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Contribution des infirmières praticiennes spécialisées en soins de première ligne dans le suivi des patients atteints de maladies chroniques : étude de cas

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Academic year: 2021

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© Carol-Ann Ferlatte, 2019

Contribution des infirmières praticiennes spécialisées

en soins de première ligne dans le suivi des patients

atteints de maladies chroniques : Étude de cas

Mémoire

Carol-Ann Ferlatte

Maîtrise en sciences infirmières - avec mémoire

Maître ès sciences (M. Sc.)

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Contribution des infirmières praticiennes spécialisées

en soins de première ligne dans le suivi des patients

atteints de maladies chroniques :

Étude de cas

Mémoire

Carol-Ann Ferlatte

Sous la direction de :

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iii

Résumé

Face au fardeau grandissant des maladies chroniques et à la difficulté d’accès aux soins en première ligne, l’enrichissement des champs de pratique professionnelle, notamment celui de l’infirmière, fait partie des recommandations récurrentes pour assurer l’efficience du système de santé québécois. L’intégration des infirmières praticiennes spécialisées en première ligne (IPSPL) a donc débuté en 2007 au Québec pour répondre à l’évolution des besoins de santé en première ligne. À ce jour, peu d’études québécoises portent sur l’exploration de modèles de pratique basée sur l’offre de soins des IPSPL et de l’expertise infirmière. À l’aide du Nursing Role Effectiveness Model d’Irvine, Sidani, et Hall (1998a, 1998b), une étude de cas a permis d’identifier les éléments du processus de pratique des IPSPL et les résultats qui en découlent chez les patients atteints de maladie chronique. Des entrevues individuelles semi-dirigées ont permis de relever les perceptions de 14 informateurs clés (10 patients et 4 IPSPL) en lien avec le rôle et la pratique des IPSPL. Des observations (n=3) et des revues de dossiers (n=9) ont également été réalisées afin de trianguler l’information. Les résultats identifient le rôle de l’IPSPL comme étant axé sur une approche biopsychosociale et une prestation de soins de qualité qui favorisent des résultats positifs en termes santé et de bien-être chez les patients atteints de maladie chronique, représentant une valeur ajoutée pour ces derniers. Les résultats mettent également en lumière les facteurs structurels et organisationnels constituant des défis persistants pour les IPSPL, pouvant avoir un impact sur l’étendue de leur pratique et la continuité de leurs soins dans le suivi des patients atteints de maladies chroniques. Face à ces constats, plusieurs recommandations émergent pour optimiser l’utilisation des IPSPL au sein du système de santé québécois et améliorer la santé et le bien-être des patients en première ligne.

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iv

Abstract

The growing prevalence of chronic diseases and limited access to a primary health care professional represent a concern in Canada and Quebec. To address these problems, health care restructuring has led to expanded roles in nursing, and substantial increases in the different types and number of advanced practice nursing roles. As of 2007, the nurse practitioner (NP) role has emerged in Quebec in response to growing healthcare demands, especially in primary care. However, a limited amount of research in Quebec is focused on the innovation of practice models where nurses, including the registered nurse role and the nurse primary health care nurse practitioner (PHCNP) role, are the first contact for patients. In this paper, a case study will be presented based on the Nursing Role Effectiveness Model (Irvine, Sidani, & Hall, 1998a, 1998b) to explore the process of PHCNP role within a multidisciplinary care model and to identify NP-specific health outcomes for patients with chronic diseases. Semi-structured interviews were conducted on 14 key informants (10 patients and 4 PHCNP) to explore their perceptions of the NP practice in chronic disease management and follow-up. Observations and medical record review allowed information triangulation. Results showed that PHCNP emphasize health promotion and provide comprehensive, accessible, coordinated and quality family healthcare service for patients with chronic diseases. The discussion presents strategies to address barriers related to scope of practice as well as organizational issues affecting continuity of NP care. A better understanding of the added value of the PHCNP role will certainly contribute to optimize efficiency and better health and wellness outcomes for patients in primary care.

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v

Table des matières

Résumé ... iii

Abstract ... iv

Table des matières ... v

Liste des tableaux et figures ... viii

Liste des abréviations et acronymes ... ix

Remerciements ... x

Introduction ... 1

Chapitre 1 : Problématique de recherche ... 2

1.1 Réorganisation du système de santé québécois valorisant la première ligne et la pratique infirmière avancée ... 2

1.2 Brève description de la pratique infirmière avancée et de la première ligne ... 4

1.3 Contexte actuel au Québec : besoins de santé grandissants en première ligne ... 4

1.4 Émergence du rôle IPSPL en réponse à ces besoins ... 6

1.5 Évaluation du rôle IPSPL ... 10

1.6 But et objectifs de recherche ... 12

Chapitre 2 : Recension des écrits ... 13

2.1 Qualité et valeur des soins infirmiers ... 13

2.2 La pratique infirmière avancée ... 14

2.2.1 Facteurs affectant la pratique des IPS ... 15

2.2.2 Caractéristiques de la pratique des IPSPL ... 20

2.3 Résultats de soins des IPSPL ... 27

2.3.1 Dans le contexte des maladies chroniques ... 29

Chapitre 3 : Cadre de référence ... 32

3.1 Le Modèle de McGill ... 32

3.1.1 Postulats ... 33

3.1.2 Concepts centraux du métaparadigme ... 34

3.1.3 L’apprentissage et le potentiel de santé ... 36

3.2 Le Nursing Role Effectiveness Model (NREM) ... 37

3.2.1 Interdépendance des dimensions ... 39

3.2.2 Le Nursing Role Effectiveness Model pour l’évaluation de la pratique infirmière avancée en première ligne ... 40

3.2.3 Intégration du modèle de Shuler ... 41

3.3 Résumé du cadre de référence de l’étude... 42

Chapitre 4 : Méthodologie ... 44

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vi

4.1.2 Cas sélectionné ... 45

4.2 Participants à l’étude ... 45

4.2.1 Méthode d’échantillonnage et recrutement ... 45

4.3 Collecte de données ... 46

4.4 Analyse des données ... 47

4.5 Rigueur méthodologique ... 49

4.6 Considérations éthiques ... 51

Chapitre 5 : Résultats ... 53

5.1 Profil des participants ... 53

5.2 Structure organisationnelle et offre de services en première ligne ... 54

5.2.1 Organisation des services ... 54

5.2.2 Facteurs contraignants au suivi... 59

5.2.3 Compréhension du rôle IPSPL ... 61

5.2.4 Utilisation du rôle IPSPL à son plein potentiel ... 63

5.3 Perceptions face au rôle et à la prestation de soins des IPSPL ... 64

5.3.1 Pratique clinique basée sur une approche holistique ... 64

5.3.2 Un rôle axé sur la promotion de la santé ... 69

5.3.3 L’arrimage de la collaboration inter et intraprofessionnelle ... 71

5.3.4 Une pratique appuyée sur les données probantes ... 76

5.4 Perceptions face à l’efficacité du rôle des IPSPL en termes de résultats ... 77

5.4.1 Satisfaction du patient ... 78

5.4.2 Une meilleure accessibilité aux soins de santé ... 79

5.4.3 Des patients plus autonomes dans la gestion de leur maladie chronique ... 82

5.4.4 Des résultats cliniques associés à un suivi plus assidu ... 84

5.4.5 Une pratique considérée comme une valeur ajoutée ... 88

Chapitre 6 : Discussion ... 92

6.1 Un modèle de pratique qui renforce l’organisation de la première ligne pour le suivi des maladies chroniques ... 92

6.1.1 Les défis de l’intégration du rôle IPSPL dans une équipe de soins primaires ... 95

6.2 Rôle des IPSPL dans le suivi des patients atteints de maladies chroniques ... 99

6.2.1 Des compétences professionnelles et interpersonnelles qui répondent aux besoins des patients . 99 6.2.2 Les enjeux entourant la pratique basée sur les données probantes ... 104

