• Aucun résultat trouvé

L'utilisation de la mini-entrevue par les orthopédagogues : trois études de cas

N/A
N/A
Protected

Academic year: 2021

Partager "L'utilisation de la mini-entrevue par les orthopédagogues : trois études de cas"

Copied!
146
0
0

Texte intégral

(1)

FACULTE DES SCIENCES DE L’EDUCATION (DIDACTIQUE)

L’UTILISATION DE LA MINI-ENTREVUE PAR LES ORTHOPEDAGOGUES: TROIS ETUDES DE CAS

MICHELLE FITZBACK L.

Mémoire présenté pour 1’obtention

du grade de maître es arts (M.A.)

ECOLE DES GRADUES UNIVERSITE LAVAL

JUIN 1990

(2)

RESUME

La mini-entrevue est un nouvel outil d’évaluation pour les mathématiques au niveau primaire. Elle est caractérisée par une brève séquence de questions et de tâches qu’un maître peut utiliser avec chacun de ses élèves à l’intérieur même de la classe pour évaluer leur compréhension d’un concept donné et recevoir en même temps un certain "feedback" sur son enseignement. Cependant, ce ne sont pas tous les professeurs qui accepteront d’utiliser un tel outil. Nous avons donc proposé à trois orthopédagogues, des spécialistes qui aident les maîtres dans leur travail d’enseignant et qui oeuvrent auprès des enfants en difficulté, de faire ces mini-entrevues à la place des maîtres dans des classes régulières de troisième année. Les résultats de l’expérience révèlent que les orthopédagogues ont pu intégrer cette nouvelle tâche à leur travail habituel; l’évaluation obtenue s’est avérée utile pour eux et pour les maîtres, les amenant à mieux comprendre les difficultés des enfants et à ainsi pouvoir les aider plus efficacement.

(3)

AVERTISSEMENT

Cette recherche est le fruit d’un travail d’équipe. Pour cette raison, même si j’en demeure la principale responsable, j’emploie la première personne du pluriel pour présenter l’ensemble de ce travail.

Dans ce texte, nous englobons le genre masculin et le genre féminin pour désigner, d’une façon générale, les personnes faisant partie du corps enseignant. Cependant, nous employons le féminin quand nous parlons des titulaires de classe qui ont participé à cette expérience, puisque ce sont uniquement des femmes. De même, le terme d’orthopédagogue est employé uniquement au féminin puisque ce groupe est constitué d’une grande majorité de femmes dans nos écoles primaires au Québec.

(4)

REMERCIEMENTS

La réalisation de ce travail a été rendue possible grâce à la participation de plusieurs personnes. Chacune a contribué à me faire cheminer vers une connaissance plus approfondie de la didactique des mathématiques.

Je veux d’abord exprimer ma reconnaissance à Monsieur Jean Dionne qui, tout au long de cette recherche, par sa disponibilité, sa connaissance éclairée du domaine, sa rigueur scientifique, a su soutenir mes efforts, orienter mes travaux dans les moments difficiles et ce, toujours avec un sens de l’humour fort apprécié.

Des remerciements s’adressent également aux orthopédagogues et aux enseignantes qui, avec compétence, ont accepté de participer à la réalisation des expérimentations nécessaires à cette recherche. Un merci spécial aux enfants qui, à leur façon, m’ont encouragée à poursuivre mes travaux, en collaborant à l’expérimentation ou simplement par leur présence quotidienne.

Merci enfin à la Commission scolaire Ancienne-Lorette, particulièrement à monsieur Marcel Demers Directeur général, à monsieur Robert Chevrette Directeur des services éducatifs ainsi qu’à Madame Denise Baillargeon Directrice d’école qui, par leur attitude et leur ouverture d’esprit, ont démontré l’importance qu’ils accordaient au perfectionnement de leur personnel ainsi qu’à la recherche en milieu scolaire.

(5)

V

TABLE DES MATIERES

RESUME... ii

AVERTISSEMENT... iii

REMERCIEMENTS... iv

TABLE DES MATIERES...v

INTRODUCTION... 1

CHAPITRE I : PROBLEMATIQUE... 5

1. Le travail de l’orthopédagogue...6

2. Quelques besoins de l’orthopédagogue... 8

3. Le modèle constructiviste de compréhension.. 12

4. L’orthopédagogue et le problème de l’éva­ luation en mathématique... 13

5. Evaluation en mathématique un tour de la question... 16

5.1 Historique...16

5.2 L’entrevue clinique... 16

5.3 L’observation critique des actions..17

5.4 L’entrevue clinique ou le dialogue..17

5.5 La méthode critique ou la méthode clinique revisée...18

5.6 Aspects techniques de l’entrevue clinique revisée... 19

5.7 La mini-entrevue...22

5.8 L’évaluation formative, ses caracté­ ristiques ... 23

5.9 La mini-entrevue modifiée... 26

6. Une première expérience vécue...27

7. Vers la présente recherche... 30

CHAPITRE II: METHODE... 32 1. La compréhension de la numération dans le

(6)

cadre du modèle constructiviste... 33

2. Le questionnaire de la mini-entrevue... 36

3. Sujets de l’expérimentation... 46

4. Déroulement de l’expérimentation... 46

4.1 Préparation des orthopédagogues... 46

4.2 Présentation du déroulement et des des autres outils nécessaires... 47

4.3 Travail des orthopédagogues avec les classes... 49

4.4 L’intervention après la mini-en­ trevue ... 50

5. Collecte et analyse des données... 50

6. Les outils liés à l’entrevue... 51

6.1 Questionnaire de l’entrevue... 51

6.2 Grille d’observation-d’analyse...51

6.3 Enregistrement sur cassette des entrevues réalisées...52

7. Les outils liés à la recherche...52

7.1 Journal de bord des orthopédagogues.52 7.2 L’ensemble des données des outils décrits en 6... 52

7.3 Test standard... 52

7.4 Questionnaire destiné aux professeurs... 53

7.5 Questionnaire destiné à l’orthopé­ dagogue ... 53

8. Retour sur les questions de recherche et leurs liens avec ces divers outils... 54

CHAPITRE III: PREMIERE EXPERIMENTATION : DIANE...55

1. Contexte... 56

2. Réalisation matérielle des entrevues... 57

3. Evaluation des élèves par 1’orthopédagogue..58

(7)

vii

3.2 Mini-entrevue... 58

3.3 Analyse de la compréhension des élè­ ves effectuée par Diane... 59

3.4 Deux cas problème au niveau procé­ dural ... 61

3.4.1 Elève numéro sept...62

3.4.2 Elève numéro douze... 64

3.4.3 Quelques autres cas remarquables... 66

3.5 Résultats similaires aux deux tests.69 3.6 Un cas unique... 70

4. Utilisation des données par l’orthopédago­ gue ... 71

5. Retour sur l’évaluation de Diane... 72

6. Appréciation de l’outil par Diane... 73

7. Appréciation de l’outil par 1’enseignante... 74

CHAPITRE IV: DEUXIEME EXPERIMENTATION: MARLENE...76

1. Contexte... 77

Milieu socio-économique particulier 77 2. Réalisation matérielle des entrevues... 79

3. Evaluation des élèves par 1’orthopédagogue..79

3.1 Test standard... 80

3.2 Mini-entrevue... 81

3.3 Analyse du résultat des enfants par Marlène...82

4. Utilisation des données par l’orthopédago­ gue ... 83

5. Retour sur l’évaluation de Marlène... 84

6. Appréciation de l’outil par Marlène... 85

7. Retombées personnelles pour Marlène... 88

(8)

ANNEXES

CHAPITRE V: TROISIEME EXPERIMENTATION: DENISE... 90

1. Contexte...91

2. Réalisation matérielle des entrevues... 92

3. Evaluation des élèves par 1’orthopédagogue..93

3.1 Test standard... 93

3.2 Mini-entrevue... 93

3.3 Analyse du résultat des enfants par Denise... 94

4. Utilisation des données par l’orthopédago­ gue ... 96

Interventions de Denise en classe...97

5. Retour sur l’évaluation de Denise... 100

6. Appréciation de l’outil par Denise... 101

7. Retombées personnelles pour Denise... 102

8. Appréciation de l’outil par 1’enseignante..102

CHAPITRE VI: RESUME ET CONCLUSIONS... 104

1. Problématique... 105

2. Questions de recherche... 106

3. Méthode...107

4. Expériences... 108

4.1 Premier cas: Diane... 108

4.2 Deuxième cas: Marlène... 111

4.3 Troisième cas: Denise... 112

5. Réponses aux questions de recherche... 114

6. Retour critique... 118 7. Autres conclusions...120 8. Implications pédagogiques... 121 9. Questions de recherche... 123 BIBLIOGRAPHIE... 125 Annexe 1... Al

(9)

ix Annexe 2... A2 Annexe 3...A3 Annexe 4...A4 Annexe 5... A5 Annexe 6... A6 Annexe 7... A7 Annexe 8... A8 TABLEAU

Analyse conceptuelle de la numération décimale

(10)
(11)

2 Dans un grand nombre d’écoles primaires au Québec, on trouve une

spécialiste appelée orthopédagogue qui travaille à la fois avec les élèves et avec les maîtres.

