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(Internet version 1.03)
Amine Beyhom
To cite this version:
Amine Beyhom. Théories de l’échelle et pratiques mélodiques chez les Arabes – Une approche
systé-matique et diachronique (Internet version 1.03) : Volume I – L’échelle générale et les genres – Tome
1 : Théories gréco-arabes de Kindī (ixe siècle) à Ṭūsī (xiiie siècle) . Geuthner, 1 (1), 2010, Volume 1:
L’échelle générale et les genres – Tome 1 : Théories gréco-arabes de Kindī (IXe siècle) à Ṭūsī (XIIIe
siècle), 978-2-7053-3840-4. �hal-01473402�
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« Music was forced first to select artistically, and then to shape for itself, the material on which it works. Painting and sculpture find the fundamental character of their materials, form and colour, in nature itself, which they strive to imitate. Poetry finds its materials ready formed in the words of language. Architecture has, indeed, also to create its own forms ; but they are partly forced upon it by technical and not by purely artistic considerations. Music alone finds an infinitely rich but totally shapeless plastic material in the tones of the human voice and artificial musical instruments, which must be shaped on purely artistic principles, unfettered by any reference to utility as in architecture, or to the imitation of nature as in the fine arts, or to the existing symbolical meaning of sounds as in poetry. There is a greater and more absolute freedom in the use of the material for music than for any other of the arts. But certainly it is more difficult to make a proper use of absolute freedom, than to advance where external irremovable landmarks limit the width of the path which the artist has to traverse. Hence also the cultivation of the tonal material of music has […] proceeded much more slowly than the development of the other arts. It is now our business to investigate this cultivation » Hermann L. F. Helmholtz Ŕ « On the Sensations of Tone »1
À Rosy, soleil de ma vie, et à mes illustres prédécesseurs, Fārābī et (ibn) Sīnā, sans lesquels tout ceci nřaurait pas pu être possible
P
RÉFACE
Une musicologie majeureLa musicologie, ou étude scientifique, de la musique arabe est aujourdřhui majeure, ce qui ne veut pas dire autonome, isolée, encore moins unitaire ; bien au contraire, cřest sa capacité à se diviser en acoustique, organologie, histoire des instruments, des pratiques, des systèmes, des œuvres, analyse, systématique, ethnomusicologie des traditions, anthropologie religieuse, sociologie, puis à mettre ces points de vue en interaction qui en fait la richesse et lřintérêt, la pertinence. Le dialogue de cette musicologie de la musique arabe avec celles des musiques européennes anciennes ou contemporaines, des musiques de Chine, de Bretagne, de Bulgarie ou dřAfrique prend aujourdřhui une tout autre tournure que la course à lřancienneté, la pureté, qui caractérisaient les débats des années 1920 ou 1970, ou que la course à la modernité et la primauté de lřinvention. Nul besoin aujourdřhui de vouloir retrouver les sources anciennes, quřelles soient grecques ou mésopotamiennes, ni de purger des influences, pour faire œuvre dřhistorien ; il faut pour cela les mêmes méthodes que celles utilisées pour la Chine ou lřIrlande : lřétude critique des sources, le regard éloigné. Le comparatisme, venu avant, reviendra après. Il fait partie nécessaire de la culture générale du musicologue, mais nřintervient pas à ce stade en tant que tel.
Quand le baron Rodolphe lui-même ŕ ou lřauteur collectif connu sous le nom dřErlanger ŕ entreprenait ses travaux, le cadre général dans lequel se situait la théorie était celle dřune échelle générale des sons en rapport avec des genres mélodiques (B. Carra de Vaux, préface, La musique arabe, tome I, Paris, Geuthner, 1930, p. VII). Quand Amine Beyhom, en septembre 2005, expose le projet de recherche qui aboutira cinq ans plus tard au présent ouvrage, la situation est quelque peu différente. On dispose grâce à sa thèse présentée sous la direction de Nicolas Meeùs (Systématique modale, université Paris-Sorbonne, septembre 2003) dřun cadre intellectuel fort : grâce à la combinatoire et en sřappuyant sur un relevé généralisé des échelles modales constatées ou décrites tant dans la littérature spécialisée que par les professionnels de la musique et de son enseignement, on sait que le fondement des musiques modales ne peut être saisi que dans une alternance entre déroulement temporel mélodique (bourdon, teneur, finale, cadence …) et insertion de cette mélodie particulière dans un vaste système de différences permettant des regroupements, ou modes, et éventuellement des passages, ou modulations ; rien ne dit encore à ce stade que ces modes soient réductibles à des échelles, encore moins à des mesures. Quatre mille pages plus loin, rien ne lřaffirmera non plus. Avant même dřaborder le rapport entre théorie et pratique, force est de constater par lřhistoire comme par la pratique ethnomusicologique de
lřinteraction que lřensemble que constitue une musique modale (quřelle soit prise à lřéchelle de la modalité, de lřIslam, de lřensemble arabo-arméno-chaldéo-turco-persan, du monde « arabo-musulman », de la musique syro-égyptienne ou du mâlouf de Constantine) doit être saisi (même si on peut douter que cela soit possible simultanément) à la fois comme structure (ici : système de différences entre échelles) et comme mémoire (reconnaissance des motifs, formules, tournures, intonations).
Amine Beyhom ne tranche pas ; il propose simplement un cadre qui va permettre de saisir le système en tant que structure, et montre que lřensemble des échelles modales constatées et décrites se situent à lřintérieur de choix prédictibles et modélisables entre arrangements dřintervalles composant des ensembles ordonnés, appelés échelles. Il montre que la diversité la plus grande, la capacité de créer le plus grand nombre dřéchelles différentes avec un ensemble défini de notes rejoint étroitement et nécessairement lřéconomie dans les intervalles : traduit en termes triviaux, on crée fort peu dřespèces dřoctaves à partir des deux seuls intervalles de quinte et de quarte (en employant les noms conventionnels). Le choix dřéchelles de six ou sept notes est de loin le meilleur car en deçà ou au-delà on a une combinatoire potentielle moins élevée ; le choix des intervalles relève de la même systématique : on a tout avantage à sélectionner peu dřintervalles (on rejoint ici la fameuse théorisation des « modes à transposition limitée »), et lřéchelle diatonique, une octave partagée par sept intervalles de deux grandeurs, les deux petits non adjacents, est certainement une des solutions les plus élégantes et les plus économiques. Un résultat non trivial est que la génération par genres (quartes, quintes ou tierces) est liée à une contrainte proposée au modèle, celle quřune étape soit la quinte ou la quarte justes (que celles-ci mesurent réellement 3/2 ou 4/3 nřintervient évidemment pas).
