• Aucun résultat trouvé

Utilisation des services de santé chez les aînés ayant un trouble cognitif sans démence et influence de la dépression et de l'anxiété : une étude longitudinale

N/A
N/A
Protected

Academic year: 2021

Partager "Utilisation des services de santé chez les aînés ayant un trouble cognitif sans démence et influence de la dépression et de l'anxiété : une étude longitudinale"

Copied!
127
0
0

Texte intégral

(1)

Utilisation des services de santé chez les aînés

ayant un trouble cognitif sans démence et influence

de la dépression et de l’anxiété: une étude

longitudinale

Mémoire doctoral

Alexandre St-Hilaire

Doctorat en psychologie

Docteur en psychologie (D.Psy.)

Québec, Canada

© Alexandre St-Hilaire, 2016

(2)

Utilisation des services de santé chez les aînés

ayant un trouble cognitif sans démence et influence

de la dépression et de l’anxiété: une étude

longitudinale

Mémoire doctoral

Alexandre St-Hilaire

Sous la direction de :

Carol Hudon, directeur de recherche

Olivier Potvin, codirecteur de recherche

(3)

RÉSUMÉ DU MÉMOIRE DOCTORAL

Objectifs: Peu de données objectives et représentatives au niveau national rapportent l’influence d’un trouble cognitif sans démence (cognitive impairment no

dementia; CIND) sur l’utilisation des services de santé. L’objectif principal de l’étude

était de comparer sur une période de trois ans le patron d’utilisation des services de santé des aînés ayant un CIND prévalent ou incident à celui des aînés sans CIND. Un deuxième objectif était d’examiner l’effet modérateur de la dépression et de l’anxiété sur l’utilisation des services. Méthode: Des données ont été recueillies auprès d’un échantillon de 2265 personnes âgées vivant dans la communauté de la province de Québec. Le CIND était apparié aux données médicales (utilisation des services de santé) de la Régie d’assurance maladie. Des régressions logistiques multinomiales ajustées pour l’influence de plusieurs variables sociodémographiques, de santé et du réseau social ont été réalisées pour chaque service de santé. L’effet de l’interaction entre le CIND et la dépression/anxiété était également examiné. Résultats principaux: Le CIND prévalent était associé à un plus grand nombre de jours de consommation d’un anxiolytique/sédatif/hypnotique. Le CIND incident menait à de plus longues hospitalisations. La dépression augmentait la probabilité de consulter un gériatre, un psychiatre ou un neurologue, de même que de se rendre à l’urgence. Toutefois, la dépression diminuait la probabilité de consulter un médecin généraliste. La présence de dépression ou d’anxiété, couplée à un CIND incident, n’augmentait pas la probabilité de consommer un antidépresseur, alors que la présence de CIND sans ces conditions psychiatriques augmentait cette probabilité. Discussion: En comparaison aux personnes âgées ayant un fonctionnement cognitif normal, les aînés ayant un CIND ont un patron d’utilisation des services de santé distinct. L’évaluation de la cognition et des conditions psychiatriques à des moments clés pourrait favoriser une utilisation plus optimale de certains services de santé.

(4)

ABSTRACT

Objectives: Little objective and nationally representative data are available concerning the influence of cognitive impairment no dementia (CIND) on utilization of healthcare services. The main objective was to compare the use of healthcare services over three years, between elders with current or incident CIND and those without CIND. A second objective was to evaluate the moderating effect of depression and anxiety on utilization of healthcare services. Methods: Cross-sectional and longitudinal data from a population-based survey of 2265 older adults living in Quebec were used. CIND was linked with medical records from public health insurance plan. Multinomial logistic regressions adjusted for relevant socio-demographic, social network and health-related confounders were conducted for each service. Interaction between CIND and depression/anxiety was also examined. Main results: Current CIND was a predictor of longer anxiolytic/sedative/hypnotic medication use. Incident CIND led to longer hospital stay. Depression raised the likelihood of frequenting geriatricians, psychiatrists or neurologists and emergency department, but lessened the likelihood of visiting general practitioners. The addition of the psychiatric conditions to the incident CIND did not increase the likelihood of consuming antidepressants, while the incident CIND cases without psychiatric conditions increased this likelihood. Discussion: Compared to older adults without CIND, older adults with CIND have a distinct utilization of healthcare services. Evaluation of cognition and psychiatric conditions at key moments could allow a more efficient use of health resources.

(5)

TABLE DES MATIÈRES

RÉSUMÉ DU MÉMOIRE DOCTORAL ... iii

ABSTRACT ... iv

TABLE DES MATIÈRES ... v

LISTE DES FIGURES ET DES TABLEAUX ... vii

LISTE DES ABRÉVIATIONS ... viii

REMERCIEMENTS ... ix

AVANT-PROPOS ... xi

CHAPITRE I: INTRODUCTION GÉNÉRALE ... 1

Épidémiologie et caractéristiques cliniques des troubles cognitifs sans démence ... 1

Utilisation des services de santé et troubles cognitifs sans démence ... 5

Études rétrospectives sur l’utilisation des services de santé... 6

Études prospectives sur l’utilisation des services professionnels ... 7

Études prospectives sur l’utilisation de psychotropes ... 9

Sommaire ... 10

Utilisation des services de santé et dépression chez les aînés ... 11

Études rétrospectives sur les effets de la dépression et des troubles cognitifs sans démence sur l’utilisation des services ... 14

Études prospectives sur les effets de la dépression et des troubles cognitifs sans démence sur l’utilisation des services ... 15

Sommaire ... 18

Utilisation des services de santé et anxiété chez les aînés ... 18

Critiques, limites et particularités des études antérieures sur l’utilisation des services ... 20

Différences entre les systèmes de santé ... 20

Validité des données et représentativité des échantillons ... 21

Opérationnalisation des variables et modérateurs ... 21

Contrôle pour l’effet de variables confondantes ... 22

Distinction entre troubles cognitifs sans démence prévalents et incidents ... 23

Objectifs du mémoire doctoral ... 23

CHAPITRE II: ARTICLE... 25

Résumé ... 26

Abstract ... 27

Introduction ... 28

Methods ... 31

Study design and setting ... 31

Participants ... 32

(6)

Statistical methods ... 36

Results ... 38

Descriptive data ... 38

Visits to a general practitioner and to a geriatrician, a psychiatrist or a neurologist ... 38

Emergency department visits and hospital stays ... 39

Dosing days of an anxiolytic, sedative or hypnotic (ASH) ... 39

Dosing days of antidepressants ... 40

Interaction between CIND and anxiety/depression ... 40

Discussion ... 41

Visits to general practitioners and to medical specialists ... 41

Hospitalizations and emergency department visits ... 44

Psychotropic drugs ... 45

Strengths and limits of the study ... 46

Disclosure statement ... 48

Funding ... 48

Figures and Tables ... 49

References ... 56

CHAPITRE III: DISCUSSION GÉNÉRALE ... 65

Résumé des résultats ... 65

Détection des déficits cognitifs et des troubles psychiatriques ... 68

Détection par les médecins ... 68

Détection à l’urgence ... 74

Détection à l’hôpital ... 76

Accès à un médecin de famille ... 77

Des soins de santé intégrés ... 79

Psychotropes ... 82

Conclusion ... 85

ANNEXE ... 87

(7)

LISTE DES FIGURES ET DES TABLEAUX

Figure 1. Research design. ... 49 Figure 2. Flow chart of the study enrolment. ... 50 Table 1. Characteristics of participants with and without

cognitive impairment no dementia (CIND) at baseline. ... 51 Table 2. Predictors of the number of visits to a general practitioner and to a geriatrician, a psychiatrist or a neurologist... 52 Table 3. Predictors of the number of emergency department visits. ... 53 Table 4. Predictors of hospital stays. ... 54 Table 5. Predictors of the number of dosing days of an anxiolytic/sedative/hypnotic and an antidepressant. ... 55 Tableau 6. Nombre et proportion de participants avec et sans CIND qui utilisent les services de santé de l’étude (≥ 1 visite ou jour d’utilisation). ... 87 Tableau 7. Nombre et proportion de participants avec et sans dépression ou anxiété qui utilisent les services de santé de l’étude (≥ 1 visite ou jour d’utilisation). ... 88 Tableau 8 (Supplemental Table 2). Predictors of the number of visits to a general practitioner and to a geriatrician, a psychiatrist or a neurologist. ... 89 Tableau 9 (Supplemental Table 3). Predictors of the number of emergency

department visits. ... 91 Tableau 10 (Supplemental Table 4). Predictors of hospital stays. ... 92 Tableau 11 (Supplemental Table 5). Predictors of the number of dosing days of an anxiolytic/sedative/hypnotic and an antidepressant. ... 93

