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Les impacts constitutionnels et politiques du renvoi relatif a la secession du Quebec /

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LES IMPACTS

CONSTITUTIONNELS ET

POLITIQUES

DU

RENVOI

RELATIF

À

LA SÉCESSION

DU QUÉBEC

PAR FRÉDÉRIC BÉRARD

THÈSE PRÉSENTÉE

À LA FACULTÉ DES ÉrUDES

SUPÉRIEURES EN VUE DE L'OBTENTION DU GRADE DE

MASTER IN ARTS (M.A.) EN SCIENCE POLITIQUE

DEPARTMENT OF POLITICAL SCIENCE

FACULTYOF ARTS

McGILL UNIVERSITY

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NationalUbrary of Canada Acquisitionsand Bibliographie Services 395 Weling10n Street CltawaON K1 A 0N4 canada Bibliothèque nationale duCanada Acquisitions et services bibliographiques 395.rueWelington OttawaON K1A 0N4 canada Your"'Von~

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Claude Péclet,

penseu, cartésien

et

,ationnel, intègre et cynique, humaniste et ami.

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AVANT-PROPOS

«

Ilfaut

sepiquer

d'être

rai!orrnable, mais nonpas

d'awir

raison;

de

sinafrité

et

non

pas

d'infaillibilité...

»

• Joubert

Un autre essai sur la sempiternelle question de l'unité canadienne, déplorez-vous présentement. Pis encore, ajoutez-vous, on yaborde une fois de plus l'ennuyeuse et l'ennuyante problématique constitutionnelle. Et pourquoi l'auteur a-t-il choisi un tel sujet? Parce qu'il fait partie de la race des fatigants mais infatigables maniaques de cet incessant débat qu'est celui desDeux Solitudes?

Possible. Sûrement même. Mais il y a plus: le Renvoi relatifà la sécession du Québec ne représente pas qu'un simple épisode de la saga constitutionnelle canadienne. Vraisemblablement, ces implications pratiques pourraient un jour sceller l'issue du débat. Certes, le mouvement séparatiste québécois, loin d'être moribond, ne s'éteindra pas sur la seule base d'une décision de la Cour suprême du Canada. Prétendre le contraire relève de la fantaisie, de l'outrecuidance ou encore, d'un manque tangible de pragmatisme politique. Toutefois, un fait persiste: appliqué ill

extenso. l'Avis s'avère une sérieuse embûche sur le chemin menant à l'indépendance. Les exigences que doivent maintenant remplir les leaders séparatistes sont trop élevées. Ne serait-ce que de par les critères de question et majorité claire énoncés par la Cour et repris par la Loi C-20, il est dorénavant loisible de conclure à l'utopisme du projet du Parti Québécois. Les sondages sont unanimes: sans duperies ni autres astuces, l'option du OUI ne peut recueillir les appuis préalablesà la réalisation de la sécession. Qui plus est, toute menace de déclaration unilatérale, menace omniprésente en 1995, est aujourd'hui illégale. La sécession du Québec devra être réalisée par l'entremise d'un amendement constitutionnel, avec les immenses difficultés que cela comporte. Les autres Canadiens, représentés par le gouvernement fédéral et leurs autorités respectives, pourront également se faire entendre. La sécession n'est pas une mince affaire, et

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implique une foule de contentieux. Malgré la duplicité de l'argumentaire indépendantiste à cet égard. les questions d'ordre territorial devront faire l'objet de sérieuses discussions. En fait, si le territoire canadien est divisible, le territoire d'un Québec souverain l'est tout autant. Le principe de l'adhésion volontaire des composantes d'une entité politique n'est pas uniquement applicable au Canada; il l'est également au Québec. Il en va de même pour le respect des minorités et de la règle de droit. La sécession québécoise relève du politique, certes, mais aussi du droit. Une démocratie ne peut s'épanouir sans les remparts de l'ordre légal, tout comme une constitution ne peut légitimement survivre sans l'assentiment des gouvernés.

Par ailleurs, bien que la Cour soulève avec circonspection la possibilité d'une sécession effective, il convient de remarquer la répugnance qu'éprouvent les États face aux tentatives de sécessions unilatérales. En fait, l'étude de la pratique internationale révèle que les sécessions effectuées à

l'encontre de l'assentiment de l'État prédécesseur échouent inéluctablement. On peut alors s'interroger sur les probabilités de succès du« Grand Jeu» de l'ex-premier ministre Parizeau lors du processus référendaire de 1995. Enfin, la Cour soulève une lapalissade, pourtant ignorée par certains intellectuels souverainistes: le peuple du Québec ne peut être garant d'un droit à la sécession en vertu du droit international. Il n'est aucunement brimé, opprimé ou colonisé au sein de la fédération canadienne. De même, le principe de l'effectivité ne peut être considéré comme étant un moyen légal d'accéder à l'indépendance; toute tentative unilatérale contrevient clairement au droit positif, et constitue un acteà la fois révolutionnaire et illicite.

Somme toute, le Renvoi relatif

à

la sécession du Québec rejette un nombre incalculable de mythes et d'illogismes entretenus depuis longtemps par le mouvement séparatiste. Et bien que plusieurs académiciens soulignent systématiquement le caractère partagé de la décision, l'analyse de ses tenants et aboutissants m'amène à une tout autre conclusion. N'en déplaise à l'ingénuité des indépendantistes, l'Avis se révèle, malgré l'imposition de l'obligation de négocier, une de

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-leurs principales «conditions perdantes ». Lalo sensu, son application requiert la pratique d'un exercice fort douloureux pour l'argumentaire souverainiste québécois: brûler ce qu'il a adoré, et adorer ce qu'il a brûlé. Quantàmoi, je tenterai de m'acquitter de ma tâche en ayantàl'esprit la maxime de Léon XIII :«La première loi de 1'Histoire est de ne pas oser mentir; la seconde, de ne pas craindre d'exprimer toute la vérité ... »Bonne réflexion.

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REMERCIEMENTS

«

Bon

droit

a

besoin d'aide. ..

»

- Mo6ère

Rome ne s'est pas construite en un jour; ce mémoire de maîtrise non plus. En fait, n'eut été de l'aide inestimable de certaines personnes, je serais présentement rendu à l'aurore de mes objectifs. C'est pourquoi je tiens mordicus à exprimer toute ma gratitude à ces bonnes gens, qui ont transfonné une charge de travail considérable en une aventure exceptionnellement plaisante.

Tout au long de mes années universitaires, tant en droit qu'en sCiences politiques, j'ai pu bénéficier des commentaires et réflexions de professeurs qui, parfoisà leur insu, ont alimenté mes pistes de recherche. Je tiens ainsiàremercier les professeurs de l'Université de Montréal François Chevrette, José \Voehrling, Jean Leclair (qui a eu l'idée de ce mémoire) et Jean Hétu. Ma reconnaissance s'adresse également aux professeurs de l'Université McGill Richard Schultz, Filippo Sabetti et Allan Patten, dont l'expérience et l'esprit critique ont utilement servi à l'élaboration de ce travail.

Je m'en voudrais aussi de ne pas souligner la contribution de proches, amis et connaissances qui, de par leur travail intarissable, ont à la fois assuré la correction des épreuves et fourni des commentaires d'une rare pertinence. Des remerciements vont ainsi à Gilles Bisaillon, Richard Dang, Claude et Pierre Péclet, Serge Gasselin, Stéphane Dion, Pierre Bérard, Frédéric

Gilbe~François Boulay, Marc Lalande, Monique Bisaillon, Phlippe-André Tessier, Patrick McQuilken, Shawn Danton, Marianne et Micheline Petit. Sans votre collaboration, ce travail aurait difficilement pu être achevé.

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J'exprime également ma gratitude au cabinet Stikeman et Elliott, spécialement à Me Lyse Charest et Mme Josée Beauclair, pour m'avoir accordé le temps nécessaire à la rédaction de cet ouvrage.

