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Les personnes seules âgées de 65 ans et plus et vivant de l'insécurité alimentaire et leur recours aux services d'aide alimentaire, dans le quartier Limoilou, Québec

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Academic year: 2021

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Les personnes seules âgées de 65 ans et plus et vivant de

l’insécurité alimentaire et leur recours aux services d’aide

alimentaire, dans le quartier Limoilou, Québec

Mémoire

Mijanou Bourque Bouliane

Maîtrise en santé communautaire

Maître ès sciences (M.Sc.)

Québec, Canada

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RÉSUMÉ

Nous vivons au Québec un phénomène de vieillissement de la population. Or, plusieurs aînés souffrent d’insécurité alimentaire. Peu d’entre elles recourent aux services d’aide alimentaire mais leurs motifs sont méconnus. La présente étude vise à documenter les stratégies d’accès alimentaire des personnes âgées de 65 ans et plus vivant seules au sein de la communauté, et vivant de l’insécurité alimentaire, dans le quartier Limoilou, et à mieux comprendre leur recours et leur non-recours aux différents types de services d’aide alimentaire (banques alimentaires, cuisines collectives, etc.). La réalisation de deux vagues de 14 entretiens individuels avec des personnes âgées vivant seules dans le quartier Limoilou a permis d’approfondir ces données. Les résultats de cette étude suggèrent des pistes de recherche intéressantes ainsi que des pistes d’intervention pour améliorer leur accès aux aliments et adapter les services d’aide alimentaire aux besoins et réalités des personnes âgées.

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ABSTRACT

We are currently experiencing an aging of the population in the province of Québec. Even though many elders are food insecure, very few of them resort to food aid programs. However, the reasons behind this low take-up are unknown. This study aims to document the food access strategies used by food insecure lone elders living in the Limoilou neighborhood and to better understand the motives behind their use and non-use of several types of food aid programs (food banks, collective kitchens, etc.). We carried out two waves of fourteen individual interviews with food insecure lone elders from Limoilou, which deepened our understanding of their experience. The results of this study suggest interesting avenues for research and intervention to facilitate their access to food and adapt food aid programs to the elders’ needs and realities.

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TABLE DES MATIÈRES

RÉSUMÉ ... iii

ABSTRACT ... v

TABLE DES MATIÈRES ... vii

LISTE DES FIGURES ... ix

REMERCIEMENTS ... xi

INTRODUCTION ... 1

CHAPITRE 1. PROBLÉMATIQUE ET RECENSION DES ÉCRITS ... 5

1.1 Historique, définition du concept d’insécurité alimentaire et de sécurité alimentaire et concepts connexes ... 5

1.2 Les déterminants de la sécurité alimentaire ... 9

1.2.1 Les déterminants individuels de la sécurité alimentaire ... 9

1.2.2 Les déterminants collectifs de la sécurité alimentaire ... 9

1.3 L’insécurité alimentaire et les personnes âgées : un aperçu de l’état des connaissances ... 12

1.3.1 Le revenu et l’isolement social au cœur de l’expérience de l’insécurité alimentaire chez les personnes âgées ... 12

1.3.2 L’état de santé des personnes âgées et l’insécurité alimentaire ... 14

1.3.3 Le manque de connaissances nutritionnelles et d’habiletés culinaires et l’insécurité alimentaire ... 16

1.3.4 Les stratégies d’accès et de gestion alimentaire ... 17

1.4 Les services d’aide alimentaire et les personnes âgées ... 18

1.5 Objectifs et questions de recherche ... 21

CHAPITRE 2. CADRE CONCEPTUEL ... 23

CHAPITRE 3. MÉTHODOLOGIE ... 27

3.1 Devis de recherche ... 27

3.2 Justification et description du milieu et de la population choisis ... 27

3.3 Méthodes de collecte des données ... 33

3.3.1 Observation participante ... 33

3.3.2 Entrevues individuelles ... 34

3.4 Sélection des personnes pour les entrevues individuelles ... 34

3.5 Stratégies de recrutement ... 35

3.6 Outils de collecte de données ... 37

3.6.1 Le guide d’entrevue ... 37

3.6.2 Adaptation d’un outil de cartographie participative pour les entrevues ... 38

3.7 Déroulement du recrutement et des entrevues ... 39

3.8 Processus d’analyse des données ... 39

3.9 Considérations éthiques ... 40

3.10 Critères de rigueur ... 41

CHAPITRE 4. RÉSULTATS ... 43

4.1 Profil des participants rencontrés ... 43

4.2 Stratégies pour faire face à l’insécurité alimentaire ... 46

4.3 Sources d’approvisionnement alimentaire ... 52

4.3.1 Principales sources d’approvisionnement alimentaire utilisées ... 52

4.3.2 Des sources d’approvisionnement alimentaire peu utilisées ... 53

4.4 Motifs de recours aux services d’aide alimentaire ... 54

4.4.1 Recourir aux services d’aide alimentaire en tant que stratégie de survie ... 54

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4.4.3 Recourir aux services d’aide alimentaire dans les périodes difficiles ... 56

4.4.4 Ne pas avoir les compétences culinaires nécessaires pour préparer des repas .... 56

4.4.5 Briser l’isolement ressenti ... 57

4.5 Motifs de non-recours aux services d’aide alimentaire ... 58

4.5.1 La méconnaissance des services ... 58

4.5.2 L’évaluation de leur situation et leur besoin de services ... 59

4.5.3 La situation de pauvreté et la non motorisation ... 59

4.5.4 Des craintes ... 60

4.5.5 Raisons liées aux caractéristiques des services ... 60

4.5.5.1 Manque d’anonymat et de confidentialité ... 60

4.5.5.2 Critères d’accès empêchant le recours ... 61

4.5.5.3 Complexité des procédures empêchant le recours ... 61

4.5.5.4 Fonctionnement trop contraignant d’un service ... 61

4.5.5.5 Services exigeants sur le plan physique... 62

4.5.5.6 Heures d’ouverture contraignant le recours... 62

4.5.6 Avoir vécu des expériences négatives ... 62

4.6 Pistes de solution identifiées par les personnes pour diminuer l’insécurité alimentaire ... 63

4.6.1 Percevoir qu’il est impossible d’améliorer les choses ... 63

4.6.2 Désirer une amélioration de la qualité de la nourriture dans les services d’aide alimentaire ... 63

4.6.3 Désirer une hausse des revenus ... 64

CHAPITRE 5. DISCUSSION ... 65

5.1 Sources d’approvisionnement alimentaire ... 65

5.2 Stratégies d’accès et de gestion alimentaire ... 67

5.3 Motifs de recours aux services d’aide alimentaire ... 69

5.4 Motifs de non-recours aux services d’aide alimentaire ... 70

5.5 Réflexions générales en regard du cadre conceptuel retenu ... 76

5.6 Pistes de solutions pour diminuer l’insécurité alimentaire ... 77

5.7 Limites et forces de l’étude ... 78

5.8 Pistes de recherche ... 80

5.9 Pistes d’intervention ... 81

CHAPITRE 6. CONCLUSION ... 85

BIBLIOGRAPHIE ... 87

ANNEXES ... 95

ANNEXE 1. CADRE CONCEPTUEL ... 95

ANNEXE 2. GRILLE D’OBSERVATION ... 97

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LISTE DES FIGURES

Figure 1. Le sexe des participants……….44 Figure 2. L’âge des participants………44

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REMERCIEMENTS

Je tiens d’abord à remercier Sophie Dupéré, ma directrice de recherche, pour son grand dévouement, son écoute, sa patience et sa grande disponibilité, malgré ses nombreuses autres responsabilités. Elle a su être présente tout au long de mon cheminement et m’encourager à me dépasser. De plus, elle s’est également montrée présente sur le plan personnel, lors de moments plus difficiles. Je la remercie également pour avoir permis mon intégration au sein du projet VAATAVEC, car ma présence au sein du comité de recherche de ce projet a été très enrichissante pour mes travaux personnels. Je souhaite également remercier tous les membres du comité de recherche VAATAVEC, qui m’ont accueilli à bras ouverts dans le projet. Je remercie particulièrement Gracia Adams, qui a été d’une grande aide pour le recrutement des participants à La Bouchée généreuse en me présentant à l’équipe de bénévoles et en m’aidant à présenter mon projet aux personnes présentes lors d’une distribution alimentaire. De plus, je tiens également à remercier Micheline Bélisle, qui a également beaucoup contribué à mon projet de recherche, notamment en acceptant de réaliser une entrevue test afin de tester mon guide d’entrevue, ainsi qu’Élise Landry, Jenni Labarthe et Manon Roy, qui ont également contribué à son avancement.