Auprès des enfants, sa tâche est surtout orientée vers le diagnostic et la remédiation: elle travaille individuellement ou en petit groupe (maximum quatre) avec les élèves chez qui on a détecté des problèmes d’apprentissage, particulièrement en français et en mathématiques. Dans certains cas, il lui faut faire de la rééducation et aider les élèves à développer des structures cognitives demeurées déficientes. A d’autres moments, elle donne des cours de récupération portant sur une notion spécifique en s’efforçant de la relier à des acquis antérieurs afin d’amener un enfant au niveau de son groupe et lui permettre d’y fonctionner ensuite de façon autonome. Enfin, dans les cas les plus simples, elle apporte un renforcement pédagogique sous forme d’activités supplémentaires offertes à des élèves ne présentant pas de difficultés marquées mais dont l’apprentissage s’avère plus lent.

Afin d’aider les enseignants et les enseignantes, l’orthopédagogue prépare et corrige divers tests écrits pour évaluer les connaissances et habilités de leurs élèves. Elle peut ainsi fournir au maître un profil de sa classe, un portrait de ce que ses élèves ont tiré des enseignements reçus. L’orthopédagogue pourra par la suite suggérer ou aider le maître à construire des matériels didactiques et des activités d’apprentissage adaptés aux besoins des enfants, compte tenu des résultats des tests.

L’orthopédagogue, à cause de la nature de sa tâche, a besoin d’outils d’évaluation formative pouvant lui fournir les données nécessaires à une meilleure intervention de sa part. La mini­ entrevue (Nantais 1989) pourrait lui être fort utile dans

(12)

l’évaluation de la compréhension des enfants en mathématiques. Elle lui apporterait un éclairage sur la compréhension des enfants, l’aidant à mieux détecter les difficultés des élèves en mathématiques et à mieux y remédier. L’orthopédagogue serait aussi en mesure de fournir à l’enseignant ou à l’enseignante des portraits de classe plus précis et raffinés et de l’aider à préparer des activités d’apprentissage sans doute plus pertinentes et plus fructueuses.

Cependant, tout ceci demeure une hypothèse et exige certaines vérifications. Il faudrait voir, et c’est là l’objet de cette recherche, comment la mini-entrevue peut vraiment être intégrée à la tâche de l’orthopédagogue et qu’est-ce que le recours à un tel outil par cette dernière apporte aux enseignants et à leurs élèves.

Nous avons abordé cette recherche par l’étude de la compréhension du concept de numération et nous avons élaboré une méthode d’évaluation de cette compréhension chez les élèves en nous inspirant des travaux de Nantais (1989).

Nous retrouvons dans le premier chapitre la problématique et les questions de cette recherche. Les problèmes évoqués au début de cette introduction y sont décrits en détail et nous pouvons constater l’évolution de ces problèmes vers les questions de recherche que nous avons déjà sommairement proposées. Nous y retrouvons une description de la tâche des orthopédagogues et des problèmes d’évaluation de la compréhension des enfants en mathématique. Une description du modèle de compréhension de Herscovics et Bergeron (1982) y est fournie et les principes fondamentaux de la mini-entrevue y sont décrits.

Le chapitre 2 présente les outils que nous avons dû élaborer aux fins de cette recherche, par exemple une analyse du concept de

(13)

4 numération dans le cadre du modèle de compréhension développé par Herscovics et Bergeron (1982) de même qu’un questionnaire de mini-entrevue portant sur la compréhension ici décrite. Par la suite nous exposons la méthode que nous avons suivie pour répondre aux questions de recherche données plus haut.

Les chapitres 3, 4 et 5 présentent les trois études de cas que nous avons effectuées. Nos sujets d’expérimentation sont trois orthopédagogues dont deux se retrouvent dans la même école; la troisième oeuvre seule dans la sienne. Nous retrouvons dans chacun de ces chapitres la description du

lequel chacune évolue, la description

l’évaluation qu’elle fait des enfants rencontrés, son analyse de la compréhension de ces derniers, également l’utilisation que chacune fait de ces faisons un retour sur son évaluation et

contexte scolaire dans de son expérience,

de même que Nous voyons données, nous nous prenons connaissance de son appréciation de l’outil d’évaluation qu’est la mini-entrevue ainsi que l’appréciation de 1’ enseignante de la classe où l’expérience a été menée.

La conclusion résume d’abord les éléments importants de cette recherche, soit la problématique et la méthode employée. Les conclusions que nous avons pu tirer de nos études de cas s’y retrouvent et nous permettent de déboucher à la fois sur un certain nombre d’implications pédagogiques à retenir du travail mené et sur quelques questions de recherche qui sont issues à la fois de ce travail et des réflexions qu’il a suscitées.

(14)
(15)

6 1. Le travail de l’orthopédagogue

L’enseignement dans nos écoles primaires au Québec se veut le plus adapté possible aux besoins de l’enfant. On assure à ce dernier une formation de base couvrant plusieurs domaines de connaissance. Pour ce faire, on a recours à des généralistes entourés de spécialistes.

Pour répondre d’une façon adéquate aux besoins de la clientèle, un grand nombre de commissions scolaires possèdent, parmi leurs personnes ressources, des orthopédagogues. Ces dernières fonctionnent suivant des modalités différentes selon de la commission scolaire qui les emploie. Mais on peut malgré tout décrire globalement leur rôle en disant qu’elles travaillent à la fois auprès des enfants et des autres agents éducateurs.

Chez les enfants, elles s’occupent surtout - mais non exclusivement - de ceux et celles qui sont en difficulté d’apprentissage, que ce soit en français, en mathématiques ou autre discipline concernée par leur difficulté. Elles travaillent en mode individuel, c’est-à-dire avec un seul enfant à la fois, ou en mode semi-individuel, c’est-à-dire avec un petit groupe d’enfants n’excédant pas quatre individus. Leur but est :

- d’offrir à ces enfants la rééducation dont ils ont besoin*, donner à l’enfant les stimulations adéquates en vue de pallier à une déficience de structure cognitive et de développer cette structure;

- de donner des cours de récupération: retourner sur les derniers acquis d’un enfant, dans une matière donnée, sur une notion bien spécifique, afin de

(16)

construire une connaissance solide et durable et de même niveau que celle de son groupe. Cette récupération devrait amener l’enfant à rattrapper ce groupe dans sa démarche de connaissance et à pouvoir à nouveau fonctionner d’une façon autonome en classe;

- de fournir du renforcement pédagogique à des élèves sur des notions étudiées en classe: assurer des stimulations supplémentaires pour les enfants ne présentant pas de difficultés marquées, mais dont l’apprentissage est plus lent et exige des activités supplémentaires.

Elles travaillent en classe ou auprès des autres agents éducateurs dans le but:

- d’instrumenter les professeurs, dans leur démarche d’enseignement: leur apporter des références adéquates en fonction des besoins exprimés, en leur bâtissant des profils de classe sur une matière comprenant plusieurs notions, ou sur une notion donnée, en les éclairant sur le choix d’un matériel didactique approprié;

les épauler pédagogiques ateliers de

de les guider dans des interventions particulières: et monter avec eux des projets au niveau de la classe, comme des lecture, d’écriture, l’expérimentation matériel ;

d’un nouveau

- de travailler en classe avec le professeur, dans le cas d’une organisation en sous-groupe visant à un enseignement plus individualisé;

(17)

8 - d’instrumenter les parents qui veulent aider leur

enfant par du travail maison, en leur expliquant sommairement la démarche à prendre, le matériel utilisé et le pourquoi de l’ensemble de la situation.

Il fut une époque où la fonction d’orthopédagogue n’existait pas. Le professeur se retrouvait le seul agent responsable de sa classe, de son bon fonctionnement et seul face à ses multiples problèmes pédagogiques. Il devait trouver des périodes en dehors du temps de classe afin d’assurer "le rattrapage" des enfants ayant subi un retard pédagogique.