Un double remerciement va à Pierre Péclet et à Marianne Petit. À Pierre, pour la grande générosité dont il a fait preuve en me pennettant de jouir de la quiétude de son chalet du Lac Nomingue, où la quasi-totalité de cet ouvrage fut effectuée.

À

Marianne, ma compagne, pour la patience, la mansuétude et la grande compréhension dont elle a (heureusement!) su faire preuve au cours des derniers mois.

Enfin, je tiens àremercier spécialement le professeur Christopher P. Manfredi, directeur de cette thèse, pour l'extrême bienveillance dont il a fait preuve à mon égard. Il m'a été possible de bénéficier de ses compétences Ilecplus ultra au niveau de l'influence judiciaire à l'intérieur de l'arène politique. ainsi qu'en matières constitutionnelles canadiennes. La latitude et le support offerts tant au niveau des réflexions que de l'argumentation ont été largement appréciés.

Certes, cette liste n'est pas exhaustive. Je m'en veux déjà d'avoir omis de mentionner les noms de personnes qui ont su, de près ou de loin, susciter mon intérêt relatif aux questions sécessionnistes et constitutionnelles. Alorsàvous tous, merci.

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TABLE DES MATIÈRES

AVANT-PROPOS ...••...•••...•••.•.•.•.••...••...•.•.•..•.••••...•.••••..•...•...•..•.••..•...•... REMERCIEMENTS ..•.••...•....•...•.•••••.•••...•.•.•••...••.•••••...•..•.•...•...•••.•••...• .•.•.•• iv INTRODUCTION... •... .•..•...•..•... .•••.••. ...•... ... .••..•.•.•..•.. ••• •••. .•.• 1 CHAPITRE 1 : HISTORIQUE, INITIATIVE ET AUDITIONS DU RENVOI... 6

1.1 Avallt-projet de /0; sur la souverail,eté,processus de consultation et Entente du 12

juin 1995...•...•••.•...••••...••... 6 1.2 Premières contestations judiciaires: Affaire Bertrand no 1 et Singh .. .••.•••. .••.••...•• 9 1.3 Le référendum du 30 octobre 1995 et suite des contestations judiciaires .•. 12 1.4 Initiation du Renvoi relatif à la sécession du Québec. ...•. •.. •••. 15 1.5 Nomination de l'ant;cus curiae et auditions du Renvoi •.••.•.•...••••. 16 a) Argumemation de l 'amicus curiae , '" '" 18 b) Argumentation du Procureur Général du Canada '" ,.. ,. 20

c)Argumentation des intervenants '" , , '" , , 22

1.6 Décision de la Cour Suprême du Canada .•.•... .•.. ....•.•.• ...•... .•... 23 a) Compétence de la Cour etjusticiabi/ité des questions soumises '" , .. , , 23

CHAPITRE 2 : RÉPONSES RELATIVESÀLA QUESTION 1 .• 26 2.1 Constitution écrite et principes constitutionnels sous-jacents.. ...••..• ...• ...• 26 2.2 Définition des principes constitutionnels sous-jacents... 27 a) Principe dufédéra/isme '" '" 28

b) Principe de la protection des minorités , '" , 29

c) Principes de fa primauté du droit et du constitutiomza!isme '" .. ... 29 d) Principe de la démocratie '" ., '" , 30 2.3 Principes constitutionnels sous-jacents et sécession unilatérale ...••.••••. ••••. 31 2.4 Principes constitutionnels sous-jacents, amendements constitutionnels et obligation de négocier .•• 33 2.5 Question et majorité claire •••••.••••..••...•.••••...•..•.•••.•••.•..•...•...•••.•••.•.•••..••.... 36 a) Question claire '" 37

b) Majorité claire , . 46 b)i. L'avis de la Cour et le seuil de majorité requis , 47

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b)H. La règle de la majorité simple: Loi universelle de la démocratie? , c) Conclusion , , '" '" , '" , '" '" .,. '" '" , ,

2.6 L'obUgation de négocier ...•••.•.•...•.•...•••...•...•...•.•.•...•...

a) Aucun droit absoluàla sécession , '" , . b) Les négociations devront s'effectuer dans le cadre constitutionnel actuel ,.

c) L'obligation de négocier de bonne foi '" .. , '" , . d) Québec ne pourra imposer unilatéralement l'ordre du jour '" . e) L'obligation de négocier était déjà reconnue en pratique ,

f) Les négociations de pourront être bilatérales .

g) Conclusion , , , '" '" ." , ..

2.7 Droit des Peuples autochtones : participation, consentement et partition ....••.•.•.••...

a) Partie négociatrice et consenteme1lt . b) Le droit de rester Canadiens et la partition du territoire québécois .

c) Conclusion , , .

2.8 Formules d'amendements .

2.9 Impasse des négociations et principe de l'effectivité en droit canadien ...•.•..•...•....

a) Impasse des négociations . b) Principe de l'effectivité versus le droit canadien , .

CHAPITRE 3 : RÉPONSES RELATIVESÀLA QUESTION 2 ...•...•...•.•.•....•. 3.1 Juridiction et compétence de la Cour ...•..•...••.•...•.•...•...•...•...

3.2 Droit à la sécession en droit international ..

a) Est permis ce quiIl'est pas imerdit , ..

b) Droit à l'autodétermination des peuples: principe de droit i1ltematiollal .

c) Droit à l'autodétermination interne et principe de l'imégrité territoriale .

dn1 Droll a auto etermmatlOn extenle. 'l' d' . . '" , , .

e) Conclusion " , " , '" , , '" .

3.3 Effectivité, contrôle du territoire et reconnaissance internationale ..

a) Contrôle effectifdu territoire , , , .. b) Reconnaissance de la communauté internationale ..

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COSCLUSION ••.•••••..••...•••••.••••..•.••. ••..•..••...••...•.•..•.• ••. •... ..•...••..•...••....• .••. •••••..•.. 124 BIBLIOGRAPmE ET MÉDIAGRAPHIE •••.. .•.•...•••...•..••••... .•...••.•.•..•.•.•••. .••.. 128 ANNEXE : Renvoi relatifà la sécession du Québec

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INTRODUCTION

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"D,the politique est

un

!)'slème

de

LTOyant,"eJ

au poulYJir

d'évocation extrêmementpuùsant. ..

» - Stéphane PaquÎD

(L'invenrion d'UD mythe: le pacte entre deuspeuplafondateun)

Sans l'ombre d"un doute, la date du 20 août 1998 doit dorénavant êtte considérée comme faisant partie des annales de l'histoire canadienne. Cette même journée. fut rendue l'une des décisions les plus attendues et controversées de la Cour suprême du Canada: leRenvoi relatifàla sécession du Québec'. Attendue, car pour la toute première fois de l'histoire occidentale contemporaine. une Cour nationale2se pencha sur une question lourde de conséquences: la qualification juridique de la sécession d'une province issue d'un État démocratique.3 Controversée. puisque suite à la décision du gouvernement fédéral d'obtenir des clarifications légales sur la nature d'une telle démarche, l'entièreté du mouvement souverainiste québécois (auquel s"ajoutèrent des appuis fons impoJ1aDts de leaders fédéraiistes.J) s'insurgea contre la tenue d'un renvoi. On dénonça grandement ce processus qualifié d'anti~émocratique, où une «Cour suprême

1Rem'oi relatifàla sécession du Québec, [1998] 2 R.C.S. [ci-aprèsRellVOi sur la sécessionavec renvois aux R.C.S.]

Il convient d'ailleurs de noter que contrairement aux prétentions du ministre québécois Jacques Brassard, un renvoi possède une valeur juridique équivalenteàtout autre jugement judiciaire. C'est du moins l'opinion du professeur PeterW. Hogg, COllstillitiollalLaM' of Canada, 40: édition, 1996, p. 8.6 (d): etdes professeurs F. Chevrette et H. Marx..Droit COl1stilllliolllle/ : Noies et jurispnlde1lce, 1982, p. 181. Pour l'opinion contraire, voir: K. Gagnon,«Dion devient '"l'arroseur arrosé", dit Brassard»),LaPresse [de Montréal],21 août 1998, BI.