Au sein de l’organisme La Bouchée Généreuse, je remercie certains employés y travaillant, soit Pierre Gravel, le directeur, qui m’a permis de recruter des personnes lors des distributions alimentaires et m’a permis d’utiliser les lieux pour les entrevues, Louisette Soulard, la responsable des bénévoles qui m’a aidé à recruter des personnes et Christine Ranger, la secrétaire de l’organisme, qui a permis la réservation d’un local au sein de celui-ci, afin de réaliser les entretiens individuels avec les participants. Au sein de l’Office municipal d’habitation de Québec, je remercie Annie Tremblay, qui m’a permis de présenter mon projet de recherche aux résidents des Immeubles Saint-Pascal, via une assemblée générale annuelle. Aussi, j’aimerais remercier mon conjoint David Mathieu ainsi que mes proches, qui ont su être présents durant tout mon cheminement et m’encourager tout au long de celui-ci, et ce, également dans les moments plus difficiles de celui-ci.

Pour finir, je tiens à remercier toutes les personnes ayant accepté de prendre part à mon projet de recherche, sans qui le projet n’aurait tout simplement pas pu exister. Je remercie également certaines d’entre elles d’avoir facilité mon recrutement en parlant du projet à d’autres

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INTRODUCTION

Le Canada est un pays riche, classé au sixième rang de l’Indice de développement humain de l’Organisation des Nations Unies. Cependant, au sein de ce même pays, l’écart socio-économique ne cesse de croître entre les plus démunis et les plus fortunés (De Schutter, 2011). Selon les données de Statistique Canada, 8,3% des ménages canadiens souffraient d’insécurité alimentaire en 2011-2012, soit 1.1 millions de ménages (Statistics Canada, 2011-2012). Au Québec, 13,5% des ménages étaient en situation d’insécurité alimentaire en 2012 (Tarasuk, Mitchelle et Dachner, 2012). Dans la ville de Québec, selon le Plan d’action local en santé publique du Centre de santé et de services sociaux de la Vieille-Capitale 2006-2010, 20,4% des personnes vivant dans le secteur Basse-Ville-Limoilou-Vanier rencontraient ou craignaient alors de rencontrer des difficultés d’approvisionnement alimentaire, comparativement à 10% dans le secteur Haute-Ville-Des-Rivières et 7,8% dans le secteur Sainte-Foy-Sillery-Laurentien (Centre de santé et de services sociaux de la Vieille-Capitale, 2010).

Parmi ces statistiques se trouvent les personnes âgées, qui sont aussi susceptibles de vivre de l’insécurité alimentaire. En 2011-2012, 115 336 ménages composés de personnes âgées souffraient d’insécurité alimentaire au Canada (Statistique Canada, 2013). Plusieurs études effectuées auprès de personnes âgées au Canada et aux États-Unis ont mis en lumière différentes facettes de leur expérience d’insécurité alimentaire et ont identifié des facteurs y étant associés. (Dachner, Ricciuto, Kirkpatrick et Tarasuk, 2010 ; Dewolfe et Millan, 2003 ; Green, Williams, Johnson et Blum, 2008 ; Keller, Dwyer, Edwards, Senson et Edward, 2007 ; Krondl, Lau, Coleman et Stoker, 2003 ; Lee, Frongillo et Olson, 2006 ; Locher et al., 2008 ; Rabinowicz, 2002 ; Sharkey et al., 2002 ; Smoyer-Tomic, Spence et Amrhein, 2006 ; Wolfe, Frongillo et Valois, 2003). Toutefois, au Québec, très peu d’études portent sur l’insécurité alimentaire telle que vécue par cette population (Rabinowicz, 2002 ; Table de Concertation sur la Faim et le Développement Social de l’Outaouais, 2011) alors que nous assistons à un vieillissement de la population et que les personnes âgées sont pourtant affectées par l’insécurité alimentaire et ses conséquences.

Bien que ces études nous informent sur l’insécurité alimentaire telle que vécue par les personnes âgées, certaines d’entre elles comportent tout de même certaines limites. Notamment, l’étude de Lee et ses collaborateurs réalisée en 2006 comprend beaucoup de mesures auto-rapportées concernant la quantité de nourriture ingérée, la grandeur et le poids. L’utilisation de telles mesures, particulièrement concernant le poids chez les personnes

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présentant de l’embonpoint, peut avoir conduit à des surestimations de sous-nutrition au sein de l’échantillon. De plus, cette étude présente différents facteurs contribuant à l’insécurité alimentaire, soit des facteurs médicaux (présence de comorbidités, médication), des facteurs fonctionnels (mobilité réduite, besoin d’assistance pour préparer les repas, les consommer et acquérir de la nourriture), des facteurs liés à la santé buccale, des facteurs sociaux (état civil, taille du réseau social) facteurs liés à la religion (support religieux), des facteurs psychologiques (statut cognitif) et des facteurs économiques, soit les différents niveaux d’insécurité alimentaire. Cette taxonomie semble limiter l’insécurité alimentaire à sa dimension économique, ce qui contribue à réduire grandement celle-ci. De plus, l’environnement physique n’a pas été nommé parmi ces différents facteurs, lequel est pourtant important dans l’expérience d’insécurité alimentaire.

Selon les données de l’Institut national de santé publique du Québec, le nombre d’aînés devrait passer, d’ici 2031, à 2.3 millions et les aînés de 85 ans et plus, à 300 000. Selon ces prévisions, plus du quart de la population sera alors âgée de 65 ans et plus (Institut national de santé publique du Québec, 2010). Dans la ville de Québec, cette tranche d’âge représente 17% du territoire du Centre de santé et de services sociaux de la Vieille-Capitale, ce qui est plus élevé que dans la région de Québec et même du reste de la province. Dans le secteur Basse-Ville-Limoilou-Vanier, près d’une personne sur quatre est âgée de 65 ans et plus, soit près de 19 000 personnes (Centre de santé et de services sociaux de la Vieille-Capitale, 2010). L’arrondissement de la Cité-Limoilou compte 28 025 personnes âgées de 65 ans et plus, et près de la moitié d’entre elles vit seule au sein de ce quartier (Mercure, 2009). De plus, le territoire de Basse-Ville-Limoilou-Vanier présente le plus grand nombre de personnes vivant sous le seuil de faible revenu (SFR). En effet, près de la moitié de la population du territoire de ce CLSC vivrait sous le seuil de faible revenu. De plus, 44,2% des personnes âgées de 65 ans et plus y résidant bénéficieraient du supplément de revenu garanti. Dans un territoire marqué par la défavorisation sociale et matérielle, les personnes âgées, entre autres, risquent d’éprouver de la difficulté à combler tous leurs besoins essentiels, notamment sur le plan de l’alimentation, et sont donc susceptibles de vivre de l’insécurité alimentaire. Toutefois, aucun rapport récent n’établit de statistiques touchant celles-ci au sein du quartier.

Le recours aux services d’aide alimentaire, notamment, permet de diminuer l’expérience d’insécurité alimentaire des personnes. Seulement, un rapport québécois et des études américaines relèvent que très peu de personnes âgées recourent à ce type de services (Banques alimentaires Canada, 2011 ; Gundersen et Ziliak, 2006 ; Wolfe et al., 1996 ; Wu, 2009).

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Les motifs de la réticence des personnes âgées à consulter des services d’aide sont encore méconnus. Ces informations s’avèrent précieuses car elles permettraient de bonifier les stratégies d’intervention visant à diminuer l’insécurité alimentaire des personnes. Dans cette optique, la présente étude vise, en premier lieu, à documenter les stratégies d’accès alimentaire des personnes âgées de 65 ans et plus vivant seules au sein de la communauté, et vivant de l’insécurité alimentaire, dans le quartier Limoilou, et, en deuxième lieu, de mieux comprendre leur recours et leur non-recours aux différents types de services d’aide alimentaire (banques alimentaires, cuisines collectives, etc.).