6.2.3 Des défis inhérents à une pratique collaborative ... 106

6.3 Impact du rôle IPSPL sur les résultats-patient ... 109

6.3.1 Accès aux services de santé facilité par la présence des IPSPL dans l’équipe de soins ... 109

6.3.2 Une prestation de soins sécuritaires et de qualité ... 112

(7)

vii

6.4 Forces et limites de l’étude ... 118

6.5 Recommandations pour la pratique et la recherche ... 119

Conclusion ... 121

Références ... 122

Annexe 1: Guide d’entrevue IPSPL ... 139

Annexe 2: Guide d’entrevue patient ... 143

Annexe 3: Grille d’observation ... 146

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viii

Liste des tableaux et figures

Tableau 1.1 Évolution du nombre d’infirmier(ère)s praticien(ne)s spécialisé(e)s inscrits au Tableau de l’OIIQ

Tableau 5.1 Tableau synthèse des résultats Figure 3.1 Le Nursing Role Effectiveness Model

Figure 3.2 Indicateurs-patients identifiés dans le modèle de pratique IPS de Shuler Figure 3.3 Résumé du cadre de référence de l’étude

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Liste des abréviations et acronymes

AIIC Association des infirmières et infirmiers du Canada

AIPSQ Association des infirmières praticiennes spécialisées du Québec CIUSSS Centre intégré universitaire de santé et de services sociaux CMQ Collège des médecins du Québec

CSBE Commissaire à la santé et au bien-être

FCRSS Fondation canadienne de recherche sur les services de santé GMF Groupe de médecine familiale

INESSS Institut national d’excellence en santé et services sociaux IPS Infirmière praticienne spécialisée

IPSPL Infirmière praticienne spécialisée en soins de première ligne MSSS Ministère de la Santé et des Services sociaux

OIIQ Ordre des infirmières et infirmiers du Québec OMS Organisation mondiale de la santé

PIA Pratique infirmière avancée

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x

Remerciements

De prime abord, je tiens à remercier Mme Louise Bujold et Mme Clémence Dallaire pour m’avoir permis d’embarquer dans ce projet ancré dans la reconnaissance et la mise en valeur de la profession infirmière. Je tiens particulièrement à remercier Mme Bujold pour m’avoir appuyée tout au long des différentes étapes de mon parcours au deuxième cycle. Votre disponibilité, votre rigueur intellectuelle et votre intérêt marqué pour la pratique infirmière avancée ont été des facteurs importants dans la réalisation de ce projet de recherche. Nos nombreuses rencontres, riches en échanges et en réflexion critique, m’ont permis de cheminer dans ce processus et m’aideront certainement dans la poursuite de ma carrière de clinicienne et de chercheure.

Ensuite, un remerciement de taille s’impose à tous les membres de l’équipe de la clinique impliquée dans cette étude de cas, particulièrement aux patients qui m’ont accordé leur temps personnel pour participer aux entretiens, ainsi qu’à l’équipe administrative et aux IPSPL qui m’ont ouvert la porte de leur travail quotidien afin de me permettre d'y réaliser mes travaux.

Finalement, rien de tout cela n’aurait été possible sans le soutien moral de mes amis et mes proches, particulièrement mes parents, qui m’ont appuyée dans tous les hauts et les bas de ce long trajet qu’a été la rédaction de ce mémoire. Votre support et vos encouragements continuels ont été des facteurs indispensables dans la réussite de ce projet d’envergure.

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1

Introduction

L’encombrement des services d’urgence au Québec démontre la difficulté de la première ligne à répondre aux besoins de la population. Alors que le Commissaire à la santé et au bien-être (2016a) démontre que la majorité de ces consultations à l’urgence serait facilement traitable par un professionnel de première ligne, le rapport Clair (2000) recommande une meilleure organisation des soins primaires pour éviter que l’urgence demeure la porte d’entrée principale du système de santé. Dans le contexte de ces besoins en première ligne et du fardeau grandissant des maladies chroniques, une offre de soins primaires permettant un suivi adéquat est nécessaire pour éviter les exacerbations et les hospitalisations. Toutefois, la difficulté d’accès à un médecin de famille est relevée par les patients comme un défi majeur du système de santé québécois (Lecours, Tremblay, & Pomey, 2013). À cet égard, des modèles de pratique interdisciplinaire en première ligne dont l’offre de soins se concentre sur des professionnels non-médicaux, notamment des rôles en pratique infirmière avancée (PIA), peuvent être vus comme une innovation qui permettrait l'amélioration de l'accessibilité aux services et des résultats-patients, notamment pour la clientèle aux prises avec une ou des condition(s) chronique(s). Cette recherche sous la forme d'une étude de cas vise à explorer comment les IPSPL, œuvrant dans un tel modèle de pratique, contribuent au suivi des patients atteints de maladies chroniques et répondent à leurs besoins en termes de santé et de bien-être.De fait, peu d’études portent sur l’évaluation de l’impact des interventions et du suivi des IPSPL sur les indicateurs de résultats chez les patients atteints de maladies chroniques, d’où la pertinence de cette étude. Cette recherche vient combler un manque dans la littérature concernant la valeur ajoutée de la PIA et de son impact direct sur les résultats spécifiques engendrés chez les patients.

Ainsi, dans les chapitres qui suivent, le contexte favorisant l'émergence de ce rôle dans le contexte québécois sera d'abord présenté ainsi que la problématique générale associée à l’intégration et à l’évaluation de cette pratique auprès des équipes de première ligne et de la clientèle. Deuxièmement, la littérature reliée au phénomène d’intérêt sera recensée, notamment les articles traitant des facteurs affectant l’optimisation des rôles infirmiers en pratique avancée, les processus des soins des IPS et leur contribution en première ligne pour les systèmes de santé et les patients-familles. Troisièmement, le cadre théorique de McGill (Allen, 1977) et d'Irvine et al. (1998a, 1998b), combinée au modèle pratique IPS de Shuler et Davis (1993a), seront présentés, afin de décrire les composantes à l'étude. Par la suite, la méthodologie utilisée sera décrite, selon les critères d’une étude de cas définis par Yin (2014). Les résultats seront également présentés et une discussion sera faite en lien avec la littérature. Cette discussion sera structurée autour du cadre de référence combinant les différents modèles conceptuels utilisés. Finalement, une brève conclusion résumera les faits saillants de l'étude et proposera des pistes pour la pratique et la recherche.

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2

Chapitre 1 : Problématique de recherche

Ce chapitre pose le contexte de la problématique en explorant certains défis passés et actuels du système de santé québécois. À travers ces difficultés, les recommandations découlant de différents rapports gouvernementaux sont analysées afin de comprendre comment améliorer l’organisation des soins de santé. L’une des recommandations récurrentes, soit celle de renforcer la première ligne et d’enrichir les champs de pratique professionnels à leur pleine étendue, a largement contribué à l’émergence de la pratique infirmière avancée (PIA). Plus précisément, le rôle d’infirmière praticienne spécialisée en soins de première ligne (IPSPL1) s’est vu porter un intérêt marquant pour répondre aux besoins de santé mineurs et chroniques, améliorant de ce fait l’accessibilité des soins et la santé des patients. Étant établi depuis plusieurs décennies dans différents pays, ce rôle a su faire ses preuves, tant au niveau de l’accessibilité aux soins que la satisfaction des patients. Ainsi, l’innovation de cette pratique au Québec, bien que tardive, semble être une solution à long terme pour répondre aux besoins du système de santé québécois, particulièrement en ce qui a trait à la gestion des maladies chroniques. Subséquemment, les impacts de la pratique IPSPL sont considérés, et l’évaluation de leur rôle en termes de valeur ajoutée et de résultats-patients est mise en lumière dans le contexte québécois.