Le point de vue de lřethnomusicologie des traditions musicales arabes et méditerranéennes vient apporter une précision : comme lřa analysé Suzy Felix (La
double clarinette au Liban Ŕ Le mijwiz, mémoire de Master, université
Paris-Sorbonne, juin 2007), il existe une alternative pour « créer le plus grand nombre dřéchelles différentes » à ce que nous avons défini plus haut comme « ensemble défini de notes » : cřest de jouer sur la grandeur même des intervalles ; cřest ce que fait le joueur de mijwiz ou le guitariste maltais en raccourcissant ou élargissant ses intervalles tout en gardant les mêmes doigtés. On en arrive à montrer ainsi un présupposé caché, mais évident : soit on a une modalité (ici : possibilité dřobtenir des ensembles de hauteurs ayant des caractéristiques propres et utilisables pour les mettre en relation avec des sentiments, expressions, ethos) floue mais limitée aux capacités psycho-acoustiques de discrimination par lřinstrumentiste et de lřauditeur, difficilement reproductible dřune fois sur lřautre, difficile à reporter sur un autre instrument, et impossible à codifier, comme dans le cas du mijwiz, soit on passe par des notes fixes, claires et distinctes. On peut décider que lřempereur fixe un étalon arbitraire, aussi arbitraire que la seconde ou le mètre ; on peut aussi décider
collectivement de construire des instruments (comme on dit instruments dřoptique) de référence : on les appellera alors « règle » (qānūn), « bois » (ʿūd)…
Quand Amine Beyhom me propose en septembre 2005 un travail de la dimension de lřancienne thèse dřÉtat en vue de son habilitation à diriger les recherches, il a encore en tête la perspective dřune « théorie alternative de la modalité
arabe », dans laquelle lřexposé pour mémoire des théories existantes depuis avant
Safiyy-a-d-Dīn jusquřà Mashāqa prendrait à peine quelques 260 pages. Dans notre esprit, les textes avaient été établis, traduits, analysés, discutés, ressassés. Le résultat de la recherche, dont le lecteur tient le premier volume entre les mains, est dřune autre dimension, pas seulement dřune autre taille : cette dimension, je la qualifierai non plus de systématique, ni dřhistorique, mais de spirituelle : la pratique de la recherche des textes, des manuscrits, des copies, des éditions, de la lecture, de la traduction, de la comparaison des variantes et interprétations a fait entrer lřancien ingénieur polyglotte et cosmopolite (= celui qui est citoyen dřune ville qui a les dimensions dřun monde) dans la dimension de lřherméneutique ; cette pratique de lecture a inséré lřhomme dans une chaîne de réception et de transmission dans laquelle nécessairement sřinsère une interprétation. Elle établit à rebours combien lřœuvre dřErlanger, le Bourbaki de la musique arabe, était elle-même insérée dans des préoccupations et des savoirs de son temps.
De là découle le style particulier à Beyhom, à la fois ou successivement érudit et polémique, laborieux et inspiré, toujours rigoureux, souvent enflammé : le texte (Fārābī, Ibn Sīnā ou Kindī) met son lecteur dans la position qui fonde lřart dřentendre la musique comme la poésie arabes : lřentendement juste est celui de lřamoureux passionné, du fou (on pense ici évidemment à Rūmī, à Tagore, à Ted Levin, à Jean During). Ici, cette folie nřest pas celle du vin, des garçons ou des femmes, mais du nombre et du doigté, dřun sens qui tient tout entier dans la forme, à condition que celle-ci soit mise en situation. Dans ce qui peut se lire aussi comme un exposé chronologique et systématique Amine Beyhom a inscrit plusieurs interrogations qui forment intrigue : ne peut-on connaître la zalzalité dès avant Fārābī ? Y a-t-il nécessité que le ʿūd ait eu des frettes ? Peut-on diviser lřoctave en un nombre dřintervalles qui ne soit ni sept, ni douze, ni vingt-quatre ? Et dix-sept a-t-il fait, feraia-t-il lřaffaire ? On lřa compris, cřest à un dialogue passionné en forme de
munāẓara que fait appel Théories de lřéchelle et pratiques mélodiques chez les Arabes,
un dialogue dont il nous plaît de rappeler quřil a toute sa place au sein du centre de recherches Patrimoines et Langages Musicaux et que nous avons voulu établir avec les meilleurs spécialistes mondiaux, qui forment cette petite communauté nomade, polyglotte et cosmopolite qui aime à se retrouver pour débattre, discuter et qui comprend les professeurs Owen Wright, Amnon Shiloah,Mahmoud Guettat, Dwight F. Reynolds, mais aussi le regretté Bernard Moussali, Christian Poché, Frédéric Lagrange, tout aussi bien que les auditeurs attentifs que nous sommes, vous lecteur et nous.
Nous ne saurions trop remercier et féliciter madame Myra Prince pour lřaccueil du présent ouvrage par lřéditeur même qui a publié Erlanger tout comme le nécessaire Musiques du monde arabe et musulman de Christian Poché et Jean Lambert (2000), le superbe Voyage au ciel dřun héros sama de Nicole Revel et al., 2005, et le merveilleux Musique, honneur et plaisir au Sahara de Michel Guignard (1975/2005).
François Picard
Professeur dřethnomusicologie analytique à lřuniversité Paris-Sorbonne, Directeur du centre de recherches Patrimoines et Langages Musicaux
P
ROLÉGOMÈNES
Plus de deux mille cinq cents ans avant notre temps, pythagoriciens et aristoxéniens sřopposaient déjà sur la nature de la musique et sur les moyens de la décrire (de la « théoriser », dirait-on aujourdřhui2). La musique est-elle Art, est-elle
Science3 ? Suit-elle les règles de la nature et des mathématiques ou dépend-elle
uniquement des sensations humaines ?
Ce livre ne prétend pas apporter de réponses directes à ces questions4, mais se
propose de raconter une histoire simple et passionnante, celle dřun vieux différend dont les débuts peuvent être retracés jusquřà lřAntiquité grecque, et dont les échos se répercutent toujours dans les pratiques musicales actuelles des pays arabes, en Asie Mineure ou Centrale, et en Iran. En effet, et parallèlement à la querelle entre modernes et anciens que nous retrouvons tout au long de lřhistoire dans toute « haute culture »5, les relations entre théories de la musique et pratiques musicales se sont distinguées, autour de la Méditerranée, par des controverses persistantes qui se sont traduites en désaccords entre les théoriciens eux-mêmes6. À part les implications purement musicales, il est utile de signaler ici que ces théories sont toutes, ou presque, dictées par des impératifs extra-musicaux, quřils soient culturels, philosophiques ou politiques, ou autres encore.
Un des indicateurs forts de cette situation est le divorce chronique entre, dřun côté, les théories sur (ou de) la formation de lřéchelle ou de sa composition et, de lřautre, la pratique telle quřobservée de nos jours ou (surtout en ce qui concerne la
2 Ou même, de la « modéliser », ce qui pourrait être plus proche dřun abord plus respectueux du matériau
musical existant, en vue dřessayer de comprendre les relations internes structurant la musique.
3 Ou, plus prosaïquement : la musique est-elle avant tout la pratique dřun art ou lřapplication dřune
théorie ?
4 Mais notre position à ce sujet est explicitée dans les conclusions de ce Tome 1.
5 Les termes « (de) haute culture » sont utilisés (notamment en ethnomusicologie) pour désigner des
cultures qui, tout en se situant hors du champ de la musicologie traditionnelle occidentale, constituent une subdivision particulière du champ dřétude de lřethnomusicologie (également occidentale) : ceci concerne plus particulièrement, à titre dřexemple, les musiques « classiques » des pays arabes, de Turquie et dřIran, de Chine, de lřInde, de Java, etc.
6 Rappelons ici que le terme « théorie » utilisé dans ce livre ne concerne pas seulement les théories
classiques de conservatoires, mais bien les théories de lřéchelle, dans lřacception du mot théorie comme « ensemble de propositions servant à unifier de façon logique des concepts afin dřexpliquer et dřinterpréter certaines aspects de la réalité dont lřon cherche à rendre compte ».
période précédant le XIXe siècle) telle que relevée dans les écrits des théoriciens ou
praticiens : en effet, bien peu de « musicologues » se sont penchés sur la question de la pratique musicale arabe ancienne7, préférant évoluer en vase clos et même,
quand mention de celle-ci existe, détourner les yeux dřindications sortant du cadre de lř« harmonieux » agencement des sons, supposé refléter, pour beaucoup8, celui de
lřUnivers même.
