sur la confiance du consommateur, augmenterait la familiarité et l’usage des services offerts par la même compagnie (Yoon, 2002). Étant donné l’importance des expériences passées avec la compagnie dans l’utilisation d’un site de JHA, le site de Loto-Québec semble avantagé sur cet aspect. Faisant figure de monopole pour les JHA au Québec, la majorité de la population a déjà fait affaire avec Loto-Québec d’une manière ou d’une autre. Selon cette théorie les gens seraient donc plus enclins à réutiliser leurs services, même s’ils s’offrent sur Internet.

L’attitude personnelle et sociétale comme prédicteurs.

Certains autres facteurs personnels à l’individu, bien qu’encore peu étudiés dans le domaine des JHA, peuvent être associés à la participation au jeu en ligne et plus particulièrement sur EJ. Parmi ceux-ci, il est possible d’identifier l’opinion adoptée par l’individu et son entourage quant à l’activité et l’exposition à de la publicité incitative. Selon la théorie du comportement planifié, l’adoption d’un comportement, dont le pari d’argent sur Internet, serait d’abord basée sur l’intention de l’adopter, qui elle-même serait dictée par les attitudes et normes subjectives liées à ce type de comportement (Ajzen, 1991). L’attitude représente un facteur personnel et réfère à la perception du comportement en question. Les normes subjectives réfèrent à la perception de l’individu selon laquelle son entourage perçoit positivement ou négativement le comportement en question ainsi que la pression ressentie pour effectuer le comportement. À cet effet, des chercheurs s’intéressant à la prédiction des comportements de jeu (Moore & Ohtsuka, 1999; Thrasher, Andrew, & Mahony, 2011) observent que plus l’attitude du répondant et sa perception de l’attitude adoptée par ses proches face aux JHA étaient positives, plus les intentions et les comportements de jeu s’avéraient présents (Moore & Ohtsuka, 1999; Thrasher, Andrew, & Mahony, 2011).

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17 Pour ce qui est de l’exposition à la publicité comme prédicteur des comportements de jeu, une étude canadienne rapporte que 90 % des répondants affirmaient avoir vu ou entendu de la publicité pour le jeu et que parmi ceux-ci, 39 % révélaient que cela était lié à leur achat de loterie (Felsher, Derevensky, & Gupta, 2004). Aussi, à l’aide des données de 1500 participants, Amey (2001) a observé une relation significative entre l’exposition à la publicité pour le jeu et les comportements de jeu. Plus spécifiquement, les individus qui s’adonnent aux JHA plus fréquemment que la moyenne rapportent avoir été exposés à significativement plus de publicités incitatives que les autres. Les non joueurs rapportent avoir été exposés à significativement moins de publicités (Amey, 2001). En général, les résultats présentés suggèrent que l’intention de s’adonner aux JHA, l’opinion quant à cette activité ainsi que l’exposition à la publicité pour les JHA semblent de bons prédicteurs de la participation à cette activité. Par contre, aucune étude recensée ne s’est attardée à leur valeur prédictive dans la participation aux JHA en ligne et plus spécifiquement pour un site légal.

Nature et contexte du mémoire.

En février 2010, le gouvernement québécois autorise officiellement Loto-Québec, une société d’État québécoise, à offrir des jeux de hasard et d'argent (JHA) en ligne. Le 1er

décembre de la même année marque l’entrée en opération d’EJ, un site de JHA dirigé par cette société. En vertu de la loi canadienne, qui régit les JHA, EJ constitue le premier site de JHA légal à être offert au Québec.

