Présentation du numéro
Jacques IGALENS et Laouratou DIALLO
Texte intégral
1. Si l’on accepte comme point de départ l’adresse que fit Koffi Annan à Davos en 1999 afin que soit conclu un pacte mondial entre l’ONU et le secteur privé, cela fait 20 ans que les thèmes du développement durable et de la responsabilité sociale des entreprises sont inscrits sur l’agenda des dirigeants. En 20 ans (1999-2019), il s’est passé beaucoup de choses; le pacte mondial a été un succès puisqu’il a entrainé l’engagement de 10 000 entreprises dans 164 pays mais il convient également de signaler la parution de la norme ISO 26000 en 2010 concernant les lignes directrices relatives à la responsabilité sociétale et la COP 22 qui s’est tenue à Marrakech en novembre 2016, et qui a abouti à un appel lancé par la présidence marocaine « Climate Vulnerable Forum », par lequel 48 pays en développement ont fait serment de produire uniquement et « aussi vite que possible » des énergies renouvelables.
2. 20 ans, c’est à la fois le temps long à l’échelle des organisations privées, notamment les entreprises, qui sont tenues de privilégier le court terme (et parfois le très court terme) mais c’est aussi le temps court pour nombre de changements dans nos environnements, le changement climatique ou la réduction de la biodiversité. Pour un pays comme le Maroc et pour un continent tel que l’Afrique, ces 20 ans ont été ceux de la prise de conscience que le développement économique pour nécessaire qu’il soit et qu’il demeure ne pouvait pas être obtenu à n’importe quel prix et notamment à n’importe quel prix social et à n’importe quel prix environnemental. En se dotant d’une stratégie nationale à l’horizon 2030, le Maroc a clairement fixé les enjeux autour de 7 thèmes (gouvernance, économie verte, biodiversité, changements climatiques, territoires sensibles, cohésion sociale et culture) eux-mêmes déclinés en 31 axes prioritaires et chiffrés par 137 objectifs.
3. Il est donc naturel que la communauté scientifique apporte sa contribution en termes de production et de partage de connaissances sur ces thèmes et c’est ce qui fut fait à Agadir du 22 au 24 février 2018 sur le thème: « Développement durable, RSE et innovations technologiques: état des lieux, enjeux et perspectives » à l’initiative de plusieurs communautés scientifiques nationales et internationales avec l’appui de la CGEM.
4. Ce 3ème numéro de la revue RIMEC, issu de ces travaux, est instructif à plusieurs titres. En premier lieu, il déborde le cadre marocain et prend en compte la réalité africaine à travers le cas de pays tels que le Cameroun, l’Algérie et la République de Guinée. Il sort également du cadre strict des Sciences de Gestion pour intégrer l’apport de la science économique et du droit. A certains égards, il combine à la fois des apports théoriques et des réflexions pratiques à partir de cas concrets. L’articulation entre les deux demeure, comme souvent, un gage de progrès pour les numéros qui suivront car il est certain que les axes qu’il présente devraient inspirer des recherches futures. Ainsi, sept contributions le composent : d’abord, Hubert LANDIER soulève, sous un angle juridique, la question de la pertinence de
la RSE considérée dans le contexte de l’entreprise commerciale à travers sa contribution intitulée « La constitution de l’entreprise sous forme de société commerciale est-elle
compatible avec la RSE ? ». Il permet dans ce sens d’asseoir le cadre de la réflexion qui
sous-tend l’élaboration de ce numéro et offre une vision quelque peu philosophique de la RSE. Ensuite, Houda HACHIMI et Faisal ILMEN introduisent le concept de performance globale dans leurs contributions respectivement intitulées, « La performance durable au cœur
des entreprises responsables » et « Réflexion théorique sur l’instrumentalisation de la performance globale ». La première traite du champ de la convergence entre RSE et
performance entrepreneuriale tandis que la seconde passe en revue les outils de gestion, les systèmes de pilotage de la performance globale et les indicateurs RSE selon différentes approches. Dans sa contribution intitulée « Les soubassements juridiques du Développement
Durable et de la RSE: un des leviers institutionnels incontournables pour la promotion de ces concepts au Maroc« , Aouatif BOUKIL et Abderrahmane MESSAOUDI mènent une réflexion
autour des mesures prises par l’Etat marocain pour promouvoir ces deux concepts, en se focalisant de manière critique sur les leviers juridiques dédiés à leur institutionnalisation. LHocine HOUANTI et al. posent par la suite, à travers le cas du groupe Cevital, les prémisses d’un travail de grande envergure sur la difficile intégration professionnelle des femmes algériennes dans les entreprises du pays malgré des niveaux de formation élevés sanctionnés par des diplômes de l’enseignement supérieur. Par ailleurs, Noora Vanessa N’GOLOKO dans « La perception de la Responsabilité Sociétale des Universités en contexte
camerounais » et Laouratou DIALLO dans « La RSE dans le contexte africain: quelles pratiques dans le secteur minier? Cas de la République de Guinée » permettent de transiter
du Nord du continent vers l’Afrique Subsaharienne en traitant de la perception de la RSE et des pratiques en vigueur dans les universités camerounaises et le secteur minier en République de Guinée.
Auteur
Jacques IGALENS : Professeur émérite Université de Toulouse Président Institut
International de l’Audit Social
Pour citer cette article
Jacques IGALENS et Laouratou DIALLO, "Présentation du numéro", RIMEC [en ligne], 03 |
2019, mis en ligne le 11 mars 2019, consulté le 02 June 2021. URL: http://revue-rimec.org/presentation-du-numero-2/
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