Ce livre est donc, avant tout, une tentative de remise à plat de lřhistoire des théories de lřéchelle générale chez les Arabes9avec une attention particulière portée
aux mentions de la pratique musicale10, quand elles existent, et leurs implications
sur la conception même de lřéchelle qui doit, in fine, être déduite de ces deux types de données historiques et analytiques11. Dans son essence, notre démarche se veut
donc être démythificatrice et reconstructive du rôle de la théorie et de sa relation avec la pratique musicale.
7 Notamment mélodique.
8 Bien évidemment et avant tout, pour les pythagoriciens, puis pour ceux qui les ont suivi dans cette voie.
9 Et chez leurs homologues théoriciens et praticiens Persans, Byzantins et Turcs.
10 Et, dans le Tome 2, aux manifestations de cette dernière dans les mondes contemporain et moderne, à
travers enregistrements sonores et performances « live ».
11 Dans le cadre de ce que nous nommons la Systématique diachronique, concept que nous développons
A
VERTISSEMENT
Dans un ouvrage de cette ambition, et dans un domaine aussi controversé que celui des théories musicales ou musicologiques qui y sont abordées, il est inévitable dřutiliser des termes qui peuvent prêter à confusion : le premier terme ambigu qui nous sera reproché sera, évidemment, la qualification dř« arabe » pour des théories et des pratiques qui ne le sont que partiellement ou incomplètement ; un deuxième terme sera celui de « théorie(s) » ; un troisième celui de maqām12 dans des contextes,
notamment populaires, où lřutilisation de ce mot ne se justifie, a priori, que très peu13.
Lřutilisation dřautres termes (ou terminologies) et définitions nous sera probablement et également reprochée : pour ces derniers, nous espérons avoir inclus suffisamment de notes explicatives pour remédier à une déficience terminologique chronique en analyse des musiques dites « orientales ».
Quant aux trois termes cités, précisons ce qui suit :
La musique considérée dans ce livre14 est celle de lřaire géographique
englobant des régions ayant été soumises, suffisamment longtemps pour que les caractéristiques culturelles véhiculées par lřenvahisseur initial deviennent partie intégrante des cultures locales, à lřIslam15, tout en faisant lřimpasse sur
certaines musiques particulières comme celles de la Mongolie, de la Chine, des Philippines, ou de lřAsie de lřEst en général16. Géographiquement, par
conséquent, lřaire visée comprend ce que lřon appelle de nos jours le Proche-Orient, lřAfrique du Nord, lřAsie centrale ainsi que lřIran, avec un centrage
12 Mode de la musique arabe ; le terme « mode » prête lui-même à confusion : la discussion sur « mode »
et « maqām » sera développée dans un ouvrage ultérieur.
13 Le terme que nous préconisons dans ce genre de cas est « laḥn » (« mélodie »), par exemple « laḥn
bayāt », ou [une] « mélodie [en] bayāt ».
14 Nous pourrions envisager dřutiliser les termes « du maqām » au lieu dř« arabe » pour caractériser cette
musique, mais dřautres difficultés surgiraient à ce moment, notamment du fait que le mot « maqām » est dřutilisation récente historiquement ; lřutilisation du terme « orientale » à la place dř« arabe » créerait une distorsion due à lřopposition implicite entre « Orient » et « Occident », que nous souhaitons éviter, au moins dans les définitions de base : « arabe » semble dans ce cas un moindre mal, mais ne nous satisfait pas non plus.
15 « Islam », avec une majuscule initiale, est utilisé dans cet ouvrage pour désigner la civilisation issue de
la révolution religieuse initiée par Muḥammad, et sřapplique par conséquent à des populations qui ne sont pas nécessairement « musulmanes » ; « islam », avec minuscule initiale, est utilisé dans un cadre confiné à celui de la religion correspondante. Nous écrirons cependant « civilisation islamique » en minuscules, bien que le domaine de la civilisation en question dépasse celui de la religion musulmane (tout court).
particulier sur les deux premières régions et des extensions limitées à (ou pour) certains pays situés au nord de la Méditerranée, comme la Grèce (et les Balkans en général) ou lřEspagne.
De par lřexistence de la « Ligue arabe », le terme « arabe » est également
porteur dřune connotation politique qui est absente de cet ouvrage qui se limite à lřétude des théories et pratiques des musiques modales heptatoniques, connues de nos jours comme musiques du maqām. Les musiques du Soudan et celle des Gnawas du Maroc, par exemple, à forte dominante pentatonique, ne rentrent pas dans cette catégorie, bien que ce pays et cette ethnie soient affiliés, de facto, à lřentité appelée « Ligue arabe ».
Le mot « arabe », appliqué aux musiques et théories revues, nřest donc
(dé)limité ni sur le plan géographique (par lřexistence dřune quelconque « ethnie » arabe sur le sol du pays), ni sur le plan politique ou linguistique (des pays comme la Turquie, lřIran, la Grèce, lřEspagne, ainsi que différents pays dřAsie centrale sont inclus dans la revue, à lřinverse de pays comme le Soudan), ni sur le plan religieux puisque (1) les musiques séculaires et les musiques religieuses ont eu de profondes influences les unes sur les autres et que (2) les religions (et les musiques religieuses) de ces différentes régions se sont influencées les unes les autres, surtout pour les Arabes et lřIslam à travers le concept des trois religions regroupées sous la bannière des Ahl al-Kitāb (ou « gens [des religions] du Livre »). Cřest dans ce cadre que sřest déroulée, selon nous, une des plus belles aventures de lřhistoire humaine, dont nous ne pouvons raconter ici quřune petite partie réduite aux théories de lřéchelle musicale17 et ses dérivés.
Dřun autre côté, lřutilisation du terme maqām, rentré (historiquement)
récemment dans le lexique musical, recouvre une réalité large que nous étendons encore un peu plus dans notre ouvrage : celle de lřexistence dřun corps de musique de référence pour tous les pays et régions inclus par nous sous le terme « arabes », et recouvert, notamment vers la fin du XIXe siècle18
par les termes « al-mūsīqā a-sh-sharqiyya » ou « musique orientale » ; cette dernière appellation nous est apparue cependant inadéquate car exprimant une opposition a priori entre musiques de lřOrient et musiques de lřOccident : il est indéniable que ces musiques se sont influencées, à divers degrés selon les périodes historiques, mais ce nřest aucunement, bien au contraire, une raison pour les opposer.
Plus loin encore, lřutilisation du terme « théorie » est à prendre dans le sens
purement musicologique, ou « ensemble dřanalyses appliquées à une musique et faisant ressortir des règles de fonctionnement, souvent indépendantes des
17 Même les mots « échelle » et « mode » prêtent à confusion, comme nous lřexpliquons dans lřIntroduction
générale infra.
règles enseignées ou présentées comme telles ». Ceci veut dire que les théories musicologiques se différencient avant tout des théories musicales par le fait que les premières sont supposées expliquer la nature du fonctionnement dřune musique quelconque, indépendamment du discours autochtone sur son enseignement, sa transmission ou encore des transpositions, dans un sens ou dans lřautre, de concepts appliqués à certaines musiques vers des musiques dont les principes de fonctionnement sont parfois très différents. Comme exemple type de cette dernière approche, nous pouvons citer les tentatives dřexpliquer, à partir dřun langage harmonique occidental, les subtilités modales des musiques du maqām : autant ces transpositions de concepts sont justifiées en ce qui concerne la production musicale « arabe » actuelle, complètement hybride dans la pratique et la théorie (dans le sens dřune théorie enseignée dans les conservatoires, et dřune musique de grande diffusion auprès des autochtones), autant ces concepts occidentaux ne peuvent nullement sřappliquer aux musiques traditionnelles « arabes » anciennes ou contemporaines, tout autant quřelles ne peuvent pas sřappliquer, du moins telles quelles, aux musiques traditionnelles européennes ou dřailleurs.