En novembre 2010, peu de temps avant la mise en ligne officielle du site en question, le Centre québécois d’excellence pour la prévention et le traitement du jeu (CQEPTJ) a mandaté la firme de recherche et sondages SOM pour réaliser un sondage en ligne auprès d’un bassin d’internautes québécois. Le but était de documenter les caractéristiques sociodémographiques et les habitudes de jeu des répondants et d’explorer le phénomène de la légalisation des JHA en ligne sur EJ. La collecte de données, sous forme de sondage Internet, a eu lieu en deux temps de mesure, soit quelques jours avant (novembre 2010) et 12 mois à la suite de l’inauguration d’EJ. Le sondage en question visait

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à documenter : (a) à quelle fréquence des internautes québécois de 18 ans et plus s’adonnaient aux JHA hors ligne et sur Internet plus spécifiquement, (b) s’ils avaient l’intention de visiter le site EJ, (c) s’ils avaient pris connaissance de la publicité pour ce site ou pour d’autres sites de JHA, et finalement, (d) leur opinion quant à la décision du gouvernement de légaliser l’offre de JHA en ligne.

Ce mémoire présente les informations découlant de ce sondage et vise à décrire l’évolution dans les habitudes de jeu des répondants après l’inauguration du site EJ et ce, en portant une attention particulière aux comportements de jeu en ligne.

Objectifs et Questions de recherche.

À la lumière des informations mises en relief dans la revue de littérature, il est possible de croire que le site EJ possède plusieurs facteurs ayant le potentiel d'influencer les comportements des gens qui y sont exposé. Il est donc possible d’anticiper des changements dans les comportements de jeu des Québécois à la suite de l’inauguration du site de JHA légal EJ. Toutefois, aucune étude ne s'est à ce jour penchée sur ce phénomène précis, il s'avère pertinent de porter un regard global sur les impact de cette nouvelle offre de jeu virtuelle sur la population générale du Québec.

Ainsi, à partir des données recueillies aux deux temps de mesure du sondage, le mémoire doctoral a pour objectif général de décrire les trajectoires de jeu des internautes interrogés entre l’inauguration d’EJ et janvier 2012 et d’explorer les facteurs (caractéristiques sociodémographiques et liées aux habitudes de jeu) associés à la fréquentation du site légal.

Les questions de recherche suivantes sont soulevées :

1) Une année après l’inauguration d’Espacejeux.com, les comportements de jeu des internautes interrogés ont-ils changé ?

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19 2) Qui sont les internautes qui parient de l’argent réel sur Espacejeux.com au temps 2?

a) Sont-ils différents des internautes qui jouent de l’argent réel exclusivement sur des sites illégaux?

3) Quelle(s) variable(s) répertoriée(s) dans le sondage sont reliées au pari d’argent réel sur Espacejeux.com au T2?

a) Quelle est la meilleure combinaison de variables pour prédire le pari d’argent réel sur Espacejeux.com?

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Méthode

Participants.

Les participants (N = 729) proviennent d’une sollicitation par courriel expédiée par la firme de recherche et sondages SOM à 1987 personnes sélectionnées de manière aléatoire à partir de l’une de leur base de données (Panel Or). Le Panel Or constitue une base de données composée d’individus ayant auparavant pris part à un sondage omnibus et ayant accepté d’être recontactés pour d’autres sondages en ligne. Un sondage omnibus comporte des questions sur plusieurs thèmes et est effectué chaque semaine auprès d’un échantillon d’environ 1000 répondants, représentatif de la population adulte du Québec. Parmi les 1987 invitations envoyées en novembre 2010, 1009 individus ont accepté d’être sondés avant l’ouverture du site EJ. Le sondage, disponible en français et en anglais, comprenant six questions au temps 1 (T1) et huit au temps 2 (T2), a été intégré dans le cadre d’un sondage omnibus. L’échantillon probabiliste de 1009 répondants est stratifié non proportionnel pour trois régions métropolitaines de recensement (RMR), soit Montréal, Québec et ailleurs en province. Il est aussi pondéré en fonction de cinq variables sociodémographiques (l’âge, le genre, la langue maternelle, la scolarité et le nombre d’individus vivant seuls ou non) de manière à assurer un poids démographique s’apparentant aux données du recensement populationnel de 2006. Un an suite à l’ouverture d’EJ, 979 des 1009 répondants ont été sollicités à nouveau. Parmi ceux qui n’ont pu être recontactés, 15 avaient une adresse courriel invalide et 15 autres une adresse courriel maintenant inexistante. Finalement, 734 personnes ont répondu au sondage à nouveau en janvier 2012. Cinq d’entre elles ont dû être éliminées de l’échantillon final étant donné qu’elles ont fourni des informations contradictoires à certaines questions du sondage ou ont préféré s’abstenir de répondre aux questions portant sur les habitudes de jeu. Les 729 répondants retenus pour l’étude sont donc des internautes de 18 ans ou plus, provenant des différentes régions du Québec. Ils avaient en moyenne 45,17 ans (ÉT = 14,451) en 2012 et 50,9 % (371 sur 729) sont de genre féminin. Les caractéristiques sociodémographiques de l’échantillon aux deux temps de mesure sont présentées dans le Tableau 1.