(8)

LISTE DES ABRÉVIATIONS

AChEI: acetylcholinesterase inhibitors / inhibiteurs de la cholinestérase ASH: anxiolytic/sedative/hypnotic / anxiolytiques/sédatifs/hypnotiques CI: confidence interval / intervalle de confiance

CIND: cognitive impairment no dementia / trouble cognitif sans démence CSSS: centre de santé et de services sociaux

DEIS: depressive episode with insufficient symptoms / dépression sous-clinique DSM: Diagnostic and Statistical Manual / manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux

ESA: study on elders’ health / enquête sur la santé des aînés

LASA: Longitudinal Amsterdam Study of Aging / étude longitudinale d’Amsterdam sur le vieillissement

MCI / TCL: mild cognitive impairment / trouble cognitif léger MDE: major depressive episode / épisode dépressif majeur

MMSE: Mini-Mental State Examination / examen mental de Folstein OR: odds ratio / rapport de cote

RAMQ: Régie de l’assurance maladie du Québec SNC: central nervous system / système nerveux central T1: initial evaluation / évaluation initiale

T2: follow-up evaluation / évaluation au deuxième temps de mesure TAG: generalized anxiety disorder / trouble d’anxiété généralisée UAD: unspecified anxiety disorder / trouble anxieux non spécifié

(9)

REMERCIEMENTS

Je veux tout d’abord remercier infiniment mon directeur de recherche, Carol Hudon, alors que je débarquais comme un cheveu sur la soupe, de m’avoir intégré dans son laboratoire de recherche. J’ai pu y côtoyer une équipe dynamique composée d’Isabelle, Brandy, Sarah, Mélissa, Marie-Pier, Eddy, Nélia, et Mélanie. J’ai appris à côtoyer un directeur doté d’une curiosité intellectuelle contagieuse, disponible pour ses étudiants et dégageant une présence chaleureuse. Merci pour les expériences de travail enrichissantes à travers les différents contrats que tu m’as offerts. Un énorme merci également à mon co-directeur, Olivier Potvin, qui a démontré une patience indéfectible face à mes multiples interrogations et dont la justesse des commentaires ont permis de peaufiner le présent mémoire doctoral. Merci à tous les deux pour la pertinence, la qualité et la promptitude de vos réponses qui m’ont permis d’approfondir mes réflexions. J’ai été heureux que vous m’accompagniez dans cette course contre la montre.

J’aimerais également remercier Michel Préville de m’avoir permis de travailler à partir de sa banque de données, ainsi que Philippe Landreville et Pasquale Roberge, d’avoir accepté de siéger sur mon comité d’évaluation.

Un merci spécial à Christine Bertrand et Isabelle Rioux, superviseures de clinique, non seulement pour m’avoir mis en contact avec celui qui deviendrait mon directeur de mémoire, mais surtout pour avoir toujours cru en mon potentiel de clinicien. Merci d’avoir eu l’intérêt et la gentillesse de renouveler une expérience de supervision dans le cadre de mon internat. Je manque de mots pour vous dire à quel point votre soutien a été apprécié! Merci également à Christianne Bolduc, Karina Duguay-Gagné, Marc-André Lamontagne et Andrée-Anne Lefèbvre, qui m’avez offert une supervision clinique à un moment ou un autre de mon parcours doctoral. Vous avez été plus que généreux de votre temps et vous avez tous forgé à votre manière mon identité professionnelle en tant que futur neuropsychologue.

Je ne pourrais pas non plus passer sous silence les encouragements et la qualité d’écoute de Marie-Claude Blais, mon employeur au Centre de recherche

(10)

clinique et évaluative en oncologie, notamment lors des moments plus difficiles de mon parcours doctoral. Merci pour les contrats de travail m’ayant permis de développer mes aptitudes à la recherche et de m’avoir fourni un environnement de travail m’ayant permis de progresser rapidement et en toute quiétude dans mon mémoire doctoral.

Je dois évidemment souligner l’appui indispensable de ma famille tout au long de ces longues années de parcours universitaire, appui fourni en grande partie par mes parents et ma sœur. Vous m’avez encouragé dans toutes les étapes importantes de mon parcours qui vous a sûrement semblé interminable. Vous avez supporté mes moments de joie, de découragement et d’autres plus stressants, ce qui n’a pas toujours dû être de tout repos. Je vous suis reconnaissant pour tous ces petits gestes qui ont simplifié mon quotidien. Merci à mes grands-parents, d’avoir toujours cru que je parviendrais au bout de mes rêves. Merci à ma sœur Andréanne d’avoir fait preuve d’une patience à toute épreuve lorsque je lui ai fait part à maintes reprises de mes remises en question professionnelle et d’avoir été mon public lors de mes pratiques de séminaires. Merci à Julien, l’un de mes principaux confidents. Notre longue amitié m’a permis de faire preuve de transparence avec toi. Merci d’avoir été présent tout ce temps et pour tes judicieux conseils. Merci à Laurence, Léa et Tijana, mes collègues neuropsy de ces dernières années, pour votre zénitude plus développée que la mienne. Vous m’avez aidé à relativiser les situations qui me semblaient être la fin du monde et à décompresser un peu.

Merci à vous tous qui avez fait la différence, car vous m’avez tous aidé d’une façon ou d’une autre à atteindre l’issue de ce long parcours!

(11)

AVANT-PROPOS

Alexandre St-Hilaire est l’auteur principal des trois chapitres composant ce mémoire doctoral. De plus, il a contribué à l'énoncé de la problématique et à l'établissement des questions de recherche, a effectué la recension des écrits, l’ensemble des analyses statistiques et a interprété les résultats issus de ces analyses.

Carol Hudon, Ph.D., directeur du mémoire doctoral, professeur à l’École de psychologie de l’Université Laval et chercheur au Centre de recherche de l'Institut universitaire en santé mentale de Québec, a supervisé l’ensemble de la démarche scientifique et a révisé le manuscrit. Olivier Potvin, Ph.D., co-directeur du mémoire doctoral, a également participé à la supervision, au choix des analyses statistiques, en plus de réviser le manuscrit. Michel Préville, Ph.D., était le chercheur principal de l'Enquête sur la Santé des Aînés (ESA). Il a déterminé le devis de l’étude, a choisi les outils d’évaluation, a travaillé à l’approbation éthique du projet et a révisé l’article inclus dans ce mémoire. Les résultats de la présente étude découlent de la banque de données ESA.

Le présent mémoire est composé d’une introduction générale critique (chapitre I) recensant les écrits publiés quant à l’utilisation des services de santé chez les aînés ayant un TCL/CIND, une dépression ou de l’anxiété. Le chapitre II constitue un article empirique. Messieurs St-Hilaire, Hudon, Préville et Potvin ont fourni une contribution intellectuelle d’une ampleur justifiant l’ordre octroyé à chacun. Tous ont également donné leur consentement pour l’inclusion de l’article dans ce mémoire doctoral. Cet article a été publié dans une revue scientifique avec comité de lecture, soit Aging & Mental Health, et est accessible en ligne depuis le 21 mars 2016. Avec l’autorisation de l’éditeur, cet article est inclus dans le présent mémoire. Ce mémoire se clos avec le chapitre III qui prend la forme d’une discussion générale permettant une réflexion plus large sur la détection et la prise en charge du CIND, de la dépression et de l’anxiété chez les aînés dans les différents points de santé du Québec.