Quant au concept de théories « musicologiques », il nous incombe également,
en tant que musicologues analytiques ou historiques, de différencier les « théories universelles » des « théories particulières ». Les théories « universelles » ont tendance à expliquer le fonctionnement et les bases de toute musique comme se rapportant à des universaux ; les théories « particulières » essayent dřexpliquer les principes et les bases dřune musique particulière sans nécessairement relier ces principes et bases à des universaux quelconques. Notre démarche sřapparente, dans cet ouvrage et avant tout, à un essai dřétablissement dřune théorie (musicologique) particulière, tout en la reliant à un contexte historique et géographique complexe, ainsi quřà un processus de transmissions et dřinfluences croisées qui nřont pas fini de soulever des controverses. Cette relecture sřappuie sur les avancées de la
Systématique diachronique, qui est une extension des techniques et méthodes
préconisées par la Systématique modale19, et a pour vocation ultime, de par
son intégration dans une (vraie) musicologie généralisée, dřétablir des passerelles nouvelles entre les musiques diverses de par le monde, et de contribuer, dans une optique comparatiste et historique, à une meilleure compréhension du phénomène musical.
Enfin, lřutilisation de lřadjectif « zalzalien »20 pour qualifier les intervalles
« neutres » de la musique arabe, aujourdřhui assimilés à des multiples impairs du
19 Voir [Beyhom, 2003], et le Tome 2 du présent ouvrage.
quart de ton, est justifiée par celle quřen faisait déjà (ibn) Sīnā21 (et probablement
déjà au début du XIe siècle) pour la wusṭā du même nom, puis (bien plus tard Ŕ au XXe siècle) par Owen Wright pour caractériser plus généralement les échelles utilisant ces intervalles, toujours appelés « neutres » par certains théoriciens. Lřusage de cet adjectif est nécessaire pour lever tout a priori pouvant transparaître à travers lřusage de lřadjectif « neutre »22.
21 Voici un extrait du texte dans lequel (ibn) Sīnā [1956, p. 145] parle de la wusṭā zalzalienne :
» يلزلزلاب ةفكرعت١ا ،ةثيدتٟا ىطسولا هذى نم وى لب ،كلذك سيلك ،ةتٯدقلا ىطسولل بنّٓاك ونأ مىرثكأ ونظي اناتسد كلذ ؽوف اكدش منهإ ثم عبسك لثم ةبسن ىلع ،ة
.«
En traduction française : « et ils lièrent au-dessus [de cette ligature] une [autre] ligature que certains croient [à tort] être la ligature du mujannab de la wusṭā ancienne, mais ce nřest pas le cas, puisque cřest la ligature de cette wusṭā moderne, connue comme zalzalienne, sur le rapport dřun même et dřun septième [8/7] ». Notons cependant que la première référence à la « wusṭā de Zalzal » (sans adjectivation), qui
établit théoriquement les intervalles neutres sur la touche du ʿūd, se retrouve chez Fārābī au IXe siècle
(voir la ligature noVI dans la Figure 75).
22 Signalons également ici un point de méthodologie, mineur probablement mais quřil nous appartient
quand même de clarifier : nous utilisons dans ce livre tantôt le « nous de modestie » (au singulier), dřusage pour les ouvrages exposant des résultats de recherches, tantôt le « nous » pluriel quand le contexte va au-delà de la référence unique à lřauteur (quand le propos est général, et concerne ou devrait concerner également le lecteur ou différentes catégories de personnes), et tantôt le « je » quand le contexte est une affirmation de la démarche personnelle de lřauteur.
R
EMARQUES SUR LA TRANSLITTÉRATION
Notre translittération sřinspire des translittérations courantes pour la langue arabe, avec les particularités suivantes :
Nous avons essayé de combiner deux représentations en une seule, soit
lřécriture reproduisant dřune manière relativement fidèle celle de lřoriginal arabe, mais également une prise en compte de la prononciation de lřarabe
classique pour le lecteur. Nous nous écartons en cela du principe consistant à
reproduire les lettres utilisées une à une sans donner au lecteur dřindications pour une prononciation souvent défaillante pour le non arabisant, et nous ne prenons pas non plus en compte les dialectes locaux, les écrits examinés se rapportant tous23 au corpus commun aux Arabes de différentes régions.
En conséquence de quoi, la lettre « l » de lřarticle « al » (« le » ou « la » ou
« les » en français) est remplacée, dans le cas où le mot suivant lřarticle débute par une consonne « solaire »24, par cette même lettre, comme par
exemple dans a-sh-Sharafiyya (au lieu de al-Sharafiyya) ; le « l » est remplacé, dans ce cas, par la consonne à redoubler (dans lřexemple précédent la lettre double « sh »), avec inclusion dřun tiret pour indiquer le remplacement.
Les consonnes solaires sont25 :
Le « tāʾ » ou
ت
26, translittéré en t et se prononçant comme le « t » de« tiroir » ou de « tétracorde ». Une particularité de la prononciation de lřarabe classique fait que le « t » final dřun mot, quand il est isolé (et notamment dans sa graphie ة) ou précédé de lřarticle « al- », nřest pas
23 À lřexception notable du livre de (ibn) Ṭaḥḥān [1990] qui, tout en se référant à ce corpus commun,
comporte des informations assez particulières à un pays (lřÉgypte) et utilise des termes dialectaux, relevés dans les extraits transcrits en Annexes.
24 Les consonnes « solaires » (de shams, « soleil » en arabe, qui en contient deux, le « sh » et le « s »), sont
celles qui sont redoublées, pour la prononciation, en cas de présence de lřarticle « al » immédiatement avant : contrairement au français ou à lřanglais, par exemple, on ne peut pas intercaler, en langue arabe, un adjectif ou tout autre mot entre lřarticle et le mot immédiatement suivant, dřoù la propension à toujours écrire cet article avec un tiret lřunissant au mot correspondant. « La belle femme », par exemple, sera dit/écrit comme « la femme la belle », ou al-marřa [a]l-jamīla. Dans cet exemple, les deux lettres « m » et « j » sont des lettres « lunaires », le mot « lune », en arabe qamar, étant (par opposition à shams Ŕ « soleil ») le prototype de mots débutant par une consonne (et en contenant deux également, le « q » et le « m ») pour lesquelles le « l » de lřarticle « al » ne change pas en prononciation, comme pour al-qamar (on prononce le « l »), tandis que dans a-sh-Shams (« le soleil »), le « l » de lřarticle « al » (habituellement) translittéré (et écrit en arabe) en … « l », justement, est prononcé comme un « sh », dřoù le redoublement de ce type de consonne dans notre translittération.
25 Voir [Blachère & Gaudefroy-Demombynes, 1975, p. 28].
26 Nous ne donnons ici que la graphie isolée de la lettre en arabe ; les autres graphies sont lřinitiale (au début
prononcé, comme par exemple pour le mot firqa ou al-firqa (
ةقٍرًف
= « groupe, détachement, division ») ; dans le cas dřune utilisation de ce mot en combinaison avec dřautres dans une phrase ou un titre et en position initiale, comme par exemple dans Firqat al-Funūn a-sh-Shaʿbiyya (ة
ٌيًبٍعَّشل
ا
ا
فونيفل ةقٍرًف
= « groupe [musical] des arts populaires »), le t est prononcé pour firqat dřoù son inclusion dans notre transcription (mais il ne lřest pas pour le mot « shaʿbiyya », puisque ce dernier est précédé de lřarticle « al- »). Cette « règle » découle de celle de la non prononciation des voyelles brèves (de flexions de cas) en fin de mot (voir ci-dessous). Cependant, le « t » final des pluriels féminins est toujours prononcé en arabe (et différencie le pluriel du singulier), et est par conséquent translittéré en tant que tel. Le « thāʾ » ou
ث
, translittéré en th et prononcé comme le « th » anglais de« thorough » ou « thin ».