1.1 Réorganisation du système de santé québécois valorisant la

première ligne et la pratique infirmière avancée

Le système de santé québécois a connu plusieurs réorganisations au cours des dernières décennies afin de répondre aux besoins de la population. Des lacunes importantes ont particulièrement été identifiées au niveau de la première ligne, en ce qui concerne la façon de planifier, organiser, financer et offrir les services de soins de santé. D’importants changements ont donc débuté lors de la Commission d'enquête sur les services de santé et les services sociaux en 1988, alors que cette dernière recommandait la décentralisation des politiques de santé et une régionalisation plus marquée, ainsi qu’une approche populationnelle (Rochon, 1988). Les recommandations de cette commission ont d’ailleurs servi d’assise à la réforme des années 1990. En effet, le virage ambulatoire (1995) qui en résulte avait pour but de diminuer le recours à l’hospitalisation, et a ainsi contribué à la fermeture et la fusion d’établissements. Ainsi, l’idée fondatrice de cette réforme consistait à valoriser l’utilisation des services de première ligne afin d’en faire la porte d’entrée principale du système de santé québécois. C’est donc ainsi que sont mis de l’avant les

1 Le terme IPSPL est propre au Québec. Dans les contextes anglophones (ex. ontariens et américains), le titre

correspond à primary care nurse practitioner ou primary health care nurse practitioner (PHCNP). Dans un souci de simplification, le terme IPSPL sera utilisé dans ce texte pour désigner toute IP travaillant en soins primaires ou en première ligne.

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centres de santé et de services sociaux (CSSS), les groupes de médecine familiale (GMF) et autres services courants de première ligne. Pourtant, à la suite de cette réorganisation, l’urgence demeure encore la ressource de santé la plus utilisée, tel que démontré par la Commission Clair en 2000. D’ailleurs, les recommandations découlant de cette commission consistent principalement à reconnaître la prestation des soins de première ligne comme les piliers du système de santé québécois (Clair et al., 2000). Les problèmes majeurs d’accessibilité, de continuité et de coordination des soins de santé sont ainsi mis en lumière par la difficulté à trouver un médecin de famille, la complexité de la trajectoire de soins, le temps d’attente démesuré dans les salles d’urgence, ainsi que divers éléments démontrant la mauvaise organisation des soins, particulièrement pour les patients présentant des problèmes de santé mineurs et chroniques (Clair et al., 2000). Les travaux de la commission Clair préconisent ainsi l’établissement d’une première ligne plus performante avec, entre autres, des équipes interdisciplinaires de soins de santé primaires. Cette approche sous-tend qu’une organisation efficace de la première ligne et un développement des réseaux de services intégrés contribuent à l’amélioration du fonctionnement des services hospitaliers de 2e ligne.

Ces recommandations s’inscrivent donc dans un constat de lacunes en termes de prestations de services de première ligne pour la population québécoise. Pourtant, selon un rapport de l’Institut national de santé publique du Québec (INSPQ), 78% de la population québécoise nécessite des services de santé de première ligne (Kapetanakis, Ouellet, & Pineault, 2008). Ces auteurs soulignent que les personnes atteintes d’un ou de plusieurs problèmes de santé chroniques sont plus susceptibles d’avoir besoin de tout type de services de premier contact et ont tendance à faire plus de visites aux médecins généralistes. D’ailleurs, le Québec présente une prévalence plus élevée que la moyenne canadienne quant aux besoins en soins de routine ou de suivi et, pourtant, le quart de la population québécoise dit avoir rencontré des difficultés d’accessibilité à ces services de première ligne. La constatation de ces lacunes du système de santé a donc poussé les instances gouvernementales à instaurer des solutions concrètes permettant de faire face à cette situation. L’une de ces stratégies consiste en l’intégration des IPSPL grâce à l’adoption de la loi 90 en 2003. Les résultats escomptés de cette pratique sont d'offrir une accessibilité plus vaste à des services de santé primaires aux clientèles présentant des problèmes de santé mineurs et ainsi contribuer à améliorer, en partie, le fonctionnement des urgences et des services de première ligne.

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4

1.2 Brève description de la pratique infirmière avancée et de la

première ligne

Avant d’aller plus loin, il est important de bien comprendre ce à quoi réfère la PIA en première ligne. Tout d’abord, la première ligne fait référence, selon le rapport de la Commission Clair, à la porte d’entrée du système de santé. Plus précisément, « les services de première ligne sont le point de contact de la population avec le réseau. Ils comprennent un ensemble de services courants, médicaux et sociaux, qui s’appuient sur une infrastructure légère de moyens diagnostiques et thérapeutiques permettant de résoudre la majorité des préoccupations et problèmes communs, d’ordres social et médical, de la population.» (Clair et al., 2000). L’émergence de la PIA s’inscrit donc dans ce contexte de besoins grandissants en première ligne. La définition retenue de la PIA est celle de l’Association des infirmières et infirmiers du Canada (AIIC) qui décrit ce terme comme « une expression générale décrivant un niveau avancé de la pratique des soins infirmiers cliniques, qui maximise l’utilisation de connaissances acquises aux études supérieures, d’un savoir infirmier approfondi et d’une compétence confirmée au service des besoins de santé des personnes, des familles, des groupes, des communautés et des populations dans le domaine de la santé » (AIIC, 2008).

En fait, le commencement de la PIA a pris place au cours des dernières décennies à mesure que les systèmes de santé et les gouvernements à travers le monde ont reconnu que l’exploitation du plein potentiel de la profession infirmière ainsi que l’élargissement de son champ d’expertise constitue une stratégie efficace à suivre pour améliorer les services de santé (Schober & Affara, 2006). Suite aux nombreux rapports ayant reconnu l’importance de la première ligne, en plus d’une pénurie de médecins persistante dans les systèmes de santé, les années 1960 et 1970 ont marqué l’implantation du rôle de l’infirmière en pratique avancée aux États-Unis et au Canada (Kaasalainen et al., 2010). Par la reconnaissance du potentiel de ces professionnelles, le développement de plusieurs rôles en PIA s’ensuit, dont celui d’IPS (infirmière praticienne spécialisée) et d’ICS (infirmière clinicienne spécialisée), ainsi que diverses spécialités appuyées par des cadres légaux. Ainsi, depuis plusieurs décennies, les IPS à travers le monde s’affairent à développer leur rôle et acquérir de plus en plus d’autonomie afin d’offrir à la population des soins de santé répondant à leurs besoins.

1.3 Contexte actuel au Québec : besoins de santé grandissants

en première ligne

Les besoins de la société en termes de soins de santé sont en constante évolution, ce qui confronte le système de santé québécois à de nombreux défis. De fait, le vieillissement de la population est l’un des plus

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5

importants défis auquel fera face le système de santé dans les années à venir en raison de l’augmentation de la complexité des soins y étant associée (Voyer, 2013).

Les personnes âgées occupent une place de plus en plus importante puisque cette population est en constante augmentation depuis plusieurs décennies. Selon les statistiques, la proportion de personnes âgées doublera d’ici 50 ans au Québec (Turcotte & Schellenberg, 2007). Alors qu’elles représentaient 15% de la population québécoise en 2010, elles en représenteront 28% en 2056, ce qui démontre un vieillissement très rapide dans les années à venir, qui sera inévitablement relié à une demande accrue en soins de santé, particulièrement pour la première ligne. De fait, la chronicisation de la maladie est souvent associé au vieillissement. Les maladies chroniques constituent la principale cause de morbidité et de mortalité dans la population adulte dans le monde, représentant au total 63% des décès, et la prévalence de plusieurs d’entre elles augmente avec l’âge (Organisation mondiale de la santé (OMS), 2010). D’ailleurs, l’OMS considère les maladies chroniques comme étant l’un des plus grands défis de tous les systèmes de santé du monde. Par définition, une maladie chronique est « un problème de santé irréversible, qui ne peut généralement pas être guéri définitivement, mais dont il est possible de contrôler la progression ou les symptômes » (Voyer, 2013). À l’échelle nationale, on note que 38% de la population canadienne âgée de 20 ans et plus est atteinte d’au moins l’une des dix principales maladies chroniques2, et 15% sont en situation de comorbidité, c’est-à-dire qu’ils sont atteints d’au moins deux de ces maladies (Agence de la santé publique du Canada, 2016). Au Québec, plus de 80% de la population âgée de 65 ans et plus souffre d’au moins une maladie chronique (Camirand & Fournier, 2012), principalement de maladies cardiovasculaires, de cancers, de maladies respiratoires ou de diabète.