(12)
(13)

CHAPITRE I: INTRODUCTION GÉNÉRALE

Épidémiologie et caractéristiques cliniques des troubles cognitifs sans

démence

Le Canada compte parmi les pays dont la proportion de personnes âgées croît le plus rapidement. D’ici 2036, la proportion de Canadiens âgés de 65 ans et plus sera de 25% (Sheets & Gallagher, 2013). Avec l’augmentation du nombre d’aînés vient également un accroissement du nombre de problématiques de santé liées à l’avancement en âge telles que le trouble cognitif léger (TCL), une condition potentiellement prodromique de la démence (Lopez, 2013; Petersen et al., 1999). Il est prévu que 1,4 million de Canadiens seront atteints de démence d’ici 2031, dont la plus courante est la maladie d’Alzheimer (Société Alzheimer du Québec, 2014). Il n'y a pas actuellement de traitement permettant d'arrêter ou de freiner le processus neurodégénératif (Karakaya, Fusser, Schroder, & Pantel, 2013; Popp & Arlt, 2011). La majorité des personnes souffrant de TCL finissent par vivre une détérioration de leurs capacités cognitives au long cours ou demeurent à un niveau sous-optimal sans présenter de déclin (Petersen et al., 2001; Roberts et al., 2012). Bien que certaines personnes connaissent un retour à la normal de leurs fonctions cognitives, une récente étude réalisée auprès de 534 aînés âgés de 70 ans et plus indique que 65% d’entre elles développent à nouveau un TCL ou une démence après un suivi de cinq ans (Roberts et al., 2014). Une autre étude rapporte des résultats similaires (Koepsell & Monsell, 2012).

Différentes terminologies et définitions ont été utilisées pour décrire les formes légères de déclin cognitif survenant à un âge avancé. Le concept de TCL est celui le plus répandu et a longtemps reposé sur les critères diagnostiques établis par Petersen et al. (2001) et révisés en 2004 (Petersen, 2004), c’est-à-dire: a) une plainte cognitive formulée par l’aîné et de préférence corroborée par un proche; b) des déficits cognitifs objectivés par des tests dans au moins un domaine cognitif (performance inférieure à -1,5 écart-type par rapport aux personnes de même âge et de même niveau de scolarité); c) une préservation du fonctionnement cognitif général; d) une préservation générale de l’autonomie fonctionnelle (capacité à réaliser

(14)

sans aide la plupart des activités de la vie quotidienne); et e) une absence de démence. Petersen (2004) fait la distinction entre un TCL de type amnésique (mémoire épisodique déficitaire) ou non amnésique, chacun pouvant être à domaine simple (une seule fonction cognitive déficitaire) ou multiple (plusieurs fonctions cognitives déficitaires). Les critères diagnostiques pour un TCL de type pré-Alzheimer (c.-à-d. TCL amnésique selon Petersen) ont été revus par Albert et al. (2011) afin de détailler davantage les critères ci-mentionnés et d’inclure l’analyse optionnelle des biomarqueurs. Les critères d’Albert et al. (2011) sont légèrement plus inclusifs que ceux de Petersen (2004). Ainsi, la présence d’une plainte cognitive peut être rapportée non seulement par l’aîné ou un proche, mais aussi constatée par un clinicien. De plus, le déficit cognitif est objectivé en présence d’une performance cognitive se situant en deçà de un écart-type par rapport aux données normatives pour un groupe d’individus ayant un âge et un niveau de scolarité comparables. Le déclin cognitif ne doit pas découler d’une cause médicale autre que neurodégénérative. Les auteurs de la récente mouture du manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux (DSM-5; APA, 2013) ont également introduit un concept s'apparentant à celui de TCL, soit le trouble neurocognitif mineur (mild neurocognitive disorder; traduction libre). Ce dernier reprend l’idée que la constatation d’un déficit cognitif peut provenir soit du patient, d’un proche ou du clinicien. Le déclin cognitif doit être modeste, tel que documenté par une évaluation cognitive standardisée. Les déficits cognitifs ne doivent pas interférer avec la capacité à accomplir de manière autonome les activités de la vie quotidienne, mais une plus grande difficulté à les accomplir ou le recours à des stratégies de compensation peuvent être présentes. Les déficits ne doivent pas survenir exclusivement dans le contexte d’un délirium et ne sont pas mieux expliqués par un trouble de santé mentale. Puisqu’une seule étude (Lopez-Anton et al., 2014) s’est attardée au trouble neurocognitif mineur, ce concept ne sera pas davantage abordé dans le présent document.

Les diagnostics de TCL amnésique et pré-Alzheimer tels que définis par Petersen (2004) et Albert et al. (2011) ont pour but d’identifier précocement la présence d’un processus neurodégénératif irréversible (Fisk, Merry, & Rockwood,

(15)

no dementia; CIND), introduit via l’Étude canadienne sur la santé et le vieillissement

(Graham et al., 1997), s’avère plus inclusif que celui de TCL puisqu’il ne nécessite pas une préservation de la cognition générale et englobe toutes causes possibles de déficits cognitifs, que ces derniers soient évolutifs ou transitoires (p.ex.: neurodégénératifs, psychiatriques, délirium, troubles cognitifs induits par un traumatisme crânien ou une substance (Graham et al., 1997; Tuokko et al., 2003; Tuokko, Frerichs, & Kristjansson, 2001; Ward, Arrighi, Michels, & Cedarbaum, 2012)). Malgré cette hétérogénéité, des études n’ont rapporté aucune différence significative entre les taux d’évolution vers la démence des personnes rencontrant les critères du CIND (Larrieu et al., 2002; Tuokko et al., 2001) ou du TCL (Fisk et al., 2003). Le concept de CIND est intéressant dans le cadre d’une étude épidémiologique afin de tirer des conclusions représentatives de la population desservie en cabinet médical plutôt que sur un groupe plus restreint d’individus. En effet, en cabinet médical, l’évaluation des fonctions cognitives se limite habituellement à un dépistage du fonctionnement cognitif général plutôt qu’à une évaluation neuropsychologique, permettant seulement de statuer sur la présence de CIND.

Une grande variabilité entre les études de prévalence et d’incidence du CIND et du TCL a été retrouvée en raison des définitions différentes pour caractériser ces affections, mais aussi en raison de différents critères d’inclusion: échantillon en population générale vs en milieu clinique (TCL) (Farias, Mungas, Reed, Harvey, & DeCarli, 2009), proportion d’hommes et de femmes (TCL) (Artero et al., 2008) et l’âge des participants (TCL et CIND) (Ward et al., 2012). Dans une revue systématique d’études menées dans la population, la prévalence varie de 3% à 42% pour le TCL et de 5% à 36% pour le CIND (Ward et al., 2012). Le taux annuel de nouveaux cas s’étend de 2,2% à 10,5% pour le TCL (Brodaty et al., 2013; Luck, Luppa, Briel, & Riedel-Heller, 2010; Roberts et al., 2012; Ward et al., 2012) et est de 6% pour le CIND (Plassman et al., 2011).

Outre les symptômes cognitifs, tant le TCL que le CIND sont associés à plusieurs symptômes neuropsychiatriques. Les symptômes dépressifs et anxieux comptent parmi les symptômes les plus prévalents chez les aînés avec TCL/CIND

(16)

vivant en communauté (van der Linde, Stephan, Savva, Dening, & Brayne, 2012a). Chez les personnes avec TCL/CIND, l’incidence annuelle de symptômes dépressifs varie entre 11,7% et 26,6% (Panza et al., 2010). La prévalence de symptômes dépressifs (2,4% à 63%) (Panza et al., 2010) et d’anxiété (3% à 53%) (Apostolova & Cummings, 2008; Monastero, Mangialasche, Camarda, Ercolani, & Camarda, 2009; Peters et al., 2012; Rosenberg et al., 2013) est plus élevée que chez les personnes cognitivement saines (4,9% à 11,4% pour la dépression et 1% à 5% pour l’anxiété) (Geda et al., 2008; Peters et al., 2012), mais est similaire entre les différents sous-types de TCL/CIND (dépression : 12,3% versus 14,6%; anxiété : 4,6% versus 4,2% pour le CIND amnésique versus les autres sous-types, respectivement) (Peters et al., 2012). Par ailleurs, de récentes méta-analyses ont montré que les symptômes de dépression et d’anxiété augmentent le risque de TCL (Yates, Clare, & Woods, 2013), de la maladie d’Alzheimer, de la démence vasculaire ou de tous types de démences (Diniz, Butters, Albert, Dew, & Reynolds, 2013; Gao et al., 2013). Ces résultats sont en accord avec les hypothèses que les symptômes neuropsychiatriques constitueraient un marqueur de la sévérité du TCL (Feldman et al., 2004), que les symptômes neuropsychiatriques, même de faible sévérité (Rosenberg et al., 2013; Taragano et al., 2009), compteraient parmi les signes annonciateurs d’une démence ou encore que ces symptômes seraient une entité indépendante augmentant le risque de développer une démence (Panza et al., 2010). Des chercheurs ont d’ailleurs estimé qu’une réduction de 10% des cas de dépression pourrait mener à la prévention de 326 000 cas de maladie d’Alzheimer dans le monde (Barnes & Yaffe, 2011). De plus en plus d’auteurs appuient l’idée de ne pas exclure d’emblée les sujets avec une telle comorbidité de la définition de TCL/CIND afin de préserver la représentativité des aînés à risque de développer une démence (Busse, Hensel, Guhne, Angermeyer, & Riedel-Heller, 2006; Lopez, 2013; Panza et al., 2010; Portet et al., 2006).