Le « dāl » ou
د
, translittéré en d et prononcé de même. Le « dhāl » ou
ذ
, translittéré en dh et prononcé comme son équivalentanglais dans « they » ou « there ».
Le « ḍād » ou
ض
, translittéré en ḍ et prononcé comme un « d » dur (lavoyelle le suivant est généralement prononcée « fermée », à lřinverse de celle suivant le « d » simple).
Le « ṭāʾ » ou
ط
, translittéré en ṭ et prononcé comme un « t » dur (la voyellele suivant est généralement prononcée « fermée », à lřinverse de celle suivant le « t » simple).
Le « ẓāʾ » ou
ظ
, translittéré en ẓ et prononcé comme un « z » dur (lavoyelle le suivant est généralement prononcée « fermée », à lřinverse de celle suivant le « z » simple).
Le « nūn » ou
ف
, translittéré en n et se prononçant (toujours, même en finde mot) de même.
Le « rāʾ » ou
ر
, translittéré en r et se prononçant de même. Le « lām » ouؿ
, translittéré en l et se prononçant de même. Le « zāy » ouز
, translittéré en z et se prononçant de même. Le « sīn » ou
س
, translittéré en s et prononcé exclusivement (pas de « z »)comme dans « son » ou « ça ».
Le « ṣād » ou
ص
, translittéré en ṣ et prononcé comme un « s » dur (lavoyelle le suivant est généralement prononcée « fermée », à lřinverse de celle suivant le « s » simple).
Le « shīn » ou
ش
, translittéré en sh et se prononçant comme le « ch » de« chat » ou comme le « sh » anglais de « shine ».
À part les consonnes (quřelles soient « solaires » ou « lunaires », ces dernières
ou courtes et qui se réduisent, pour lřarabe classique et pour chacune des deux catégories, à trois voyelles en tout :
Les voyelles courtes se placent soit au-dessus des consonnes ou des
voyelles longues27, soit en dessous de ces dernières :
La « fatḥa » ou ىَ (le cercle en pointillés indique la présence,
obligatoire, dřune consonne), est lřéquivalent dřun « a » et se prononce comme tel. Elle est placée au-dessus de la consonne et translittérée en a. La « kasra » ou ًَ (le cercle en pointillés indique la présence,
obligatoire, dřune consonne), est équivalente au « i » français et est naturellement translittérée en tant que i. Elle est placée, en graphie arabe et comme la position du cercle indiquant la présence de la consonne lřindique, en dessous de cette dernière.
La « ḍamma » ou يَ (le cercle en pointillés indique la présence,
obligatoire, dřune consonne), est lřéquivalent dřun « ou » et est translittérée comme u. Elle est placée, bien évidemment, au-dessus de la consonne en graphie arabe.
Les voyelles longues sont des lettres à part entière, et sřécrivent toujours,
ce qui nřest pas le cas pour les voyelles courtes que certains copistes ou rédacteurs omettent par commodité et en partant du principe que le lecteur doit savoir les replacer de lui-même pour le processus de lecture. Ces voyelles longues ont différentes graphies (comme pour les autres lettres, à part les voyelles courtes qui nřont, de toute manière, quřun rôle auxiliaire dans lřécriture de lřarabe) que nous nřexposons pas dans cet ouvrage, et sont translittérées comme suit :
Le « alif » ou ا (en graphie isolée), est lřéquivalent dřun « â »28 en
français, et est translittéré en ā.
Les deux autres voyelles longues sont le « yāʾ » et le « wāw », qui ont la
particularité dřêtre prononcées différemment selon que lřon puisse les assimiler (effectivement) à des voyelles, ou à des consonnes. Dans ce dernier cas, leur translittération est différente ; en graphie arabe, les lettres ne changent pas, mais les voyelles courtes qui caractérisent les consonnes sont généralement remplacées par le « sukūn », ou (lřéquivalent dřune) marque de voyellisation longue de la lettre, et dont la graphie, au-dessus de la voyelle longue, est équivalente à « ٍَ », le cercle en pointillés représentant cette fois-ci la voyelle longue qui, sinon et sans cette marque de sukūn, pourrait être prise pour la consonne correspondante.
27 Quand elles sont assimilées à des consonnes Ŕ voir plus loin dans le texte.
Le « yāʾ » ou
ٍم
, translittéré en tant que ī, est prononcé comme le « î » français, et le « wāw » ou
ٍك
est translittéré en ū et prononcé comme un « ou » français allongé, ou comme le « ou » anglais de « you ».Ces deux dernières voyelles ont des équivalents consonnants
translittérés, pour le « yāʾ » ou
م
(qui peut être surmonté par, ou surmonter lui-même, une voyelle courte, comme par exempleىم, يم,
ًم
) en y et prononcé de même (obligatoirement suivi Ŕ sauf quand redoublé Ŕ dřune voyelle soit « ya », « yu » ou « yi », ou encore de leurs équivalents avec des voyelles longues à la place des voyelles courtes)29,et pour le « wāw » ou
ك
(également surmonté par, ou situé au dessous dřune, voyelle courte, soitىك,
يك
ouًك
) en w30. Les autres consonnes, toutes « lunaires » (on garde la prononciation du « l »
de lřarticle « al »), sont :
Le « bāʾ » ou
ب
, translittéré en b et se prononçant comme tel. Le « jīm » ouج
, translittéré en j et se prononçant comme tel. Le « ḥāʾ » ou
ح
, translittéré en ḥ et correspondant, selon Blachère31, à uneconsonne laryngale en « souffle sourd émis[e] dans la position de la voix chuchotée » (et sans équivalent en français).
Le « kḥāʾ » ou
خ
, translittéré en kh et correspondant, également selonBlachère32, à une consonne vélaire « spirante fricative sourde » (et
également sans équivalent en français).
Le « ʿayn » ou
ع
, translittéré en ʿ et qui correspond, toujours selonBlachère33, à une consonne laryngale « spirante fricative sourde » (et
toujours sans équivalent en français).
Le « ghayn » ou
غ
, translittéré en gh et équivalent au « r » (fortement)grasseyé du parler parisien34.
Le « fāʾ » ou
ؼ
, translittéré en f et se prononçant comme tel. Le « qāf » ou
ؽ
, translittéré en q et se prononçant comme un « q » (« k »dur).
29 « Ay » (« ىأ ٍم »), dans le sens de « cřest-à-dire », « aw » (« ىأ ٍك »), dans le sens de « ou », sřécrivent avec un
« sukūn », ou marque dřabsence de voyelle courte.
30 En ce qui concerne les noms propres, tous ceux se terminant par un « م » (comme « ʿAlī », « Shawqī »,
« Fārābī »), sans exception, sont translittérés à la fin en « ī », indépendamment des flexions possibles. Dans les noms composés, cependant, le « م » est redoublé et clairement prononcé, dřoù, par exemple, lřutilisation du double « y » dans « Ṣafiyy-a-d-Dīn » ; de même en fin dřadjectif.
31 [Idem, p. 26].
32 [Idem, p. 25].
33 [Idem, p. 26].
34 Cřest la mâchoire haute qui est mise à contribution pour le gh, à lřinverse du « r » grasseyé parisien,
Le « kāf » ou
ؾ
, translittéré en k et se prononçant comme tel. Le « lām » ouؿ
, translittéré en l et se prononçant comme tel. Le « mīm » ouـ
, translittéré en m et se prononçant comme tel. Le « hāʾ » ou
ق
, translittéré en h et se prononçant comme le « h » anglais(prononciation obligatoire).