Pour répondre à nos objectifs de recherche, nous avons réalisé des entretiens semi-dirigés avec des personnes âgées à faible revenu du quartier Limoilou. Les principaux thèmes que nous avons abordés sont les sources d’approvisionnement alimentaire utilisées par ces personnes ainsi que leurs motifs de recours et de non-recours aux services d’aide alimentaire. Nous avons également brièvement discuté des pistes de solutions suggérées par les participants pour diminuer l’insécurité alimentaire.

Ce mémoire est divisé en six chapitres. Le premier chapitre expose la problématique et recense les écrits pertinents sur le problème. Nous débuterons par un bref historique du concept de l’insécurité alimentaire et nous explorerons les concepts connexes pour bien camper le sujet à l’étude. Par la suite est présentée une revue de la littérature sur les principaux déterminants individuels et collectifs de l’insécurité alimentaire et un aperçu plus détaillé de l’état des connaissances sur l’insécurité alimentaire vécue par les personnes âgées ainsi que le phénomène de non-recours aux services d’aide alimentaire.

Quant à lui, le chapitre 2 présente le cadre conceptuel utilisé afin de guider l’analyse. Dans cette section, nous présenterons les différentes dimensions de ce cadre et nous justifierons son utilisation dans la présente étude en le comparant à d’autres cadres conceptuels existants. Ensuite, le chapitre 3 fait état de la méthodologie utilisée dans la présente étude, soit le devis de recherche et une justification et une description du milieu et de la population choisis, soit une présentation du quartier Limoilou, où l’étude a été réalisée, ainsi que des services d’aide alimentaire établis au sein de celui-ci. Ensuite sont présentées les méthodes de collecte de données utilisées, la sélection des participants et les stratégies de recrutement. Par la suite est décrit le déroulement du recrutement et des entrevues et est présenté brièvement le guide d’entrevue et l’utilisation d’un outil adapté de la cartographie participative. Ce chapitre se

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clos par la description du processus d’analyse de données et la présentation des considérations éthiques et des critères de rigueur observés dans le cadre de l’étude.

Par la suite, le chapitre des résultats débute par la présentation du profil des participants rencontrés ainsi que leurs stratégies pour faire face à l’insécurité alimentaire, après quoi sont décrites leurs différentes sources d’approvisionnement alimentaire, ainsi que leurs motifs de recours et de non-recours aux différents services d’aide alimentaire et leurs pistes de solutions pour diminuer l’insécurité alimentaire.

Puis, une section discussion suit, dans laquelle nous discutons des principaux résultats de la recherche à la lumière de la littérature, soit les différentes sources d’approvisionnement alimentaires utilisées par les participants, leurs stratégies pour acquérir de la nourriture ainsi que leurs motifs de recours et de non-recours aux services d’aide alimentaire. Nous discutons également des pistes de solutions suggérées par ces personnes pour diminuer l’insécurité alimentaire. De ces résultats, nous tirons des pistes de recherche et d’intervention. Nous discutons également dans cette section des forces et limites de notre étude.

Finalement, une conclusion fait un bref retour sur notre problématique et présente les contributions de notre étude à la recherche et des réflexions sur la contribution potentielle de la recherche en général et des professionnels de la santé sur l’amélioration des services d’aide alimentaire et l’accès aux aliments.

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CHAPITRE 1. PROBLÉMATIQUE ET RECENSION DES

ÉCRITS

Le présent chapitre présente un bref historique du concept de l’insécurité alimentaire ainsi qu’une définition de celui-ci. Ensuite, nous mettons ce concept en lien avec celui de sécurité alimentaire et présentons également un historique de ce concept ainsi que différentes définitions de ce dernier et quelques concepts connexes. Par la suite, nous présentons les déterminants individuels et collectifs de l’insécurité alimentaire, après quoi nous présentons un aperçu de l’état des connaissances sur l’insécurité alimentaire vécue par les personnes âgées ainsi que le phénomène de non-recours aux services d’aide alimentaire.

1.1 Historique, définition du concept d’insécurité alimentaire et de sécurité

alimentaire et concepts connexes

Bien que la faim semble toujours avoir existé au Québec, elle n’y est pas toujours apparue comme un problème social (Racine, 2007). En effet, au début des années 80, celle-ci était considérée comme un problème à court terme lié à la récession économique. Cependant, le recours à l’aide alimentaire ne diminua pas après la relance de l’économie, augmentant plutôt de manière constante au cours des années 80 et 90, ce qui contribua à sensibiliser graduellement la population à ce phénomène. La faim fut alors reconnue comme un problème touchant les populations pauvres de plusieurs pays riches d’Occident (Tarasuk, 2001). Cette problématique est donc graduellement devenue l’une des problématiques sociales importantes et fait désormais partie des préoccupations de plusieurs milieux, soit les milieux communautaires, citoyens, universitaires, institutionnels, ministériels et privés, comme nous le verrons plus loin dans cette section.

Bien que la population canadienne n’ait été sensibilisée au problème d’insécurité alimentaire qu’au courant des années 80 et 90, nous verrons qu’au niveau international, son penchant, la sécurité alimentaire, a commencé à faire partie des préoccupations bien avant. Aussi, au Québec, certaines initiatives furent entreprises avant cette période concernant notamment la nutrition. En effet, en 1977, le gouvernement du Québec a commencé à se préoccuper de plus en plus de la santé de la population et a commencé à adopter des mesures afin d’améliorer les conditions de vie de celle-ci. Cela débuta par la Politique québécoise en matière de nutrition,

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suivie, en 1978-1979, par la Campagne « Au Québec, faut se sentir en santé » et du programme Kino-Québec, incluant une campagne de promotion de l’activité physique appelée « Viens jouer dehors ». Près de trente ans plus tard, soit en 2004, fut créé le Programme de promotion des saines habitudes de vie « Vas-y, fais-le pour toi ! », qui devint par la suite « Bougez plus, mangez mieux ». Par la suite, en 2006, le Plan d’action gouvernemental de promotion des saines habitudes de vie et de prévention des problèmes reliés au poids 2006-2012-Investir pour l’avenir, fut lancé. Ce plan d’action présente une stratégie visant à améliorer le bien-être et la qualité de vie de la population québécoise et vise les citoyens, les communautés et les entreprises. Il a pour principal objectif de créer des environnements favorisant l’adoption de saines habitudes de vie tout en agissant sur les comportements individuels et les normes sociales. Via ces différents programmes s’est affirmé l’importance de la sécurité alimentaire pour la population québécoise. (Racine, 2007).

Le concept de sécurité alimentaire a émergé durant la crise alimentaire mondiale du milieu des années 1970. En effet, c’est lors du Sommet mondial de l’alimentation de 1974 qu’a été créée la première définition de la sécurité alimentaire. Par la suite, au courant des années 1980, les travaux de la FAO et de la Banque Mondiale ont élargi le concept en ajoutant la dimension d’accessibilité alimentaire, physique et économique, des personnes vulnérables à la nourriture au sein de la définition de ce concept. C’est à ce moment que celui-ci est passé d’une échelle mondiale et nationale à une échelle microsociale des ménages et des individus (Maxwell, 1996). Une étude de la Banque mondiale définissait alors la sécurité alimentaire comme « l’accès pour chaque individu à tout instant à une quantité suffisante de nourriture permettant de mener une vie saine et active. » (Maxwell, 1996, p.157, traduction libre). Par la suite, lors du Sommet mondial de l’alimentation de 1996, la FAO a redéfinit la sécurité alimentaire en lui reconnaissant un caractère multidimensionnel, se centrant autour de trois principales dimensions de l’alimentation que sont la disponibilité, l’accès (physique) et le coût (Lang et Barling, 2012). Elle définit donc celle-ci comme étant « l’accès physique et économique à une nourriture suffisante, saine et nutritive leur permettant de satisfaire leurs besoins énergétiques et leurs préférences alimentaires pour mener une vie saine et active. » (Ministère de la Santé et des Services Sociaux, 2008, p.13).