2Il impone de noter toutefois le cas des Îles AJand, iJes situées sur le Golfe de Botnie entre la Suède et la Finlande. Entre 1917et 1921, les habitants de ces mèmes iles ont tenté de faire sécession de laFinlande~ une volonté claire de ses habitants s'était en effet établie afin de se joindre à la Suède. Mais les deux commissions de la Société des Nations chargées de s'occuper de la question refusèrent la sécession des iles, jugeant que bien que celles-ci bénéficiaient d'un droit à l'autodétennination, ce dernier ne pouvait menerà un droit à la sécession. Cependant, contrairement au Renvoi présentement étudié, ce sont des commissions d'ordre international et non national qui ont rendu décision. Dece fait, leRenvoi relatifà la sécession du Québecconstitue bel et bien un précédent.

JBon nombre de spécialistes et d'observateurs étrangers ont d'ailleurs louangé le pacifisme de l'initiative fédérale et

son résultat. Parmi ceux-ci, notons le Secrètaire Général des Nations Unies, M. Koti Annan(Le Devoir, le5octobre 1998,A4)~les juristes Français Hamon, Emeri et Avril. et les juristes Belges Corten et de Bruyker (dans D. Darche et P.J. Monahan, «ln Search of Plan A» [1999] 7 CœlOda Watch. nO 1-2)~ ainsi que l'ancien président de la Cour européenne des droits de l'homme, M. Luzius Wildhaber(Ottawa Citi:e", le 11 octobre 1998).

.J En effet, outre les indépendantistes québécois, bon nombre de citoyensetreprésentants de toute allégeance tirent connaitre leur oppositionàla tenue du Renvoi. Parmi ces détracteurs, on comptait certains fédéralistes québécois, tels le Chef de l'opposition officielle de l'époque, M. Daniel Jonhson: l'intellectuelet ancien Chef du Pani Libéral du Québec M. Claude Ryan; l'ancien Chef du Pani Conservateur du Canada devenu depuis Chef du PLQ, M. Jean Charest. Mème le Cardinal Turcotte a joint vivement les rangs des opposants. Quant à la population québécoise francophone. des sondages révélèrent que plus de 55% des citoyens du Québec de langue française remettait fortement en doute l'impartialité deladécision judiciaire et donc, la justesse de tenir un tel renvoi (voiràcet effet:

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paniaIe»5 substituerait illégitimement son choix à celui du peuple québécois6• Pourtant, alors que tout

expert prévoyait une victoire facile du gouvernementféd~la Cour rendit plutôt une décision remplie de nuances et de subtilités. Les neuf magistrats de la Cour suprême7 soucieux des remous que pourraient

causer au Québec un verdict d'apparence favorable au gouvernement fédéral7 choisirent en fait de créer

l'impression d7

un jugement partagé7• Le rejet de deux positions jugées extrêmes suffitàprovoquer cene fausse impression; premièrement, on rejette la légalité d'une sécession unilatérale en vertu du droit canadien et du droit international; deuxièmement, on refuse la possibilité pour les gouvernements fédéral et provinciaux de demeurer indifférents devant la volonté clairement exprimée des Québécois de ne plus faire panie du Canada. Alors que la première de ces conclusions confirme tant les prédictions des experts que la justesse du plaidoyer du Procureur général duCanad~ la deuxième constitue en apparence un large motif de réjouissance pour les souverainistes. Selon les propos du premier ministre Bouchard :

Les juges fédéraux ont donc donné raisonàce que disent les souverainistes depuis 30 ans : après un OUI, il Y aura des négociations. Lors du dernier référendum, nous l'avons répété sur toutes les tribunes. C'était notre conviction. Aujourd7

hui7 c'est une certitude, d'autant

que les représentants du gouvernement fédéral ont avoué, hier, qu'ils allaient se confonner à l'ordre qu'ils ont eux-mêmes reçu de leur cour8•

G. Lachapelle. «Quebec Public Opinion and the Supreme Court of Canada: Will the Decision Be Impartial?»

~ 1997] .5Canada Watch. .no~.. . . , . . - En fait, le mouvement mdependantlste fit cabale en utlhsant pnnclpalement la celebre boutade de 1ancien premier ministre Duplessis:«La Cour suprême, c'est comme la Tour de Pise,çapenche toujours sur le même bord! )) Cette boutadefut lancée au lendemain de la décision de la Cour suprême d'invalider la«Loi sur le Cadenas )), loi adoptée par le régime duplessiste visant à réprimer les libertés individuelles de militants dits communistes. Voir à cet effet le récent livre de Jacques Hébert :J.Hében,Duplessis. no" merci!Montréal, Boréal, 2000.

6Par exemple, le Procureur général du Québec, M. Paul Bégin, déclarepeuaprès l'annonce du Renvoi:«Nous avons

déclaré depuis le début que ce n'est pas aux tribunaux de décider ce qu'il va advenir [... ] )). Reproduit dans W. J.

Newman, «TheQllebec Secessioll ReferellCe,the rule of law and the position of the Attorney General of Canada»,

Osgoode Hall Law School York University, Toronto, 1999.Nous tenons d'ailleursàremercier M. Newman pour cet excellent texte, dont la recherche exhaustive a su alimenter cet historique. Mentionnons que M. Newman est conseiller général des Affaires constitutionnelles du département de la justice du Canada, et fut représentant du Procureur général du Canada lors duRellvoi.

7Voiràcet effet l'excellent article de Michael Mandel, qui démontre l'importance pour la Cour suprême de rendre une décision en apparence partagée. M. Mandel, «A Solomonic Judgment?»,(1999) 7Calla/aWatch. n° 1-2. 8L. Bouchard,«Lafin de plusieurs mythes fédéralistes ... »,LaPressefdeMOIIlTéal}.22 août 1998,83.

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La Cour, en refusant de se soumettre au caractère réducteur du libellé des questions sownises par le gouvernement fédéral9, semblait ainsi assurer sa réputation d'institution impartiale, et redorait du même

coupson blason auprès des souverainistes québécois. fi n'en fallait pas plus pour déclencher une pléiade de critiques laudatives et dithyrambiques, tant auprès de l'intelligentsia francophone qu'anglophone. Les journaux du pays entier titraient les«Magnificient judgment on secession : a model for the world»10,« La

victoire du bon

sens })

11, «Common sense from the Court»12,«Le jugement du bon sens »13,«Les experts réagissent de façon positive»loi, «Awise judgment »IS, et «Un jugement nuancé»16. Qui plus es~ tous

semblèrent y trouver leur compte. Aux commentaires les plus flatteurs s'ajoutèrent les «Federalist, separatist camps can both daim victoty»17, « Bouchard et Chrétien heureux du jugement»18, «We wi~

both claim»19et«Un jugementàla Salomon»20.

En

bref: tousygagnen~nul n'y perd.

Bien que cette impression duRen\'oirelatifà/0sécessiondu Québec semble largement répandue chez bon nombre d"académiciens des plus émérites, nous ne pouvons y souscrire. Notre thèse s"attardera ainsi à

démontrer que loin d'être une décision partagée, le Renvoi constitue

un

échec non équivoque du camp souverainiste. Et les raisons fourmillent. De prime abor<L la décision démontre clairement le caractère illicite et révolutionnaire de la démarche référendaire de 1995. Deuxièmemen~ malgré son apparence de gain pour le camp du OUI, l'obligation de négocier est au contraire une exigence supplémentaire que de\Tont remplir les leaders indépendantistes afin de parvenir à leursfins. En fai~ bien que laCourpuisse sembler prima!aciae «couper la poire en deux », une telle impression ne peut résister à l'analyse

9En effet, les questions soumises référaient uniquement à la sécession unilatérale. Voir àcetégard le texte de Daniel

Darche«Editorial-Ottawa's Legal Offensive: AnEasyWin»(1997)CœllldaWatch. Vol.5, n°6.