Considérant que le TCL et le CIND sont tous deux associés à une détérioration de la condition mentale et augmentent le risque de développer une démence (Plassman et al., 2011), il est possible que le TCL et le CIND augmentent l’utilisation des services de santé médicaux (tels que les visites chez le médecin ou à

(17)

recension des écrits, les moteurs de recherche PubMed et PsycInfo ont été utilisés. Les mots-clés (ou MeSH Terms; Medical Subject Headings) employés pour la recherche étaient : mild cognitive impairment, cognitive impairment no dementia,

cognitive decline, cognitive deficit, Alzheimer’s disease, depression, major depressive disorder, major depressive episode, minor depression, depressive symptomatology, anxiety, health services, mental health services, personal health services, primary care, medical specialty, emergency service, ER, hospitalization, et psychotropic drugs. Les références des articles sélectionnés ont aussi été consultées afin de

rechercher des articles supplémentaires. La période couverte par les articles s’étend jusqu’en août 2014.

Utilisation des services de santé et troubles cognitifs sans démence

Les services de santé prennent différentes formes. Il peut s’agir de soins pharmaceutiques et de services rendus soit par des professionnels médicaux (au sein d’établissements médicaux ou à domicile), soit par des professionnels non médicaux ou par des aidants naturels. Les coûts reliés à ces services peuvent être pris en charge par des régimes d’assurance publique (p.ex.: la Régie de l’assurance maladie du Québec (RAMQ)), des programmes d’assistance aux aînés et aux familles avec faible revenu (Medicare et Medicaid) ou des programmes privés. La majorité des aînés québécois non hébergés (96%) sont couverts par la RAMQ, les autres n’étant pas sur le régime public parce qu’ils ont accès à un régime privé (Barnard, Lantin, & Roberge, 2001b). Une enquête populationnelle sur la santé des personnes âgées de 65 ans et plus menée dans les collectivités canadiennes a révélé que 22% des Québécois disent avoir reçu des services de santé à domicile par un professionnel ou par un proche au cours de la dernière année (Hoover & Rotermann, 2012).

L’utilisation des services de santé et leurs coûts chez les personnes avec démence ont fait l’objet de nombreuses études jusqu’à ce jour (Costa et al., 2012; Costa et al., 2013; Oremus & Aguilar, 2011). Toutefois, cette question a été peu documentée chez les aînés avec TCL ou CIND. Quelques chercheurs ont cependant entrepris de dresser ce profil d’utilisation afin de vérifier si la présence de TCL ou de CIND influence l’utilisation et les coûts des services de santé chez les personnes âgées.

(18)

Études rétrospectives sur l’utilisation des services de santé

Quelques études ont comparé les fréquences autorapportées d’utilisation des services de santé entre des personnes ayant des déficits cognitifs prévalents (c.-à-d. déficit à un temps donné sans documentation de déclin cognitif entre deux temps de mesure) et des personnes âgées saines. La plus récente étude américaine à ce sujet indique que le nombre de personnes âgées hospitalisées à avoir visité un médecin généraliste au cours des trois derniers mois est similaire entre les deux groupes (Zhu et al., 2013). D’autres auteurs ont ciblé la fréquence d’utilisation des services d’Allemands âgés avec TCL pour une période couvrant trois ou six mois (Luppa et al., 2008). Tout comme l’étude de Zhu et al. (2013), aucune différence n’a été observée quant aux taux d’utilisation des services médicaux à l’externe et des soins lors d’une hospitalisation.

D’autres auteurs ont vérifié l’utilisation des services d'aînés sains, avec CIND et avec démence admis dans une unité de récupération fonctionnelle d’un centre médical en Suisse à partir des données administratives de l’établissement (Seematter-Bagnoud, Martin, & Bula, 2012). Malgré un temps d’hospitalisation plus long et une fréquentation plus élevée d’un hôpital de jour à la suite de l’hospitalisation pour les patients avec CIND et ceux avec démence, seuls les patients déments utilisent significativement plus ces services que les aînés sains lorsque le statut fonctionnel et affectif sont pris en considération.

Par ailleurs, sept études ont comparé le patron d’utilisation de services de santé d’aînés atteints de maladie d’Alzheimer ou d’autres démences aux aînés cognitivement sains dans les années précédant le diagnostic (variant entre un et cinq ans). Les données tirées des dossiers médicaux ou des assureurs publics ont montré qu’avant même le diagnostic de démence, ces patients font l’objet d’un plus grand nombre de visites médicales ou d’actes médicaux (Albert, Glied, Andrews, Stern, & Mayeux, 2002; Eaker, Mickel, Chyou, Mueller-Rizner, & Slusser, 2002; Eisele et al., 2010; McCormick et al., 1995; Ramakers et al., 2007; Suehs et al., 2013) et de visites à l’urgence (Eaker et al., 2002; McCormick et al., 1995; Suehs et al., 2013). Bien que Ramakers et al. (2007) aient rapporté un nombre supérieur de visites médicales cinq

(19)

ans avant un diagnostic de démence, aucun contrôle pour les variables confondantes n’a été effectué et McCormick et al. (1995) n’ont pas contrôlé pour la présence de troubles physiques ou mentaux comorbides. Aucune différence n’a été rapportée en ce qui a trait aux visites d’un médecin spécialiste (McCormick et al., 1995), hormis le nombre de visites rendues à un psychiatre ou à un neurologue au moment du diagnostic (Eisele et al., 2010). La proportion de personnes hospitalisées est similaire entre les groupes (TCL: 22%; Sains: 14%) (Albert et al., 2002; McCormick et al., 1995), bien que le nombre d’actes médicaux reçus au cours d’une hospitalisation et le nombre d’hospitalisations soient légèrement plus élevés en présence de TCL par rapport aux sujets sains (Eaker et al., 2002; Suehs et al., 2013). Pour leur part, Leibson et al. (1999) ont noté seulement un nombre plus grand de visites médicales en institution avant un diagnostic de maladie d’Alzheimer et aucune différence entre les groupes quant au nombre de visites médicales en cabinet, de visites à l’urgence et d’hospitalisations. Toutefois, plusieurs aînés dans cette dernière étude sont institutionnalisés. Hormis l’étude de Ramakers et al. (2007), les autres études comparant l’utilisation des services de santé des aînés sains à ceux TCL ne couvrent qu’une à deux années avant que le diagnostic de maladie d’Alzheimer soit posé. Il ne peut donc pas être exclu que la plus grande utilisation des soins médicaux et des services d’urgence rapportés par ces études reflètent davantage le profil d’utilisation de patients dont le processus démentiel était déjà entamé (Ramakers et al., 2007). Études prospectives sur l’utilisation des services professionnels

Plutôt que de comparer l’utilisation des services de santé entre des personnes avec et sans trouble cognitif à un moment précis, d’autres auteurs ont évalué la relation entre le déclin cognitif et le recours aux services médicaux à travers le temps. Ces études contrôlaient pour l’effet de variables sociodémographiques et de santé. Concernant les visites médicales, Fowler et al. (2012) ont suivi sur deux ans des aînés sans démence en provenance de différents cabinets médicaux des États-Unis. Parmi les aînés ayant un déclin cognitif, les données transmises par le médecin traitant révèlent une fréquentation plus importante de leur médecin généraliste que les patients ne s’étant pas détériorés au plan cognitif, mais cette différence ne s’observe que chez ceux qui se sont rendus à l’urgence au cours des 24 derniers mois. À

(20)

l’inverse, dans une étude menée en Nouvelle-Écosse s’échelonnant sur deux ans, le nombre de visites à un médecin n’est pas plus élevé pour les personnes avec CIND que celles avec démence ou celles saines (Yip, Kephart, & Rockwood, 2001). Aux Pays-Bas, un suivi sur six ans auprès d’aînés cognitivement sains a mis en évidence que des déficits cognitifs au niveau de base, de même que le déclin cognitif entre le niveau de base et les suivis, sont associés à un plus grand risque de consulter un médecin et un professionnel en santé mentale (dont les psychiatres) (Comijs, Dik, Aartsen, Deeg, & Jonker, 2005). Un fonctionnement cognitif déficitaire au niveau de base est cependant associé à une probabilité plus faible de consulter un médecin spécialiste et ni la cognition initiale, ni le déclin cognitif ne déterminent le taux d’hospitalisation (Comijs et al., 2005). Enfin, certains auteurs ont observé que l’utilisation des services de santé est souvent liée à ceux que les médecins généralistes suggèrent à leurs patients (Wolfs, de Vugt, Verkaaik, Verkade, & Verhey, 2010). Cette étude fait état que les médecins généralistes proposent le plus souvent aux patients avec CIND ou démence un suivi médical, un traitement pharmacologique ou la participation aux activités d’un centre de jour pour aînés. Ceci suggère que le fait de consulter un médecin généraliste aurait un effet modérateur sur l'utilisation des autres services de santé.