A une époque plus récente, lors de l’arrivée de l’orthopédagogue, cette dernière est intervenue comme agent pédagogique mais ce, tout en étant encore à la recherche d’une définition de tâche difficile à cerner et à établir. Au tout début, par exemple, dans notre commission scolaire, ces pédagogues travaillèrent beaucoup en psycho-motricité, selon l’école de pensée du moment. Aujourd’hui, nous sommes davantage collées à la réalité classe.

2. Quelques besoins de 1’orthopédagogue

Dans notre commission scolaire, le statut de l’orthopédagogue est sans cesse à redéfinir et évolue dans un cadre souple, adaptable aux besoins du milieu, respectant les personnes impliquées. Dans cet esprit, il nous est permis, en tant que pédagogue spécialisée, d’effectuer des recherches, de faire des études de cas, afin d’apporter un nouvel éclairage sur les actions à entreprendre en vue d’aider l’enfant dans sa démarche de connaissance, tant sur le plan rééducation que sur le plan organisation de classe.

Il faut cependant préciser que la tâche de l’orthopédagogue n’en est pas une de conseiller pédagogique. Lors de

(18)

consultations et d’échanges avec l’enseignant, la clientèle ultimement visée dans les interventions choisies dans ou hors classe, est toujours l’enfant en difficulté d’apprentissage. Cette difficulté de l’enfant a cependant des causes variées, et on doit y répondre selon des modalités distinctes, telles que décrites plus haut. Ainsi, un enfant peut accuser un retard pédagogique pour une cause extérieure à son bon fonctionnement: maladie, déménagement etc., ou alors, il peut être temporairement en difficulté pour une notion à cause d’une perturbation émotive ou autre; dans un autre cas, il peut être en difficulté dans une matière parce que la notion enseignée est trop avancée pour ses acquis personnels et donc qu’elle ne réfère à aucune notion acquise pour lui. Il y a enfin le cas de l’enfant en difficulté générale d’apprentissage, c’est-à-dire en retard sur son groupe âge, ne pouvant fonctionner au même rythme que les autres.

Toutes ces identifications, bien que simples à énumérer, ne sont pas toujours aussi claires et tranchées quand l’équipe pédagogique fait une étude de cas. L’élaboration d’instruments qui apportent un éclairage adéquat sur le fonctionnement intellectuel de l’enfant est plus que désirée, elle est nécessaire, mais hélas pas toujours présente dans nos milieux.

Pour bien comprendre le fonctionnement intellectuel de l’enfant, il faut, avant tout échange de points de vue, s’entendre entre membres de l’équipe pédagogique sur les termes importants de notre étude. Ce que nous voulons savoir, c’est si l’enfant comprend et si oui, jusqu’où va cette compréhension. Si non, qu’est-ce qu’il ne comprend pas?

(19)

10 dire comprendre? Au sein d’une même équipe pédagogique, il semble que la définition de ce terme ne fasse pas toujours l’unanimité. En mathématiques, les situations où l’évaluation donne lieu à différentes interprétations sont fréquentes.

Une réflexion sur la définition de compréhension s’impose. Des échanges sur notre pédagogie sont nécessaires. Il est important de dégager des critères communs sur lesquels on pourrait se baser en évaluation.

Herscovics, dans sa thèse de doctorat Compréhension de la droite (Université de Montréal, 1979), nous amène à une réflexion sur ce qu’est comprendre:

Toute étude portant sur la compréhension des mathématiques se doit de distinguer entre la compréhension et l’apprentissage. D’après le Larousse, "comprendre" c’est "concevoir, se rendre raison d’une chose", alors que "apprendre" c’est "acquérir des connaissances.

"Etablir une définition de ce que veut dire "comprendre la mathématique" en général, relève de la philosophie. Dans le sens plus restreint de la mathématique enseignée à l’école, cela relève du domaine pédagogique. Cependant, même pour un concept ou processus mathématique donné, il semble impossible de déterminer des critères de compréhension universellement acceptables. Néanmoins cette incapacité à définir la compréhension ne signifie aucunement qu’elle n’existe pas. D’ailleurs, une meilleure compréhension a toujours été l’un des objectifs des réformes scolaires entreprises ces vingt dernières années. Etant indéfinissable, elle est restée énoncée en des termes vagues, d’une généralité telle, qu’on pouvait difficilement la relier au travail de l’enseignant dans sa classe. " (p.27)

(20)

importante, mais les relations existant entre les deux concepts sont aussi très importantes. Pour établir des critères de compréhension, on doit tout d’abord savoir comment l’enfant "apprend", comment se fait l’acquisition de la connaissance chez l’enfant.

Comme Ginsburg et Opper (1979) le soulignent dans leur livre sur le développement intellectuel suivant la pensée piagétienne, Piaget, après trente ans de recherche dans la construction de la connaissance chez l’enfant, a pu, en épistémologie, nous apporter un éclairage pénétrant sur la pensée logique de l’enfant. Celle-ci, dit-il, n’est pas une réplique miniature, elle n’est pas inférieure à celle de l’adulte, elle est plutôt différente et cette différence, qui se manifeste dans les stades de développement qu’il décrit, est avant tout qualitative. Ces stades de pensée proposés par Piaget sont liés à l’âge, au milieu culturel et économique, aux stimulations, aux liens émotifs de l’enfant.

A côté de son modèle global sur le développement de l’intelligence, Piaget propose également un modèle de construction des connaissances dans sa théorie de l’équilibration. Cette vision de la construction de connaissance demeure cependant générale en ce qu’elle n’est pas liée à un contexte particulier ni à des concepts précis. En ce sens, la théorie de l’équilibration, si elle fournit des pistes stimulantes au plan pédagogique, ne constitue guère un outil permettant une analyse fine du développement de la connaissance d’un concept chez un enfant.

Comme nous oeuvrons dans un contexte scolaire, nous avons besoin d’un modèle plus précis que le modèle piagétien, c’est-à-dire davantage relié aux objets de connaissance comme on les rencontre ou les présente à l’école. Ce modèle

(21)

12 demeurera toutefois piagétien dans son esprit et devra permettre une description raisonnablement détaillée de l’évolution de l’enfant dans sa compréhension de concepts particuliers étudiés en classe. Ce modèle devra notamment être en mesure de délimiter des étapes dans l’acquisition de cette compréhension.

Herscovics et Bergeron (1982), nous proposent justement un modèle satisfaisant ces conditions: ce n’est pas un modèle décrivant l’apprentissage de façon très générale et vague à la fois mais un modèle de compréhension articulé autour des différentes notions mathématiques de l’école primaire.

3. Le modèle constructiviste de compréhension

Comme le décrit Dionne (1988), le modèle de Herscovics et Bergeron s’inspire de l’épistémologie génétique de Piaget pour analyser les concepts enseignés au primaire, et s’appuie sur les recherches récentes, tant européennes que nord- américaines effectuées sur ce sujet. Ce modèle décrit quatre niveaux de compréhension: la compréhension intuitive,la compréhension procédurale, l’abstraction et la formalisation. Suivant ce modèle,

la compréhension intuitive se manifeste par les connaissances "informelles” qui se caractérisent par des pré-concepts ou une pensée basée sur la perception visuelle ou des actions primitives non quantifiées qui se limitent à des estimations rudimentaires;

la compréhension procédurale, aussi appelée mathématisation initiale dans une première version du modèle, se manifeste par l’acquisition d’une procédure qui, en coordonnant les connaissances intuitives et certains pré-requis, forme une première construction d’une notion;

(22)

1}abstraction d’une notion se manifeste soit par sa généralisation, soit par sa conservation qui réflète l’invariance de l’objet mathématique, ou encore par la réversibilité des transformations;

la formalisation notion traitée, symbolisme, d’opérations Mais, dans présuppose que se soit la ou la tous l’abstraction a été manifeste, par validation découverte les cas, la du selon 1’utilisation logique d’axiomes. ce niveau faite.

Ajoutons ici, en guise de remarque, qu’un tel modèle ne règle pas tout: il est certes utile de pouvoir décrire avec une certaine finesse comment peut s’élaborer la compréhension d’un concept. Mais le problème d’évaluer le niveau de compréhension atteint par un enfant demeure.

4. L’orthopédagogue et le problème de l’évaluation en mathématiques

Le travail qui suit répond à une préoccupation d’ordre général, face à l’enseignement des mathématiques au primaire et plus particulièrement à l’évaluation formative des enfants dans cette discipline. Comme orthopédagogue, nous sommes souvent sollicitées par les professeurs et les parents qui ont des problèmes avec les enfants au plan mathématique. La tâche de l’orthopédagogue, telle que décrite plus haut, est justement de répondre à ce besoin.