10W.Johnson,Fillallcia/Post,21août1998, p.13.

Il A.Dubuc. LaPresse IdeMOl1tréalj,21août1998.82.

12TheGazelle,21 août1998, 82.

13L. Gagnon,LaPresse IdeMolllréalj,22août1998.B3.

14Y.Boisven.LaPresse[deMOlltréalJ, 21 août 1998, BI.Bien sûr, il yeut des critiques. mais celles-ci furent plutôt

mitigées.

151. H.Grey,TheGazelle.22 août 1998,B5.

16LaPresseIdeMOlltréal

J,

21 août 1998, A8.

17J.Bryden,Ottawa Citizen.21 août 1998,Al.

IlLaPresse/deMOlltréa/j,21 août1998, Al.

19TheGazetle,21 août1998,82.

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1-rigoureuse des impacts constitutionnels et politiques de sa décision. Selon Michael Mandel : « [... ] the essence of Solomon' s judgment in theMo/hers · Case was not that it gave something to bath sides but that it pretended to, flushing out the wrongfuJ claimantby trickety and ultimately handingtotal victory to ber adversary»21 •

En somme, hormis les apparences inverses, une application intégrale et complète de l'Avis en vient pratiquement

à

enrayer les possibilités d'une éventuelle sécession du Québec du Canada Au cours de cet ouwage, nous tenterons d'étayer les conclusions précédentes en offiant une analyse théorique et pragmatique des divers aspects de la décision. Nous nous attarderons en premier lieu à l'historique des faits et incidents ayant mené au Renvoi, en mettant principalement l'emphase sur lesAffaires Bertrand no

Jel no2. Le processus référendaire de 1995

sera

lui aussi examiné.

Dans un deuxième temps, nous analyserons les composantes de la réponse de la Cour reliées à la légalité de la sécession en droit interne canadien. Nous verrons alors les motifs invoqués afin d'amenuiser bon nombre de mythes entretenus au fil des ans par le mouvement indépendantiste québécois. Panni ceux-ci, notons l'injusticiabilité de la question sécessionniste, la préséance du droit international sur le droit interne en cene matière, et le droit de la province du Québec d'effectuer la sécession unilatérale par l'entremise du principe d'effectivité. S'ajoutent à celles-ci l'inviolabilité du territoire québécois, l'obligation d'adopter la règle de la majorité simple lors d'un prochain référendum, la capacité de l'Assemblée Nationale de décider seule des règles entourant le processus référendaire, et le pouvoir d'imposer unilatéralement rageoda et l'objet des négociations. Enfin,le double discours inique et fallacieux tenu par les différents pone-parole souverainistes sera également mis au grand jour.

20lA PressefdeMOlllréalJ,21 août 1998, AI.

21 M. Mandel,supranote 7.

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Au cours du troisième chapitre de cetouvrage~nous procéderons à une étude approfondie des tenants et aboutissants du statut légal de la sécession en droit international. Nous verrons ainsi le peu de crédibilité accordé par la Cour aux arguments avancés par"omicus curiae, et il sera loisible de constater les failles de l'analyse effectuée par certains intellectuels souverainistes en regard au droit

à

J'autodétennination des peuples. Par la même occasio~ nous démontrerons les faibles probabilités de la reconnaissance internationale d'une tentative de sécession unilatérale entreprise par un gouvernement séparatiste~ et examinerons les difficultés reliéesàune prise de contrôlemanu militari du territoire québécois. E~ par l'entremise d~une synthèse de précédents intemationa~ nous dévoilerons l'incapacité pour une entité sécessionnisted~obtenir la reconnaissance de la communauté internationaleàl'encontre de l'assentiment de l'État prédécesseur.

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CHAPITRE

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HISTORIQUE, INITIATIVE ET

AUDITIONS DU RENVOI

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1.1 Avant-projet

de

loi sur la souveraineté,

processus de consultation et Entente du 12

juin 1995

Sansl'A l'ant-projet de loi sur la souverainetéZl,déposéàl'Assemblée nationale le 6 décembre 1994 par le

nouveau gouvernement péquiste, jamais leRenvoi rela/ifàla sécession du Québec n'aurait vu le jour. En effet, en contenant les moult détails de l'accession du Québec à la souveraineté (nouvelle constitutio~ association économique, monnaie, traités, etc.), nul doute quel 'A vant-projet de loi constitue le premier pas vers une éventuelle tentative de sécession unilatérale; ses dispositions confinnent sans équivoque le droit du Québecàla sécession. Onyprévoit que « le Québec est un pays souverain»23,et que «le gouvernement doit, confonnément aux modalités prescrites par l'Assemblée nationale. pourvoir à l'élaboration d'un projet de constitution pour le Québec etàson adoption »2-l.

On

y ajoute que « le Québec conserve les

frontières qui sont les siennes au sein de la Confédération canadienne au moment de l'entrée en vigueur de l'article 1»25, et que « la monnaie qui a cours légal au Québec demeure le dollar canadien»26. Bien que l'on y inclut également la proposition d'une entente de nature économique avec le reste du Canada27,

l'échec d'un tel accord ne viendrait nullement compromettre l'accession du Québec àla souveraineté. Comme l'explique l'article 16 del'A vant-projet de loi: « La présente loi entre en vigueur un an après son approbation parréférend~ à moins que l'Assemblée nationale ne fixe une date antérieure»28.

De même, nulle disposition n'inclut, de près ou de loin, la nécessité de négocier une modification de la Constitution canadienne afin de réaliser la sécession. Au contraire, l'Avant-projet de loi pennet au

22Avant-projet de loi sIIrlasouverainetédl,Québec, Assemblée nationale duQuébec, Première session, 3S4!nw lég.,

Québec. 1997, 6décembre1994. 23Ibid.

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1. 24Ibid.

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3. 2~Ibid,art.4. 26Ibid,art. 6. 27Ibid.,art.2. 28Ibid.,

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gouvernement du Québec29., sans 1"accord des représentants du reste du Canada, d"établir unilatéralement

et sous des apparences légales ce que seraient les modalitéset conditions entourant la naissance du nouvel État québécois. Selon les mots deWarren J.Newman:

The brief overview of the provisions of the Draft Act respecting the souvereignty of Québec provides an indication of how sweeping

in

scope was the proposed legislation. What it portendedwasnothing lessthana revolution;anovenhrow of the established legal order ofCanada. But it was a revolution mat dared not

meak

its name. The •Declaration of sovereignty' was to be clothed in statutory fonn. and on its face the Act would promise conrinuity, not chaos. However., byan anful sleigbt ofband., the legislature of the province of Quebec, which exercices its powers under the Constitution of Canada., would be replaced by the National Assembly of the independent state of Quebec, exercising powers under a new régime purportedly established by the sovereignty legislarion itselFo.

Alors que le gouvernement fédéral refuse d'acquiescer à la demande d'un groupe de citoyens du Québec de contester judiciairement la validité del 'AIt'ont-projet de

lol',

le projet de sécession unilatérale continue de faire son chemin. Suite à la vaste entreprise de consultation prévue parl'Avant-projet, où «tout peut être

discuté~ sauf bien sûr ridée de faire de ravant-projet de loiun texte orienté vers runité canadienne»32, le

Parti Québécois, le Bloc Québécois et l'Action Démocratique du Québec en viennent à une entente le 12

juin 1995.Celle-ci., disent-ils., pennettra enfin de réaliser«un véritable changement»33 :

Dans la mesure où les négociations se déroulent positivement., l'Assemblée nationale déclarera la souveraineté du Québec après entente sur le traité de Partenariat. Un des premiers gestes du Québec souverain sera la ratification du traité de partenariat. Ces négociations ne dureront pas plus d'un an. sauf si rAssemblée nationale en décide autrement3-' .