Au cours des dernières années fut entamée une réflexion au Canada et dans d’autres pays concernant le concept de sécurité alimentaire. Celle-ci a progressivement intégré la préoccupation pour un système alimentaire évitant le gaspillage, la mauvaise utilisation des sols, la production de masse et l’appauvrissement des petits producteurs. Le bureau européen

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de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) en tenu d’ailleurs compte dans la définition de la sécurité alimentaire qu’il adopta en 2003. Lors des Journées annuelles de santé publique tenues en 2004 et 2005, le Ministère de la Santé et des Services Sociaux choisi de retenir une définition de la sécurité alimentaire adaptée de la définition formulée par l’OMS : « 1. Chacun a, à tout moment, les moyens tant physiques qu’économiques d’accéder à une alimentation suffisante pour mener une vie active et saine. 2. L’aptitude de chacun à acquérir des aliments est garantie. 3. L’accès à une information simple, fiable et objective qui permet de faire des choix éclairés est assuré. 4. Les aliments proprement dits sont satisfaisants sur le plan nutritionnel et acceptables sur le plan personnel et culturel. 5. Les aliments sont obtenus d’une manière qui respecte la dignité humaine. 6. La consommation et la production d’aliments reposent sur des valeurs sociales à la fois justes, équitables et morales. 7. Les aliments sont produits et distribués d’une manière respectueuse d’un système agroalimentaire durable. » (Ministère de la Santé et des Services Sociaux, 2008, p.14). Un élément de la définition formulée par l’OMS en 1996 fut retenu dans cette définition, soit « l’accès à une information simple, fiable et objective qui permet de faire des choix éclairés est assuré », de l’Ordre professionnel des diététistes du Québec. Cette définition reconnait l’importance que les aliments soient produits et distribués de manière à respecter un système agroalimentaire durable. Cela implique que la production, la transformation, la distribution et la consommation d’aliments ne portent pas préjudice à l’environnement. Il s’agit d’un système pouvant répondre aux besoins des générations actuelles sans toutefois compromettre la capacité des futures générations de satisfaire les leurs (Ministère de la Santé et des Services Sociaux, 2008).

Il existe également certains concepts connexes à l’insécurité alimentaire, notamment l’autonomie alimentaire et la souveraineté alimentaire. L’autonomie alimentaire comprend quatre aspects : l’accès, le pouvoir de choisir, l’action collective et l’environnement. Selon le Regroupement des cuisines collectives du Québec, il s’agit de : 1. l’accès en tout temps et à long terme à une quantité quotidienne suffisante de nourriture, à un coût raisonnable, 2. le pouvoir de choisir, en toute dignité et en ayant accès à une information claire et fiable, une alimentation saine, variée et salubre, 3. elle s’acquiert par l’action collective et solidaire de se prendre en charge individuellement et collectivement, pour le mieux-être d’une communauté, dans un esprit de développement durable, 4. elle favorise le respect de l’environnement, le commerce équitable, la consommation responsable et vise un équilibre durable entre la satisfaction des besoins présents et ceux des générations futures (Regroupement des cuisines

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collectives du Québec, s.d.). Pour sa part, la souveraineté alimentaire est définie comme étant la capacité d’un État de définir sa propre politique agricole et alimentaire suivant les intérêts de sa population. Elle doit se faire sans nuire à la capacité des autres États d’accéder à leur propre souveraineté alimentaire. La souveraineté alimentaire privilégie la production locale pour nourrir la population et l’accès à la terre et aux ressources pour y parvenir (Communauté métropolitaine de Montréal, 2013).

Dans le cadre de cette étude, nous nous situons davantage dans une perspective d’insécurité alimentaire. On considère qu’il est question d’insécurité alimentaire lorsqu’au moins une des dimensions décrites plus tôt n’est pas atteinte, c’est-à-dire un accès physique et économique incertain ou limité à des aliments qui soient en quantité suffisante et qui soient sains et nutritifs et permettent de satisfaire les préférences alimentaires, les besoins énergétiques et permettent également de mener une vie saine et active (Pouliot, 2008). L’insécurité alimentaire n’est pas une condition statique. En effet, elle peut être chronique, saisonnière, transitoire. Selon Pouliot (2008), celle-ci est principalement épisodique et elle est le plus souvent liée à un manque d’argent, lequel est considéré comme le principal élément déclenchant l’insécurité alimentaire. Il existe également une variation sur le plan de la gravité. On distingue généralement trois degrés d’insécurité alimentaire, soit l’insécurité alimentaire marginale, modérée et grave, lesquelles sont mesurées par le Security Survey Module, un instrument de mesure basé sur un questionnaire de 18 énoncés créé aux États-Unis, le, et utilisé dans le cadre de l’Enquête sur la santé dans les collectivités canadiennes (Santé Canada, 2007). L’insécurité alimentaire marginale est caractérisée par une crainte de manquer de nourriture et/ou une limitation de la sélection de nourriture en raison d’un manque d’argent. Quant à elle, l’insécurité alimentaire modérée désigne la qualité et/ou la quantité de nourriture qui est compromise en raison également d’un manque d’argent. Les personnes vivant de l’insécurité alimentaire grave se voient quant à elles obligées de réduire leur consommation d’aliments, voire de sauter des repas, et vont même jusqu’à se priver d’un repas pendant une journée complète ou plus (Tarasuk, Mitchelle et Dachner, 2012).

Dans la prochaine section, nous donnons un bref aperçu de l’état des connaissances des différents déterminants de la sécurité alimentaire et de l’expérience d’insécurité alimentaire pour ensuite se focaliser sur ce qui a été fait et ce qui reste à étudier sur notre sujet de recherche précis, soit les différentes stratégies utilisées par les personnes âgées pour acquérir de la nourriture ainsi que le phénomène de recours et de non-recours aux services d’aide alimentaire.

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1.2 Les déterminants de la sécurité alimentaire

La sécurité alimentaire, en tant qu’objectif à atteindre, est influencée par différents déterminants de la santé, lesquels sont définis comme étant tout ce qui influence, soit des facteurs de risque ou de protection pouvant être associés de manière statistique à l’insécurité alimentaire. Ceux-ci peuvent être classés comme étant des déterminants individuels ou collectifs (Ministère de la Santé et des Services Sociaux, 2008).

1.2.1 Les déterminants individuels de la sécurité alimentaire

Les principaux déterminants individuels de la sécurité alimentaire qui ont été révélés dans plusieurs études et rapports sont : un faible revenu, un faible niveau de scolarité, la monoparentalité, l’appartenance à une communauté ethnique minoritaire et l’appartenance à un ménage de grande taille. Bien que ces facteurs soient tous importants, les personnes ayant un faible revenu, particulièrement celles vivant sous le seuil de la pauvreté, sont celles qui sont les plus à risque de vivre de l’insécurité alimentaire (Ministère de la Santé et des Services Sociaux, 2008 ; Raine, 2005).

1.2.2 Les déterminants collectifs de la sécurité alimentaire

Quant à eux, les principaux déterminants collectifs de la sécurité alimentaire ayant été révélés dans plusieurs études et rapports sont : la culture alimentaire et l’environnement social, l’environnement physique et l’environnement économique et les politiques publiques. La culture alimentaire et l’environnement social concernent les connaissances et habiletés culinaires qui permettent aux personnes les possédant d’accéder à une saine alimentation. La transmission de ces connaissances et habiletés s’avère aussi primordiale afin de garantir que les générations subséquentes soient également outillées pour avoir accès à cette saine alimentation. (Agence de la santé et des services sociaux de la Capitale-Nationale, 2008). La préservation des aliments ainsi que la diffusion des éléments culturels de l’alimentation font également partie de la culture alimentaire et de l’environnement social. (Agence de la santé et des services sociaux de la Capitale-Nationale, 2008). Plusieurs changements de l’environnement social ont influencé les habitudes alimentaires des ménages, notamment l’entrée des femmes sur le marché du travail, la diminution de la taille des familles, la concentration de ces dernières autour des centres urbains et la transformation de celles-ci, notamment par le divorce. Ces différents changements ont entraîné une baisse de l’achat direct chez les producteurs et les gens ont alors commencé à cuisiner de moins en moins, privilégiant les repas préparés en raison d’un manque de temps et d’énergie (Agence de la

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santé et des services sociaux de la Capitale-Nationale, 2008 ; Ministère de la Santé et des Services Sociaux, 2008). De plus, l’organisation du travail et des temps de loisirs laissent également peu de place à la pratique, l’acquisition et la transmission des compétences culinaires. L’environnement social concerne également la disponibilité d’un réseau de soutien social pouvant protéger contre l’insécurité alimentaire. Selon une récente étude québécoise, la présence d’un réseau de soutien agit comme un protecteur contre l’insécurité alimentaire chez les personnes ayant un faible revenu. Pour sa part, l’isolement social rend les personnes plus à risque de vivre de l’insécurité alimentaire car il implique un faible soutien social et matériel des proches et de l’entourage (Carter, Dubois, Tremblay et Taljaard, 2012). Seulement, l’influence du réseau de soutien sur l’insécurité alimentaire varierait selon le profil sociodémographique des personnes et demeure encore mal compris (Kirkpatrick et Tarasuk, 2009).