Une seule publication a fait état de la fréquentation de services d’urgence chez les aînés ayant un déclin cognitif (Stephens, Newcomer, Blegen, Miller, & Harrington, 2012). Via les données gouvernementales, il a été trouvé que les aînés vivant en institution dont la détérioration cognitive est très légère se rendent plus souvent à l’urgence sur un an que les aînés sains sans égard au motif de consultation alors qu’il n’en est rien pour ceux dont le déclin est modéré à sévère.

Du côté des hospitalisations, Chodosh et al. (2004) ont mis en évidence que des Américains connaissant un déclin cognitif sont hospitalisés significativement plus souvent au cours de trois années de suivi même après avoir contrôlé pour les hospitalisations antérieures. Ehlenbach et al. (2010) et Wilson et al. (2012) ont également trouvé une association entre le déclin cognitif menant à une démence et un risque accru d’hospitalisation au cours de suivis allant de six à 12 ans. Dans l’un des

(21)

premiers écrits sur le sujet (Binder & Robins, 1990), le déclin cognitif sur un an est une fois de plus associé à une probabilité plus grande d’être hospitalisé au cours de l’année suivante, tant pour un motif physique que psychiatrique. À la suite d’une hospitalisation, le risque de déclin cognitif est aussi accru et significativement corrélé au taux annuel de déclin précédant l’hospitalisation (Wilson et al., 2012). Par ailleurs, le risque de déclin cognitif post-hospitalisation est également plus élevé chez des aînés cognitivement sains au moment de l’hospitalisation (Helvik, Selbaek, & Engedal, 2012).

En ce qui concerne les services rendus à domicile, lorsque comparés à des aînés sains, tant les patients avec CIND qu’avec démence bénéficient plus souvent de ce type de soins rendus par des professionnels rémunérés un an avant un diagnostic de maladie d’Alzheimer (Suehs et al., 2013), de même qu’avant et après une hospitalisation (Seematter-Bagnoud et al., 2012). Toutefois, aucune différence n’est observée entre ces groupes dans deux autres études (Comijs et al., 2005; Luppa, Heinrich, Matschinger, Sandholzer, Angermeyer et al., 2008).

Études prospectives sur l’utilisation de psychotropes

Les personnes avec TCL ou CIND consomment bon nombre d’agents pharmacologiques. Cette consommation était autorapportée dans toutes les études sauf celle menée par Yip et al. (2001) en Nouvelle-Écosse. Dans les centres médicaux, le taux de participants au niveau de base consommant au moins un médicament sous ordonnance s’avère significativement plus élevé chez les personnes avec TCL que chez les aînés sains (Zhu et al., 2013). Toutefois, une autre étude n’a montré aucune différence entre ces groupes (Luppa et al., 2008). Une analyse plus fine a indiqué que les aînés avec TCL sont aussi nombreux que les aînés avec démence à consommer des inhibiteurs sélectifs de la recapture de la sérotonine et des benzodiazépines. Ceux avec TCL sont plus nombreux à recevoir des ordonnances de vitamine E et de nootrope que ceux ayant une démence. L’ordonnance de neuroleptiques s’avère négligeable alors que plus du quart des participants avec TCL est sous inhibiteur de l’acétylcholinestérase malgré l’absence de démence. Cette étude a cependant été réalisée dans des centres spécialisés pour le diagnostic de la maladie

(22)

d’Alzheimer et les auteurs notent qu’il serait usuel dans le système italien de prescrire des agents psychoactifs pour la cognition, bien qu’il n’y ait pas à ce jour de consensus quant à leur utilisation pour le TCL (Frisoni, Canu, Geroldi, Zanetti, & Zacchi, 2006). Deux études ont présenté le taux d’ordonnances potentiellement inappropriées en raison de conséquences délétères sur la cognition chez des aînés avec TCL (Weston, Weinstein, Barton, & Yaffe, 2010). Ces études ont rapporté qu’une personne sur cinq avec TCL se fait prescrire soit un anticholinergique, une benzodiazépine, un anxiolytique/sédatif ou un barbiturique (Tsai, Noone, Johnson, Pradeep, & Verghese, 2012; Weston et al., 2010). Les personnes avec TCL sont plus nombreuses et à plus grand risque de consommer de tels médicaments que les aînés sains (Tsai et al., 2012).

Deux autres articles issus de la même communauté américaine ont révélé qu’en contrôlant pour des variables confondantes (démographie, santé), le nombre total de médicaments consommés, tant prescrits que non prescrits, ne diffère pas entre les personnes ayant un CIND et celles cognitivement saines (Hanlon et al., 1996). Toutefois, celles avec un CIND sont plus nombreuses à recevoir un agent pharmacologique agissant sur le système nerveux central (SNC; antidépresseurs, antiémétiques, anticonvulsivants, neuroleptiques, sédatifs/hypnotiques et antiparkinsoniens), hormis les benzodiazépines qui s’avèrent néanmoins les agents du SNC les plus prescrits chez les deux groupes (Hanlon et al., 1996). Le nombre d’agents du SNC et de médicaments non prescrits est équivalent entre les aînés avec CIND et ceux avec démence, mais il est plus élevé en faveur du CIND en ce qui a trait aux médicaments prescrits (Schmader et al., 1998). Enfin, le nombre de jours de consommation d’un médicament prescrit est similaire entre les aînés sains, avec CIND ou démence dans une étude Canadienne (Yip et al., 2001).

Sommaire

En bref, bien que les études rétrospectives aient montré une certaine hausse de la fréquence des visites aux médecins généralistes et à l’urgence en présence d’un TCL/CIND, ces résultats se rapportent à des aînés qui ont tous développés une

(23)

maladie d’Alzheimer peu de temps après la collecte des données (pour la plupart un à deux ans plus tard). L’analyse des données en ce qui concerne les autres services de santé a mené à des résultats conflictuels, peut-être en raison d’un certain nombre d’études n’ayant pas contrôlé pour l’effet de covariables. Dans l’ensemble, les études prospectives ont montré que le TCL est associé à une utilisation accrue des services d’urgence de même qu’à une probabilité plus élevée d’être hospitalisé et de consommer des psychotropes, alors que les données sont conflictuelles en matière de visites rendues aux médecins généralistes et spécialistes.

Utilisation des services de santé et dépression chez les aînés

Un grand nombre d’écrits ont mis en évidence que la dépression mène à une fluctuation de l’utilisation des services de santé professionnels et pharmacologiques chez les aînés. Tel que souligné précédemment, la dépression compte parmi les symptômes les plus prévalents en présence de TCL/CIND. Par conséquent, il est nécessaire de prendre connaissance des résultats de ce pan de la littérature. Une récente revue systématique fait état des résultats d’études qui ont été menées auprès de personnes âgées de 55 ans et plus habitant dans la communauté (Luppa et al., 2012). Quarante-cinq études portant sur l’utilisation ou les coûts des services ont été retenues dont près de la moitié se sont déroulées aux États-Unis (n = 18) et au Canada (n = 3). Elles ont le plus souvent été réalisées à partir de données autorapportées (n = 35) avec un devis transversal (n = 39).

Les résultats de cette revue systématique indiquent que les aînés avec dépression sont plus nombreux que ceux sans dépression à consulter leur médecin généraliste (48%-83% versus 36%-55%), à rencontrer un psychiatre (5%-37% versus 0,2%-1%), à suivre une psychothérapie (1%-29% versus 0,1%) et à consommer des antidépresseurs (20%-45% versus 1%-11%) et des non-psychotropes (69% versus 52% (Soudry et al., 2008)). Le nombre d’hospitalisations est plus élevé en faveur des aînés avec dépression et le taux d’hospitalisation pour ce groupe varie entre 13% et 39%. Hormis une seule étude (Meller, Fichter, Schroppel, & Beck-Eichinger, 1993) portant sur des aînés de 85 ans et plus, les autres travaux s’accordent sur le fait que

(24)

les aînés avec dépression sont plus nombreux à se rendre à l’urgence que ceux sans dépression (40%-52% versus 29%-40%).