29 Sous réserve des objections fonnulées par l'Assemblée nationale. Toutefois, compte tenu du fonctionnement de

notre système parlementaire, où l'exécutif est bien souvent majoritaire, la distinction entre le pouvoir exécutif et le fc0uvoir législatif est. on en conviendra,peuprononcée.

oW.J.Newman.supranote 6, p. 5. Nous soulignons.

31 En effet, le«Comité spécial sur l'unité canadienne», par l'entremise d'une lettre envoyée le9décembre 1994au premier ministre Chrétien., demandeàce dernier de procéder immédiatementàun renvoi en Cour suprême afin de vérifier la légalité del'Avall1-projel de Loi.Celui-ci refuse, jugeant l'affaire prématurée.

321.Parizeau,POlir un Québec souverai",Montréal, VLB éditeur., 1997. p. 88. Ce processus, qualifié de«bidon» par

plusieurs. a d'ailleurs soulevé l'ire du PLQ et de son chef de l'époque, M. Daniel Jonhson. Voir le document«Que signifie pour vous la séparation du Québec?» publié par le PLQ en février 1995. Ce dernier semble reprendre le slogan de mai 68 :«Consultations: piègesàcons!».QuantàluLM. Parizeau dit ne pas comprendre«comment on fuisse prétendre que sa démarche n'est pas démocratique », dansLa Presse [de Mo"tréalJ,le10décembre 1994,81.

3P.L. 1LoislIrl'ave,,ir duQuéhec~ Assemblée nationale duQuébec., 1ftsess., 3S~ lég., 1994~ Québec (7 septembre I99S~ann. entente du 12 juin).

34Ihid.p. 21. Nous soulignons.

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Ce modus ,'ivendi marque le début du virage souverainiste mené par le chef du Bloc Québécois Lucien Bouchar<L virage visant

à

adoucir la position indépendantiste orthodoxe et de ce fai~augmenter les appuis au projet. Nonobstant ce changement dedirectio~ qui pennet d~adopter le concept de panenariat politique,

l'Al'onl-projet (peu après devenu Projet de Loi sur l'm'enir du QuébecJs) continu de brandir la menace

d~unesécession unilatérale. En plus d'imposer unilatéralement la durée des négociations, il en détennine aussi la teneur et l'objer36, et établit cenaines conditions sine qua non à leur aboutissemen~ telles

rintégrité du territoire québécois et l'utilisation de la monnaie canadienne3' . De même~ aucune

modification à la Constitution canadiennen~estconsidérée comme étant préalable à la proclamation de la souveraineté du Québec: «dans la mesure où les négociations seraient infructueuses, l'Assemblée nationale pourra déclarer]a souveraineté du Québec dans les meilleurs délais»38.

En sonune, la possibilité d'une sécession unilatérale, loin d'être exclue, fait partie intégrante de la démarche souverainiste. Comme le confinne avec outrecuidance l'ex-premier ministre Jacques Parizeau :

On

constatera que mes discours, en ce qui touche les négociations avec le Canada, sont rédigés de façon à pennettre une telle déclaration de souveraineté. Et je ne me suis jamais engagéen public ou en privé àne pas faire de déclaration unilatérale de la souveraineté. Tout ce qui a été écrit dans les journauxàce sujet démontre une fois de plus~ue, dans ces matières, ceux qui parlent ne savent pas et que ceux qui savent ne parlent pas3•

Concernant l'Entente, il ajoute candidement: «Je ne comprends

pas

ceux que les mots effiaient. Une déclaration unilatérale de souveraineté du Québec faisait panie intégrante de la loi et de l'Entente du 12

juin, advenaitunéchec des négociations de panenariat»40.

3' Ibid Cette loi inclura en annexe les détails de l'emente, ainsi que les propositions des citoyens du Québec

recueillies par l'entremise de la Commission nationale sur l'avenir du Québec,etl'ajout du partenariat politique.

36On prévoit de façon prioritaire la négociation d'une union douanière, la citoyenneté, la politique monétaire et la

libre circulation des personnes.

37 Pourtant, comme nous le verrons subséquemment, il semble évident que ces matières devraient faire l'objet de

sérieusesnégociations, advenant un vote clairenfaveur de la sécession. 38P.L. 1Loisur "ave,,;r clu Québec, supranote33,p.21.

39J. Parizeau,supranote32,p.286. Nous soulignons.

40W.1. Newman,supranote6,p.8.

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Dévoilant les derniers dessous de son « Grand jeu»·I(, M. Parizeau admet que même les négociations prévues et promises avec le reste du Canada auraient pu être refusées par le gouvernement du Québec, ce dernier utilisant ainsi la sécession unilatérale non à titre de sortie de secours, mais bien à titre de voie principale vers la souveraineté:

À l'occasion d'une visite officielle en France en janvier 1995 (... ) Valéry Giscard d'Estaing a soulevé une question dont je n'avais pas jusque-là, compris la portée. Il faut disait-il en substance. dès la victoire du OUI au référendum. dans les heures ou les jours qui suivent qu'un geste solennel soit accompli par le Québec pour proclamer sa souveraineté. Sans cela, aucune reconnaissance rapide, c'est-à-diredans la semaine ou les dix jours suivants, n'est possible de la part d'un pays étranger. Que l'on suspende, pendant disons six mois ou unan, l'application de la proclamation d'indépendance pour donner le temps à des négociations avec le Canada d'aboutir ou pour rédiger conjointement avec le Canada un traité de partenariat, fort bien. Seulement la France, comme les autres pays du monde dureste~ ne peut reconnaître qu'un pays. Elle ne reconnaît pas uneintention~2.

Cette déclaratiolL plutôt troublante, confinne un fait: non seulement la proclamation d'une sécession uniJatérale était-elle possible advenant J'échec des négociations, elle était souhaitable et souhaitée.

1.2 Premières contestations judiciaires: Affaire Bertrand no 1 et Singb

Compte tenu de ce qui précède, il est loin d'être étonnant que J'invalidité constitutionnelle de la démarche souverainiste ait été soulevée devant les tribunaux. La première contestation est introduite lors del'Affaire Bertrand no 1~3. Le requérant, Me Guy Bertrand, dépose le 31 juillet 1995 devant la Cour supérieure du Québec une action en demande pour jugement déclaratoire et injonction pennanente; il formule par la même occasion une requête en injonction provisoire et interlocutoire. En soutenant l'illégalité et

l'inconstitutionnalité du processus référendaire, Me Berttand vise ainsi àattaquer la validité de

1'A\'ant-41 M. Parizeau qualifie lui-même de cette façon la stratégie déployée afin d'obtenir les appuis de la communauté

internationale. Voir: 1. Parizeau,supranote 32.p.284.

42 Ibid, p. 286. Nous soulignons.

43Bertrandc.Régi".[1995] R.J.Q. 2500 (C.S.Qué.).

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projet de loi etàinterdire la tenue d'un éventuel référendum sur la souveraineté. Notons par ailleurs que cette demande du requérant fait suite au refus témoignéparle Procureur général du Québec et le Procureur général du Canada de vérifier eux-mêmes la validité de la démarche séparatiste4-l. Le paragraphe 14 de son mémoire explique:

[L]a conduite du gouvernement du Québec, de même que ses faits et gestes en regard de l'avant-projet de loi sur la souveraineté et de rentente du 12 juin 1995, constituent un véritable coup d'état parlementaire et constitutionnel., une fraude à la Constitution canadienne et un détournement de pouvoirs qui auront pour conséquence de violer et de nier les droits et libertés du demandeur et ceux de tous les contribuables québécois.Js.