La hausse des problèmes de santé chroniques entraîne inévitablement une augmentation de la demande en services de santé et exige donc l’adaptation de ces services pour répondre aux besoins particuliers des personnes atteintes. L’engorgement des urgences démontre d’ailleurs de façon éloquente l’incapacité actuelle de la première ligne à répondre aux besoins de la population. Dans cette perspective, le Commissaire à la santé et au bien-être (2016a) démontre que la majorité des consultations à l’urgence a pour cause un problème de santé mineur, qui serait facilement traitable par un professionnel de première ligne. À cet égard, pour l’ensemble du Québec, 61 % des personnes qui se présentent à l’urgence sont des patients dont le niveau de priorité est 4 ou 5 et qui, dans la majorité des cas, pourraient être traités en première ligne plutôt qu’à l’urgence.

2 L’enquête sur la santé dans les collectivités canadiennes (ESCC) considère les dix principales maladies chroniques

comme étant les maladies cardiaques, les accidents vasculaires cérébraux, le cancer, l'asthme, la maladie pulmonaire obstructive chronique (MPOC), le diabète, l'arthrite, la maladie d'Alzheimer et autres démences, les troubles de l'humeur (dépression) et l'anxiété.

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Toutefois, les principales raisons relevées par la population québécoise en termes de consultations à l’urgence résident dans l’impossibilité d’obtenir les services d’un médecin de famille et dans le fait que l’urgence constituait le seul endroit où ils pouvaient aller (Lecours et al., 2013), ce qui démontre encore une fois la complexité de la trajectoire de soins et la difficulté d’accès aux services de santé en première ligne. Devant un tel constat, il est indéniable que le système de santé québécois doit rendre la première ligne plus accessible et efficiente afin de répondre aux cas moins urgents. D’ailleurs, la faible satisfaction des Canadiens en regard de leur système de services de santé serait principalement attribuable aux défis d’accès, de coordination et de continuité des services (Marchildon, 2013).

Les recommandations pour relever ces défis d’accessibilité, de continuité et de coordination des soins résident en partie dans l’amélioration de la première ligne et l’enrichissement des champs de pratique professionnels (Clair et al., 2000; Commissaire à la santé et au bien-être, 2016a; Schoen et al., 2007). En effet, le constat de ces difficultés constitue une situation propice à la reconnaissance et au développement de l’expertise infirmière. Le CSBE (2016a) souligne d’ailleurs que les professionnels de la santé non-médicaux (ex. infirmière, IPS) devraient jouer un rôle beaucoup plus important dans la prise en charge des patients, en particulier ceux atteints de maladies chroniques. C’est donc dans ce contexte que s’inscrit l’émergence de la PIA au Québec, notamment en première ligne à travers le rôle de l’IPSPL.

1.4 Émergence du rôle IPSPL en réponse à ces besoins

Considérant les besoins grandissants en première ligne et la difficulté d’accès à un médecin de famille, le gouvernement québécois s’est inspiré des modèles de collaboration entre infirmières et médecins établis dans les autres provinces et pays pour introduire le rôle d’IPS. La littérature montre d’ailleurs que l’intégration de ces professionnelles dans les équipes de soins primaires est susceptible d’améliorer l’accessibilité des soins et l’efficience du système (Carter & Chochinov, 2007; Dierick-van Daele, Spreeuwenberg, Derckx, Metsemakers, & Vrijhoef, 2008; Dierick-van Daele, Spreeuwenberg, et al., 2010). C’est ainsi qu’en 2003, la mise en application de la Loi modifiant le Code des professions et d’autres

dispositions législatives dans le domaine de la santé (Loi 90, 2002) permet l'actualisation des champs de

pratique de plusieurs professions issues du domaine de la santé, notamment l’infirmière. De ce fait, cette loi fait naître le rôle d’IPS en déléguant certaines activités médicales aux infirmières certifiées, visant à répondre aux besoins non-satisfaits de la population en termes de soins de santé.

Toutefois, ce n’est qu’en 2006 que les premiers travaux pour la création du rôle de l’infirmière praticienne spécialisée en soins de première ligne ont été amorcés par un comité consultatif paritaire de l’Ordre des

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infirmières et infirmiers du Québec (OIIQ) et du Collège des Médecins du Québec (CMQ). Le premier programme de formation pour les IPS en soins de première ligne débute donc à l’automne 2007 à l’Université de Montréal et à l’Université Laval. L’adoption des lignes directrices pour les IPS en soins de première ligne se fait en 2008 et le premier examen de certification se tient en 2009. Les lignes directrices de la pratique clinique des IPS ont connu deux mises à jour, soit une première en 2014 et une deuxième en 2018 (OIIQ & CMQ, 2014, 2018).

Les lignes directrices sont issues d’une collaboration entre les deux ordres professionnels, soit l’OIIQ et le CMQ, et encadrent ainsi le rôle de l’IPS en première ligne. Selon ce document, l’IPSPL est une infirmière ayant réussi une formation universitaire de 2e cycle, lui permettant de partager certaines activités relevant de la pratique médicale, tout en enrichissant ses compétences propres à la discipline infirmière. De cette manière, elle utilise son leadership professionnel pour porter une réflexion critique sur des situations de soins complexes, tout en mettant à profit les données probantes. Ainsi, elles possèdent les habiletés nécessaires au développement de la collaboration interprofessionnelle essentielle à l’amélioration de l’accessibilité, de la continuité et de la qualité des services de première ligne (OIIQ & CMQ, 2014). En plus des 16 activités réservées aux infirmières, l’infirmière praticienne spécialisée peut effectuer cinq activités médicales, soit 1) prescrire des examens diagnostiques, 2) utiliser des techniques diagnostiques invasives ou présentant des risques de préjudice, 3) prescrire des médicaments et d’autres substances, 4) prescrire des traitements médicaux, et 5) utiliser des techniques ou appliquer des traitements médicaux, invasifs ou présentant des risques de préjudice.

Plus précisément en lien avec les maladies chroniques, les lignes directrices mentionnent que les IPS peuvent contribuer de manière efficace à leur prise en charge. Ces dernières utilisent leurs connaissances en physiopathologie et en pharmacologie, tout en tenant compte des résultats probants et des guides cliniques reconnus, pour surveiller l’état de santé des patients souffrant de maladies chroniques stables et leurs réponses aux traitements administrés. Considérant que l’incidence et la prévalence des maladies chroniques au sein de la population sont en augmentation et que la situation pourrait s’accentuer davantage (OMS, 2010), les IPSPL semblent être une solution efficace à long terme pour contrer ce défi. De plus, puisque les compétences des IPSPL incluent le partenariat avec les patients, l’utilisation de données probantes et de compétences d’encadrement (Hamric, Hanson, Tracy, & O'Grady, 2014), ces professionnelles peuvent être utilisées de manière efficace dans les programmes de mieux-être, en travaillant avec des patients atteints de malades chroniques afin de renforcer leur autonomie et leur adhérence au traitement, en plus de concevoir et mettre en œuvre des programmes éducatifs pour ceux ayant des besoins de gestion plus complexes.