Pour sa part, l’environnement physique concerne « la disponibilité et l’accessibilité aux aliments via la proximité du milieu de vie des personnes à des aliments qui soient sains, nutritifs et en quantité suffisante. » (Agence de la santé et des services sociaux de la Capitale-Nationale, 2008, p.17 ; Ministère de la Santé et des Services Sociaux, 2008) ; Raine, 2005). Cela implique que toute personne doit pouvoir avoir accès à des aliments, notamment les fruits et légumes, à proximité de chez elle ou bien être capable d’y accéder via le transport. À cet égard, une étude de la Direction de santé publique réalisée en 2006 dans la ville de Montréal ainsi qu’une autre réalisée par le Ministère de la Santé et des Services Sociaux en 2008 démontrent que « 40 % des personnes vivant dans les secteurs les plus urbains (ouest de l’île exclu) n’ont pas accès à un approvisionnement approprié en fruits et légumes frais à distance de marche. » (Direction de santé publique de Montréal, 2006; Ministère de la Santé et des Services Sociaux, 2008, p.18). De plus, le transport en commun ne serait pas toujours très adapté aux courses hebdomadaires. Des problèmes sur le plan du transport, tel que le fait de ne pas avoir accès à un moyen de transport motorisé, le coût élevé du transport, notamment du taxi et aussi du transport en commun, et la difficulté de transporter des paquets des commerces jusqu’au domicile, peuvent contribuer à limiter l’accès des personnes à faible revenu à des aliments qui soient sains et nutritifs (Direction de santé publique de Montréal, 2006; Johnson, 2008). Ces personnes peuvent alors se voir contraintes d’acheter de la nourriture à prix plus élevé dans des petits commerces avoisinants, lesquels offrent une moins grande variété d’aliments (Johnson, 2008). Ce phénomène désigne les déserts alimentaires, c’est-à-dire des endroits, en milieu urbain, qui sont caractérisés par le manque d’accessibilité

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à de la nourriture saine, nutritive et à prix abordable, laquelle est difficilement accessible sans l’utilisation d’un moyen de transport (Cummins et Macintyre, 2002 ; Racine, 2007). Les déserts alimentaires sont exacerbés par le faible pouvoir d’achat et par l’état de santé des personnes vivant dans ces milieux, qui sont eux-mêmes influencés par le revenu. Entre alors en jeu l’accessibilité économique car le faible revenu limite l’accès des personnes à des aliments sains, nutritifs et en quantité suffisante (Agence de la santé et des services sociaux de la Capitale-Nationale, 2008 ; Racine, 2007). Toutefois, les études portant sur les déserts alimentaires ont surtout été réalisées aux États-Unis et, selon une récente revue systématique, les preuves de l’existence de ceux-ci à l’extérieur de ce pays, dont le Canada, seraient faibles en raison des lacunes méthodologiques des études recensées qui empêcheraient d’appréhender l’ensemble du phénomène (Beaulac et al., 2009). Plusieurs études ont relevé ces lacunes, notamment une étude canadienne qui a relevé le fait de s’être concentrée sur des quartiers relativement homogènes de la ville de Toronto, ne donnant pas un portrait global de la problématique à l’échelle de la ville (Kirkpatrick et Tarasuk, 2009). Une autre étude a souligné le fait qu’elle se soit concentrée uniquement sur l’accès potentiel des personnes à des aliments sains et nutritifs mais n’ait pas mesuré les stratégies d’accès de celles-ci (Gould, Apparicio et Cloutier, 2012). Selon ces études, davantage de recherche devrait être réalisée pour mettre en lumière cette problématique afin de comprendre davantage toute la complexité des facteurs liés à l’approvisionnement alimentaire chez les personnes à faible revenu. En plus de l’accès physique et économique aux aliments, un autre déterminant important de la sécurité alimentaire est l’accès à une information simple et fiable. En effet, la capacité de déchiffrer les informations nutritives des aliments augmente l’accessibilité à des aliments qui soient sains et nutritifs (Racine, 2007).

Finalement, les politiques publiques constituent, pour leur part, « un ensemble de buts pour résoudre des problématiques relevées par les gouvernements, les entreprises privées, les groupes communautaires et les individus. » (Agence de la santé et des services sociaux de la Capitale-Nationale, 2008, p.23). Les politiques publiques liées au revenu et au logement ont une influence sur l’insécurité alimentaire car, tout comme le revenu, celles-ci influencent le pouvoir d’achat des personnes.

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1.3 L’insécurité alimentaire et les personnes âgées : un aperçu de l’état des

connaissances

Dans les passages suivants, nous faisons ressortir ce que nous connaissons sur l’insécurité alimentaire telle que vécue par les personnes âgées, ce qu’il reste à découvrir sur ce sujet ainsi que ce qui reste à entreprendre dans ce domaine. Plus précisément, nous nous intéressons au faible revenu et à l’isolement social en tant qu’éléments faisant partie de l’expérience d’insécurité alimentaire des personnes âgées. Ensuite, nous présentons l’état de santé des personnes âgées et le mettons également en lien avec l’insécurité alimentaire vécue par celles-ci. Par la suite, nous traitons des différentes stratégies d’aide alimentaire utilisées par les personnes âgées et de leur recours aux différents services d’aide alimentaire.1

1.3.1 Le revenu et l’isolement social au cœur de l’expérience de l’insécurité alimentaire chez les personnes âgées

Selon quelques études et rapports, les montants du supplément de revenu garanti et de la pension de vieillesse seraient insuffisants et donc ne permettraient pas aux personnes âgées à faible revenu de subvenir à leurs besoins de base, ceux-ci demeurant tout de même sous le seuil de la pauvreté (Banques alimentaires Canada, 2011 ; Banques alimentaires Canada, 2012 ; Bryant et al., 2002 ; Fédération de l’Âge d’Or du Québec, 2011 ; MacDonald, Andrews et Brown, 2010 ; Rabinowicz, 2002). De plus, le montant des pensions de retraite n’assurerait pas non plus une sécurité alimentaire à toutes les personnes âgées (Banques alimentaires Canada, 2012 ; Green, Williams, Johnson et Blum, 2008). Ceci contredit les résultats d’un rapport de l’Institut national de santé publique du Québec réalisé en 2011, selon lequel « les ménages dont la principale source de revenu était une rente semblent protégés de l’insécurité alimentaire. » (Institut national de santé publique du Québec, 2011, p.28). De plus, les personnes âgées seules seraient particulièrement à risque de percevoir un faible revenu (Banques alimentaires Canada, 2011 ; Banques alimentaires Canada, 2012 ; Conseil national

1Pour effectuer cette recension des écrits, nous avons utilisé les banques de données suivantes : PubMed, EBSCO (Ageline), Web of Science

et Google Scholar. Les mots-clés recherchés ont été choisis en tenant compte du but de notre étude, soit de documenter les stratégies d’accès alimentaire des personnes âgées de 65 ans et plus vivant seules au sein de la communauté, et vivant de l’insécurité alimentaire, dans le quartier Limoilou, et de mieux comprendre leur recours et leur non-recours aux différents types de services d’aide alimentaire. Notre recherche en langue française s’est basée sur les mots-clés suivants : pauvreté, recours, non recours, accès, non accès, insécurité alimentaire, sécurité alimentaire, aînés, personnes âgées, Canada. Quant à elle, notre recherche en anglais a consisté en les mots-clés suivants : elder, elderly, senior, food, food insecurity, Canada, Poverty, use, non-use, access, non access, food insecurity, food security, malnutrition, food bank, food program.

