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Transfert de matière liquide-liquide en micro-canal : application à la réaction chimique

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Academic year: 2021

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Remerciements

Pendant ces trois années de thèse, je suis passée par plusieurs périodes de doutes. Non pas que ce fût si difficile à vivre, mais il y avait toujours des interrogations qui m’em-brouillait l’esprit : Est-ce que j’aurai le temps ? Pourquoi cette simulation diverge ? Com-ment ce micro-réacteur s’est-il bouché ? Pourquoi il fuit ?. . . Je tiens donc à exprimer ma gratitude envers toutes les personnes qui m’ont rassurées, épaulées, encouragées, confortées dans mes choix et plus généralement qui ont contribuées au bon déroulement de ma thèse et fait de ces trois ans une expérience formidablement enrichissante. Tout ça pour dire que si c’était à refaire, je le referai, et c’est en grande partie dû à ceux à qui je consacre ces quelques lignes.

Merci à Laurent Prat pour tout et même plus encore. Tu as été un encadrant excep-tionnel : disponible, plein de bonnes idées et toujours à l’écoute. Je considère que ce travail est le notre au vu de l’investissement dont tu as fait preuve pendant ces trois années. Merci pour ton accompagnement, ton soutien et ta confiance.

Je remercie également les membres de mon jury de thèse :

Mon directeur de thèse, Patrick Cognet : pour ta bonne humeur et tes encouragements. Un grand merci à Christophe Gourdon pour m’avoir fait profiter de ton savoir, et aussi pour ton enthousiasme débordant et tes paroles toujours si réconfortantes et encourageantes. Je remercie Michael Matlosz pour avoir accepté de rapporter ce manuscrit, mais aussi pour avoir diriger avec brio le projet européen IMPULSE. Je remercie également Albert Renken pour le temps que vous avez consacré à lire et commenter mon manuscrit. Michel Vaultier, pour avoir accepté de présider mon jury et pour l’intérêt que vous avez porté à mes tra-vaux. Agnès Montillet, pour les remarques et félicitations que vous m’avez faits parvenir alors que vous étiez bloquée à Saint-Nazaire en raison d’un mouvement de grève. Merci à Dominique Legendre pour vos remarques pertinentes et judicieuses sur mon étude numé-rique. A travers vous, c’est également Jacques Magnaudet et Jean Baptiste Dupont que je

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vi

remercie pour m’avoir ouvert l’accès au code JADIM, qui a constitué l’outil indispensable à mon travail de thèse. Un merci particulier à Josiane Tasselli pour avoir toujours répondu à mes demandes en micro-réacteur avec beaucoup de gentillesse, et de patience ! ! Enfin un grand merci à Manfred Kraut, d’abord de t’être déplacé pour assister à ma soutenance de thèse (qui plus est en français ! !). Mais aussi pour la sympathie dont tu as fait preuve lors de nos diverses rencontres dans le cadre du projet IMPULSE.

Je me dois également de remercier les personnes sans qui cette soutenance n’aurait peut-être pas pu avoir lieu le 14 novembre 2008. Il s’agit des pilotes d’Air France qui n’ont pas fait grève ce jour-là, et permis à mon jury de thèse d’être quasiment au complet. Merci à eux. . .

Je remercie très sincèrement l’ensemble du personnel du LGC.

Un merci particulier aux membres de l’équipe Chimie fine et Procédés qui m’ont accueilli si chaleureusement au sein de leur groupe : Michel Cabassud, Richard Guilet, Sébastien Elgue, Philippe Destrac, Stéphane Condoret, Séverine Camy, Nadine Gabas, Jean-Paul Canselier, Yolande Peres Lucchese, Marie Morère, Jean-François Blanco et David Riboul. Mais également Eric Climent qui m’a bien souvent aidé pour mettre au point mes simulations.