Remarques supplémentaires :
Les voyelles longues assimilées à des consonnes sont, dans ce dernier cas,
« lunaires ».
La « hamza » ou
ء
, ou encore consonne « laryngale […] occlusive ouexplosive sourde » selon Blachère35, et qui, pour nous, équivaut à une
indication dřattaque des voyelles quand elles sont prononcées séparément des consonnes qui les suivent, comme pour le mot « ʾamīr » (« émir, prince » ou
تَم
ٲ
, et qui sřécrira dans cet ouvrage « amīr », tout simplement), ou encore une indication dřarrêt avant la consonne comme dans maʾtam (« funérailles »), etc. La hamza est placée au-dessus ou en dessous des voyelles longues (pour indiquer, notamment, que ces voyelles sont attaquées directement et séparément dřéventuelles consonnes les précédant ou les suivant), notamment sur le alif (comme pour amīr ci-dessus), ou en dessous de ce dernier en début de mot ; elle peut être graphiée à part, par exemple en fin de mot (comme pour shayʾ, ouءٍيىش
= « chose »). Elle nřest translittérée, dans tous les cas et dans cet ouvrage, que si sa prononciation nřest pas évidente (hamza dř« arrêt » non immédiatement suivie dřune voyelle). Dans les deux exemples donnés ci-dessus, rajouter une hamza translittérée à amīr nřen changera pas la prononciation (le « a » sera toujours attaqué en tant que lettre initiale, sauf à assimiler le mot au français et à écrire « lřamîr » ou, tout simplement « lřémir », puisque le mot est entré dans le lexique du français Ŕ dřoù notre expression, dans ce genre de cas, « le amīr »), tandis que son élision de maʾtam introduirait un changement considérable (au point de déformer le sens du mot) ; de même, la différence de prononciation entre thaʾara (ىرىأىث
) et thāra (ىراث
), dont les graphies en arabe sont quasiment identiques, correspond à une différence conséquente du sens, puisque le premier terme veut dire « sřest vengé » et le deuxième « sřest soulevé [contre un oppresseur quelconque] »36. Le redoublement dřune consonne ou « shadda », marqué en graphie arabe
par le ٌَ (surmontant la consonne, comme sa position par rapport au cercle en pointillés lřindique), est reproduit, tout simplement, par un
35 [Ibid.]
36 Remarquons que le sentiment de revanche est loin dřêtre absent, de manière générale, dřun
redoublement de son équivalent translittéré (ce signe de redoublement peut, en écriture arabe, lui-même être surmonté, ou placé au-dessus, dřune voyelle courte, qui sřapplique dans ce cas pour la deuxième consonne que la shadda remplace). Cette règle nřest pas appliquée pour les redoublements en fin de mot précédés dřune voyelle longue (par exemple « ḥād » Ŕ « aigu » Ŕ au lieu de « ḥādd »).
Une autre série de remarques aidera probablement le lecteur à lever certaines ambiguïtés persistantes de translittération :
Nous avons généralement, dans les extraits dřauteurs occidentaux, gardé la
translittération dřorigine, en la ramenant cependant à la nôtre quand le besoin sřen est fait sentir pour une meilleure compréhension du texte.
Les noms propres figurent en majuscules, de même que les mots dřun titre, à
lřexclusion des prépositions et des articles (sauf sřils se trouvent en début de titre).
Dans le cas de transcription de la lettre initiale dřun mot en initiale
capitalisée, et si sa transcription se fait à lřaide de deux lettres latines (comme pour sh, kh, etc.), seule la première lettre du mot translittéré est écrite en casse haute.
Les noms propres sont généralement utilisés, pour la concision et en corps de
texte, sans lřarticle ou la filiation : par exemple « Fārābī » au lieu de « al-Fārābī » ; cependant, quand le nom figure au sein dřune énumération de filiations ou dřascendances, les indications de ces dernières (« ibn » et « ab ») et les articles (« al- », le tiret indiquant lřattribution de lřarticle au mot suivant) sont, bien évidemment, réintégrés dans le texte. Les indications de filiation de type « ibn » sont mises en parenthèses, par exemple « (ibn) Sīnā » au lieu de « ibn Sīnā »37.
Les mots et noms propres composés, comme « Ṣafiyy-a-d-Dīn » (« pureté de la
religion », nom propre), ne sont pas fléchis en fonction de leur cas (sujet ou complément direct ou indirect) : ceci mènerait à plusieurs graphies pour un même nom (ici « Ṣafiyy-a-d-Dīn, Ṣafiyy-u-d-dīn ou Ṣafiyy-i-d-dīn »), ce que nous avons préféré éviter ; nous avons par conséquent procédé à lřélision systématique de la voyelle finale (et parfois intermédiaire entre deux composantes du nom) indicative de la flexion, pour les noms propres38
comme pour les noms communs39.
37 Tout comme, par simplification, « (ibn) Nadīm » au lieu de « ibn a-n-Nadīm ».
38 Sauf, pour faciliter la prononciation, les noms composés avec « ab » (« père »), qui sont également
fléchis mais dont la flexion la plus courante est « abū » (de même pour « banū », « les fils [de] »).
39 Ceci permet également de garder le « a » de lřarticle « al », et de rappeler sa présence pour le non
spécialiste. Lřélision de la voyelle finale est utilisée, notamment, pour alléger le discours, mais également pour éviter les erreurs de flexions de cas, fréquentes chez les non-spécialistes (y compris nous-même).
Par ailleurs, la bibliographie et lřindex suivent lřordre alphabétique latin, en
commençant par le ʿayn (« ʿ ») puis a b c d etc. Les lettres translittérées doubles (initiales) figurent par conséquent en tant que sous-sections de la lettre initiale (Kh est à chercher sous « K », puis « h ») ; les lettres translittérées initiales et différenciées des équivalents latins par un point inférieur, telles ḍ ḥ ṣ ṭ, sont intercalées dans les référencements de termes correspondants aux lettres latines, telles d h s t.
Pour conclure, il est peut-être utile dřexpliquer pourquoi nous avons choisi, en définitive, cette translittération : la raison première pour cette adaptation est quřil nous semble que les deux translittérations principales40, dans leur fonction première
de reproduction, en lettres latines (ou latines modifiées), de la graphie de la langue dřorigine, sont devenues obsolètes ; en effet, dans lřétat actuel de la technologie, ce qui paraissait être un luxe devient indispensable41 : les traitements de texte courants
de nos jours intègrent la possibilité de rentrer un texte dans la langue dřorigine, notamment pour le logiciel « Word » sous MS DOS (ou Windows)42. La
translittération « classique » devient de ce fait superflue puisque le philologue, ou tout simplement lřarabisant lecteur, est capable de lire le texte dans la graphie originale. Cette « translittération », modifiée, garde cependant son utilité, notamment pour fournir au non arabisant une sorte de guide de prononciation le plus proche possible de la graphie initiale des termes arabes, et de donner la possibilité à lřarabisant non lecteur (de lřarabe, comme un grand nombre dřArabes émigrés en Occident) la possibilité de reconnaître à lřoreille (et autant que possible) les mots dřorigine. Nous avons par conséquent adopté, pour les non-lecteurs, la translittération modifiée utilisée dans cet ouvrage et inclus, pour les autres, le texte original en arabe43.