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Ce rôle émergent au Québec a donc incité plusieurs infirmières à se diriger vers la pratique avancée afin de combler leurs ambitions professionnelles et de faire valoir le potentiel de cette pratique. D’ailleurs, bien que cette pratique soit une innovation au Québec, les autres provinces canadiennes bénéficient de son apport depuis plusieurs décennies. En 2009, on comptait 1463 IPS pour l’Ontario, 294 pour l’Alberta, 129 pour la Colombie-Britannique, et seulement 41 pour le Québec (Kaasalainen et al., 2010). Néanmoins, ce nombre semble connaître une augmentation importante depuis les dernières années puisqu’en 2017, l’Ontario comptait un peu plus de 3000 infirmières praticiennes, soit 2,15 pour 10 000 habitants, comparativement à seulement 0,58 au Québec, démontrant un potentiel à exploiter dans les prochaines années (OIIQ, 2018). D’ailleurs, la plupart des IPS québécoises, soit 405 (83,7 %), sont spécialisées en soins de première ligne et depuis 2013-2014, leur nombre a plus que doublé, ce qui démontre un intérêt grandissant pour cette profession (Tableau 1.1).

Tableau 1.1 Évolution du nombre d’infirmier(ère)s praticien(ne)s spécialisé(e)s inscrits au Tableau de l’OIIQ

Source: Rapport statistique sur l’effectif infirmier 2017-2018 (OIIQ, 2018, p.15)

Du côté de l’Ontario, les chiffres précédents démontrent que ce rôle est implanté depuis déjà plusieurs années et est bien connu de la population. Cette province a d’ailleurs été de l’avant dans cette reconnaissance de la PIA en créant des cliniques dirigées par du personnel infirmier praticien. Ces cliniques sont les premières de leur genre en Amérique du Nord et offrent, depuis 2007, des services de santé importants comme des soins primaires complets, de la prévention des maladies et de la promotion de la santé, le diagnostic et le traitement de maladies épisodiques et chroniques et des évaluations de santé (Gouvernement de l'Ontario, 2010). En date du 31 janvier 2014, on compte 25 cliniques dirigées par du personnel infirmier praticien en Ontario qui offrent des soins de santé primaires à plus de 43 000 familles et personnes, ce qui permet d’accroître de façon importante l’accessibilité aux soins.

Dans le même ordre d’idées, la ville de Québec a été témoin d’une innovation semblable en lien avec la PIA de première ligne. En effet, en 2011, des infirmières ont mis sur pied un organisme à but non lucratif, soit la Coopérative de solidarité SABSA. Cette clinique avait pour mission initiale de répondre à l’ampleur de

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l’épidémie du virus de l’hépatite C (VHC) et du virus de l'immunodéficience humaine (VIH) parmi des populations vulnérables. SABSA a ainsi vu le jour pour offrir à cette clientèle un encadrement serré et un plus grand support psychosocial et médical (http://www.coop-sabsa.com/). Toutefois, suite à un accueil positif et une augmentation significative de la réussite des traitements, SABSA a constaté des besoins plus larges en soins de santé pour les gens de la Basse-Ville de Québec ainsi que leur difficulté à y accéder. Son champ d’action s’est donc élargi en 2014 avec l’arrivée d’un projet soutenu par la contribution financière de la Fédération interprofessionnelle de la santé du Québec (FIQ). Ce projet novateur permet donc d’offrir une clinique de proximité aux résidents du secteur en leur offrant les ressources nécessaires pour répondre adéquatement à leurs besoins de santé. En outre, bien que l’interprofessionnalisme fasse partie intégrante du modèle de soins, l’offre de soins repose principalement sur la PIA. En effet, l’IPSPL est le centre de gravité de l’offre de soins en assumant près de 85% des consultations (Duhoux, Contandriopoulos, Roy, Laroche, & Mattmann, 2015). Ce modèle a d’ailleurs prouvé son efficience, considérant que moins de 5% des consultations réalisées par les infirmières de la Coopérative nécessitent une référence vers un professionnel de santé extérieur. La grande majorité des besoins de soins est donc prise en charge au sein de la Coopérative, qui a offert 3256 consultations en 2015. En plus d’améliorer l’accessibilité aux soins, elle a également permis des économies directes liées aux soins médicaux non facturés au réseau de santé québécois de plus de 120 000$.

Bien que la trajectoire de la clinique SABSA ait été semée d’obstacles financiers et politiques, son succès tend aujourd’hui à être de plus en plus reconnu. D’ailleurs, grâce au potentiel démontré par les IPS, le gouvernement du Québec s’est engagé à rendre disponible 2000 IPS d’ici 2024-2025 afin d’améliorer l’accessibilité des soins et des services du réseau de la santé et des services sociaux pour l’ensemble de la population. Afin de soutenir ce déploiement, le Ministère de la Santé et des Services Sociaux (MSSS) investit un peu plus de 1,4 milliard de dollars sur cette période de 10 ans, notamment pour couvrir les salaires des postes actuels et futurs d’IPS, ainsi que les bourses qui leur sont offertes dans le cadre de leurs études (MSSS, 2017a). Cet investissement constitue ainsi un appui considérable au développement du rôle IPS et sous-tend une preuve de confiance à ces professionnelles pour surmonter les défis du système de santé québécois.

Dans le même ordre d’idées, en 2016, le groupe de médecine familiale (GMF) St-Vallier a pris un nouveau virage en mettant de l’avant la pratique infirmière avancée par l’intermédiaire du projet Archimède. Ce projet consiste en la réorganisation des soins de santé par l’utilisation optimale des champs de pratique de chaque professionnel de la santé et vise à augmenter la capacité de prise en charge de patients par une collaboration accrue des infirmières praticiennes spécialisées en soins de première ligne, des infirmières et

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d’autres professionnels de la santé (Laliberté, Dubé, Fréchette, & Boucher, 2016). Ainsi, l’infirmière clinicienne est le premier contact de la clientèle et, selon son évaluation, cette dernière peut prendre le patient en charge ou référer à l’IPSPL si la situation dépasse son champ de pratique. De cette manière, le client n’a pas à voir un médecin en priorité et l’IPSPL peut s’occuper du patient si la situation ne nécessite pas d’intervention médicale obligatoire au sens de la loi. Cette pratique est axée sur l’interdisciplinarité et le travail d’équipe entre les professionnels de la santé et s’inscrit dans une vision prometteuse pour la reconnaissance de la pratique infirmière avancée et pour l’amélioration de l’offre de services en première ligne (MSSS, 2017b).

À ce jour, les chiffres montrent que le Québec peut compter sur 484 IPS dont 405 en soins de première ligne, 56 en soins aux adultes3 et 23 en néonatologie, mais ce rôle connaîtra inévitablement une expansion importante au cours des prochaines années (OIIQ, 2018), ce pourquoi il importe de bien documenter leurs impacts et savoir comment bien les utiliser. En effet, le développement de ces rôles augmente la complexité de la coordination des soins et les gestionnaires doivent donc s’assurer que chaque membre de l’équipe de soins est déployé dans un souci d’efficacité et d’efficience de manière à maximiser la santé des patients. Ceci requiert donc une bonne connaissance des rôles de chaque membre de l’équipe de soins primaires et de leur contribution au système de santé en termes de résultats de soins.

1.5 Évaluation du rôle IPSPL

En raison du caractère récent du rôle IPS en première ligne, son processus d’implantation au sein du système de santé est de plus en plus documenté, particulièrement au niveau des États-Unis et des provinces canadiennes. En effet, plusieurs auteurs se sont intéressés aux barrières et aux facteurs facilitants à l’implantation des IPS dans les équipes de soins (DiCenso, Bryant-Lukosius, et al., 2010; Gould, Johnstone, & Wasylkiw, 2007; van Soeren & Micevski, 2001). Ces recherches, en majorité qualitatives, ont permis de décrire la nature des rôles et les enjeux entourant la redéfinition des rôles existants dans l’équipe de soins primaires, l’intégration optimale et la compréhension de l’apport de ce nouveau rôle infirmier, ainsi que les relations de collaboration et de supervision entre l’IPSPL et les médecins partenaires. Plusieurs solutions ont donc été proposées par ces auteurs afin de favoriser l’implantation des IPSPL dans les équipes de soins, menant ainsi à plusieurs documents offrant des ressources permettant une intégration optimale de ces professionnelles dans les équipes de soins (Contandriopoulos et al., 2014; Dicenso, Evans, Hutchinson, Watson, & Goodline, 2006).