Je remercie également Joël Bertrand : merci de m’avoir écoutée et soutenue, et de continuer à le faire. Merci au personnel administratif, et tout particulièrement à Patricia Uliana, Claudine Lorenzon, Jean-Luc Labeyrie, Maria Escobar Munoz, Jocelyne Barale, Georgette Pollini, Christine Lampuré et Danièle Bouscary pour avoir étaient si serviables pendant ces trois ans. Un grand merci au personnel technique toujours très disponible et plein de bonne humeur, et notamment Alain Pontier, Franck Dunglas, Lucien Pollini, Marc Samazan, Lahcen Farhi, Marie-Line Pern, Ignace Coghe, Alec Manoury, Jean-Louis Labat, Jacques Labadie, Alain Muller et Alain Philip.

Je suis extrêmement reconnaissante envers mes compagnons de galère, ceux qui ont comme moi traversés des moments difficiles en travaillant dans le monde micrométrique : Flavie (ma grande sœur de micro-gouttes), Fahima (ma fidèle partenaire, un peu bavarde il faut bien l’avouer), Norbert (ne vous approchez surtout pas de sa manip, c’est une question de vie ou de mort !), Alain (mon petit frère de micro-gouttes) et Sébastien (cristalliser en micro-canal ! ! Bon courage. . .).

Enfin, il règne une ambiance formidable au sein du laboratoire, et notamment entre les doctorants. Je les remercie tous infiniment pour les moments passés ensemble avec une mention spéciale pour Mouna, Rachel, Nathalie, Nicolas, Cathy, Maha, Caroline, Zoé, Laurène, Raluca, Wassila, Amit, Huberson, Joachim, Grégory, Jean-Phi et Cécile.

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vii

En dehors du laboratoire, j’ai pu compter sur le soutien de mes proches. Merci à mes parents et mes frères : pour votre amour et pour avoir toujours cru en moi. Les retours à la maison pendant ces trois ans font parties des meilleurs moments. Enfin, merci à mon mari Mathieu : pour ton amour, ton soutien et le réconfort que tu m’as apporté chaque jour.

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Résumé

La miniaturisation est une voie d’intensification prometteuse pour la mise en œuvre de procédés limités par les transferts thermique ou massique. Cette particularité des appareils micro-structurés vient en premier lieu de l’impact favorable de la réduction de taille des ap-pareils sur les aires spécifiques d’échange. Dans notre étude, nous avons également montré que la miniaturisation permettait d’obtenir des écoulements présentant des structures hy-drodynamiques particulièrement intéressantes pour le transfert de matière liquide-liquide. En effet, nous avons observé qu’une augmentation du confinement des gouttes permettait d’obtenir des cinétiques de transfert plus rapides qu’en appareils conventionnels. Ce tra-vail a été mené au travers de simulations dont les résultats ont été validés par une étude expérimentale. Les résultats obtenus ont permis de proposer une corrélation pour l’estima-tion des coefficients de transfert massique à partir de paramètres opératoires directement accessibles à l’opérateur.

La dernière partie de ce travail a été consacrée à l’étude numérique du comportement en micro-canal des systèmes présentant du transfert de matière et de la réaction. Nous avons montré l’impact des structures hydrodynamiques locales caractéristiques des écoulements liquide-liquide confinés sur la réaction et la sélectivité dans le cas de la mise en oeuvre de réactions compétitives consécutives.

L’ensemble de cette étude a montré que les corrélations traditionnellement appliquées conduisaient à de mauvaises prédictions des flux transférés à l’échelle micrométrique en système réactionnel ou non. La manière d’appréhender et de modéliser les mécanismes de transfert doit donc tenir compte du degré de confinement des écoulements liquide-liquide.

Mots clés : micro-canal, écoulement liquide-liquide dispersé, transfert de matière, réac-tion, étude numérique

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Table des matières

Nomenclature xv

Introduction 1

I Micro-technologies : état de l’art et perspectives 5

I.1 Pourquoi miniaturiser les procédés ? . . . 5

I.1.1 Intensification des transferts thermiques . . . 8

I.1.2 Intensification des transferts massiques . . . 9

I.1.3 Conclusion . . . 11

I.2 Ecoulements diphasiques liquide-liquide en micro-canal . . . 12

I.2.1 Cartographie des écoulements . . . 12

I.2.2 L’écoulement dispersé . . . 14

I.2.2.1 Génération des gouttes . . . 14

I.2.2.2 Hydrodynamique des dispersions liquide-liquide . . . 16

I.3 Le transfert de matière en écoulement dispersé . . . 17

I.3.1 Le coefficient de transfert de matière . . . 17

I.3.1.1 Théories du double film et de la couche limite . . . 18

I.3.1.2 Théories de la pénétration et du renouvellement de l’interface 19 I.3.2 Transfert de matière en micro-canal . . . 21