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21 INSÉRER LE TABLEAU 1 ICI

Le taux d’attrition au T2 se chiffre à 27,4 %. Pour les analyses transversales liées au taux d’attrition, un test-t (comparaison de moyennes) et des tests du Khi carré (comparaison de proportions) ont été effectués. Afin d’éliminer l’hypothèse d’un biais d’attrition, les répondants qui complètent les deux temps de mesure (n = 729) sont comparés à ceux qui n’ont complété que le T1 (n = 275), et ce, sur leurs caractéristiques sociodémographiques (âge, genre, niveau de scolarité, revenu personnel, langue maternelle, région de résidence) et les données du Questionnaire sur les habitudes et intentions de jeu, tel qu’évalué au T1. Avec un seuil de rejet fixé à 0,05, les résultats montrent une dépendance statistique entre la complétion ou non du deuxième sondage et deux variables : le revenu personnel, ² (2, N =1004) = 10.184, p < .01, et le niveau de scolarité, ² (2, N =1004) = 29.924, p < .001. Les résidus standardisés (2,1) révèlent que la proportion des individus à avoir un revenu personnel de moins de 25 000 $ par année au T1 (36,6 %) diffère de celle des participants qui ont complété le sondage au T2 (26,5 %). Les résidus standardisés (3,6) révèlent aussi que la proportion des individus à avoir complété une scolarité de niveau secondaire ou inférieure au T1 (54,5 %) diffère de celle des participants qui ont complété le sondage au T2 (35,5 %). Ainsi, les individus qui n’ont complété que le T1 sont plus nombreux à déclarer un revenu personnel de moins de 25 000 $ par année et un niveau de scolarité secondaire ou inférieur. Aucune autre différence statistiquement significative ne ressort.

Instruments.

Questionnaire sociodémographique.

Ce questionnaire de huit questions a été développé par SOM. Il comporte une question à réponse dichotomique (genre du répondant), une question à réponse unique (âge) et six questions à choix de réponse multiples pour la langue maternelle, le revenu personnel et familial, la scolarité, la région de résidence et le fait de résider seul ou non.

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Ce questionnaire (voir Annexe A), développé par l’équipe du CQEPTJ, a été utilisé aux deux temps de mesure du sondage. Il comporte six questions à choix de réponse qui abordent les comportements de jeu du répondant, en général et sur Internet, durant la dernière année, les intentions de jeu sur le site EJ, le visionnement de publicités visant à promouvoir ce site ou d’autres sites offrant des JHA et finalement la position du participant face à la décision du gouvernement de permettre à Loto-Québec d’offrir du jeu en ligne. La troisième question, portant sur les intentions du participant quant à EJ a été reformulée pour le T2. Elle s’énonçait comme suit au T1 : Avez-vous l’intention d’aller jouer ou " d’essayer

" le nouveau site internet de Loto-Québec qui offrira des jeux en ligne tels que le poker, la roulette, le black jack ? Au T2, elle se lisait ainsi : Avez-vous l’intention de visiter ou de revisiter le site Internet espacejeux.com de Loto-Québec qui offre des jeux en ligne ?

Questions supplémentaires sur le jeu en ligne et l’utilisation d’Espacejeux.com.