3 Les spécialités cardiologie et néphrologie ont été regroupées sous la spécialité soins aux adultes le 8 mars 2018

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Pour faire suite à ces études, un autre mouvement de recherche a pris forme au cours des dernières années dans le but d’évaluer l’efficacité et la qualité des soins offerts par les IPSPL. Il existe donc une littérature grandissante qui démontre l’équivalence des résultats de santé chez les patients recevant des soins des IPS en comparaison à ceux recevant des soins de médecins de famille (Carter & Chochinov, 2007; Horrocks, Anderson, & Salisbury, 2002; Newhouse et al., 2011). Ces auteurs ont également démontré que la qualité des soins et la satisfaction des patients sont souvent plus élevées avec les soins des IPS. Finalement, les impacts économiques en termes d’efficience ont également été démontrés (Chenoweth, Martin, Pankowski, & Raymond, 2005; Dierick-van Daele et al., 2008; Eilrich, 2016; Paez & Allen, 2006).

Toutefois, ces études sur les impacts de leur rôle se concentrent particulièrement sur des indicateurs de résultats qui découlent du domaine de l’administration ou de la médecine, tels que l’efficience, la productivité et la comparaison entre deux professionnels issus de différentes professions (IPS-médecin). Les résultats-patients illustrant l’impact des IPSPL en termes de contribution unique restent donc peu documentés. Tel que recommandé par la Fondation canadienne pour l’amélioration des services de santé, les recherches futures devraient délaisser les résultats de productivité et les comparaisons avec les autres professionnels pour se concentrer davantage sur l’évaluation de l’impact de la PIA de première ligne en termes de valeur ajoutée par des indicateurs-patients pertinents découlant directement des interventions des IPSPL (DiCenso, Martin-Misener, et al., 2010). En effet, il est primordial pour des prestataires de soins de mesurer les résultats qu’ils engendrent chez leurs patients en termes de santé et de bien-être afin d’objectiver la qualité, la sécurité, l’efficacité et l’efficience de leurs soins. En raison de la difficulté d’accès à un médecin de famille et de l’évolution potentielle de la pratique infirmière avancée au Québec, il est devenu inévitable que le rôle d’IPS représente une alternative de choix pour les patients ayant besoin de soins primaires. Les patients atteints de maladie(s) chronique(s) font d’ailleurs partie de la clientèle qui profiterait particulièrement de la pratique des IPSPL, considérant le suivi régulier qu’ils requièrent. En conséquence, la compréhension de ce que la pratique infirmière avancée en première ligne apporte au système de santé et aux patients est nécessaire pour informer la population québécoise et les décideurs politiques du potentiel offert par les IPSPL dans un but d’amélioration de la qualité des soins et des services de santé au Québec.

Ainsi, le fondement de la présente étude se place plus particulièrement au niveau de l’évaluation de ce rôle en termes de valeur ajoutée. La pertinence d’évaluer l’impact du rôle IPSPL permet une meilleure compréhension de leur contribution au système de santé, fournit un rationnel valide pour justifier le maintien

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de ces postes ainsi que la réduction des barrières politiques et juridiques à la pratique avancée, tout en encourageant l’adoption de ces rôles dans de nouveaux milieux.

1.6 But et objectifs de recherche

À la lumière de l’importance grandissante accordée aux soins de première ligne démontrée précédemment, le rôle IPSPL semble être une solution à long terme pour répondre aux besoins du système de santé québécois. Toutefois, l’évaluation de leur rôle en termes de valeur ajoutée et d’indicateurs-patients reste encore peu documentée afin de distinguer l’impact de ces professionnelles ainsi que leur contribution unique au système de santé, particulièrement au Québec. Dans cet ordre d’idées, le but de la présente étude vise à explorer comment les IPSPL répondent aux besoins en matière de santé et de bien-être d'adultes souffrant d'une ou de maladie(s) chronique(s) lors du suivi en première ligne. Pour ce faire, les objectifs de recherche consistent à :

 Exposer la perception des patients relative à leurs besoins de santé et de bien-être spécifiques lors de consultations de suivi pour leur(s) problème(s) de santé chronique(s);

 Exposer la perception des patients souffrant d'une ou de maladie(s) chronique(s) face aux soins et aux services reçus par les IPSPL lors de consultation de suivi en première ligne en termes d’approche, de planification des soins (recommandations et traitement), de capacités d’autogestion et de résultats;

 Explorer la satisfaction des patients lors du suivi par une IPSPL pour leur(s) problème(s) de santé chronique(s);

 Décrire la perception des IPSPL face aux facteurs organisationnels d’un modèle de soins interdisciplinaire en première ligne pouvant affecter leur pratique dans le suivi des patients atteints de maladie(s) chronique(s);

 Explorer la perception des IPSPL face à l'efficacité de leur rôle dans le suivi des patients en termes de résultats-patients.

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Chapitre 2 : Recension des écrits

Ce chapitre présente une recension des écrits relatant brièvement le contexte de l'implantation d'une PIA en première ligne, ainsi que l’évaluation du rôle IPSPL fait à ce jour. Pour ce faire, une définition de la qualité des soins infirmiers est présentée, en tenant compte de la notion de valeur ajoutée. Ensuite, une revue de littérature présente les facteurs facilitants et les barrières au développement de la PIA, ainsi que les caractéristiques de pratique de l’IPSPL et les compétences clés de ce rôle, particulièrement dans le contexte des maladies chroniques. Enfin, les résultats de soins issus de la pratique IPSPL à l’international et au Canada sont illustrés par l’intermédiaire des écrits faits à ce jour.

La recherche documentaire s’est réalisée principalement à l’aide des bases de données électroniques, dont CINAHL, PubMed, Medline et Cochrane. Les mots-clés utilisés, selon différentes combinaisons, ont été « nurse practitioner », « primary care », « advanced nursing practice », « quality care », « chronic disease » et « outcomes ». Les documents ont également été recherchés dans les sites gouvernementaux et les différentes associations reliées à la santé telles que l’Organisation mondiale de santé (OMS), l’Ordre des infirmières et infirmiers du Québec (OIIQ) et l’Association des infirmières et infirmiers du Canada (AIIC). À la suite du repérage de ces écrits, les articles cités dans les listes de références ont également été repérés et les plus pertinents ont été conservés en addition aux articles primaires.

2.1 Qualité et valeur des soins infirmiers

Tout d’abord, il importe de décrire les attentes relatives en termes de qualité des soins dans la profession infirmière, particulièrement dans la pratique avancée. En effet, tout au long de son histoire, le but fondamental de la profession infirmière s’est défini autour de l’action du prendre soin afin d’améliorer la santé et le bien-être du patient, tout en créant un environnement sain lui permettant de maintenir cet état (Meleis, 2011). Dans cette optique, malgré les compressions incessantes dans le système de santé, les infirmières persistent à maintenir une culture de soins centrés sur le patient, tout en valorisant la qualité des soins qu’elles prodiguent (Flagg, 2015; Wolf, Lehman, Quinlin, Zullo, & Hoffman, 2008). En effet, puisque le patient est au cœur des soins, la valeur des soins offerts par un professionnel de la santé est déterminée par la capacité de ce dernier à répondre aux besoins du patient (Gentry & Badrinath, 2017). Dans cet ordre d’idée, l’introduction des rôles de pratique infirmière avancée constitue l’une des solutions envisagées pour permettre l’amélioration continue des soins aux patients dans un contexte de difficultés d’accès aux soins, particulièrement en première ligne. Selon la Fondation canadienne de recherche sur les services de santé (2006), la qualité des soins est optimisée par du personnel infirmier chevronné et hautement scolarisé,

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favorisant ainsi l’expertise et la compétence, ce qui est cohérent avec les prémisses de la pratique infirmière avancée. Ainsi, l’évaluation de ces nouveaux rôles est primordiale pour remédier à la méconnaissance de ces derniers et, par le fait même, à une performance non-optimale du système de santé. L’évaluation du rôle IPSPL se construit donc autour de la notion de valeur qu’elle ajoute au système de santé. Puisque la valeur des soins de santé est définie autour du patient, cette valeur se mesure par les résultats-patients engendrés par un professionnel et l’amélioration qui en découle au sein du système de santé (Porter, 2010). Il importe à savoir le rôle que joue l’IPSPL dans la qualité des soins en termes d’indicateurs spécifiques aux soins infirmiers. La pertinence de circonscrire des indicateurs de qualité sensibles aux soins infirmiers découle de l’importance de mesurer la contribution unique des infirmières afin d’en tirer les avantages et d’apporter des solutions durables aux problèmes de l’offre de services de santé (Secrétariat international des infirmières et infirmiers de l’espace francophone, 2015).