Dans l’exécution de notre travail, nous rencontrons un problème beaucoup plus particulier: celui des enfants en difficulté d’apprentissage en mathématiques, qui ne sont pas repérés avant la quatrième année du cours primaire, les professeurs ne se rendant pas toujours compte des failles. Or, le plus regrettable, c’est que le problème déborde les mathématiques. En effet, comme nous faisons des

(23)

14 interventions individuelles également en français, nous avons eu l’occasion de vérifier la cohérence des difficultés de certains enfants. Par exemple, un enfant qui ne fonctionne pas en compréhension de lecture, au niveau de l’interprétation, érpouve bien souvent des problèmes en numération, même en performant au niveau des tests standard, basés sur l’évaluation des bonnes réponses. Nous n’insisterons pas ici sur cette question de cohérence des difficultés mais nous y reviendrons plus loin, en conclusion, car elle ouvre des perspectives

recherche. L’enseignement malheureusement souvent basé sur

nouvelles au plan de la des mathématiques est la représentation iconique et passe rapidement au symbole formel. On développe rapidement chez l’enfant des automatismes et des habiletés à fonctionner sur ce plan sans qu’il établisse de liens avec les manipulations et les situations concrètes qu’il connaît.

Le problème de l’évaluation se pose donc quand on nous demande de faire un portrait pédagogique de classe en mathématiques. Cette tâche consiste à situer le mieux possible chacun des enfants de la classe dans son apprentissage d’une notion clé du programme. Nous devons ensuite, avec le professeur, organiser l’enseignement de la notion mesurée afin que cet enseignement réponde aux besoins précis des enfants. Quand on nous demande de travailler au plan individuel avec un enfant, cette évaluation nous est d’un grand secours pour l’application d’une rééducation appropriée.

Cependant, pour réaliser une telle évaluation, il nous faut un instrument qui réponde bien à ce que nous voulons mesurer chez l’enfant. Nous avons besoin, pour une évaluation adéquate, d’un instrument qui mesure la compréhension de l’enfant, qui tienne compte du raisonnement qui l’amène à

(24)

■telle solution et qui vérifie davantage ce raisonnement que la réponse elle-même.

Or, les tests écrits que l’on retrouve normalement dans les classes tiennnent surtout compte de la réponse. On peut quelquefois y retrouver les indices du raisonnement de l’enfant, mais ce n’est pas toujours le cas. Le plus souvent, on ne peut que deviner ce qui a amené l’enfant à telle réponse. Des sous-questions seraient nécessaires pour y voir plus clair. Il faudrait alors consulter à nouveau chaque enfant individuellement, pour chaque question manquée. Par ailleurs, il peut aussi arriver qu’un enfant fournisse des réponses exactes en s’appuyant sur de mauvais raisonnements: il faudrait donc consulter également les enfants ayant bien répondu pour nous assurer de la justesse de leurs raisonnements. Un tel procédé perturberait la bonne marche d’une classe en retardant la correction des tests, en prenant du temps d’enseignement pour les clarifications. De plus, un tel retour risquerait de mettre certains enfants en état d’échec.

L’autre solution serait d’interroger verbalement chacun des enfants. Les chercheurs ont justement développé des outils dans ce but: les entrevues cliniques de type piagétien qui ont l’avantage d’être plutôt centrées sur la démarche de l’enfant que sur la réponse. Bien sûr, dans une telle situation, l’enfant ne serait pas en état d’échec puisque cette entrevue réalisée individuellement aurait comme qualité d’être rassurante et sécurisante. Cependant, on trouve plusieurs formes d’entrevues cliniques et il serait peut-être important de faire un tour de cette question de l’évaluation en nous intéressant aux entrevues sans négliger peut-être d’autres aspects avant de poursuivre notre travail.

(25)

16 5. Evaluation en mathématiques, un tour de la question

5.1 Historique

Piaget, dans son immense oeuvre, s’est intéressé à l’étude de l’intelligence humaine. Il voulut répondre à la question "Qu’est-ce que la compréhension?" mais réalisa qu’il se devait tout d’abord d’étudier comment se construit la connaissance. Il y passa trente ans, alors qu’il pensait que quelques années suffiraient.

Il bâtit tout d’abord des tests standard afin de pouvoir cerner les points essentiels indispensables à l’élaboration de la connaissance. Au cours de ses recherches, il réalisa que l’application de ces tests standard était très peu satisfaisante. Une telle approche lui semblait trop rigide. Les erreurs commises par les enfants lors de ces tests le captivèrent davantage que les performances réalisées. Il en vint à la conclusion que les procédures des tests standard pouvaient occasionner des erreurs. Quand il y a erreur d’interprétation dans la formulation de la question, l’enfant informe très peu le correcteur de sa structure de pensée.

C’est pourquoi il se tourna vers l’entrevue clinique, technique qu’il mit au point en la transformant au cours de ses années de recherches.

5.2 L’entrevue clinique

Nantais (1983) a élaboré une étude sur les méthodes d’entrevue clinique mises au point par Piaget et ses collaborateurs, sur leurs caractéristiques et leurs limites. C’est de cette étude que nous nous inspirons dans les paragraphes qui suivent et c’est de celle-ci que sont tirées

(26)

les citations entre guillemets. Dans cette étude, elle décrit trois types de méthodes cliniques:

- l’observation critique des actions, - l’entrevue clinique ou le dialogue,

- la méthode critique ou la méthode clinique revisée.

5.3 L’observation critique des actions

Piaget a eu recours à l’observation en entrevue clinique auprès d’enfants trop jeunes pour s’exprimer verbalement. Dans cette observation, il ne se fiait pas au hasard pour que certains comportements désirés se manifestent: son observation n’était pas passive. Elle s’inscrivait "dans le cadre de véritables expériences, à partir d’hypothèses bien établies et de la mise en place des conditions requises pour une étude systématique"(p.6).

Une telle méthode présente certaines limites. Elle "permet difficilement l’investigation de questions touchant la généralité de certains schèmes conceptuels"(pp.7-8). Elle ne permet pas d’accéder aux attitudes et croyances des enfants. Elle ne peut pas toujours fournir des données qualitatives sur le raisonnement de l’enfant, raisonnement qui n’est pas nécessairement perceptible lors d’exécutions de tâches non-verbales.

5.4 L’entrevue clinique ou le dialogue

Piaget a donc senti le besoin d’aller plus loin que 1’observation de ces tâches non-verbales. II décida donc d’échanger verbalement avec les enfants.

Vinh-Bang (1966), ici cité par Nantais, écrit que Piaget a mené, de 1920 à 1930, des entrevues de type verbal, c’est-à-

(27)

18 dire se basant, uniquement sur une conversation avec les enfants. Ces entrevues étaient bien sûr, inscrites dans un cadre de recherche bien précis, ayant des "hypothèses à vérifier, des questions à poser et des voies alternatives à explorer"(p.10).

Une telle méthode offre des avantages. Tout d’abord, elle permet d’aller beaucoup plus loin dans nos investigations que ne le permet une simple observation. Elle donne accès aux croyances des enfants, à leur perception et à leurs attitudes. Elle nous apporte aussi un éclairage sur le raisonnement de l’enfant. Cependant, une méthode uniquement verbale présente de grandes difficultés et comporte des limites. Tout d’abord il y a parfois une différence entre le langage adulte et le langage de l’enfant sur le plan sémantique. De plus, comme le souligne Ginsburg (1977), l’enfant éprouve parfois des difficultés à verbaliser sa pensée. D’où un obstacle pour le chercheur qui veut cerner la pensée logique de l’enfant et le suivre dans son raisonnement.

5.5 La méthode critique ou la méthode clinique revisée

Piaget, dans son étude de la logique et du raisonnement de l’enfant, en vint à adopter une méthode de recherche "mixte" dont, rapporte Nantais, Vinh-Bang (1966) situe l’apogée de 1940 à 1955.

Cette méthode est plus que la juxtaposition de l’observation critique et du dialoque. C’est un nouvel outil de recherche possédant tout à la fois les caractéristiques des deux méthodes qui le constituent, les résultantes nouvelles de l’interaction de ces deux méthodes et aussi des éléments nouveaux ajoutés à ces deux méthodes. Dans ses

(28)

caractéristiques, nous retrouvons d’abord les objets présents devant l’enfant. Les questions de l’intervieweur portent sur ces objets et l’enfant "n’a donc plus à imaginer à partir d’une description donner encouragé désignés. constitue C’est la source Piaget introduit la verbale"(p.14) . une réponse en ce qu’il "fait principale . contradiction

Ensuite, l’enfant est manipulant les objets avec ces objets qui de données"(p.15). Enfin,

dans ses arguments et ses à

suggestions afin de vérifier "la stabilité et l’authenticité" (p.15) de la pensée de l’enfant.