Des questions ont été utilisées uniquement lors du T2. La première s’énonçait comme suit : Au cours des 12 derniers mois, avez-vous visité un site de jeu en ligne autre

que le site Espacejeux.com de Loto-Québec et ce, même si vous n’y avez pas joué ? Les

réponses possibles étaient oui ou non. La deuxième question s’énonçait comme suit :

Depuis l’ouverture du site de jeu en ligne Espacejeux.com de Loto-Québec, site qui offre des jeux en ligne tels que le poker, la roulette et le blackjack, y avez-vous joué de l’argent réel ? Les réponses possibles étaient : Oui, plus de deux fois par semaine; Oui, une à deux fois par semaine; Oui, une à trois fois par mois; Oui, moins d’une fois par mois; Non, mais j’ai joué de l’argent virtuel sans avoir à ouvrir un compte; Non, ni de l’argent réel, ni de l’argent virtuel, mais je l’ai visité; Non, je ne l’ai pas visité.

Procédure.

Les données des deux sondages ont été mises à la disposition de l’auteure de ce mémoire doctoral. Pour la réalisation de l’étude, la banque a été restructurée et plusieurs variables ont été créées ou recodées. Pour opérationnaliser les comportements de jeu des internautes et ainsi pouvoir répondre aux questions de recherche, les répondants ont été divisés en quatre catégories de joueurs : (1) les non-joueurs, (2) les joueurs hors ligne, (3)

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23 les joueurs en ligne avec argent fictif et (4) les joueurs en ligne avec argent réel. Les non-joueurs comprennent les individus ne s’étant adonnés à aucun JHA dans la dernière année. Les joueurs hors ligne réfèrent à ceux qui, dans les douze derniers mois, se sont adonnés au moins une fois aux JHA hors ligne avec de l’argent réel. Les joueurs en ligne avec argent fictif comprennent ceux qui se sont adonnés à des paris avec de l’argent fictif sur des sites de JHA au moins une fois dans la dernière année, mais qui n’y ont pas parié d’argent réel. Finalement, la catégorie des joueurs en ligne avec argent réel comprend les individus s’étant adonnés au moins une fois aux JHA en ligne avec de l’argent réel dans la dernière année. Les participants inclus dans ces deux dernières catégories peuvent également s’adonner à des JHA hors ligne, mais la relation inverse ne s’applique pas, autrement dit, les joueurs de la catégorie joueurs hors ligne ne parient pas sur Internet. Ainsi, les joueurs en ligne qui jouent aussi à des JHA hors ligne ne sont pas inclus dans la catégorie des joueurs hors ligne. Les répondants se répartissent dans ces catégories au T1 et au T2 en fonction de leurs comportements de jeu auto-rapportés. La répartition des répondants dans ces catégories de joueurs, au T1 et au T2, est illustrée dans le Tableau 2.

Pour opérationnaliser les changements dans les comportements de jeu des répondants durant l’étude et permettre de répondre aux questions de recherche, des trajectoires de jeu sont utilisées. Celles-ci impliquent qu’au T1, chaque répondant fait partie de l’une des quatre catégories de joueurs et au T2, il fait aussi partie d’une catégorie, qui peut demeurer la même ou être différente de la précédente. Les Annexes C et D présentent la procédure détaillée de collecte de données de la firme SOM pour les deux temps de mesure du sondage.

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Résultats

Trajectoires de jeu des internautes entre novembre 2010 et janvier 2012.

En novembre 2010, avant l’inauguration d’EJ, 21 % des internautes interrogés étaient des non joueurs, 66 % étaient des joueurs hors ligne, 9,4 % étaient des joueurs en ligne avec argent fictif et 3,6 % étaient des joueurs en ligne avec argent réel. En janvier 2012, approximativement une année après l’inauguration d’EJ, 19,3 % des répondants étaient des non joueurs, 67,3 % étaient des joueurs hors ligne, 9,4 % étaient des joueurs en ligne avec argent fictif et 4 % étaient des joueurs en ligne avec argent réel.