D’autres études non incluses dans la recension des écrits de Luppa et al. (2012) ont obtenu des résultats similaires. En bref, les symptômes dépressifs et la dépression majeure sont des prédicteurs significatifs des visites rendues à un médecin généraliste (Fowler et al., 2012; Huang et al., 2014; Kim, Park, Jang, & Kwon, 2011; Lacruz et al., 2012; Menchetti, Cevenini, De Ronchi, Quartesan, & Berardi, 2006; Pickett et al., 2014; Sheehan, Bass, Briggs, & Jacoby, 2003), à un médecin spécialiste (Beekman et al., 2002; Choi, Kunik, & Wilson, 2013), à l’urgence (Aminzadeh & Dalziel, 2002; Choi, Marti, Bruce, & Kunik, 2012; Himelhoch, Weller, Wu, Anderson, & Cooper, 2004; McCusker, Cardin, Bellavance, & Belzile, 2000) et à l’hôpital pour une affection psychiatrique et médicale (Beekman et al., 2002; Himelhoch et al., 2004; Huang et al., 2000; Huang et al., 2014; Kim et al., 2011; Prina et al., 2013). Les aînés avec dépression sont aussi plus nombreux à consulter un médecin généraliste (Dearman, Waheed, Nathoo, & Baldwin, 2006; Djernes, Gulmann, Foldager, Olesen, & Munk-Jørgensen, 2011; Ladin, 2012), un médecin spécialiste (Ladin, 2012) et à être hospitalisés (Ladin, 2012; Sandberg, Kristensson, Midlöv, Fagerström, & Jakobsson, 2012; Walter-Ginzburg et al., 2001). Les aînés dépressifs hospitalisés le sont pour une plus longue durée (Djernes et al., 2011; Lacruz et al., 2012; Prina, Deeg, Brayne, Beekman, & Huisman, 2012; Sandberg et al., 2012). Ils ont également un plus grand nombre de visites à l’urgence (Lee et al., 2008; Walter-Ginzburg et al., 2001) et consomment plus de psychotropes que les aînés sains (Djernes et al., 2011; Hogan, Maxwell, Fung, & Ebly, 2003; Sewitch, Blais, Rahme, Galarneau, & Bexton, 2006). Quelques écrits constituent toutefois des exceptions à cette tendance à la hausse de l’utilisation des services en présence de dépression. Dans deux études (Beekman et al., 2002; Gilleard, Francis, & Brown, 1998), la dépression ne prédit pas le nombre de visites à un médecin, mais celle de Gilleard et al. (1998) a été réalisée dans un département de chirurgie. Dans un autre écrit scientifique, la dépression prédit le fait de consulter un médecin, mais cette influence est diminuée lorsque les auteurs contrôlent pour une perception négative de

(25)

l’urgence et à l’hôpital dans un échantillon composé d’aînés plus âgés (75 ans et plus) (Walter-Ginzburg et al., 2001).

Au Canada et au Québec, les études ont montré que de 20,9% à 50% des aînés avec une dépression majeure vivant dans la communauté rapportent avoir consulté un professionnel de la santé pour leurs symptômes de détresse psychologique au cours de l’année précédant le diagnostic (Cole, McCusker, Sewitch, Ciampi, & Dyachenko, 2008; Crabb & Hunsley, 2006; Mechakra-Tahiri, Zunzunegui, Dubé, & Préville, 2011; Préville et al., 2008; Préville et al., 2009), ce qui est plus élevé que chez les aînés sans dépression (Cole et al., 2008; Crabb & Hunsley, 2006; Préville et al., 2009). Les aînés avec dépression sont également plus nombreux à être suivis par un médecin généraliste, par un psychiatre, par un psychologue ou par un autre professionnel de la santé et à être membres d’un groupe de soutien, même en contrôlant statistiquement pour des variables confondantes (Cole et al., 2008; Crabb & Hunsley, 2006). L’association entre la dépression et la consultation d’un professionnel parmi ceux énumérés est d’autant plus forte lorsqu’il s’agit d’une dépression majeure en comparaison à la présence d’une dépression mineure (Cole et al., 2008). Les personnes âgées plus jeunes (65-74 ans) consultent aussi plus souvent les médecins généralistes, les psychiatres et les psychologues que les aînés de 75 ans et plus (Crabb & Hunsley, 2006). Malgré tout, hormis le médecin généraliste, le taux de consultation demeure relativement faible pour un psychiatre (5,1%-7,5%) ou un psychologue (2,5%-4,9%). Parmi les raisons possibles à ce faible pourcentage, notons une difficulté d’accès à un spécialiste de la santé mentale dans le système de santé public, mais également une mauvaise reconnaissance par les aînés de leurs symptômes et de la pertinence de consulter un professionnel pour trouver une solution à leur problème (Crabb & Hunsley, 2006; O'Connor, Rosewarne, & Bruce, 2001). Ils sont aussi moins fréquemment référés à un professionnel de la santé mentale que les personnes plus jeunes (Crabb & Hunsley, 2006). Finalement, le fait de se sentir déprimé augmente la probabilité des aînés de se rendre au moins deux fois à l’urgence en six mois (McCusker et al., 2000).

(26)

L’utilisation accrue des services de santé chez les aînés n’est pas nécessairement synonyme de prise en charge de la symptomatologie dépressive. En effet, bien que la dépression constitue un facteur de risque pour la consultation d’un professionnel en santé mentale (Bogner, de Vries, Maulik, & Unützer, 2009; Han, Gfroerer, Colpe, Barker, & Colliver, 2011; Karlin, Duffy, & Gleaves, 2008; Lee, Han, Huh, Kim, & Kim, 2014), entre 50% et 71% des aînés avec une dépression ou un trouble anxieux ne consultent pas un professionnel pour la prise en charge de leurs problèmes psychologiques (Byers, Arean, & Yaffe, 2012; Karlin, Duffy, & Gleaves, 2008; Klap, Unroe, & Unutzer, 2003; Shapiro et al., 1984). De plus, les aînés avec dépression consultent davantage les médecins généralistes que les spécialistes en santé mentale (Bogner, de Vries, Maulik, & Unützer, 2009; Harman, Veazie, & Lyness, 2006; Hornblow, Bushnell, Wells, Joyce, & Oakley-Browne, 1990).

En ce qui concerne la consommation d’agents psychotropes, les données de la Régie de l’assurance maladie du Québec (RAMQ) indiquent que 84% des aînés ayant reçu un diagnostic de dépression au cours de la dernière année consomment un psychotrope, alors que 41% en consommaient l’année précédant leur diagnostic (Sewitch et al., 2006). Plus précisément, au cours de l’année suivant le diagnostic, le taux de consommation est de 64% pour un antidépresseur, de 62% pour une benzodiazépine (buspirone, hydrate de chloral, hydroxyzine et prométhazine) et de 5% pour un anxiolytique. En somme la dépression (majeure, mineure ou comorbide à une maladie physique, à un abus de substance ou à un deuil) s’avère un prédicteur significatif de la consommation d’un psychotrope, toutes catégories confondues (Sewitch, Cole, McCusker, Ciampi, & Dyachenko, 2008).

Études rétrospectives sur les effets de la dépression et des troubles cognitifs sans démence sur l’utilisation des services

Certaines études ont tenu compte à la fois de l’effet de la dépression et des déficits cognitifs sur l’utilisation des services par l’entremise d’analyses multivariées (excepté Roelands, Van Oyen, Depoorter, Baro, & Van Oost, 2003). La fréquence d’utilisation était rapportée de façon rétrospective par les participants ou leurs proches et variait d'une période de un à 12 mois.

(27)

La présence d’un diagnostic de dépression ou de trouble anxieux prédit la fréquentation de spécialistes en santé mentale et de cliniques médicales et ce, indépendamment du fonctionnement cognitif (Bogner et al., 2009). Pour sa part, la cognition ne prédit pas de façon significative la fréquentation de ces spécialistes si l’effet de symptômes neuropsychiatriques est contrôlé (Bogner et al., 2009). Les analyses univariées d’une étude menée en Belgique ont montré que tant la dépression que les déficits cognitifs prédisent le nombre de visites à domicile d’un médecin généraliste et d’autres professionnels paramédicaux, la cognition étant marginalement corrélée au nombre de services à domicile utilisés lorsque la présence de dépression est considérée (Roelands, Van Oyen, Depoorter, Baro, & Van Oost, 2003).