L’entrevue clinique demande constamment au sujet de verbaliser ses idées, de donner les raisons de ses actions et finalement de réfléchir sur ce qu’il a fait. Ceci l’amène à décrire les processus qu’il a utilisés en répondant à la question "comment" et sur le raisonnement qu’il a suivi en répondant à la question "pourquoi". Tout ceci peut nous fournir de riches données qui éclaireront l’entrevue sur le processus cognitif.

5.6 Aspects techniques de l’entrevue clinique revisée

Bien qu’attirante, l’entrevue clinique revisée a cependant des faiblesses. Etant basée en partie sur le dialogue, elle présente les inconvénients inhérents à ce dernier: nous avons déjà évoqué les problèmes liés à la sémantique et les difficultés de verbalisation souvent éprouvées par les enfants. L’intervieweur devra faciliter une riche verbalisation en encourageant l’enfant à parler, en lui fournissant un climat de confiance et en prenant garde de mal interpréter ses réponses. Il devra vérifier les rapports verbaux, clarifier les énoncés ambigus et vérifier les différentes alternatives de processus dans une résolution de problèmes.

(29)

20 Ginsburg (1981), nous parle du modèle ”introspectionniste" pour 1’utilisation du verbal. La pensée dit-il, ne se transmet pas toute par le verbal. Pour qu’il y ait verbalisation, il faut qu’il y ait état de conscience. Si on admet que certaines parties de raisonnement et de pensée ne sont pas conscientes et verbalisables, il faut donc admettre que les rapports verbaux ne nous apportent qu’une partie d’information en ce qui regarde les processus de pensée. Dans un domaine accessible au sujet, il y aura toujours des niveaux alternatifs d’analyse dont le sujet aura connaissance et d’autres qui lui échapperont. Les données verbales doivent avoir une place dans la recherche cognitive. Cependant, on le voit, il y a d’importantes limites et contraintes dans leur emploi. Un bon usage des données verbales demande une grande prudence quant à ces limites et contraintes.

On devra également tenir compte d’autres aspects ou éléments. Tout d’abord, la motivation de l’enfant: le chercheur devra s’assurer que l’enfant est disposé à accomplir sa tâche et qu’il l’aborde sérieusement. Il devra également s’assurer que ce dernier comprend bien la question et sa formulation et que la réponse est un véritable indice d’une action intérieure. Il faut aussi prendre garde au degré de difficulté de la question. Si elle est trop facile ou trop difficile, l’enfant ne saura exprimer son raisonnement. Pour qu’il y ait un bon rapport verbal, il faut un haut degré de motivation et il faut que la question soit intéressante pour 1’enfant.

En plus, l’entrevue clinique revisée permet la clarification, la reformulation d’une question afin de rendre la situation de problème la plus claire possible pour l’enfant. On peut également vérifier "la force de conviction", par différentes

(30)

et de la certitude de l'enfant. C’est ce que Piaget appelle "la contradiction*', comme nous l’avons vu plus haut.

D’autres sources de variations dans les rapports verbaux peuvent influencer le résultat d’une entrevue clinique. L’interférence en est une: notre attitude, bien que se voulant objective, peut changer au cours de l’entrevue et ainsi orienter les réponses de l’enfant. Ce dernier peut aussi avoir un blocage du fait de s’observer exécutant une tâche. Pour éviter ces interférences, il est recommandé de passer au verbal seulement après que la tâche soit exécutée. L’ambiguïté est une autre source de variation. Les questions doivent être claires et précises afin que les réponses apportent les renseignement désirés au niveau visé. Les réponses peuvent se rapporter à trois niveaux différents:

- des processus de pensée, - des explications,

- des raisonnements.

Un fait très important à considérer, dans notre interprétation des actions et explications verbales des enfants, c’est la différence de structure entre notre système de logique et celui de l’enfant. Nous devons cependant étudier le système de ce dernier en ayant recours au nôtre pour l’interpréter.

Après ce rapide inventaire des méthodes cliniques, de leurs avantages et de leurs limites, nous devons convenir qu’elles nous aident vraiment à cerner la pensée de l’enfant. Par ces travaux, Piaget a influencé plusieurs chercheurs en didactique des mathématiques. Tout d’abord, un bon nombre se centrent, tout comme lui, sur la nature de la pensée et son développement pour saisir la nature de la connaissance

(31)

22 mathématique. De plus, certains de ces chercheurs adoptent également la méthode de l’entrevue clinique. D’autres, par contre, reprochent à cette méthode son manque de rigueur en l’opposant aux méthodes "scientifiques”, c’est-à-dire où les aspects quantitatifs et le

statistiques occupent la plus premiers, les méthodes cliniques

recours aux techniques grande place. Pour les constituent une source de données qui nous informent davantage sur les connaissances intérieures que les tests standard. Pour les seconds, la souplesse de ce type d’entrevue, adapté à chaque individu, est un défaut majeur qui l’empêche d’avoir cette constance de structure nécessaire à une recherche contrôlée. Cependant, aujourd’hui encore, beaucoup de chercheurs connaissent peu l’entrevue clinique et ne sont pas sûrs de bien l’utiliser.

Dans le contexte scolaire, ces entrevues cliniques ne peuvent cependant s’appliquer telles quelles à l’échelle d’une classe en raison de leur durée beaucoup trop grande. On ne peut imaginer qu’un professeur puisse en conduire avec chacun de ses élèves pour explorer leurs processus de pensée, surtout qu’il doit enseigner toutes les disciplines. Par ailleurs, les orthopédagogues doivent partager leur temps entre tous les élèves de toutes les classes et on ne peut espérer les voir utiliser cette approche clinique avec tous leurs clients. Il faut donc prévoir une forme d’entrevue qui n’exige pas autant de temps.

5.7 La mini-entrevue

Il existe justement un tel instrument, inspiré des entrevues cliniques de Piaget et adapté aux besoins du milieu scolaire: c’est la mini-entrevue développée par Nantais (1989).

La mini-entrevue consiste en un dialogue entre l’intervieweur et l’élève dans le

(32)

contexte d’une tâche précise se rapportant à des notions déjà enseignées. Il s’agit donc de coordonner le questionnement avec l’activité de l’élève afin d’être renseigné sur les procédures employées. Même si dans une telle entrevue un problème donné exige une réponse, celle-ci ne joue qu’un rôle de deuxième plan car c’est l’identification de la procédure utilisée pour y arriver qui en est l’objectif principal. La mini-entrevue vise avant tout à situer la compréhension de l’enfant dans la construction d’un schème conceptuel. Il est bien évident qu’elle permet aussi d’identifier les enfants qui éprouvent certaines difficultés ou qui annoncent un retard marqué par rapport au reste de la classe mais là s’arrête le rôle de dépistage de la mini-entrevue. (Nantais

1989, p.48)

Cette mini-entrevue est, comme sa description nous le laisse percevoir, une méthode d’évaluation formative, d’une part, par les objets de son étude, la compréhension de l’enfant et ses processus de pensée, et, d’autre part, par les finalités qu’elle poursuit: situer l’enfant dans son apprentissage et réajuster l’enseignement en fonction de ses besoins. Pour mieux vérifier ce fait, reprenons quelques points essentiels de l’évaluation formative.

5.8 L’évaluation formative, ses caractéristiques

Enseignement et évaluation se sont de tout temps côtoyés. L’évaluation peut revêtir diverses formes selon les finalités pour lesquelles elle est conçue. Parmi ces finalités, nous retrouvons l’identification des enfants en difficulté, le classement, l’ajustement de l’enseignement en cours d’année,

le pronostic, l’information aux parents, l’aide particulière apportée à un enfant etc. Les formes d’évaluation se distinguent entre elles par le type d’information qu’elles nous permettent de cerner et les finalités qu’elles nous

(33)

24 aident à atteindre. L’évaluation normative nous permet de situer l’enfant dans son groupe. Par l’évaluation sommative, nous sommes informés de la somme des connaissances et des apprentissages acquis par chaque individu de la classe. Par l’évaluation formative, nous acquérons un éclairage particulier sur la démarche d’apprentissage de l’enfant, ses processus de pensée et les procédures qu’il utilise. Scallon (1988) décrit la finalité de cette évaluation comme étant “... la régulation du cheminement ou la progression des élèves, des étudiants ou des individus en formation, engagés dans une démarche d’apprentissage" (p.10).