Après avoir rejeté le 31 août 1995 les moyens d'irrecevabilité soulevés par le Procureur général du Québec.J6 (jugement qui influencera la décision du P.G.Q. de cesser de prendre part aux auditions.J7), le Juge Lesage de la Cour supérieure du Québec refuse quelques jours plus tard d'accorder une injonction afm de prévenir la tenue d'un éventuel référendwn. Il s'explique:

Le demandeur [Me Bertrand] nous demande d'émettre une série d'injonctionsàl'encontre des défendeurs et du gouvernement du Québec [... ] le tribunal ne peut certainement pas paralyser le fonctionnement de l'Assemblée nationale ni lui interdire de débattre de la

4-tEn effet. alors que la réponse du Procureur général du Québec se fait toujours attendre, le Procureur général Allan

Rock. en cohérence avec la position du premier ministre du Canada. lui réplique: «Je saisis bien les préoccupations juridiques que vous soulevez, mais nous croyons cependant qu'à l'heure actuelle la véritable question n'est pas comment la séparation pourrait éventuellement se faire, maisest~ceque les Québécois veulent toujours faire panie du Canada. C'est au gouvernement du Québec de faire la démonstration que la séparation serait dans les meilleurs intérêts des Québécois. » En fait, ce refus témoigne explicitement la crainte éprouvée par le gouvernement fédéral de

«provoquer» les Québécois la veille du référendum. Un extrait de cette lettre fut reproduit dans W. J. Newman,

supranote 6, p. 8.

45Slipranote 43.

46 À Iïntérieur desarequête, le P.G.Q. affirme que la démarche de Me Bertrand a pour but d'engager les instances

judiciaires dans un débat purement politique, et en viendrait ainsi à interférer avec les pouvoirs, fonctions et privilèges de

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Assemblée nationale. Il soutient de plus que le référendum sur la souveraineté est «une démarche démocratique fondamentale qui trouve sa sanction dans le droit international public et dont l'opportunité n'a pas à être débattue devant les tribunaux»~Requête du Procureur général du Québec en irrecevabilité,supranote 43, le 24 août 1995.

47En effet, suiteàce jugement interlocutoire, le P.O.Q. décida de ne plus prendre pan aux auditions concernant la

requête de Me Bertrand. Le 5 septembre 1995, le premier ministre du Québec réprouva indirectement le jugement en demandant au Président de l'Assemblée nationale de procéder d'urgenceà une séance parlementaire spéciale, où l'on introduirait laLoi surl'avellirduQuébec, ainsi quelaquestion référendaire. Il ajoute, dansune attaque subtilement dirigée vers le jugement Lesage: « L'Assemblée pourra également être saisie, si besoinest, de toute mesure propre à affirmer ses droits, privilèges et prérogatives,à protéger ses travaux contre toute ingérence et à garantir que le peuple du Québec pourra effectivement se prononcer sur son avenir.»Lettre du premier ministre Parizeau envoyée le 5 septembre 1995 au Président de l'Assemblée nationale, M. Roger Bertrand. Un extrait de cette lettre estreproduit dans W.J. Newman,supranote 6, p. 9.

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question. Ce serait enfreindre les privilèges parlementaires (... ]

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faut comprendre que la population désire s'exprimer. Émettre une injonction contre la tenue du référendum risquerait de créer un tort plus grave que celui que l'on veut prévenir'8.

Cependant= «[U]n jugement déclaratoire peut avoir un effet tout aussi et même plus efficace que

rinjonction (... ] La déclaration n'estpas une intrusiondans le fonctionnement du pouvoir exécutif ou du pouvoir législatif»-19. En conséquence=

Le Projet de loi no l, intitulé Loi sur l'avenir du Québeèo, présenté par le premier ministre Jacques Parizeau àl'Assemblée nationale le 7 septembre 1995, visant à accorder

à }'Assemblée nationale du Québec le pouvoir de proclamer que le Québec devient un

pays souverain sans avoir à suiwe la procédure de modification prévue à la partie V de la

Loi constitutionnelle de 1982, constitue une menace grave aux droits et libertés du demandeur garantis par laCharte canadienne des droits et libertés, particulièrement aux articles 2,3.6,7,15 et24paragraphe 1SI.

Suiteàce premier jugement intituléAffaire Bertrand no /, une deuxième requêteenjugement déclaratoire est déposée en Cour supérieure le 23 octobre 1995 par leDrRoopnarine SinghS2. Bien que le requérant ne vise pas cene fois à interdire la tenue d'un référendum. il soutient par contre que le refus apparent de ]a pan du gouvernement du Québec de respecter la décision du Juge Lesage amène ]a nécessité d'obtenir un

jugement plus catégorique à cet effet. Vu la date tardive du dépôt de la requête, aucune décision n'est cependant rendue.

48Supranote 43, p. 2514-2515. 49Ibid.,p.2515.

50 Nous soulignons. En fait, le jugement Lesage est rendu le lendemain de la présentation du Projet de Loi sur

l'ave,,ir du Québecqui, comme nous le disions, reprend de manière plusétofféeles énoncés de1Jfvmlt-projet de loi sur la souveraineté du Québec.LeProjetdeloi,àla demande de MeBenrand, fut déposé devant le Juge Lesage. La même journée(7 septembre), on présenta aussila question référendairequ~ pour des raisons inconnues, n'était pas incluseàl'intérieur duProjel de loi.

51 Supranote43,p.2516.

52Sillghc.Procureur gé"éral dli Québec,C. S. Montréal, no500-05-01112275-963. Leprofesseur Stephen Scott de

l'Université McGili représenta les intérêts de Singhet al.dans cette affaire.

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1.3 Le référendum du 30 octobre 1995 et la suite des contestations judiciaires

Les électeurs et électrices du Québec se rendent aux urnes le 30 octobre 1995 afin de répondre à la question suivante: « Acceptez-vous que le Québec devienne souverai~ après avoir offen au Canada un nouveau Partenariat économiqueet politique dans le cadre du projet de loi sur l'avenir du Québec et de

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entente signée le 12 juin 1995?)53.

L'option du OUI récolte 49,42% des vo~ comparativement à 50,58% pour l'option du NON, qUI l'empone alors de justesse~. Malgré cette deuxième défaite consécutive pour les indépendantistes Québécois. l'espoir de faire du Québec un État souverain demeure inaltérable. Le discours du premier ministre Parizeau le soir de la divulgation des résultats est on ne peut plus clair: «On était si proches du pays. C'est raté de peu. Pas pour longtemps, pas pour longtemps! On n'attendra pas quinze ans, cette fois-ci [...

J.

C'est vrai qu'on a été battus, au fond, par quoi? Par l'argent, puis par des votes ethniques. essentiellement (u.] N'oubliez jamais que les trois cinguièmes de ce gue nous sommes ont voté OUl. C'était pas toutàfait assez. mais bientôt,çale sera. Notre pays, on l'aura!»55.

Vu la défaite, le Projet de Loi sur l'avenir du Québec n'est pas soumis

à

des fins d'adoption par l'Assemblée nationale du Québec. Ceci n'empêche toutefois pas la guérilla politico-juridique concernant la légalité de la démarche sécessionniste du gouvernement québécois de se poursuivre. Le 3 janvier 1996, Me Guy Bertrand sonne la charge à nouveau, et saisit la Cour supérieure d'une demande d'injonction et de

53 Déposée devant l'Assemblée nationale le 7 septembre 1995, en confonnité avec la Loi sur la consultation

'/1plllaire.L.R.Q .•c.C-64.1.

Rapportdes résultats officielsdu scrutin: Référendum du 30 octobre 1995, Directeur Général des Élections du

Québec,novembre 1995.