Les articles étaient inclus s’ils traitaient de personnes âgées de 65 ans et plus vivant de l’insécurité alimentaire, au Canada et aux États-Unis. Après avoir sélectionné les articles pour notre revue, nous avons réalisé une banque d’articles comprenant la référence de chaque article, le type d’étude (qualitative, quantitative, mixte), le but ou objectif de l’étude, le cadre conceptuel/la théorie utilisée, les résultats principaux et des commentaires généraux sur l’article.

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des aînés, 2009 ; Green, Williams, Johnson et Blum, 2008). En effet, les personnes âgées vivant seules et ayant comme unique revenu la pension de retraite seraient plus à risque d’éprouver des difficultés à subsister financièrement jusqu’à la fin du mois et seraient donc plus susceptibles de vivre de l’insécurité alimentaire (Green, Williams, Johnson et Blum, 2008). Vivre avec un partenaire aurait un effet protecteur sur les capacités à subvenir à ses besoins de base, dont une alimentation nutritive (Green, Williams, Johnson et Blum, 2008). En 2008, un aîné sur six habitait seul, soit 200 000 personnes qui percevaient un revenu inférieur au seuil de faible revenu après impôt (Banques alimentaires Canada, 2011).

Or, le faible revenu est le premier déterminant reconnu d’insécurité alimentaire chez les personnes âgées. En effet, plusieurs études et rapports ont révélé l’existence d’un lien incontestable entre le faible revenu des ménages et l’insécurité alimentaire auprès de diverses populations, dont les personnes âgées (Green, Williams, Johnson et Blum, 2008 ; Locher et al., 2008 ; Rabinowicz, 2002 ; Sharkey et al., 2002 ; Wolfe, Frongillo et Valois, 2003). Les personnes âgées ayant un faible revenu sont plongées dans un état de survie et gèrent leurs ressources en fonction de leurs besoins vitaux en acquittant d’abord les frais fixes tels que le loyer. Ceci laisse peu de ressources financières pour l’achat de nourriture, particulièrement lorsque le revenu est faible. Les aliments choisis sont alors souvent d’une qualité moindre, étant donné leur prix moins élevé, ce qui influence la qualité de l’alimentation (Comité consultatif de lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale, 2010 ; Green, Williams, Johnson et Blum, 2008 ; Wolfe, Frongillo et Valois, 2003).

Selon plusieurs études et rapports, le faible revenu aurait également des répercussions importantes sur l’isolement des personnes âgées et vice versa (Bryant et al., 2002 ; Centraide Outaouais, 2011 ; Comité consultatif de lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale, 2010 ; Conseil national des aînés, 2009 ; Lee et Frongillo, 2001). Notamment, le coût élevé du transport en commun représente une barrière importante à son utilisation et peut plonger les personnes âgées dans un état d’isolement car sans l’utilisation de celui-ci, elles perdent un moyen d’entrer en contact avec d’autres personnes (Bryant et al., 2002 ; Conseil national des aînés, 2009). De plus, le revenu est un déterminant important de l’indépendance des personnes âgées qui leur permet de participer à des activités récréatives (Bryant et al., 2002). Le faible revenu limite donc la participation de celles-ci à ce genre d’activités et contribue à leur isolement. L’expérience de l’isolement chez les personnes âgées peut se manifester par l’absence de contacts provenant de l’extérieur et des repas seuls (Centraide Outaouais, 2011). Plusieurs personnes âgées vivent seules, avec un réseau social faible, voire inexistant. Or,

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selon plusieurs études, cela les rendrait plus susceptibles de souffrir d’insécurité alimentaire (Keller, Dwyer, Edwards, Senson et Edward, 2007 ; Krondl, Lau, Coleman et Stoker, 2003 ; Lee, Frongillo et Olson, 2006 ; Locher et al., 2008 ; Raine, 2005 ; Payette et Shatenstein, 2005). En effet, le manque de stimulation sociale entraînerait une démotivation chez certaines personnes âgées, qui perdraient alors l’intérêt de se nourrir et de préparer de la nourriture (Keller, Dwyer, Edwards, Senson et Edward, 2007 ; Krondl, Lau, Coleman et Stoker, 2003 ; Lee, Frongillo et Olson, 2006 ; Locher et al., 2008). Les personnes âgées seules seraient aussi plus susceptibles de s’alimenter de manière irrégulière, et ce, sans considérer leur revenu (Krondl, Lau, Coleman et Stoker, 2003). De plus, elles seraient aussi susceptibles de sous s’alimenter (Locher et al., 2008). Le fait d’être seule à l’heure du repas jouerait un rôle important dans cette situation car les personnes âgées étant accompagnées durant ce moment s’alimenteraient davantage (Locher et al., 2008).

1.3.2 L’état de santé des personnes âgées et l’insécurité alimentaire

Le vieillissement apporte un mélange complexe de problèmes sociaux et de santé interagissant et affectant la capacité d’acquérir ou de consommer de la nourriture (Comité consultatif de lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale, 2010 ; Keller, Dwyer, Edwards, Senson et Edward, 2007 ; Lee, Frongillo et Olson, 2006 ; Locher et al., 2008 ; Wolfe, Frongillo et Valois, 2003). Selon une étude de l’Institut de la statistique du Québec réalisée en 2010-2011 , 84% des personnes québécoises âgées de 65 ans et plus et 87% des personnes âgées de 75 ans et plus disent avoir au moins un problème de santé de longue durée. Ceci désigne un problème de santé physique ou mentale qui dure depuis au moins six mois ou qui pourrait durer six mois ou plus, ayant été diagnostiqué par un médecin, nécessitant un suivi médical et demandant de prendre des médicaments, de recevoir des traitements ou d’avoir de bonnes habitudes de vie. Ces problèmes de santé sont : l’arthrite, le diabète, les problèmes respiratoires tels qu’une bronchite chronique, un emphysème ou une maladie pulmonaire obstructive chronique, l’hypertension, les maladies cardiaques ou d’autres types de problèmes tels que de l’ostéoporose, une dépression chronique ou un cancer (Institut de la statistique du Québec, 2014). Selon cette même étude, 57% des personnes âgées de 65 ans et plus et 62% des personnes âgées de 75 ans et plus cumuleraient au moins deux problèmes de santé de longue durée, la proportion augmentant légèrement d’un groupe d’âge à l’autre. Les problèmes de santé les plus rapportés dans cette étude sont l’arthrite et l’hypertension. En effet, 41% des personnes âgées déclarent faire de l’arthrite et 23% déclarent avoir une maladie cardiaque. Chez les personnes âgées de 85 ans et plus, ces

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proportions s’élèvent respectivement à 50% et 34% des personnes. Chez les personnes âgées ayant au moins un problème de santé de longue durée, deux personnes sur trois ont une incapacité légère et une sur cinq a une incapacité physique modérée ou grave. De plus, les incapacités physiques modérées et graves seraient plus répandues chez les personnes âgées ayant au moins deux problèmes de santé de longue durée (Institut de la statistique du Québec, 2014).

Ces différents problèmes de santé chroniques, particulièrement l’arthrite, peuvent aggraver l’insécurité alimentaire vécue par les personnes âgées. En effet, les personnes âgées souffrant de problèmes de santé physique chroniques éprouveraient des problèmes sur le plan de la mobilité, limitant leur capacité de se déplacer pour se procurer de la nourriture, notamment via le transport en commun (Comité consultatif de lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale, 2010 ; Lee, Frongillo et Olson, 2006 ; Locher et al., 2008 ; Wolfe, Frongillo et Valois, 2003). Les personnes âgées peuvent éprouver de la difficulté à transporter des sacs d’épicerie en raison du poids de ceux-ci, limitant par le fait même la quantité et la diversité d’aliments s’y retrouvant. Cette situation peut avoir des conséquences sur la qualité des aliments consommés, pouvant se réduire à des cannages et des boîtes de céréales plutôt qu’à des fruits et légumes frais (Lee, Frongillo et Olson, 2006).

La mobilité réduite plonge les personnes âgées dans un état de dépendance vis-à-vis les autres pour l’acquisition de nourriture, notamment vis-à-vis de leurs proches. Étant donné que les personnes âgées à mobilité réduite se déplacent très peu, elles entrent aussi très peu en contact avec les autres. L’isolement social est alors aggravé par les problèmes de mobilité réduite et peut à son tour entraîner des problèmes de dépression et de détresse pouvant même mener au suicide (Comité consultatif de lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale, 2010 ; Krondl, Lau, Coleman et Stoker, 2003). Cet isolement est davantage marqué au Québec durant la période hivernale. En effet, les personnes âgées sont nombreuses à limiter leurs déplacements en raison de conditions extérieures défavorables, telles que des trottoirs glacés et enneigés, qui rendent tout déplacement dangereux pour ces dernières, qui craignent les risques de chutes. Certaines personnes âgées vont même jusqu’à demeurer à leur domicile jusqu’au printemps (Table de concertation des aînés de l’île de Montréal, 2008).