Se basant sur des travaux qui ont traité de l’évaluation comme d’une habileté cognitive ou d’un comportement, Scallon (1988) a considéré plusieurs auteurs, mais il a retenu plus particulièrement les travaux de Noizet et Caverni (1978) et Bonniol (1981) comme cadre conceptuel. "Ces auteurs ont défini l’acte d’évaluation comme un processus de comparaison entre un produit observé (une production scolaire) et un modèle de référence construit par la personne qui évalue"

(p.22). Scallon définit le produit observé par "ce qui est" et le modèle de référence par "ce qui devrait être" (p. 13). C’est de la comparaison de ces deux éléments que l’enseignant ou l’enseignante pourrait, à partir de ses propres convictions, élaborer un jugement qu’il ou qu’elle reporterait sur une échelle de valeurs. Ce jugement doit nous conduire, insiste Scallon, à une décision-action.

La description que Scallon donne de l’évaluation formative rencontre, au moins dans les termes généraux, l’idée que nous nous en faisons. Il écrit aussi: "En évaluation formative, la collecte des informations ne sera pas toujours centrée sur le rendement ou sur la performance, et ce sera vraisemblablement le cas avec de jeunes élèves." (p.30) Il

(34)

ajoute que dans ce cas, le maître devra vérifier la motivation des enfants.

Dans ses écrits, il n’exclut pas les termes "produit d’apprentissage", "rendement", "performance", mais il en intègre d’autres comme "processus", "stratégies". Ces deux derniers termes reflètent d’avantage l’esprit de la mini­ entrevue que les premiers qui ne nous semblent pas adéquats pour parler de la progression de l’enfant dans sa démarche de l’apprentissage. Dans la mini-entrevue, nous nous intéressons à la production de l’enfant au sens dynamique plutôt qu’à un "produit" statique, placé tout simplement sur une échelle de valeurs.

La mini-entrevue est, comme son nom l’indique, une courte entrevue individuelle pendant laquelle le professeur vérifie la connaissance de l’enfant, sur une seule notion du programme et essaie de préciser son niveau de compréhension. Comme elle est réalisée par le maître en classe pendant que l’ensemble des élèves est lancé dans une activité, elle requiert des conditions essentielles:

- une analyse préalable de la notion à mesurer est nécessaire afin de faciliter l’analyse des réponses et explications de l’enfant;

- la qualité du questionnement est primordiale pour permettre une entrevue à la fois brève et qui conduise à des conclusions utiles sur la compréhension de l’enfant. On insistera notamment sur les éléments suivants:

- chaque question doit être justifiée;

- l’emboîtement des questions doit être rationnel; - une vérification des pré-requis de la notion

doit être effectuée auprès de l’enfant;

(35)

26 difficile au plus facile.

Cette forme d’entrevue réalisée par le professeur dans sa classe ne peut évidemment viser qu’un niveau de compréhension à la fois et s’appuie davantage sur l’observation de la stratégie employée que sur la réponse donnée.

Un tel test, appliqué dans le respect de ces contraintes, a de grandes qualités: il est rapide, donc, plus applicable dans une classe par un professeur. Les questions sont les mêmes, donc ni plus ni moins facilitantes pour un enfant que pour les autres. Il permet l’établissement de certaines comparaisons non pour classer l’enfant mais pour mieux le juger au sens formatif, en fonction de l’ensemble de la classe et percevoir d’éventuelles faiblesses dans l’enseignement offert au groupe: certaines incompréhensions manifestées chez plusieurs élèves peuvent en effet avoir été amenées par l’approche utilisée en classe et ne traduire aucune lacune chez les enfants. Ces faiblesses sont alors généralisées à l’ensemble de la classe et le professeur n’a qu’à revoir sa façon d’aborder la notion avec le groupe.

5.9 La mini-entrevue modifiée

En ce qui regarde la mini-entrevue, le facteur rapidité ne revêt pas la même importance pour l’orthopédagogue que pour un professeur dans sa classe. Celle-là peut plus facilement accorder deux ou trois minutes de plus à chaque enfant, ce qui lui permettra de toucher deux niveaux de compréhension à la fois. L’avantage de procéder ainsi c’est de cerner une portion plus large de la pensée de l’enfant. En effet, l’étude de deux niveaux de pensée peut donner des pistes de travail pédagogique encore mieux adapté aux besoins comme nous le verrons plus loin.

(36)

Autre avantage pour l’orthopédagogue, elle peut se permettre de compléter les questions fermées par des sous-questions ouvertes. Une fois la question fermée posée, l’enfant y répond par des actions ou des mots ou des deux façons à la fois. Souvent les gestes ou les paroles de l’enfant portent à différentes interprétations. Les sous-questions ouvertes permettent alors un meilleur éclairage sur le raisonnement de l’enfant. Ces sous-questions ne doivent cependant pas donner des pistes de réponse à l’enfant ou lui faire sentir qu’il se trompe. Elles sont plutôt du genre: "Comment as-tu trouvé ta réponse?", "Montre-moi comment tu as pensé", "Un ami m’a répondu ainsi, comment pourrait-on lui expliquer..."

Comme on le voit, si la mini-entrevue peut rendre des services aux maîtres dans leurs classes, ainsi que l’a démontré Nantais (1989), elle a de fortes chances d’apporter aussi beaucoup aux orthopédagogues, surtout que celles-ci pourront se permettre certaines libertés vis-à-vis des contraintes très sévères imposées à un professeur qui doit interroger ses élèves tout en continuant à assumer la responsabilité des activités de l’ensemble de la classe.

Reste à voir, et c’est là le projet global de la présente recherche, de quelle façon précise la mini-entrevue peut être adaptée au travail de l’orthopédagogue et ce que le recours à cet outil, dans de telles conditions, pourra apporter aux maîtres et aux élèves.

6. Une première expérience vécue

Une première expérience informelle nous a déjà permis de mieux connaître cet instrument de mesure. A plusieurs reprises, les professeurs de troisième année nous ont demandé de l’aide en mathématiques. Les enfants de leur classe

(37)

28 fonctionnaient mal dans certains tests de numération, dans les opérations et ils accrochaient quelques fois sur "des détails" dans la résolution de problèmes.

Une étude des mauvaises réponses était nécessaire. Les enfants appliquaient mal la règle de la retenue ou celle de l’emprunt, se trompaient de chiffres dans une position donnée du nombre. Il fallait en conclure que notre système décimal, c’est-à-dire la numération, était plus ou moins compris par ces enfants. Une bonne maîtrise de notre système décimal est essentielle en troisième année, pour comprendre les quatre opérations. Ces dernières consistent en grande partie, en des transformations que l’on apporte à un nombre donné soit en lui ajoutant des éléments, soit en lui en enlevant; il en va de même pour la multiplication et la division. Il faut bien sûr apprendre les règles de ces opérations, mais avant tout, il faut bien maîtriser le nombre, pouvoir jouer avec les regroupements, les défaire, les refaire...

L’expérience nous a appris et Ginsburg (1977) le souligne d’ailleurs, que la plupart des problèmes mathématiques des enfants au primaire relève d’une mauvaise compréhension de notre système de numération. C’est pourquoi le choix de la notion à évaluer fut assez

mini-entrevue ayant pour but tableau de la compréhension élèves, de la numération, pour

simple. Nous avons monté une de donner au professeur un qu’avaient l’ensemble de ses les nombres à trois chiffres, ceci, dans une perspective d’évaluation formative.

Le portrait ainsi élaboré devait s’avérer assez détaillé pour aider spécifiquement les enfants qui semblaient ne pas saisir cette notion de numération, les distinguer de ceux qui étaient "en voie d’acquisition" et des autres dont la démarche était plus avancée. C’est là un des buts importants

(38)

de l’évaluation formative: voir où en sont les enfants afin de favoriser leurs progrès.

Nous basant sur le modèle constructiviste de compréhension de Herscovics et Bergeron (1982), nous avons cerné deux niveaux de compréhension:

- le niveau procédural, - le niveau abstrait.

Pour cette expérience, nous nous retrouvions par conséquent avec quatre groupes d’enfants exigeant un enseignement différent :

- ceux qui fonctionnaient au niveau abstrait et donc au niveau procédural,

- ceux qui fonctionnaient au niveau procédural mais non au niveau abstrait,

- ceux qui avaient réussi "assez bien" à l’abstrait mais n’évoluaient pas parfaitement au niveau procédural. Ces derniers se mélangeaient quelques fois dans leurs procédures.