551. Parizeau,supranote 32. p. 143-144. Nous soulignons.Le«nous») de M. Parizeau faisait évidemment référence aux francophones, qui ont effectivement votédans leur majorité en faveur de la souveraineté. Suite à ces propos plutôt xénophobes (i.e. que seul un francophone pouvait ère un «vrai) Québécois), M. Parizeau fut obligé de présenter sa démission au cours des jours suivants. Avouons que ces propos vont à l'encontre du «EstQuébécois qui veut bien l'être )). fonnule pounant servie à souhait par le camp indépendantiste. On devrait plutôt dire, en suivant le raisonnement précédent: «Est Québécois le francophone qui vote OUI )). Lucien Bouchard y ana lui-aussi de

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jugement déclaratoire reliée à la validité constitutionnelle d'une déclaration unilatérale d'indépendance56•

Le Procureur général du Québec réplique,et dépose le 12 avril 1996 une requête en irrecevabilité faceàla demande de MeBertrand. Le 30 avril 1996,il fait de même en rapportàla demande du Dr Singh. Il réi tère alors la position prise dansl'Affaire Bertrand no 1 :

Le recours du demandeur est également irrecevable parce que le processus d'accession du Québec à la souveraineté relève essentiellement d'une démarche démocratique fondamentale

gui

trouve sa sanction dans le droit international public et la Cour supérieure n'a pas juridiction à cet égard. Le pouvoir judiciaire n'a pas à intervenir relativement à la question du processus d'accession du Québec à la souveraineté, l'opponunité de ce processus n'ayant pasàêtre débattue devant les tribunauxs7•

Bref: non seulement on reconfinne un droit à la sécession unilatérale, mais on exclut de plus toute juridiction des tribunaux canadiens en cette matière. Ce faisant, le Procureur général du Québec a inopinément réveillé le lion qui donnait jusqu'alors paisiblement: le gouvernement fédéral. Suite aux motifs invoqués par le P.G,Q.

afin

de faire rejeter les requêtes respectives de Me Bertrandet du

Dr

Sin~

le Procureur général du Canada Allan Rock (qui avait jusque-là choisi de refuser toute participation aux recours judiciaires), statue en Chambre que:

[l1he question under consideration is the position taken by the government of Quebec that the Canadian constitution and the courts are absolutely without a roleinthe question of a declaration of sovereignty. That's an extraordinary position, and we're currently studying the implications ofthat position.58.

Quelques jours plustard, soit le 10 mai 1996, le gouvernement fédéral se décide enfin àprendre part aux auditions del'Affaire Bertrand no 2. Sa position se résume ainsi:

The Attorney General of Canada does Dot challenge the right of Quebecers to express democratically their desire to secede or to

stay

inCanada. However, the secession of any

commentaires semblables., dénonçant le fait que les Québécois fonnent le peuple de race blanche qui se reproduit le moins en Occident.Lecaractère exclusif du projet souverainiste n'avait jamais paru si évident.

S6Bertralldc.Bégi",[1996]R.J.Q. 2393(C.S.Qué.).

57Ibid.; Sillghc. Procureur généralduQuéhec, C.S. Montréal, n° 500-05-01112275-953; Requête en irrecevabiJité,

r.ar.4, 12,et 13. Nous soulignons.

8Voir«Quebec's Coun Stand is Out ofLine, Rock says»,TheGazette,4 mai 1996.

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province would need to he doneinaccordancewiththe rule of law. The rule of law is not an obstacle to change; rather~ it provides the framework within which change can occur in an orderly fashions9.

Le 30 aoûtsuivan~la Cour supérieure du Québec, sous la plume du Juge Pidgeo~rend une décision selon laquelle la requête en injonction et jugement déclaratoire sownise par Me Bertrand est jugée recevable. Bien que la décision ne tranche pas immédiatement le fond de l'affaire~elle soulève toutefois quelques questions auxquelles les instances judiciaires se devront ultérieurement de répondre :

• Le droitàl'autodétennination est-il synonyme de droitàla sécession? • Le Québec peut-il unilatéralement faire sécession du Canada?

• Le processus d'accession du Québec à la souveraineté trouve-t-i1 sanction dans le droit international?

• Le droit international a-t-il préséance sur le droit interne?

Le soulèvement de ces questions provoque essentiellement deux répercussions; premièrement, le Procureur général du Québec refuse dorénavant de prendre part aux auditions sur le fond de la requête Bertrand60;

deuxièmement, le débat est propulsé en Cour suprême, où les questions formulées par Allan Rock. Procureur général du Canada, sont identiquesàcelles soulevées par la Cour supérieure du Québec.

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Exposé de la position du Procureur général du Canada, 22 mai 1996, p. 2, par. 6. Reproduit dans W. J. Newman,

supranote 6, p. 20.

60 Le Procureur général du Québec, M. Paul Bégin, confia à la presse le 4 septembre 1996 :«[... ] après avoir

prétendu, suivi nos propositions pendant deux reprises devant le juge Lesageetdevant le juge Pidgeon à l'effet qu'il ne revenait pas aux tribunaux de se prononceretaprès avoir reçu deux décisionsàcetégard, nous avons décidé de ne pas poner en appel cette décision et de ne pas être présent devant la Cour lorsque le dossier continuera [... ]».

Transcript de la conférence tenue par le Procureur général duQuébec, le 4 septembre 1996. Reproduit dans W. J.

Newman,supranote 6, p. 23.

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1.4 Initiation du Renvoi relatif

à la sécession du Québec

À la Iwnière des interrogations du jugePidgeo~ le gouvernement fédéraJ annonce. le 26 septembre 1996. son intention de porter devant la Cour suprême du Canada le débat concernant la légalité d'une déclaration unilatérale d'indépendance. Le ministre Rock expliqueà la Chambre des Communes:

[... ] the CUITent govemment of the province of Quebec seems detennined to bring the issue to a third vote at sorne future rime. Moreover. itdaims to he enritled to make a unilateral declaration of independance to create a separate state of Quebec. In our view that position is contrary to Canadian law, is unsupponed by international law. and is deeply threatening to the orderly govemance of our nation [... ].

Il ajoute:

The government of Canada does not argue against the legitimacy of a consultative referendum[ ... ] But however important mat a consultation May he. the result of a referendum does notinand of itself effect legal change. [... ] The separatist leaders argue that the rule of law is simply a ruse by which that Canadians Govemment intends to defeat an expression of democratic will by Quebecers- a trick to deny the results of a lost referendwn. They argue that to require an orderly process within the legal framework would place Quebec in a sttaighjacket. defeating the democratic result of a future referendum.

Such arguments are made for political effect. They are based on the misunderstanding that the mie of law and democratic action are somehow mutually exclusive. That is quite wrong.In facr. they coexist in hannony. Thesafetyof bath depends uoon the integrity of each. The failure to observe either endangers the twoalonce (...

J.

The issue arises from the faIse claim by the Govemment of Quebec that it alone, in a unilateral fashion that changes according to its short tenn political interests. can decide the process that may learl to secession. [...

J

Everyone has the right to he certain that the process is lawfu1, mutually acceptable and fair to al161•

Suiteàcette déclaration (qui marque le refusfinaldu gouvernement du Québec de participer au Renvoi), le gouvernement fédéral soumet officiellement, selon les dispositions de l'article S3 de la Loi sur10 Cour

61 Déclaration de l'honorable Allan Rock,DébatsdelaChambre des communes,26 septembre 1996, volume 134,no

75,p.4707-4711.

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suprême62, trois questionsàla Cour suprême du Canada. Celles-ci~ prévues par le décret no 1996-149163, sont libellées selon les termes suivants:

1. L'Assemblée nationale, la législature ou le gouvernement du Québec peut-il, en vertu de la

Constilution du Canada, procéder unilatéralementàla sécession du Québec du Canada?

2. L'Assemblée nationale, la législature, ou le gouvernement du Québec possède-t-il, en ,'ertu du droit international, le droit de procéder unilatéralementàla sécession du Québec du Canada?À cet égard en "ertu du droit international, existe-I-i1 un droitàl'autodétermination qui procureraità l'Assemblée nationale, la législature, ou le gOUl'ernement du Québec le droit de procéder unilatéralement à la .f;écessiol1 du Québec du Canada?

3. Lequel du droit interne ou du droit international aurait préséance ou Canada dans l'él'entualité d'un conflit entre eux quant au droit de l'Assemblée nationale. de la législature ou du gouvernement du Québec de procéder unilatéralementà la sécession du Québec du Canada?