La prise de médication est également, selon plusieurs études, un facteur d’insécurité alimentaire, en raison d’effets de suppression de l’appétit chez les personnes âgées, notamment liés à son influence sur l’acuité gustative de celles-ci, soit leur perception du goût des aliments. Les personnes âgées peuvent alors perdre tout intérêt à préparer de la nourriture

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et à s’alimenter, ce qui peut amener des problèmes d’anorexie. La prise de médication peut également entrer en conflit avec une saine alimentation, de par les diverses interactions avec les aliments (Keller, Dwyer, Edwards, Senson et Edward, 2007 ; Krondl, Lau, Coleman et Stoker, 2003 ; Lee, Frongillo et Olson, 2006 ; Locher et al., 2008).

Selon plusieurs études, les problèmes de santé physique et la mobilité réduite peuvent également contribuer à limiter la capacité des personnes âgées de préparer de la nourriture en raison des difficultés à se déplacer dans la maison ou à cuisiner de manière sécuritaire (Lee et Frongillo, 2001 ; Lee, Frongillo et Olson, 2006 ; Locher et al., 2008 ; MacDonald, Andrews et Brown, 2010 ; Sharkey et al., 2002 ; Wolfe, Frongillo et Valois, 2003). De plus, certaines personnes âgées peuvent également ressentir un manque d’énergie limitant leur capacité de préparer de la nourriture (Wolfe, Frongillo et Valois, 2003). La détérioration des capacités olfactives et gustatives qui accompagnent parfois le vieillissement, ainsi qu’un mauvais état dentaire et une insuffisance de sécrétion de salive nuisant à la mastication et à la digestion des aliments, peuvent également influencer l’appétit et l’alimentation des personnes âgées. Cela peut entraîner, tout comme la prise de médication, des problèmes d’anorexie (Payette et Shatenstein, 2005). Pour leur part, les personnes âgées ayant des troubles cognitifs ou ayant une maladie mentale éprouveraient de la difficulté à planifier la préparation de repas et même à reconnaître ou exprimer la sensation de faim (Lee, Frongillo et Olson, 2006 ; Locher et al., 2008).

L’insécurité alimentaire engendre des conséquences importantes sur la santé des aînés, tant sur le plan physique que mental. En effet, celle-ci peut exacerber la gravité des maladies chroniques (National Collaborating Centre for Determinants of Health, 2008) telles que le diabète, en nuisant à la gestion de cette maladie par une alimentation inappropriée ne respectant pas la diète alimentaire recommandée (Tarasuk, 2001). Les personnes souffrant d’insécurité alimentaire sont également plus à risque de souffrir d’obésité (Kim et Frongillo, 2007). De plus, l’incertitude de pouvoir accéder à de la nourriture correspondant à leurs besoins de santé engendre de l’anxiété chez les personnes âgées et peut mener à de la dépression (Kim et Frongillo, 2007 ; Wolfe, Frongillo et Valois, 2003).

1.3.3 Le manque de connaissances nutritionnelles et d’habiletés culinaires et l’insécurité alimentaire

Le manque de connaissances nutritionnelles et d’habiletés culinaires contribuerait également à limiter la capacité des personnes âgées à sélectionner des aliments sains et nutritifs et à

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préparer ces aliments, ce qui augmenterait leur risque de souffrir d’insécurité alimentaire (Lee et Frongillo, 2001 ; Lee, Frongillo et Olson, 2006 ; Payette et Shatenstein, 2005). Le décès de la conjointe, notamment, peut laisser certains hommes démunis face à la préparation de nourriture car n’ayant jamais eu cette responsabilité auparavant (Edfors et Westergren, 2012). Bref, les personnes âgées peuvent être plus susceptibles de vivre une situation d’insécurité alimentaire, particulièrement lorsqu’elles ont un faible revenu, qu’elles vivent seules, qu’elles ont des maladies occasionnant des limites fonctionnelles et qu’elles possèdent peu de connaissances nutritionnelles et d’habiletés culinaires. Confrontées à cette situation, celles-ci adoptent certaines stratégies afin d’avoir accès à de la nourriture de qualité et gérer leurs ressources alimentaires de manière à les conserver le plus longtemps possible. Seulement, certaines stratégies adoptées par ces personnes favorisent aussi une situation d’insécurité alimentaire. Alors qu’on commence un peu mieux à comprendre les déterminants associés à l’insécurité alimentaire chez les personnes âgées, on connaît beaucoup moins les stratégies d’accès et de gestion alimentaire adoptées par ces dernières.

Dans la prochaine section, nous présentons les différentes stratégies adoptées par les personnes âgées afin d’avoir accès à des aliments sains et nutritifs.

1.3.4 Les stratégies d’accès et de gestion alimentaire

Quelques études ont documenté les stratégies d’accès et de gestion alimentaire des personnes en situation de pauvreté et d’insécurité alimentaire (Dachner, Ricciuto, Kirkpatrick et Tarasuk, 2010 ; Power, 2005 ; Hamelin, Beaudry et Habicht, 2002 ; Kempson, Keenan, Sadani et Adler, 2003 ; Kirkpatrick et Tarasuk, 2009). Seulement, celles-ci ont été peu documentées chez les personnes âgées, soulignant l’importance de les étudier davantage chez cette population. Deux stratégies de gestion alimentaire utilisées par les personnes âgées vivant de l’insécurité alimentaire ont été identifiés dans la littérature, soit de gérer leurs réserves alimentaires par la préservation des aliments et la restriction alimentaire, consistant à réduire les portions de nourriture ingérées, (Keller, Dwyer, Edwards, Senson et Edward, 2007 ; Wolfe, Frongillo et Valois, 2003 ; Quandt, Arcury, McDonald, Bell et Vitolins, 2001 ; Gardner et Rausser, 2002) et réduire la quantité de nourriture ingérée afin de conserver leurs ressources financières sur une plus longue période (Rabinowicz, 2002 ; Wolfe, Frongillo et Valois, 2003). Ainsi, les personnes âgées, particulièrement celles vivant en situation de pauvreté, sont parfois forcées d’adopter certaines stratégies afin de subvenir à leurs besoins et celles-ci ont

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souvent des conséquences néfastes sur la qualité de leur alimentation (Lee, Frongillo et Olson, 2006) et par conséquent aussi sur leur santé et leur bien-être.

Une étude a aussi relevé une stratégie afin de pallier la non motorisation et faciliter les déplacements vers les ressources alimentaires, soit le recours aux services de navette (Huang, Rosenberg, Simonovich et Belza, 2012). Une autre étude a relevé trois stratégies alternatives d’accès alimentaire utilisées par les personnes âgées, soit l’emprunt d’argent et la demande d’assistance (préparation de repas) à des proches (amis, famille), le recours aux services d’aide alimentaire et l’échange de nourriture (Wolfe, Frongillo et Valois, 2003). Une étude a également relevé le recours au réseau social comme permettant le transport vers les ressources alimentaires (Green-Lapierre et al., 2012).

Un autre type de stratégie d’accès alimentaire utilisée par les personnes âgées en situation de pauvreté est le recours aux services de dépannage alimentaire, tels que les banques alimentaires, et aux services d’aide alternatifs, tels que les cuisines collectives. En effet, les personnes âgées vivant de l’insécurité alimentaire doivent parfois recourir aux services d’aide alimentaire afin de pallier celle-ci.

Toutefois, peu d’entre elles ont recours à ce type de services. Comme nous le verrons dans la prochaine section, le faible recours chez les personnes âgées est lié à plusieurs motifs.