- ceux qui ne fonctionnaient ni à l’abstrait, ni au procédural.

Ils n’avaient pas compris la procédure mais semblaient posséder les structures mentales nécessaires à la compréhension de ce niveau.

Par exemple, un enfant à qui nous demandions de nous expliquer pourquoi 54 s’écrit avec un 5 et un 4 en se servant de ses jetons me disposa 5 jetons à gauche et 4 à droite. Comme il lui restait beaucoup de jetons dans la main, il dit lui même: c’est pas ça! Poussant nos questions en parlant de paquets, il partit dans la bonne voie et accomplit la tâche. Cet enfant connaissait la notion de paquet, de regroupement, mais il avait appris un automatisme, celui de faire "des

(39)

30 portraits du nombre”. Aussi, quand nous avons reformulé autrement le problème, il s’y est perdu. Il a fallu, ultérieurement, pour cet enfant, rétablir le contact entre la manipulation et le symbole, en développant ce concept.

Un cas extrême n’est pas entré quatre groupes présentée plus enfant laissaient supposer qu’il

dans la classification en haut. Les réponses de cet ne possédait pas certains pré-requis essentiels à la compréhension procédurale. Il ne pouvait même pas réussir au niveau de la manipulation, n’arrivant pas à faire des paquets. Le symbole n’avait aucun sens pour lui, il ne pouvait même pas s’y bâtir des automatismes. Une autre mini-entrevue pour le niveau intuitif fut élaborée pour cet élève. Ce cas ne relevait plus d’une simple intervention du professeur, mais exigeait des activités spécifiques de diagnostic plus précis et de remédiations organisées par l’orthopédagogue; il n’était pas nécessaire de l’inclure dans l’organisation pédagogique de la classe qui découla de cette expérience sinon pour faire coïncider l’heure de son retrait de la classe pour sa rééducation et l’heure des mathématiques dans la classe.

A la lumière des résultats obtenus grâce aux entrevues, le professeur put, avec notre aide, réorganiser la classe et son enseignement afin de répondre de façon adéquate aux besoins spécifiques de ces élèves, regroupés pour cette expérience selon la compréhension manifestée lors de la mini-entrevue.

7. Vers la présente recherche

Bien que cette expérimentation ait été très positive, elle n’est pas suffisante pour répondre à la question de cette recherche de façon satisfaisante. En effet, une expérimentation plus structurée est nécessaire, afin de

(40)

confirmer ou rejeter nos hypothèses sur l’utilité de la mini­ entrevue dans un tel contexte. Il est d’abord nécessaire de vérifier, auprès d’autres orthopédagogues, si et comment la mini-entrevue est adaptable à leur tâche et vérifier également auprès de professeurs appartenant à d’autres écoles de ma commission scolaire si cet instrument mis entre les mains de 1’orthopédagogue peut leur apporter une aide dans leur classe.

Cette expérimentation nous amènera à faire travailler des orthopédagogues, des professeurs et leurs classes. Ce que nous visons prioritairement, c’est de voir

- comment la mini-entrevue peut être intégrée à la tâche de l’orthopédagogue,

- qu’est-ce que le recours à un tel outil par l’orthopédagogue apporte aux enseignants et à leurs élèves.

Nous verrons, dans le chapitre qui suit, la méthode employée pour mener cette expérience.

(41)

CHAPITRE II

(42)

L’expérimentation porte donc, comme cela a été le cas lors de la première expérience vécue, sur la notion de numération, dans les nombres à trois chiffres, chez les élèves de troisième année.

L’expérience a lieu entre novembre 1988 et janvier 1989. A ce moment de l’année, les enseignants connaissent bien leur groupe et ils sentent le besoin d’orienter leur enseignement d’une façon plus individuelle, afin de répondre plus spécifiquement aux besoins de l’enfant.

Comme notre mini-entrevue, l’on y pose, s’appuie sur de la numération c’est-à-dire la description proposée dans constructiviste de Herscovics et le

les questions que de la compréhension cadre du modèle

section 3 du premier chapitre, nous

Bergeron présenté à la allons, dans un premier temps, nous arrêter à cette description. Ceci nous permettra ensuite de présenter le questionnaire de notre mini-entrevue pour enfin donner les autres détails d’organisation de notre méthode de recherche.

1. La compréhension de la numération dans le cadre du modèle constructiviste

La description de la compréhension de la numération fait référence à des objectifs spécifiques de notre enseignement. Nous y retrouvons les quatre niveaux du tableau général proposé dans le modèle de compréhension de Herscovics et Bergeron (1982): les niveaux intuitif, procédural, abstrait et formel.

Au niveau intuitif, nous retrouvons les notions suivantes: - plus il y a de chiffres, plus le nombre est grand.

Par exemple, un enfant de neuf ans qui était en rééducation mathématique dans mon service éprouvait

(43)

34 des difficultés sérieuses dans cette matière. Il ne pouvait réussir des tâches additives et ne se retrouvait pas facilement dans son comptage. A ma question: "Quel est le plus grand nombre, 99 ou bien 101?" Il me répondit: "As-tu vu les 9? C’est bien plus gros que des 1 et des 0!" Cet enfant n’avait même pas les prérequis pour comprendre le système décimal de numération;

l’enfant reconnaît des groupements utiles dans la vie courante. Par exemple, un jeune enfant de quatre ou cinq ans qui, après avoir considéré un groupe d’amis et la quantité de bonbons requise pour ce groupe dit en montrant sa main avec les doigts dressés: "Je veux trois mains de bonbons", a utilisé le regroupement par cinq pour se faciliter la tâche de comptage jusqu’à quinze, comptage qu’il ne peut peut-être pas effectuer formellement;

l’enfant a des habiletés de comptage. Par exemple, le même enfant qui, plus haut, jugeait 99 plus grand que 101 "à cause des 9", ne pouvait dénombrer correctement une quantité de jetons inférieure à vingt. Il pouvait énumérer les nombres correctement jusqu’à cent mais, quand il dénombrait une quantité de jetons, chaque nombre prononcé ne correspondait pas nécessairement à un jeton. Il pouvait énumérer "un, deux, trois, quatre, cinq" et pendant ce temps ne "toucher" que trois jetons. Il ne possédait donc pas cette habileté de comptage;

la notion positionnelle est perçue comme une juxtaposition de chiffres. Cette notion va plus loin que la notion de numération décimale verbale.

(44)

"Vingt”, c'est un 2 puis un zéro, placés un à côté de l’autre, dans un ordre bien précis. La notion de valeur positionnelle s’installe.

Le niveau procédural, dans le tableau de compréhension, se distingue par l’acquisition de procédures qui, en coordonnant les connaissances intuitives, forme une première construction d’une notion. Pour la numération, nous retrouvons l’acquisition de procédures quand l’enfant effectue, à notre demande, des regroupements pas dix, quand il peut compter par dix. A un deuxième niveau, ces procédures se manifestent par la transcription de ces regroupements en respectant la valeur positionnelle. L’enfant peut alors comparer des nombres, transformer le nombre en enlevant ou en ajoutant des unités, des dizaines ou des centaines par comptage.

Le niveau abstrait, dans le tableau de compréhension, se caractérise, entre autres, par la construction d’invariants. En numération, nous retrouvons notamment l’invariance du nombre dans la conservation de la dizaine. Que nous comptions des regroupements par dix ou que nous les comptions un à un, le nombre qui en résulte est le même. L’enfant possède alors la conservation selon la disposition. Il peut aussi illustrer un nombre. A un deuxième niveau, il perçoit la dizaine, la centaine, comme unités de mesure plus grandes. Il peut reconnaître, dans un grand nombre, le nombre d’unités, de dizaines et de centaines. Il fait la correspondance entre 30 dizaines et 3 centaines.

Le niveau de formalisation est décrit, dans le tableau de compréhension par certaines manifestations chez l’enfant. Nous y retrouvons, par exemple, l’utilisation du symbolisme, la validation logique d’opérations. En numération, nous retrouvons cette utilisation du symbolisme lorsque la

(45)

36 notation positionnelle est perçue comme conventionnelle. Quand l’enfant peut exprimer la décomposition de plus d’une façon, il a recours à cette utilisation du symbolisme et à la validation logique d’opérations.

Les critères de compréhension énumérés ci-dessus sont résumés dans le tableau que l’on trouve à la page suivante. Cette analyse du concept de la numération a été faite à partir des définitions théoriques des niveaux de compréhension dans le modèle en s’appuyant sur une première ébauche d’analyse,

ébauche aussi sommaire qu’inédite, faite par Herscovics et Bergeron vers 1982, de même que d’observations tirées de mon expérience personnelle. Il n’y a pas eu de travail de validation des critères auprès d’enfants, ce qui exigerait une recherche en soi.