En Suisse, Seematter-Bagnoud et al. (2012) ont rapporté une durée et un taux d’hospitalisation comparables entre les aînés CIND et sains, peu importe que les patients avec dépression ou délirium soient inclus ou non à l’échantillon. La présence de déficits cognitifs et de symptômes dépressifs augmentent le risque d’hospitalisation dans une autre étude, mais il n’est pas rapporté si ces personnes étaient exemptes de démence (Kim et al., 2011).

En contrôlant pour les données sociodémographiques, de santé et cognitives, les aînés avec dépression mineure et majeure sont plus susceptibles de consulter des intervenants paramédicaux, de recevoir une aide-infirmière à domicile et de consommer des benzodiazépines (Beekman, Deeg, Braam, Smit, & Van Tilburg, 1997). La dépression majeure augmente le risque de prendre un antidépresseur et de visiter un psychiatre, mais la dépression majeure ou mineure n’augmente pas le risque d’être hospitalisé et de consulter un autre type de médecin.

Études prospectives sur les effets de la dépression et des troubles cognitifs sans démence sur l’utilisation des services

Des études américaines, européennes et asiatiques ont vérifié aussi, à l’aide d’un devis longitudinal, l’effet de la dépression et de la cognition sur l’utilisation des services chez des personnes âgées de la communauté.

(28)

Dans l’étude LASA (Longitudinal Amsterdam Study of Aging), considérant la dépression, les déficits cognitifs, les maladies chroniques et les limitations fonctionnelles, ni la dépression ni les déficits cognitifs prévalents n’expliquent le taux de fréquentation autorapporté des services médicaux et non médicaux (travail social, physiothérapie et dentisterie) au niveau de base (Beekman et al., 2002). Cependant, au suivi de trois ans, la dépression et le déclin cognitif prédisent tous deux le nombre de visites rendues à un médecin spécialiste, le déclin cognitif ayant une plus grande influence que la dépression. De plus, le déclin cognitif prédit le nombre de visites rendues à un médecin généraliste, alors que la présence de dépression influence plutôt le nombre d’hospitalisations et l’utilisation des services à domicile. Fowler et al. (2012) ont aussi rapporté un nombre supérieur de visites chez un médecin généraliste pour les patients avec CIND par rapport aux sujets sains et ce, tant au niveau de base qu’au suivi de deux ans. Cette association entre le CIND et le nombre de visites médicales est indépendante de l’influence des symptômes dépressifs et ce, malgré le fait que les patients avec symptômes dépressifs consultent eux aussi plus souvent le médecin que ceux sans dépression. Feng, Yap, Kua, and Ng (2009) ont montré que la présence de symptômes dépressifs prévalents et incidents prédisent le nombre de visites rendues au médecin généraliste au suivi, mais pas le taux d’hospitalisation. La cognition n'exerce pas d'effet modérateur sur ces associations. L’effet seul de la cognition n’est pas rapporté.

Pour les visites à l’urgence, tant une détérioration cognitive que la dépression influencent le nombre de visites (Lee et al., 2008; Stephens et al., 2012), mais les problèmes mnésiques ne constituent pas un prédicteur d’un retour à l’urgence dans un délai de 30 jours (McCusker et al., 2000). Toutefois, les déficits d’encodage et les symptômes dépressifs sont des facteurs qui augmentent le risque des aînés de se rendre à l’urgence (Wolinsky et al., 2008). Dans une étude longitudinale menée à Jérusalem, la dépression augmente la probabilité de cumuler les visites autorapportées à l’urgence au cours de l’année précédant l’évaluation à l’âge de 78 et 85 ans, même après le contrôle pour des covariables en lien avec la sphère sociale, médicale et fonctionnelle (Rottenberg, Jacobs, & Stessman, 2013).

(29)

Dans cette dernière étude, la dépression n’est toutefois pas reliée à la probabilité d’être hospitalisé. De façon similaire, dans une étude menée en Suède pendant six ans, les aînés avec dépression ont un nombre et une durée d’hospitalisations équivalente aux aînés sans dépression. Pour leur part, les déficits cognitifs prédisent la durée de l’hospitalisation, mais seulement pour les deux premières années de l’étude (Sandberg et al., 2012). Lors d’un suivi de six mois, Huang et al. (2000) ont identifié quant à eux la présence de symptômes dépressifs comme étant un prédicteur d’une hospitalisation, sauf chez les femmes âgées de 75 ans et plus. Chez ces femmes, ce sont plutôt les déficits cognitifs qui constituent un prédicteur. À l’inverse, dans un autre article, les symptômes dépressifs répertoriés chez des femmes âgées de 75 ans sont marginalement associés à un risque accru d’hospitalisation (autorapporté) cinq ans plus tard, alors que les déficits cognitifs au niveau de base n’agissent pas à titre de prédicteur significatif (Larsen, Schroll, & Avlund, 2006). Dans ce dernier papier, aucun effet de la dépression ni de la cognition n’est rapporté chez les hommes. Chez les personnes âgées hospitalisées en raison d’une dépression, la cognition à un test de dépistage ne différencie pas les groupes de patients utilisant principalement des services à domicile, principalement des services de santé mentale ou utilisant tous ces services six mois après leur sortie de l’hôpital (Choi, Morrow-Howell, & Proctor, 2006).

Quelques auteurs se sont penchés sur les psychotropes. Ainsi, au terme d’un suivi de 10 ans aux Pays-Bas, tant la dépression que la présence de déficits cognitifs sont associés à la consommation d’antidépresseurs, mais l’effet de la cognition est présent seulement chez les participants ayant une dépression mineure ou sans dépression (Sonnenberg, Deeg, Comijs, van Tilburg, & Beekman, 2008). L’effet de la cognition n’est pas significatif en présence de dépression majeure. Soudry et al. (2008) ont rapporté également ce dernier résultat pour des communautés françaises, à la différence que l’effet de la cognition n’est observé que dans le groupe de participants non dépressifs. Cette dernière étude est cependant rétrospective et couvre uniquement le dernier mois avant l’entrevue. Au cours d’un suivi de quatre ans et demi, aucun effet significatif n’a été retrouvé pour la présence de déficits cognitifs et de symptômes dépressifs autres que les problèmes de sommeil sur la consommation

(30)

de benzodiazépines chez des aînés de 75 ans et plus (Jorm, Grayson, Creasey, Waite, & Broe, 2000).

Sommaire

En bref, une récente recension des écrits en est venue à la conclusion que la proportion de personnes âgées avec dépression utilisant les services de santé (médecins généralistes, psychiatres, urgence, hospitalisations et antidépresseurs) est plus importante qu’en l’absence de dépression. Les études canadiennes sont arrivées à des conclusions similaires, mais n’ont pas étudié le service d’urgence ni les hospitalisations pour tous motifs. Lorsque tant les effets de la dépression et de la cognition sont contrôlés, les études prospectives n’arrivent pas à un consensus concernant l’effet de la cognition et de la dépression sur le nombre de visites aux médecins généralistes ou spécialistes. Cependant, hormis quelques spécificités touchant certains groupes de personnes âgées (âge, sexe, durée de l’étude), en général, la présence de CIND incident et de dépression prédisent le nombre de visites à l’urgence, de même que le nombre et la durée des hospitalisations. Trois études ont testé l’interaction (effet modérateur) entre la cognition et la dépression et l’utilisation de certains services (Feng et al., 2009; Sonnenberg et al., 2008; Soudry et al., 2008). Deux de ces études ont montré que le déclin cognitif et la présence de dépression sont associés à une probabilité plus élevée de consommer un antidépresseur, mais l’effet de la cognition est seulement significatif chez les participants sans dépression majeure ou avec de légers symptômes.