I.S. Nomination de

/'amicus curille

et auditions du Renvoi

Considérant le refus du gouvernement du Québec de participer aux auditions du Renvoi~ la Cour suprême n'a d~autrechoix que de nommer, conformément à l'article S3 (7) de la Loi sur la Cour suprême, un amicus curiae. Ce dernier a pour mission d'assister la Cour dans sa démarche, en présentant le point de vue adverse. La Cour annonceainsi~ le 11 juillet 1997, que MeAndréJoli-eœur, souverainiste notoire, a accepté de servir

à

ce titre. Une telle nomination ne se fait pas sans vagues. Les souverainistes, en 62Loi57lr la Cour suprême.L.R.C. 1985.c.S-26,

an.

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cohérence avec leurs positions initiales64, dénoncent ipso !aclo la panicipation de Me Joli-Cœur aux auditions. Selon les propos du chroniqueur Yves Boisve~ les leaders indépendantistes avaient en fait «excommunié préventivement tout avocat, provenant de n'impone où dans le monde connu, qui oserait [accepter Je mandat de représenter l'argumentation indépendantiste]»65. Le monde juridique ne reste pas

passif devant une telle opération de salissage de la part du gouvernement québécois. Me PierreBienven~ à l'intérieur d'un article dénonçant vivement l'attitude gouvernementale, affinne :

La réaction du gouvernement du Québec à rannonce de l'intention de la cour de nommer un amicus ne s'est pas limitée à réaffinner son opposition au renvoi fédéral, non plus qu'à réitérer la décision du gouvernement du Québec de ne pas participer à cette procédure. Ses porte-parole ont également jugé bon de stigmatiser à ravance tout membre du Barreau du Québec qui oserait accepter ce mandat du plus haut tribunal du pays, le qualifiant«d'imposteur», de«faux porte-parole» qui s'embarquerait dans une «aventure scabreuse» [... ] Si l'on pennet aux politiciens d'attaquer personnellement un avocat parce qu'il accepte de défendre un point de vue avec lequel un gouvernement n'est pas d'accor~ va-t-on aussi permettre les dénonciations publiques d'avocats qui entreprennent la défense d'autres causes impopulaires auprès de la majorité du moment?66

En plus des accusations de trahison prononcées à l'endroit de Me Joli-Cœur, les leaders souverainistes n'en démordent pas: le peuple du Québec a le droit de proclamer unilatéralement son indépendance61.On réitère que la question ne relève pas du droit, mais bien de la démocratie: «le dernier mot revient au peuple québécois»68. On souligne alors l'iHégitimité du Renvoi, dénonçant à la fois son caractère

63C.P. 1996-1997.

64C'est-à-dire que la question ne relève pas du ressort des tribunaux. Le premier ministre Bouchard, quelques mois

plus tard, réaffirme cette position:«le gouvernement québécois, lui, ne sera pas présent lors de ces audiences. [...] la réponse, c'est la primauté de la démocratie.»Ce propos de M. Bouchard fut tenu lors d'un discours à la Faculté de droit de l'Université de Montréal, et est reproduit dans W.1.Newman,supranote 6, p. 31.

6SY. Boisvert,LaPresse {de Montréal},le 14 mai 1997,OS.

66P. Bienvenu«Àla défense d'un adversaire»,1erdécembre 1998, LeJounlOlduBan-eau.Nous soulignons.

67Dans un article paru le 16 septembre1997dans le quotidienLeDevoir, M. Jaques Parizeau affirme:«Lameilleure

façon d'obtenir l'autorisation du Canada, c'est de ne jamais renoncer, fut-œ unmoment,à une déclaration unilatérale de souveraineté.»Voir: «La déclaration unilatéraleestindispensable»,LeDeVOiT, 16 septembre 1997.Lepremier ministre Bouchard est tellement d'accord avec la position de Parizeau qu'il affirme le même jour, en conférence de presse:«Je pourrais signer le texte de M. Parizeau.Jeconsidère que c'est un excellent texte qui est très clair, quiest

très transparentetqui pose très bien les choses.»Reproduit dans W. 1. Newman,supra, note 6, p. 30.

68Ces propos du premier ministre Bouchard sont rapportésàl'intérieur de l'article«Le renvoi en Cour suprême: Le

dernier mot revient au peuple québécois»),publiédansle quotidien LeDevoir, le 13 février 1998, AIl.

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«colonial»69 et la partialité de la Cour suprême70. On rejette ainsi l'applicabilité de rAvis, annonçant

publiquement qu'un gouvernement du Parti Québécois ne respecterait tout simplement pas la décision de la Cour71. Sous ce climat politico-juridique des plus malsains, débutent les auditions du Renvoi.

U)

Argumentation de l'amicus curiae

Le 18 décembre 1997, Me André Joli·Cœur dépose son mémoire. Il y soulève en premier lieu des objections reliées à la compétence de la Cour et

à

la justiciabilité de la cause, spécialement l'illégalité de l'article 53 de la Loisur la Cour suprême72• Et si l'on doit conclure à la constitutionnalité dudit article~

ajoute-t-il, le champ d'application de ce dernier ne peut couvrir le type de questions soumises à la Cour par le Procureur général du Canada73•

n

conclut en affinnant que si la Cour se juge compétente afin d'entendre

le Renvoi, celle-ci se devrait d'utiliser son pouvoir discrétionnaire et s'abstenir de répondre, car les questions sont à la fois trop théoriques ou conjecturale~de natures politiques et pas encore mûres pour faire l'objet d'un recoursjudiciaire7~.Quant au fon<L il argue, avec l'aide de différents académiciens7s,que la volonté démocratique d'une population doit l'emporter sur le principe de la primauté dudroi~ advenant

69Ibid

70Comme nous l'avons précédemment mentionné, le mouvement séparatiste québécois a en effet comparé, selon les

termes de l'ancien premier ministre Duplessis, la Cour suprêmeàla Tour de Pise. Celle-ci penchait, dit-il, toujours du même bord. Des pamphlets illustrant cette métaphore avaient d'ailleurs été mis en circulation par le mouvement lors des auditions du Renvoi.

71 Voir entre autres: «Un gouvernement du PQ fera outrage à la Cour suprême», Le Devoir, le 13 mai 1997~

«Québec ne tiendra aucun compte du jugement de la Cour suprême»,LaPresse {de MOlltréalj, le 13 mai 1997,B4~ «Un jugement politique que le Québec ignorera»,LeDroit, le 13 mai 1997.

72 Loi sIIr la Cour suprême, supra, note 62, art. 53. En fait, l'amicus curiae soutient que l'article 101 de la Loi

constitutionnelle de 1867 n'attribue aucunement au Parlement fédéral le pouvoir de conféreràla Cour suprême la compétence d'entendre un renvoi. fi affinne :«Oubien cepouvoir constitutionnel [de doter le plus haut tribunal de la fédération de la compétence d'émettre des avis consultatifs] est expressément préw par la Constitution, comme c'est le cas en Inde. (Collstitutiollde l'I"de, artAJ), ou bienil n'y est pas prévu et alorsil n'existe tout simplement ~as.»RellVOi slIrlasecession. supranote l, par. 12.

On y plaide que puisque la question no 2 estune question strictement de droit international, il ne peut être de la compétence de la Cour d'y répondre.

74Notons que ces objections relatives à la justiciabilité sont similaires, voire identiques, à celles soulevées par le

Procureur général du Québec lors desAffaire BerfrOl'" no/ etno2,supranote 43 et note 56.

75En fait, pas moins de dix experts ont conseillé l'amicuscuriaeen vue des auditions. Ce sont les professeurs: Abi-Saab, de l'Institut Universitaire des hautes études internationales de Genève; H. Choper, de University of California at Berldey; Fallon., du HarvardLawschool~ Franck., Murry et Ida Becker, de New York University school ofLaw; Le Bouthilier, de la Faculté de droit de l'Université d'Ottawa, McEvoy, de la Faculty of Law University of New

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