40 Celles du New Grove et de lřEncyclopædia of Islam.
41 Jřai compulsé récemment un ouvrage de philologie édité (en 2008) au Liban par un chercheur
(français) du CNRS, dont aucune citation nřétait reproduite dans la langue dřorigine (en arabe) : je nřai malheureusement pas gardé les références de ce livre, mřétant empressé de le remettre à sa place en rayon de librairie. La question qui se pose est : comment rédiger un livre destiné à des spécialistes de la langue, et ce sans y inclure les textes dřorigine ? Ce qui pourrait se comprendre pour des citations occasionnelles peut difficilement être accepté dans le cadre dřune discussion philologique sur les particularités de la langue (et pas une comparaison entre plusieurs langues, pour lesquelles une translittération commune pourrait être utile à des fins de comparaison).
42 Et que la moindre des choses, avec ces avancées technologiques (et pour un philologue), est dřinclure le
texte original étudié.
43 Comme contribution supplémentaire à une discussion qui pourrait être constructive sur lřutilité de cette
translittération, nous incluons ici quelques questionnements et réflexions supplémentaires qui ont contribué à son adoption dans notre ouvrage :
Une translittération est un transcodage : à quoi sert-elle de nos jours ?
Il est vrai quřon peut utiliser, pour reproduire la prononciation dřun mot, lřalphabet phonétique,
mais cet alphabet date, est peu courant, et de moins en moins de chercheurs le connaissent ; il est plus simple actuellement de reproduire le son tel quel (enregistrement), sachant cependant que
Nous préconisons, en conclusion et pour des recherches dans lesquelles la langue dřorigine joue un rôle important, dřinclure le texte original avec la traduction adéquate44 et de fournir des translittérations phonétiques pour les termes clef, à
double fin de comparaison et de simplification pour le lecteur de lřaccès à la langue. Cřest ce que nous essayons de faire, bien quřencore imparfaitement, dans cet ouvrage : ceci dit, et même (et surtout) dans le cadre de cette translittération adaptée pour répondre à des besoins différents de ceux des translittérations usuelles, les choix effectués prêteront certainement à critiques : nous les accueillerons avec joie, dans lřespoir quřelles seront suffisamment constructives pour contribuer à lřamélioration de cette première ébauche.
lřauditeur bénéficiera dřune seule prononciation (celle de la personne qui enregistre), mais (généralement) correcte. En lřabsence dřenregistrements, et comme le contexte de notre recherche ne justifie pas des inclusions audio Ŕ ou vidéo, nous avons adopté cette solution médiane : utiliser la translittération comme vecteur de reconnaissance des mots pour les non spécialistes, tout en essayant de faciliter la prononciation des mots pour ceux qui le désirent.
Par ailleurs, une translittération phonétique peut être importante à cause de la similitude entre
certains mots dans des régions parfois très éloignées, et qui ne ressort que par leurs prononciations (lřarabe arḍ et lřallemand Erde par exemple, qui tous les deux veulent dire « terre » ; un autre exemple serait le terme arabe « jamʿ », utilisé pour la formation de lřéchelle par assemblage de tétracordes et de tons Ŕ disjonctifs ou conjonctifs Ŕ à comparer avec « gamme » ; en égyptien dialectal, le mot « jamʿ » se prononce dřailleurs « gamʿ ») ; dans ce genre de cas, la translittération phonétique permet de faire des rapprochements que la reproduction à lřidentique des textes dřorigine ne permettrait pas dřeffectuer aussi simplement.
44 Sans tomber, par conséquent, dans lřexcès inverse de la translittération consistant, chez certains
hellénisants, par exemple dans [Bélis, 1986] (mais pas dans [Bélis, 1999]), à nřinclure que les textes dřorigine sans traduction, ce qui réduit la discussion aux spécialistes, et ôte aux non spécialistes la possibilité de se faire une opinion, ou encore de pouvoir utiliser les textes pour une étude comparée.
C
OMMENT LIRE CE LIVRE
Le format particulier de ce livre est dû au fait quřil est conçu pour être le premier tome dřun ouvrage en deux parties, réparties de la manière suivante :
La première partie45 est consacrée aux théories de lřéchelle chez les Arabes
dans leur relation avec la pratique musicale telle que rapportée dans les écrits anciens ou modernes46, et recouvre toute la période historique, incluant
notamment les théories turques, byzantines et persanes de la musique au long des siècles. Ces dernières théories sont revues surtout en fonction de leur relation avec celles des musiques arabes, quřelles ont, à certains stades historiques, personnifiées ou influencées, et vice versa.
La deuxième partie47 consiste en une revue du concept de maqām, dans la
même perspective systématique et diachronique que la première partie, ainsi que de lřévolution du vocabulaire inhérent à lřanalyse et à la description des
maqāmāt48 tout au long de la longue histoire de la musique arabe ; cette
deuxième partie inclura également une description des différentes formes, dans le temps et dans lřespace, que peut prendre chaque maqām, ainsi que les modalités de son exécution.
La première partie a nécessité la rédaction de deux tomes, dont le présent Tome 1 est consacré aux théories anciennes jusquřau XIIIe siècle (sans Urmawī et le
début de la période systématiste) ; ce premier tome se divise en quatre parties principales :
Les « Préalables », ou corpus de connaissances nécessaires à la compréhension
du corps de texte et des appendices ; ces préalables sont, à leur tour, divisés en trois thèmes complémentaires qui sont :
Une revue de mathématiques et acoustique appliquées aux intervalles, en
trois parties :
(1) Une revue des opérations mathématiques sur les longueurs de
cordes (et sur les intervalles en général), suivie (2) dřun exposé synthétique sur les mathématiques pythagoriciennes et (3) dřune revue des différentes techniques de combinatoire intervallique.
Une introduction à la théorie des genres chez les Grecs anciens,
notamment en ce qui concerne son influence sur les théories correspondantes chez les anciens Arabes.
45 En deux tomes, comme nous lřexplicitons infra.
46 Et à travers les manifestations enregistrées ou vivantes de cette musique pour les périodes moderne et
contemporaine.
47 En deux tomes également.
Un exposé sur les systèmes principaux de division de la touche du ʿūd chez
les Arabes49.
Le corps de texte qui comprend les analyses des théories en tant que telles, et
qui comporte deux chapitres :
Le premier chapitre traite de la période des « Précurseurs », ou les
pionniers des théories de la musique chez les Arabes, dont les écrits se sont parfois limités à une reproduction des connaissances de base sur les théories musicales grecques anciennes parvenues en leurs mains.
Le deuxième chapitre expose et analyse les écrits de ce que nous avons
appelé lřÂge dřOr des théories arabes, et est plus particulièrement centré sur le grand traité de Fārābī sur la musique.
Les Appendices, qui constituent des recherches à part, complémentaires de
celles exposées en corps de texte et sur lesquelles sřappuient certaines des conclusions (et des raisonnements) des analyses et recherches effectuées dans ce corps de texte. Ces appendices sont au nombre de deux :
Le premier est consacré au ʿūd et au ṭunbūr et à leurs imbrications avec les
théories et les pratiques musicales ; plusieurs thématiques, concernant notamment les origines, le frettage et, plus particulièrement pour le
ṭunbūr, les échelles utilisées sur lřinstrument, y sont abordées.
Le deuxième est consacré à une revue des théories grecques des genres et
de lřéchelle musicale, et centré sur les pans qui nous ont paru les plus à même dřéclaircir les théories arabes, pour la période revue et lřaspect théorique abordé50.
Les Conclusions du Tome 1 reprennent les éléments exposés dans les
différentes parties de ce tome et proposent une première lecture de lřévolution des théories et de lřincidence des pratiques sur ces premières, telles que perçues à travers les écrits anciens. Elles comportent également une partie prospective dans laquelle nous donnons une première idée des résultats des recherches exposées dans le Tome 2 de lřouvrage.