Utilisation des services de santé et anxiété chez les aînés

Tel que mentionné précédemment, l’anxiété est aussi associée à la présence de CIND de sorte que cette recension de la littérature ne saurait être complète sans un mot à ce sujet. Quelques chercheurs ont dressé le portrait de l’utilisation des services chez les aînés aux prises avec un trouble anxieux en exerçant un contrôle sur l’effet de variables sociodémographiques et de santé, incluant dans certains cas l’effet de la cognition (de Beurs et al., 1999; Diefenbach, Robison, Tolin, & Blank, 2004; Naughton et al., 2010). Hormis l’étude de Gurmankin Levy, Maselko, Bauer,

(31)

autres études couvrent plutôt une période allant de trois à 12 mois précédant l’entrevue diagnostique. Les participants proviennent de cliniques ou de communautés (de Beurs et al., 1999) et les données sont autorapportées ou tirées des dossiers médicaux.

En excluant de l’étude LASA les aînés avec dépression pour ne conserver que ceux avec un trouble anxieux, de Beurs et al. (1999) ont associé les troubles anxieux à un risque accru de consulter un médecin généraliste et de recevoir une aide-infirmière à domicile. Tant un trouble anxieux que des symptômes d’anxiété sont associés à une plus grande consommation de benzodiazépines, mais pas d'antidépresseurs ni à une augmentation des hospitalisations. Parmi des immigrants Portoricains établis aux États-Unis, ceux avec un trouble anxieux consultent significativement plus souvent un médecin spécialiste et se rendent plus souvent à l’urgence que les aînés sains, mais ils ne sont pas davantage hospitalisés (Diefenbach et al., 2004). La présence de symptômes anxieux augmente le risque de visites répétées à l’urgence, mais pas la présence de déficits cognitifs (Naughton et al., 2010). Au cours d’un suivi de deux ans, Gurmankin-Levy et al. (2007) ont établi le lien entre la présence d’un trouble anxieux et une hausse du nombre total de visites rendues à un médecin généraliste ou spécialiste (autre qu’un psychiatre) et le nombre de visites à l’urgence. Les symptômes anxieux ne suffisent pas à augmenter l’utilisation des services.

Trois études américaines se sont intéressées exclusivement à l’utilisation des services chez les aînés avec un trouble d’anxiété généralisée (TAG) en comparaison aux aînés sains, dont deux sont issues de la même population (Calleo et al., 2009; Stanley et al., 2003). Hormis le nombre de visites en radiologie supérieur pour le TAG, le nombre total de visites médicales, en santé mentale, à l’urgence et à l’hôpital n’atteint pas le seuil de signification statistique (Calleo et al., 2009; Stanley et al., 2003). Toutefois, le nombre d’ordonnances pour des psychotropes est marginalement significatif en faveur du TAG (Stanley et al., 2003) et lorsque tous les services professionnels sont cumulés (médecine, santé mentale, urgence, hospitalisation), le nombre total de visites est supérieur pour les aînés avec un TAG (Porensky et al., 2009). Entre 36% et 52% des aînés avec un trouble anxieux sont sous antidépresseur

(32)

ou anxiolytique (Calleo et al., 2009; Stanley et al., 2003) alors que de Beurs et al. (1999) rapportent chez les aînés sans trouble anxieux des taux de consommation d’à peine 1% pour un antidépresseur et de 10% pour une benzodiazépine.

Critiques, limites et particularités des études antérieures sur

l’utilisation des services

Différences entre les systèmes de santé

Les études décrites plus tôt ont été réalisées dans plusieurs pays différents, chacun étant muni d’un système de santé avec des modalités de fonctionnement propres à chaque état, ce qui rend la comparaison entre les études difficile. Dans certains pays (p.ex.: Australie, États-Unis, Japon), même les personnes âgées qui sont éligibles à un régime de santé public doivent défrayer une partie des coûts reliés à leurs soins (Karlin et al., 2008). Par conséquent, en fonction du revenu et du type de régime (privé ou public), il existe possiblement des différences notoires dans l'utilisation des services de santé. Au Québec, la quasi-totalité des personnes âgées de 65 ans et plus sont couvertes par la RAMQ et sont exemptées du paiement de la prime (Government of Quebec, 2015), ce qui pourrait faciliter l’accès aux soins de santé des aînés plus pauvres comparativement à d'autres systèmes de santé. Hormis quelques médicaments non remboursés par la RAMQ, peu de soins médicaux sont non couverts et le type de couverture de santé est pratiquement identique pour toutes les personnes âgées, à l'exception d'un faible pourcentage (4%) qui possède aussi une assurance privée (Barnard et al., 2001). De plus, contrairement au système québécois, certaines législations requièrent que tous les habitants soient inscrits auprès d’un médecin généraliste (p.ex.: Danemark, France, Italie, Pays-Bas, Royaume-Unis) (Thomson, Osborn, Squires, & Jun, 2013). Dans certains cas, il est attendu de la part des médecins de première ligne qu’ils offrent des soins après les heures régulières de bureau (p.ex.: Allemagne, Danemark, Italie, Nouvelle-Zélande) (Thomson et al., 2013). Dans d’autres cas, un accès direct aux médecins spécialistes de son choix est possible (p.ex.: Allemagne, Espagne, Grèce, Suisse) (van Doorslaer, Masseria, & Koolman, 2006) ou certains services spécialisés sont rares (p.ex.: les cliniques de mémoire en Allemagne) (Eisele et al., 2010). Enfin, dans certaines cultures, des

(33)

services de soins non traditionnels (p.ex.: médecine orientale) sont plus répandus, pouvant potentiellement réduire l’affluence vers les autres services de santé plus traditionnels (Kim et al., 2011). Considérant ces divergences d’un pays à l’autre, des différences notables entre les taux d’utilisation des services de santé au Québec et ailleurs dans le monde sont attendues.

Validité des données et représentativité des échantillons

Bon nombre d’auteurs fondent leurs résultats sur des données autorapportées et dès lors, la validité de ces données peut être remise en question étant donné le biais de rappel et les problèmes mnésiques potentiels des participants avec TCL ou CIND. En effet, la comparaison entre les données autorapportées et celles provenant de réclamations d’assurances indiquent une forte sous-estimation des services utilisés lorsque la fréquence d’utilisation est rapportée par les participants âgés (Hunger, Schwarzkopf, Heier, Peters, & Holle, 2013; Raina, Torrance-Rynard, Wong, & Woodward, 2002). Afin d’avoir un reflet plus juste de l’utilisation des services de santé par les aînés avec TCL/CIND tenant compte des variations dans l’utilisation des soins associés aux aspects géographiques, il est préférable de se référer aux données provenant de régimes d’assurances publiques couvrant la majorité de la population (Fowler, 2013; Hunger et al., 2013). Enfin, hormis l’étude d’Albert et al. (2002), celles portant sur l’utilisation des services chez les aînés avec TCL/CIND ne sont pas composées d’échantillons aléatoires et représentatifs de la population étudiée.

Opérationnalisation des variables et modérateurs

Bon nombre d’études utilisent des termes tels que «déficits cognitifs» ou «déclin cognitif». Ces termes sont ambigus puisqu’il n’est pas toujours spécifié si les participants étaient libres de toute démence ou si ce déclin a conduit ou non à un état de démence. Par ailleurs, lorsque les concepts de TCL ou CIND sont utilisés, ils sont opérationnalisés différemment d’une étude à l’autre (outils utilisés, opérationnalisation selon des normes vs une cote limite à un test cognitif). Ces différences pourraient être à l’origine de certains résultats divergents entre les études.

Figure

Figure 1. Research design.
Figure 2. Flow chart of the study enrolment.
Table 1. Characteristics of participants with and without cognitive impairment no dementia (CIND) at baseline
Table 2. Predictors of the number of visits to a general practitioner and to a geriatrician, a psychiatrist or a neurologist
+7

Références

Documents relatifs

Nous allons exprimer analytiquement le principe de la conversation de la masse, d'abord dans le système de variables de Lagrange, puis dans le système de

L’archive ouverte pluridisciplinaire HAL, est destinée au dépôt et à la diffusion de documents scientifiques de niveau recherche, publiés ou non, émanant des

Le corps (Körper), le corps- objet, objet de soin, est distinct du corps de chair (Leib), ou corps-sujet, sujet d’attention pour autrui, rattaché à la vie (Leben). Les deux types

La relation entre les déficits mnésiques et la FRR semble être bien établie dans les écrits scientifiques. Il serait alors essentiel d’investiguer si la FRR peut

[r]

En revanche, dans le cas de la France, l’intégration du système d’enseignement supérieur dans les politiques industrielles est moins forte. Pendant longtemps, seules les

Since the target sys- tem is commonly not yet available, our approach of- fers two facilities: a Deployment Diagram in which software components can be mapped over hardware nodes