Dans le but de vérifier si les internautes interrogés ont changé de catégorie de joueurs dans l’année suivant l’inauguration d’EJ, un test de symétrie de Bowker (Kuhnt & Krampe, 2005) a été effectué. Les résultats montrent que les changements dans les catégories de joueurs entre les deux temps de mesure ne sont pas statistiquement significatifs, ² (6, N =729) = 6.284, p = .392. Tel que permettent de le constater les pourcentages de l’axe diagonal du Tableau 3, calculés pour chacune des lignes du tableau à partir de la catégorie de joueurs au T1, la plus grande proportion de répondants se retrouve dans la même catégorie de joueurs au T2: 67,6 % des non-joueurs, 87,1 % des joueurs hors ligne, 55,3 % des joueurs en ligne avec argent fictif et 55,5 % des joueurs en ligne avec argent réel.

INSÉRER LE TABLEAU 3 ICI

Malgré l’absence de différence au plan statistique, des trajectoires de jeu sont observées (voir Figure 1). Parmi les non joueurs au T1 (n = 153), un peu plus de 2 % ont évolué vers la catégorie des joueurs en ligne avec argent fictif et aucun vers la catégorie des joueurs en ligne avec de l’argent réel. Chez les joueurs hors ligne au T1 (n = 482), les trajectoires de jeu démontrent un mouvement vers la catégorie des joueurs en ligne avec argent fictif et la catégorie des joueurs en ligne avec argent réel pour, respectivement, 4,4 % et 1,9 % des répondants. Dans la catégorie des joueurs en ligne avec argent virtuel au T1 (n

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25 = 68), 8,8 % ont évolué vers la catégorie des joueurs en ligne avec argent réel au T2. De plus, 36,7 % ne se sont plus adonnés au jeu en ligne avec argent virtuel entre les deux temps de mesure, ils appartiennent à la catégorie des joueurs hors ligne (32,4 %) ou des non-joueurs (4,4 %) au T2. Finalement, pour ce qui est de la catégorie des joueurs en ligne avec argent réel au T1 (n = 26), 23,1 % ont parié seulement de l’argent fictif entre les deux temps de mesure alors que 15,4 % sont maintenant des joueurs hors ligne et 7,7 % sont des non-joueurs au T2.

INSÉRER LA FIGURE 1 ICI

Fréquentation et portrait des utilisateurs d’Espacejeux.com.

Les trajectoires de jeu impliquant la fréquentation d’EJ au T2 par les internautes sont illustrées dans le Tableau 4. En janvier 2012, 1,9 % des répondants déclarent avoir joué de l’argent réel sur EJ et 2,1 % déclarent y avoir joué de l’argent fictif. Parmi les non joueurs au T1, 1,3 % ont fait la transition vers le pari d’argent fictif sur EJ. Parmi les joueurs hors ligne au T1, moins de 1 % ont parié de l’argent réel sur EJ et la même proportion y a parié de l’argent fictif. Dans la catégorie des joueurs en ligne avec argent fictif au T1, 8,8 % ont essayé la même activité sur EJ et un seul internaute a fait la transition vers EJ pour parier de l’argent réel. Finalement, parmi les joueurs en ligne avec argent réel au T1, 34,6 % ont parié de l’argent réel sur le site légal et 11,5 % y ont parié de l’argent virtuel.

INSÉRER LE TABLEAU 4 ICI

Quatorze répondants ont parié de l’argent réel sur EJ depuis son inauguration. Lors du T1, 64,3 % d’entre eux étaient déjà des joueurs en ligne avec argent réel, 28,6 % étaient des joueurs hors ligne et 7,1 % étaient des joueurs en ligne avec argent virtuel. Pour ce qui est des caractéristiques sociodémographiques, 85,7 % sont de sexe masculin et leur moyenne d’âge est de 39 ans (ÉT : 13,9 ans). La moitié d’entre eux ont une scolarité

Figure

Tableau 1 (suite
Figure 1. Trajectoires de jeu des internautes entre novembre 2010 et janvier 2012.

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