49 Ces préalables peuvent être considérés comme des documents annexes, mais les informations quřils
contiennent sont indispensables, pour un apprenti musicologue, à la compréhension du texte ; nous avons préféré par conséquent, contrairement à lřusage habituel, les grouper en un ensemble cohérent, dont le but principal est de fournir au lecteur une référence rapide et disponible immédiatement, et précédant le corps principal de texte. Nous avons ainsi inclus, dans la partie consacrée aux « Mathématiques pythagoriciennes », les descriptions qui nous ont semblé les plus à même de faciliter la compréhension au lecteur, sans prétendre faire acte dřoriginalité dans cet exposé, à part quelques additions et commentaires destinés à rectifier ou améliorer certains raisonnements ou à les replacer dans la perspective de ce livre.
50 La démarche adoptée pour cet appendice est la même que celle pour les « Mathématiques
Enfin, les Annexes, qui incluent (I) des reproductions ou interprétations de
manuscrits51, (II) un additif concernant des exemples de difficultés courantes
dans lřinterprétation des textes anciens, (III) lřindex, (IV) la bibliographie, (V) les figures et les tableaux trop volumineux pour figurer dans le texte, et (VI) la table des matières, se trouvent logiquement regroupées en fin dřouvrage. Comment lire ce livre ?
Les musicologues confirmés ne jugeront probablement pas nécessaire de lire les « Préalables » et passeront directement au corps de texte, encore que certains aspects spécialisés puissent éventuellement contenir des points propres à éclaircir les idées, ou à servir dřaide-mémoire. Le traitement, en particulier, de la combinatoire intervallique au sein des (mises en) genres y figure, inspiré des résultats de mes recherches par application de la systématique modale, que ce soit pour la thèse soutenue en 2003 ou pour les recherches ultérieures, dont celles exposées dans ce Tome 1.
Les Appendices contiennent également un certain nombre de résultats originaux issus de mes recherches dans le domaine, notamment en ce qui concerne le ʿūd et le
ṭunbūr et la question clef du « frettage » du ʿūd, mais aussi en ce qui concerne
certains points de théorie chez les Grecs anciens. Lřappendice « grec », tout particulièrement, a été rédigé pour fournir au lecteur un accès rapide aux théories du même nom, extrêmement importantes pour les deux premières périodes abordées en corps de texte, mais aussi en introduction aux théories systématistes (dans le Tome 2), notamment avec la division du canon.
Les Annexes contiennent, classiquement, les parties complémentaires de lřouvrage, nécessaires à lřinformation du lecteur et à la vérification des sources ; quant au corps de texte, bien évidemment, il est le cœur de la réflexion menée et concentre les résultats directs des recherches menées pendant ces dernières années.
Signalons enfin, pour clore les explications concernant ce tome, que les références à un texte se font entre parenthèses carrées, avec le nom de lřauteur et lřannée de parution, ainsi que le(s) numéro(s) de page(s) si nécessaire(s), par exemple [Jurjānī, 1938, p. 7], ou « Jurjānī [1938, p. 7] » dans le cas où lřauteur est nommé explicitement en cours de phrase.
51 Peut-être faut-il préciser ici que le terme « manuscrit » ne se réfère pas nécessairement, ou toujours, à
un écrit original, mais parfois à des copies tardives, ou encore à des extraits repris par des auteurs postérieurs à celui (ou ceux) cité(s) : le contexte de la citation est explicité dans le texte ou les notes, et permet au lecteur de préciser à quel type de transmission de texte nous avons affaire. Si nous considérons par exemple les écrits de Platon (et le lecteur se rendra compte que cet auteur grec, ainsi que plusieurs autres, sont primordiaux pour la compréhension des auteurs arabes anciens), « les deux manuscrits les
plus anciens remontent à la fin du IXe siècle après J.-C ou au début du Xe siècle. […] Il est à noter que le
terme Ŗéditionŗ nřavait pas dans le monde gréco-romain le sens quřil prendra après lřapparition de
lřimprimerie au XVe siècle. Avant lřimprimerie, éditer un texte consistait à mettre au point un exemplaire
Concernant enfin la suite du Tome 1, soit le Tome 2 de lřouvrage consacré à la période historique sřétendant du XIIIe siècle (Avènement systématiste) à nos jours
(Théories contemporaines), elle sera structurée de la manière suivante :
Le corps de texte, divisé en cinq chapitres et une synthèse générale, avec :
Un « premier » (troisième) chapitre consacré aux théories systématistes de
lřéchelle et leurs incidences et interactions avec la pratique musicale.
Un deuxième chapitre consacré principalement aux théories post et proto
systématistes, pour la période sřétendant du XIVe au XVIIIe siècle.
Un troisième chapitre qui traite des théories modernes de lřéchelle, avec
lřintrusion des divisions de lřoctave en quarts de ton (Mashāqa), le résultat des reformulations des théories byzantines (XIXe siècle) à travers les
réformes de Chrysanthos et de la Commission de Constantinople (1881) ainsi que, de manière concomitante, les réflexions des théoriciens turcs sur lřéchelle et ses divisions, résultant en le partage de lřoctave en 24 parties inégales.
Le quatrième chapitre est consacré aux théories contemporaines, et scrute
les différentes tentatives de mener le processus enclenché au Congrès de musique arabe de 1932 à terme (soit en consacrant la division de lřoctave en 24 quarts de ton égaux à lřoctave), ou encore le souci de certains théoriciens (plus proches de la tradition) de recréer des échelles en divisions inégales de lřoctave.
Le cinquième chapitre traite, comme première approche et en se basant
sur les avancées de la Systématique modale ces dernières années, de la perception et de la mesure des intervalles réellement utilisés dans les musiques arabes (ou autres) contemporaines, et de lřadéquation des théories exposées et revues quant à la description, ou quant à la prescription, de ces pratiques musicales.
La synthèse du premier volume (Tomes 1 et 2) vient, enfin, livrer le fond
de notre réflexion sur la question de lřéchelle.
Plusieurs appendices seront nécessaires pour expliquer les évolutions du
concept dřéchelle pendant cette période dont :
La suite de lřappendice consacré aux théories grecques, et exposant
certains aspects complémentaires de ces théories pouvant contribuer à éclairer lřapproche systématiste des (mises en) genres.
Un appendice consacré aux théories byzantines de la musique. Un appendice consacré aux théories turques de lřéchelle.
Un appendice consacré aux théories persanes (et iraniennes
contemporaines) de lřéchelle.
Un appendice consacré aux descriptions occidentales de lřéchelle musicale
arabo-turco-persane.
S
OMMAIRE
Préface ... vii
Prolégomènes ... xi
Avertissement ... xiii Remarques sur la translittération ... xvii Comment lire ce livre ... xxv Sommaire ... xxix
Introduction générale ... 3
PRÉALABLES
... 9 -A- Mathématique et musicologie ... 13A.1. Opérations arithmétiques sur les intervalles et calcul de longueurs de cordes ... 13 A.2. Un aperçu sur les Mathématiques pythagoriciennes... 39 A.3. Combinatoire intervallique ... 70 Conclusion sur les opérations mathématiques sur les intervalles ... 82
-B- Brève introduction à la théorie des genres (et des intervalles) chez les Arabes anciens – Influences ... 83
Introduction ... 83 I. Influences ... 85 II. Prémices ... 88 III. Exhaustivité ... 89 IV. Renouveau ... 90
-C- Systèmes utilisés par les anciens Arabes pour diviser la corde sur la touche du ʿūd ... 93
Le partage « diatonique » pythagoricien ... 94 Le partage aliquote en 12 ou 24 segments de corde ... 98 Le partage « harmonique » en rapports superpartiels ... 100 Le partage « pythagoricien-aliquote » ... 101