1.4 Les services d’aide alimentaire et les personnes âgées

Le recours aux services d’aide alimentaire serait peu élevé chez les personnes âgées. Au Canada, 851 014 personnes ont reçu de la nourriture d’une banque alimentaire en date du mois de mars 2011, ce qui représente une augmentation de 20% par rapport à l’année 2001. Or, seulement 4,4 % des personnes âgées de 65 ans et plus ont recours à ces services. (Banques alimentaires Canada, 2011). Plusieurs études ont relevé le fait que malgré les besoins importants des personnes âgées, peu d’entre elles ont recours aux services d’aide alimentaire (Gundersen et Ziliak, 2006 ; Wolfe et al., 1996 ; Wu, 2009). Ces études ont exploré les motifs derrière ce phénomène de non-recours. Nous avons recensé six motifs pour expliquer celui-ci, soit la peur d’être stigmatisé, le manque d’accès à de l’information sur les services offerts, l’évaluation des personnes âgées de leur situation d’insécurité alimentaire, l’insuffisance des économies réalisées en lien avec le coût associé à chaque nouvelle certification d’éligibilité à un service, des obstacles liés au transport et à la mobilité ainsi que la perception des ressources d’aide. Selon quelques études, la peur d’être stigmatisé serait une raison possible de non-recours à ces services (Lee et Frongillo, 2001 ; Wolfe et al., 1996 ;

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Gundersen et Ziliak, 2006). En effet, la peur de la réaction de l’entourage face à ce recours semble être un important motif de non-recours aux services. Par contre, selon d’autres études, le manque d’information serait, plus que la stigmatisation, une raison importante de non-recours, les personnes âgées ayant difficilement accès à de l’information concernant les différents services et ressources disponibles (Johnson, 2008 ; Lee et Frongillo, 2001 ; Bhattarai, Duffy et Raymond, 2005 ; Lambie-Mumford, Crossley, Jensen, Verbeke et Dowler, 2014 ; Loopstra et Tarasuk, 2012). De plus, une autre étude reflète cette situation en démontrant qu’environ 60% des personnes âgées ne participeraient pas au programme de bons d’achat alimentaire car croyant ne pas être éligibles à celui-ci (Wu, 2009). Une certaine confusion à l’égard des services et ressources disponibles et des règles de fonctionnement associées à ceux-ci seraient à l’origine de ce non-recours (Wu, 2009 ; Loopstra et Tarasuk, 2012). Ce manque d’accès à de l’information, retrouvé également dans une autre étude, serait influencé par l’isolement vécu par les personnes âgées, en raison du nombre limité de personnes pouvant leur fournir de l’information sur les différents services et ressources existants (Bryant et al., 2002). L’isolement des personnes âgées pourrait être expliqué en partie par le fait que certaines d’entre elles éprouveraient de la difficulté à admettre qu’elles vivent de l’insécurité alimentaire, ayant comme mentalité qu’il est important de se débrouiller seul et de ne pas dépendre de programmes d’aide gouvernementaux. Aussi, celles-ci préféreraient recourir à leurs proches plutôt que de recourir à ces programmes, ce qui peut également être mis en relation avec la stigmatisation associée au recours à ceux-ci. D’autres études évoquent plutôt des raisons liées aux perceptions des personnes âgées en regard de leur évaluation de leur situation. Ainsi, une étude rapporte que les personnes âgées n’identifient pas le besoin d’y recourir car croyant que d’autres personnes en ont davantage besoin (Lee et Frongillo, 2001) et croyant également ne pas avoir besoin d’y recourir personnellement (Wu, 2009). Selon l’étude de Keller et ses collaborateurs (2007), les personnes seraient réticentes à recourir à toute forme d’aide alimentaire, tout simplement parce qu’elles ne seraient pas conscientes de leur situation d’insécurité alimentaire. À cet égard, Wolfe et ses collaborateurs (1996) suggèrent que les services d’aide alimentaire visant spécifiquement les personnes âgées seraient plus facilement acceptés par celles-ci, car elles auraient davantage l’impression qu’elles y ont droit.

Dans la plupart des études recensées, le peu de bénéfices retirés du recours serait également une raison de ne pas recourir à un service, particulièrement aux bons d’achat alimentaire (Edward et Evers, 2001 ; Wolfe et al., 1996 ; Wu, 2009). Ceci a également été constaté dans

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une autre étude qui révèle que les économies associées au recours aux bons d’achat alimentaire ne vaudraient pas, pour plusieurs, les coûts engendrés à chaque nouvelle certification d’éligibilité à ce type de services (Gundersen et Ziliak, 2006). Le nombre limité d’études ayant rapporté ce motif semble démontrer qu’il s’agit d’un motif peu répandu. Finalement, deux études font ressortir des obstacles liés au transport et à la mobilité des personnes âgées (Johnson, 2008 ; Vallianatos, Shaffer et Gootlieb, 2002) principalement liés au fait de ne pas avoir de véhicule automobile, d’avoir de la difficulté à transporter des paquets dans le transport en commun et de ne pas pouvoir acquitter les frais associés à ce type de transport. Tel que mentionné précédemment, ces problèmes de mobilité peuvent également être liés à l’isolement social vécu par ces personnes car contribuant à les confiner à leur domicile et réduisant par le fait même leurs contacts sociaux (Bryant et al., 2002 ; Conseil national des aînés, 2009).

Selon cette revue de littérature, plusieurs études américaines se sont penchées sur le phénomène de non-recours aux services d’aide alimentaire ainsi que les motifs associés à ce non-recours. Toutefois, très peu d’études canadiennes semblent avoir examiné ceux-ci (Bryant et al., 2002 ; Edward et Evers, 2001 ; Keller, Dwyer, Edwards, Senson et Edward, 2007 ; Loopstra et Tarasuk, 2012) et aucune étude québécoise n’a été recensée alors que les taux de fréquentation de ces services sont faibles dans cette province.

Notre connaissance des obstacles au recours et les motifs de la réticence des personnes âgées à consulter des services d’aide demeure fragmentaire. Il s’avère important de mieux comprendre ces éléments car, comme rapporté précédemment, ces informations permettraient de bonifier les stratégies d’intervention visant à diminuer l’insécurité alimentaire des personnes âgées. Deux études indiquent qu’il y aurait une inadéquation entre les besoins des personnes âgées et les services d’aide alimentaire (Keller, Dwyer, Edwards, Senson et Edward, 2007 ; Tarasuk et Eakin, 2003). Par exemple, les problèmes de mobilité de celles-ci seraient méconnus de certaines banques alimentaires, lesquels affectent leur accès à ces services. De leur côté, les intervenants éprouveraient aussi de la difficulté à rejoindre les personnes âgées, particulièrement celles vivant seules à domicile (Comité d’action en sécurité alimentaire de Laval, 2010). Il y aurait également un écart entre les besoins nutritionnels observés et documentés des personnes âgées et les politiques et services mis en place pour soutenir ces derniers (Keller, Dwyer, Edwards, Senson et Edward, 2007 ; Tarasuk et Eakin, 2003).

(33)

1.5 Objectifs et questions de recherche

La présente étude s'inscrit dans un projet de recherche plus large intitulé « Vers une autonomie alimentaire pour tous : Agir et Vivre ensemble le Changement AVEC » qui a pour objectif d'approfondir la compréhension, avec des personnes en situation de pauvreté et socialement exclues, des stratégies d'accès alimentaire (dont le (non) recours aux ressources visant l'autonomie alimentaire) en mettant en relief les facteurs structurels.

Au sein de ce projet de recherche, la présente étude vise, en premier lieu, à documenter les stratégies d’accès alimentaire des personnes âgées de 65 ans et plus vivant seules au sein de la communauté, et vivant de l’insécurité alimentaire, dans le quartier Limoilou, et, en deuxième lieu, à mieux comprendre leur recours et leur non-recours aux différents types de services d’aide alimentaire (banques alimentaires, cuisines collectives, etc.). Pour ce faire, nous avons examiné, avec les participants, leurs stratégies d’accès alimentaire, dont le recours et le non-recours de ces personnes aux services de dépannage alimentaire et aux services d’aide alternatifs, en tentant de découvrir les motifs y étant associés et leur expérience de recours. Les questions de recherche sont donc les suivantes : quelles sont les stratégies des personnes âgées de 65 ans et plus pour acquérir de la nourriture ? Les personnes âgées de 65 ans et plus vivant de l’insécurité alimentaire recourent-elles aux ressources d’aide alimentaire pour se nourrir ? Sinon, pour quels motifs n’y recourent-elles pas ?

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Figure

Figure 2. L’âge des participants

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