Bref, dans une complexification des organisations et des rôles professionnels en santé, il est essentiel de bien distinguer la valeur de chacun pour améliorer la performance du système de santé et ainsi, prodiguer des soins de qualité pour les patients. En effet, la qualité des soins est une donnée importante dans la considération de la valeur ajoutée d’un rôle professionnel. Il est donc pertinent de chercher à distinguer la valeur ajoutée des nouveaux rôles infirmiers pour exploiter au maximum leur potentiel et leur contribution à l’optimisation de la santé des patients.

2.2 La pratique infirmière avancée

Tel que décrit précédemment, les difficultés d’accessibilité aux soins ont favorisé l’émergence de la pratique infirmière avancée au Québec, particulièrement en première ligne. Puisque la première ligne s’est vue accorder une grande importance par plusieurs rapports gouvernementaux (Clair et al., 2000; Clarke, 2016; Kapetanakis et al., 2008), le rôle d’IPSPL a connu une reconnaissance grandissante au cours des dernières années. De fait, plusieurs études ont démontré qu’une première ligne efficace est cruciale pour contrôler les coûts, améliorer les résultats-patients et ultimement améliorer la performance de l’ensemble du système de santé et ainsi assurer sa pérennité (Macinko, Starfield, & Shi, 2003; Rittenhouse, Shortell, & Fisher, 2009; Starfield, Shi, & Macinko, 2005). Ainsi, l’organisation des services de soins primaires a été clairement définie en tant qu’élément essentiel de la qualité des soins, particulièrement au regard de l’accessibilité et de la continuité. De plus, l’ampleur des maladies chroniques dans le monde démontre l’importance d’accorder une attention particulière au système de soins primaires. Hansen, Groenewegen, Boerma, et Kringos (2015) ont d’ailleurs démontré que les personnes souffrant de maladies chroniques sont enclines à une meilleure santé dans les pays où la structure et l’organisation des soins primaires sont optimales. C’est

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pourquoi l’introduction du rôle d’IPSPL constitue une avancée prometteuse au sein du système de santé, particulièrement en ce qui a trait à la prise en charge des patients aux prises avec une maladie chronique.

Dans le même ordre d’idées, l’engouement entourant l’amélioration continue de la qualité des soins au cours des dernières décennies a également contribué à la création des rôles IPS (Hamric et al., 2014). De fait, l’élargissement du champ de pratique de ces professionnelles, notamment par l’intégration de certains actes médicaux et d’une pratique basée sur les données probantes, contribue à l’optimisation de la qualité et de la continuité des soins, en plus de diminuer les coûts du système de santé (Mark, Salyer, & Wan, 2003). Bref, dès leur début, l’intégration des infirmières praticiennes dans les équipes multidisciplinaires vise à satisfaire aux principaux éléments de la réforme du système de soins primaires au Canada, ce qui inclut un meilleur accès aux soins ainsi qu’une plus grande importance accordée à la promotion de la santé et à la prévention de la maladie (DiCenso et al., 2007).

Toutefois, il a été soulevé par certains auteurs que le chevauchement du rôle IPS entre la profession infirmière et médicale représente une ambigüité au niveau de la compréhension de leur rôle (Brideau & Dallaire, 2010; Damien Contandriopoulos et al., 2016). En effet, tel que discuté préalablement, le rôle IPS découle d’une substitution verticale, considérant l’extension du rôle infirmier par l’inclusion d’activités habituellement réservées au champ médical (Roch & Ouellet, 2010). Ainsi, cette affirmation confirme encore une fois la nécessité de distinguer la valeur ajoutée de ces professionnelles par l’intermédiaire d’indicateurs spécifiques aux soins infirmiers.

2.2.1 Facteurs affectant la pratique des IPS

Bien que la PIA semble être une solution prometteuse pour répondre aux difficultés du système de soins primaires, ce rôle a longtemps tardé à trouver sa place dans le système de santé et reste encore méconnu aux yeux des communautés et des professionnels de la santé, particulièrement au Québec. Ainsi, la constatation de ces lacunes a poussé plusieurs chercheurs à étudier en profondeur les facteurs influençant l’intégration des IPS dans un contexte de soins primaires pour en développer une meilleure compréhension. Alors que les États-Unis ont été le premier pays à développer le rôle d’infirmière praticienne dans les années 1960, ce rôle de pratique avancée tend à se développer de plus en plus au niveau international (AIIC, 2002). Dans la plupart des pays, l’une des principales raisons du développement de ces rôles infirmiers avancés est avant tout d’améliorer l’accès aux soins et de promouvoir une plus grande qualité des soins. Dans le contexte des maladies chroniques, la principale raison consiste à fournir des services de suivi et de conseils plus intensifs aux patients, dans un contexte d’une offre médicale limitée (Delamaire &

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Lafortune, 2010). Au Canada, l’Ontario et l’Alberta ont été des provinces pionnières en termes d’adoption de la législation pour les IPS et du développement de ce rôle (Kaasalainen et al., 2010). Quant au Québec, bien que les débuts du rôle IPSPL soient plus récents, son développement semble soulever des attentes favorables à l’amélioration de la qualité et de l’accessibilité des soins offerts aux usagers du système de santé.

Toutefois, avant de voir apparaître un impact positif sur la santé des patients, la profession se doit de trouver sa place dans le système de santé. Pour ce faire, elle doit surmonter certaines barrières afin de s’implanter concrètement dans une perspective à long terme. C’est donc suite à la constatation de ces barrières et du manque de littérature sur ce sujet que les chercheurs se sont penchés sur les facteurs influençant l’intégration et la pratique des IPS dans un contexte de soins primaires pour en développer une meilleure compréhension. Tout d’abord, l’opposition de la profession médicale est apparue comme l’un des principaux obstacles au développement de rôles avancés infirmiers dans la plupart des pays couverts par l’étude de Delamaire et Lafortune (2010). Cette résistance de la part des médecins inclut plus particulièrement un questionnement face au chevauchement potentiel dans le champ de pratique de l’IPSPL et du médecin, mais également face aux compétences et à l’expertise des infirmières en pratique avancée (Delamaire & Lafortune, 2010). Ces propos sont d’ailleurs étroitement reliés à une méconnaissance et une confusion entourant le rôle IP, tel qu’identifié par les IPSPL autant à l’international (MacLellan, Higgins, & Levett-Jones, 2015; Poghosyan, Nannini, Stone, & Smaldone, 2013) qu’au Canada (Bryant-Lukosius, Dicenso, Browne, & Pinelli, 2004; DiCenso, Bryant-Lukosius, et al., 2010; Gould et al., 2007; Sangster-Gormley, Martin-Misener, Downe-Wamboldt, & Dicenso, 2011). Considérant ce chevauchement potentiel du champ de pratique IPSPL-médecin et la confusion qui en découle, une clarification de l’étendue de pratique de l’IPS s’avère nécessaire. Selon MacLellan et al. (2015), le rôle de l’IPSPL et l’impact de ses soins se doivent d’être clairs pour éviter toute confusion et résistance de la part des autres professionnels de la santé, reflétant ainsi un conflit de rôle interprofessionnel. Cela évite ainsi un manque de connaissances envers la PIA et des attentes mal définies face à la pratique et aux responsabilités des IPS, ce qui favorise leur inclusion au sein de l’équipe interdisciplinaire et la mise à profit des compétences de chaque professionnel (Jones, 2005). La compréhension adéquate du champ de pratique de l’IPSPL par les autres professionnels mène d’ailleurs à des collaborations intra et interprofessionnelles plus efficaces, qui sont bénéfiques pour le patient (Xyrichis & Lowton, 2008). Par ailleurs, l’importance de distinguer le rôle IPS comme un rôle inhérent à la discipline infirmière a également été soulevée par certains auteurs (Bryant-Lukosius et al., 2004; Lowe, Plummer, O'Brien, & Boyd, 2012; Way, Jones, Baskerville, & Busing, 2001). Pour que les IPS aient un impact sur l’amélioration de l’offre de services, une compréhension claire de leur pratique est impérative. En effet, lorsque l’accent est mis sur le rôle de substitution médicale plutôt que sur