2. Le questionnaire de la mini-entrevue et la grille d’observation

Comme nous l’avons annoncé au chapitre précédent, le questionnaire de mini-entrevue élaboré pour les fins de cette expérience couvre deux niveaux de compréhension'- l’abstrait et le procédural. Conformément à l’une des caractéristiques de la mini-entrevue, nous procéderons en allant du niveau le plus difficile au plus facile. Nous retrouvons donc tout d’abord le niveau abstrait et, à l’intérieur de celui-ci, nous y discernons aussi plusieurs niveaux de difficultés. Tout d’abord, nous avons recours à un procédé soustractif, puis à un procédé additif. A l’intérieur de ces deux procédés, nous reconnaissons une transformation à différentes positions du nombre.

Cette caractéristique voulant que nous procédions du plus difficile au plus facile n’est pas un problème pour l’enfant.

(46)

Ex.: 40, 8 au lieu de 48, tau 40+8, ou 408.

INTUITION C0MPRÉHEN5ION PROCÉDURALE ABSTRACTION NORMALISATION

Numération -L’enfant sait que compter -On demande à l’enfant de: -Conservation de la dizaine -Aspect additif de l’écriture déc i ma1 e par paquets de 2, 3 ou 5, ça

verbale va plus vite, mais il ne sait 1) regrouper par dix; Ex.: En comptant 48 par Ex.: 234 = 200 + 30 +4 pas nécessairement le faire 2) compter par dix. paquets de dix, est-ce qu’il

y en aura pareil si tu les -Le système des enfants n’est ( on lui enseigne ) comptes par un? toujours conventionnel:

Numération -Plus i1 y a de chiffres, décimale plus le nombre est grand, positionnelle c d u □ ü n n n □ □ U LJ LJ □ ü 2 3 4

-Reconnaît dans 234, deux centaines, trois dizaines et quatre unités;

-Décomposition symbolique faisant intervenir les différentes unités de mesure

écriture 234

-Dans 204, reconnaît 20 Ex.: 234 = 2x100 + 3x10 + 4 dizaines.

-Conçoit qu’il y a trois possibi1ités:

-des unités seulement; -des dizaines et des unités; -des centaines, dizaines, et

unités;

et que pour les trois

possibilités,i1 n’y a qu’une seule écriture.

C0 -O

(47)

38 L’atmosphère dans laquelle l’examinateur évolue avec ce

dernier est le plus souvent détendue, l’enfant est heureux de passer ces quelques minutes seul avec un adulte qui lui

accorde toute son attention. C’est un moment privilégié

et il arrive souvent qu’un enfant demande à vivre à nouveau l’expérience. Une mauvaise réponse dans un tel contexte, n’est pas considérée comme une faute par l’enfant puisque l’adulte passe à la question suivante avec le sourire et surtout qu’il lui assure que "ce n’est pas un examen".

Dans un examen "normal", on va des questions les plus faciles aux plus difficiles. On s’appuie là sur une certaine "stratégie du succès" afin de permettre à l’élève de fonctionner au meilleur de ses connaissances dans le sens où, s’il a réussi un problème, il sera encouragé, il aura plus de chance de réussir la deuxième et ainsi de suite. Dans la mini-entrevue, la confiance que l’élève se bâtit repose moins sur la qualité de ses réponses qui ne doivent pas être jugées de façon manifeste devant lui mais beaucoup plus sur l’attitude de la personne qui pose des questions. Ces facteurs nous permettent d’organiser autrement les questions de la mini-entrevue, pour commencer avec les questions qui demandent les stratégies les plus évoluées. Dans la mesure où l’enfant ne peut les réaliser, on revient à des choses plus simples. On peut porter un jugement, mais comme l’enfant, de par l’attitude de l’adulte est mis en confiance, il ne sentira pas ses réponses sanctionnées. Pour lui, c’est l’occasion de raconter comment il pense et pourquoi il peut dire que la réponse est bonne.

Comme nous l’avons vu plus haut, lors d’une première expérimentation, notre choix s’est porté sur le concept de numération dans les nombres à trois chiffres. Nous avons donné les raisons de ce choix, notamment le fait que ce

(48)

concept là soit très central.

Nous n’avons pas dissocié la grille d’observation du questionnaire afin de permettre une meilleure compréhension de l’ensemble de cet outil et d’en faciliter l’application.

Comportement de l’enfant:

L’enfant semble à l’aise. L’enfant semble nerveux.

L’enfant pose des questions sur le but de l’entrevue. L’enfant est obligé de calculer à voix haute.

Niveau abstrait

I. a) J’ai 234, j’enlève 2 dizaines, combien ai-je maintenant?

-Réponse exacte et rapide (moins de 15 sec)

-Réponse exacte mais plus lente (entre 15 et 30 sec) -Réponse exacte mais très lente (plus de 30 sec) -Réponse inexacte mais le chiffre transformé est

celui qui est dans la position ciblée.

-Réponse inexacte avec transformation d’un chiffre placé dans une autre position que celle ciblée.

-Aucune réponse.

b) J’ai 129, j’enlève 7 unités, combien ai-je maintenant?

-Réponse exacte et rapide (moins de 15 sec.)

-Réponse exacte mais plus lente (entre 15 et 30 sec) -Réponse exacte mais très lente (plus de 30 sec) -Réponse inexacte mais le chiffre transformé est

celui qui est dans la position ciblée.

-Réponse inexacte avec transformation d’un chiffre placé dans une autre position que celle ciblée.

(49)

40 -Aucune réponse.

c) J’ai 234, j’ajoute une centaine, combien ai-je maintenant?

-Réponse exacte et rapide (moins de 15 sec.)

-Réponse exacte mais plus lente (entre 15 et 30 sec) -Réponse exacte mais très lente (plus de 30 sec) -Réponse inexacte mais le chiffre transformé est

celui qui est dans la position ciblée.

-Réponse inexacte avec transformation d’un chiffre placé dans une autre position que celle ciblée.

-Aucune réponse.

d) J’ai 129, j’ajoute 3 dizaines, combien ai-je maintenant?

-Réponse exacte et rapide (moins de 15 sec.)

-Réponse exacte mais plus lente (entre 15 et 30 sec) -Réponse exacte mais très lente (plus de 30 sec) -Réponse inexacte mais le chiffre transformé est

celui qui est dans la position ciblée.

-Réponse inexacte avec transformation d’un chiffre placé dans une autre position que celle ciblée.

-Aucune réponse.

Ces questions ont pour but de placer l’enfant dans une situation où il doit réajuster un nombre qui subit une altération, utilisant tour à tour un processus additif ou soustractif, et appliquant les principes de notre système décimal pour finalement redonner à chacun des chiffres du nombre la bonne valeur positionnelle. L’enfant qui effectue correctement ces tâches a recours à au moins un des processus mentaux suivants: il se fait une image mentale du nombre et de la transformation qu’il doit effectuer, il peut se représenter mentalement la procédure demandée, c’est-à-dire, ajouter ou enlever les jetons, les paquets de dix, les

Figure

tableau de classe, les notes  que 4/6 est une note de passage?
Tableau de classe de 3 ième année, 1980-99
Tableau de classe de 3ième année, 1988-89 Classe de Cécile
Tableau de classe de 31ème année, 1988*89

Références

Documents relatifs

[r]

Le cercle de centre D et de rayon DA coupe la droite [BC] en un point P du même côté que B par rapport à D.. Le cercle circonscrit au triangle AEP coupe la droite [BC] en un

Dans cette étude, nous avons essayé de localiser et d'analyser l'IF syntaxique d’ordre prépositionnel entre le tachelhit et le FLE des lycéens marocains du niveau tronc

Cet article présente la portion qualitative d’une étude doctorale effectuée au Nouveau-Brunswick auprès de 30 femmes présentant un trouble dépressif. Cette recherche

Alors que Marseille manque cruellement de logements et notamment de logements sociaux, cet outil va permettre de relancer la machine de la construction sur notre territoire dans

Les filtres des écrans minéraux, comme le dioxyde de titane et l’oxyde de zinc, protègent la peau en réfléchissant ou en réfractant les rayons ultraviolets; par contre, des

Size (in bytes) of the file specification buffer Integer to receive Directive Status Word. ACHN$ [mod], [tbmsk],lun,fsbuf,fssz

Pile 2 piles au lithium AA (L91) / remplaçables par l'utilisateur (non incluses) Matériel Polycarbonate résistant aux UV. Couleur International