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Suite à une brève revue de la littérature, nous avons retenu le cadre conceptuel de Wolfe et ses collaborateurs réalisé en 1996, le trouvant le plus pertinent et utile pour cette étude. Un autre cadre traitait de l’expérience de l’insécurité alimentaire chez les personnes âgées mais se concentrait exclusivement sur les personnes âgées vivant dans les milieux ruraux. Or, cela ne convenait pas à la présente étude, étant donné qu’elle se situe dans un milieu urbain et que ces deux milieux vivent des réalités très différentes, notamment en ce qui concerne la problématique du transport (Quandt, Arcury, McDonald, Bell et Vitolins, 2001). D’autres cadres conceptuels plus récents ont été identifiés mais ne convenaient pas pour diverses raisons. Par exemple, le cadre conceptuel de Green-LaPierre et ses collaborateurs (2012) s’intéresse à l’insécurité alimentaire mais uniquement chez les femmes âgées. D’autres comme celui de Glanz et ses collaborateurs (2005) s’intéressent à l’influence de l’environnement sur la nutrition Or, notre étude ne s’intéresse pas à la nutrition mais plutôt aux stratégies utilisées par les personnes pour acquérir de la nourriture. Nous ne visons pas à porter de jugements sur l’alimentation des participants à l’étude. Plusieurs cadres s’intéressent aux bonnes habitudes alimentaires (Haering et Syed, 2009) mais nous ne nous intéressons pas à cet élément. Donc, très peu de cadres conceptuels s’intéressent à l’expérience d’insécurité alimentaire telle que vécue par les personnes âgées comme c’est le cas du cadre de Wolfe et ses collaborateurs (1996). À notre connaissance, l’étude réalisée par cet auteur en 2003 et bonifiant celui-ci est également la seule adoptant une définition de l’insécurité alimentaire adaptée à la situation vécue par les personnes âgées (Green-LaPierre et al., 2012 ; Quandt, Arcury, McDonald, Bell et Vitolins, 2001). Il s’agit d’une étude qualitative américaine ayant réalisé des entrevues en profondeur auprès de 46 ménages de personnes âgées, certaines d’origine latino-américaine et d’autres américaines d’origine non latine et ayant conceptualisé l’expérience d’insécurité alimentaire des personnes âgées selon quatre dimensions : quantitative, qualitative, psychologique et sociale.

Le cadre de Wolfe et ses collaborateurs (1996) a été développé en 1996 dans le cadre d’une recherche qualitative américaine ayant comme objectif de déterminer les effets potentiels sur l’insécurité alimentaire des personnes âgées de changements apportés au plan de l’aide sociale et des programmes nutritionnels et de santé. Pour ce faire, celle-ci a tenté de mieux comprendre les facteurs influençant l’insécurité alimentaire chez les personnes âgées. Ce cadre (Annexe 1) découle des résultats d’analyse d’entrevues en profondeur réalisées avec 41 personnes âgées à faible revenu, et identifie différents facteurs contribuant à l'insécurité

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alimentaire chez les personnes âgées, soit le faible revenu, un état de santé précaire et des incapacités physiques, lesquelles entraînent des frais médicaux élevés et des dépenses imprévues (urgences médicales), en plus de réduire la capacité des personnes âgées à se procurer de la nourriture et à consommer cette dernière. Un faible réseau social est aussi décrit comme pouvant accroître l’expérience d’insécurité alimentaire chez les personnes âgées (Wolfe et al., 1996). En effet, plusieurs d’entre elles dépendent de membres de leur famille pour les aider à se transporter vers des ressources, leur apporter des repas et parfois même préparer leurs repas. L’absence de réseau social peut donc occasionner une situation d’insécurité alimentaire causée par une incapacité à se transporter pour acquérir de la nourriture ou une incapacité à préparer ses repas.

Le cadre de Wolfe et ses collaborateurs (1996) présente également certains éléments décrits comme réduisant l'expérience d'insécurité alimentaire chez les personnes âgées, soit les stratégies de gestion alimentaire, telle que la réalisation de réserves alimentaires pour les temps plus difficiles et la préservation d’aliments via la congélation. Une autre stratégie consiste à recourir aux services de dépannage alimentaire (banques alimentaires) et aux services d’aide alternatifs (jardins communautaires, cuisines collectives). De plus, la possession d'économies et la présence d'un réseau social (amis, famille) pouvant aider lors de la survenue de dépenses imprévues (emprunt d’argent), peuvent aussi réduire l’expérience d’insécurité alimentaire.

Ce cadre traite aussi du phénomène de non-recours aux services d’aide alimentaire et soulève certains motifs y étant associés, tels qu’un refus d’admettre être en situation d’insécurité alimentaire et ne pas vouloir dépendre de programmes gouvernementaux.

Ce cadre illustre des dimensions significatives de l’expérience d’insécurité alimentaire chez les personnes âgées ainsi que leurs stratégies d’accès alimentaire et leurs motifs de non- recours aux services d’aide alimentaire et s’est avéré utile dans le cadre de notre étude, à la fois pour nous orienter dans la collecte des données, l’analyse et l’interprétation des données concernant les stratégies d’accès alimentaire des personnes âgées ainsi que leurs motifs de non-recours aux services d’aide alimentaires. Étant donné que la présente étude s’intéresse à l’insécurité alimentaire telle que vécue par les personnes âgées, l’adoption d’une définition de l’insécurité alimentaire intégrant leur expérience s’avérait importante. Tel que mentionné précédemment, une définition semblable a été élaborée par Wolfe et ses collaborateurs dans une étude réalisée en 2003. Selon eux, l’insécurité alimentaire peut être comprise comme étant l’incapacité d’acquérir ou de consommer une nourriture de qualité ou une quantité

suffisante de nourriture, qui correspond aux besoins de santé et soit obtenue de manière socialement acceptable, ou l’incertitude de pouvoir y arriver. Cette définition prend en compte la situation particulière des personnes âgées ayant des besoins nutritionnels particuliers, liés à un état de santé précaire. Celles-ci vivent un stress lié à une incertitude de pouvoir se procurer des aliments en quantité suffisante et qui correspondent aussi à leurs besoins précis (Wolfe, Frongillo et Valois, 2003). De plus, l’incapacité de préparer des repas est également associée à l’insécurité alimentaire telle que vécue par les personnes âgées car celles-ci peuvent posséder les ressources financières nécessaires pour acquérir de la nourriture mais être incapables de la préparer en raison de problèmes de santé ou d’un manque de motivation ou d’énergie, résultant en une diète alimentaire inadéquate. Un manque d’intérêt à s’alimenter ou un manque d’appétit peuvent également être ressentis, en raison de sentiments dépressifs découlant de l’isolement social vécu par certaines personnes âgées (Wolfe, Frongillo et Valois, 2003).

Bref, pour toutes les raisons énoncées précédemment, nous croyons que le cadre conceptuel de Wolfe et ses collaborateurs (1996) était le plus pertinent à utiliser dans le cadre de la présente étude.