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la complexité et l’intégralité des soins offerts par l’IPSPL, les composantes infirmières de ce rôle deviennent moins valorisées, ce qui tend à discréditer la valeur ajoutée de la pratique infirmière avancée (Bryant-Lukosius et al., 2004). Certains auteurs soulignent d’ailleurs que l’incorporation des fonctions médicales n’est qu’une portion de la prestation de soins de l’IPSPL, celle-ci étant davantage centrée sur le patient et sur une orientation holistique (Lowe et al., 2012; Way et al., 2001).Une étude faite par Fleming et Carberry (2011) supporte également ces propos en identifiant les caractéristiques du rôle de l’IPSPL par une approche de soins intégrée, holistique et centrée sur le patient qui se rapproche davantage d’une pratique supportée par une base de connaissances avancées en soins infirmiers plutôt que d’un modèle médical. Ces auteurs suggèrent d’ailleursque des recherches futures sont nécessaires pour démontrer l’impact de cette approche de soins holistique sur les résultats-patients.

Par la suite, une autre barrière identifiée par les IPS dans la littérature résulte des contraintes législatives restreignant l’étendue de pratique de ces professionnels. De fait, les restrictions au champ de pratique de la PIA rapportées par les études étaient principalement reliées au rôle d’IPSPL (de Witt & Ploeg, 2005; DiCenso et al., 2007; Gould et al., 2007; Humbert et al., 2007; Kaasalainen, DiCenso, Donald, & Staples, 2007; Way et al., 2001). Dans ces études, des IPSPL dénoncent le manque de constance entourant les activités permises dans leur champ de pratique, notamment en lien avec la prescription de médicaments. Selon certains participants questionnés dans ces études, les règlementations de l’organisation constituaient une barrière importante à la mise en œuvre du rôle d’IPSPL, alors que la pratique était beaucoup plus étendue dans d’autres juridictions. Au Canada, par exemple, une étude publiée par la Nurse

Practitioners’ Association of Ontario (NPAO) démontre une grande disparité en termes d’activités autorisées

par les IPS selon les provinces (Spence, Agnew, & Fahey-Walsh, 2015). Cette étude est également révélatrice de la grande autonomie dont disposent les IPS en Ontario et l’impact positif de leur pratique dans le système de santé ontarien. Dans cet ordre d’idées, les IPSPL du Québec font face à plusieurs restrictions dans leur champ de pratique, particulièrement au niveau de la prise en charge et du suivi des maladies chroniques. En effet, le Québec est la seule province canadienne dans laquelle l’IPSPL n’est pas autorisée à poser un diagnostic et à initier un traitement pour une maladie chronique4 (Association des infirmières praticiennes spécialisées du Québec (AIPSQ), 2017). Ce document souligne d’ailleurs que « lorsque la législation permet aux IPS d’exercer une pratique à la hauteur de leurs compétences, leur travail améliore clairement l’accessibilité aux soins, la prise en charge des patients et la qualité des soins de santé » (p.7). La seconde mise à jour des lignes directrices de la pratique clinique de l’IPSPL lui permet toutefois d’amorcer un traitement pharmacologique pour l’un des six problèmes énumérés au Règlement sur les infirmières praticiennes spécialisées, soit le diabète, l’hypertension, l’hypercholestérolémie, l’asthme,

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les maladies obstructives pulmonaires chroniques (MPOC) et l’hypothyroïdie (OIIQ & CMQ, 2018). Néanmoins, le patient doit tout de même voir le médecin dans le mois suivant l’amorcement du traitement, afin de confirmer l’hypothèse diagnostique de l’IPSPL. Contandriopoulos et al. (2017) démontrent d’ailleurs que le Québec est la province canadienne à imposer le modèle de supervision le plus strict et la formation la plus longue aux IPS, mais que ces dernières ont la plus faible étendue de pratique à l’échelle nationale.

De fait, selon Keating, Thompson, et Lee (2010), le manque de support organisationnel et les contraintes législatives constituent, à long terme, des freins de taille à la progression et à la durabilité du rôle IPS. Par ailleurs, les auteurs Dicenso et Bryant-Lukosius (2010) mettent en évidence, par l’intermédiaire de leur revue de littérature, que la définition des rôles de chaque membre de l’équipe interdisciplinaire et leur impact sur les résultats de soins doivent être clairs et consensuels afin de permettre à chacun de pratiquer à la pleine étendue de ses capacités et de répondre le plus efficacement possible aux besoins de la clientèle.

Ces barrières se doivent donc d’être prises en considération dans le but de développer des méthodes et des solutions permettant l’avancement du rôle et la reconnaissance des IPSPL comme un élément central à un modèle de prestation de soins efficace et efficient. Des stratégies ont donc été proposées et mises en place afin de soutenir la pratique des IPSPL et favoriser leur intégration au sein des équipes de soins ainsi que l’utilisation la plus efficace possible de ces professionnels (Bryant-Lukosius & Dicenso, 2004; Clarin, 2007; Dicenso et al., 2006). Les principales suggestions consistent en une préparation adéquate des équipes à l’accueil des IPSPL, notamment par des formations aux professionnels sur la description du rôle de l’IPSPL et de leur étendue de pratique, tout en répondant à leurs préoccupations et en favorisant leur mobilisation. Sangster-Gormley, Martin-Misener, et Burge (2013) ont d’ailleurs relevé que l’un des principaux obstacles à l’intégration des IPSPL réside dans le fait que les membres de l’équipe de soins soient peu informés et peu impliqués dans ce processus. De leur côté, Bryant-Lukosius et Dicenso (2004) ont développé le cadre PEPPA (Participatory, Evidence-based, Patient-focused Process for Advanced

practice role development, implementation, and evaluation), qui comporte neuf étapes permettant de

soutenir l’implantation des IPS. Parmi ces étapes, les auteurs démontrent l’importance d’examiner l’impact des actions des IPS et de lier leurs activités de soins à des résultats spécifiques tels que la prévention des complications, le nombre de consultations des patients à l’urgence, la satisfaction des patients, etc. Ce cadre favorise ainsi une meilleure compréhension des rôles de PIA et une utilisation optimale de l’expertise des IPS. Par le fait même, dans le but d’approfondir la compréhension du rôle des IPS, Keating et al. (2010) identifient le besoin pour les IPS et pour les organisations d’évaluer ce rôle en termes d’indicateurs-clés de

Figure

Tableau 1.1 Évolution du nombre d’infirmier(ère)s praticien(ne)s spécialisé(e)s inscrits au Tableau de l’OIIQ
Figure 3.1 Le Nursing Role Effectiveness Model adapté à la pratique infirmière avancée (tiré de Sidani et  Irvine, 1999)
Figure 3.2 Indicateurs-patients identifiés dans le modèle de pratique IPS de Shuler
Figure 3.3 Résumé du cadre de référence de l’étude
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Références

Documents relatifs

a mis en lumière que les aspects légaux et les directives avancées (planification préalable des soins) se retrouvent parmi les principaux besoins non comblés [33]. Les besoins