I.3.2.1 Transfert liquide-liquide . . . 21

I.3.2.2 Transfert gaz-liquide . . . 23

I.4 Conclusion . . . 27

II Hydrodynamique des écoulements liquide-liquide en micro-canal 31 II.1 Introduction . . . 31

II.2 Etude expérimentale de la cartographie des écoulements liquide-liquide . . . 32

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xii TABLE DES MATIÈRES

II.2.1.1 Matériel . . . 32

II.2.1.2 Systèmes liquide-liquide . . . 36

II.2.2 Résultats . . . 38

II.3 Caractérisation de l’écoulement dispersé . . . 43

II.3.1 Etude expérimentale de l’hydrodynamique globale . . . 43

II.3.1.1 Influence des conditions opératoires sur la longueur des gouttes . . . 44

II.3.1.2 Influence des conditions opératoires sur la vitesse des gouttes 49 II.3.1.3 Modélisation de la forme des gouttes . . . 50

II.3.2 Simulations pour l’étude de l’hydrodynamique locale . . . 51

II.3.2.1 Méthode numérique . . . 52

II.3.2.2 Résultats . . . 55

II.4 Conclusion . . . 56

III Transfert de matière liquide-liquide en micro-canal 59 III.1 Introduction . . . 59

III.2 Etude numérique . . . 60

III.2.1 Méthode numérique . . . 60

III.2.1.1 Formulation mathématique . . . 60

III.2.1.2 Procédure de discrétisation et algorithme de calcul . . . 62

III.2.1.3 Choix du maillage . . . 64

III.2.2 Résultats . . . 68

III.2.2.1 Impact de la structure hydrodynamique locale de l’écoule-ment sur le champ de concentration . . . 68

III.2.2.2 Identification du coefficient de transfert de matière . . . 74

III.2.2.3 Etude de l’évolution du coefficient de transfert de matière . 75 III.2.3 Conclusion . . . 82

III.3 Etude expérimentale . . . 82

III.3.1 Mode opératoire . . . 82

III.3.1.1 Le système diphasique Toluène/Acétone/Eau . . . 82

III.3.1.2 Méthode analytique . . . 84

III.3.2 Résultats . . . 87

III.3.2.1 Identification du coefficient de transfert de matière . . . 87

III.3.2.2 Confrontation des résultats de simulation et expérimentaux 89 III.4 Comparaison avec d’autres modèles de transfert . . . 92

(13)

TABLE DES MATIÈRES xiii

III.5 Conclusion . . . 95

IV Transfert de matière en milieu réactionnel 99 IV.1 Introduction . . . 99

IV.2 Accélération du transfert par la réaction . . . 100

IV.2.1 Définition du facteur d’accélération . . . 100

IV.2.2 Etude numérique . . . 102

IV.2.2.1 Méthode numérique . . . 103

IV.2.2.2 Résultats . . . 104

IV.3 Impact de la longueur entre les gouttes sur la sélectivité de la réaction . . . 113

IV.3.1 Etude numérique . . . 114

IV.3.1.1 Formulation mathématique . . . 114

IV.3.1.2 Résultats . . . 116

IV.3.2 Etude expérimentale : la nitration du toluène . . . 123

IV.3.2.1 Généralités sur la nitration des composés aromatiques . . . 123

IV.3.2.2 Dispositif expérimental . . . 126

IV.3.2.3 Méthode analytique . . . 127

IV.3.2.4 Résultats . . . 128

IV.3.3 Conclusion . . . 131

Conclusion et perspectives 135 Bibliographie 141 Annexes 153 A Fabrication des puces en PDMS/verre . . . 153

B Fabrication des puces en silicium/verre . . . 155

C Conditions opératoires pour l’étude expérimentale de l’hydrodynamique des écoulements . . . 156

D Conditions opératoires des simulations pour l’étude du transfert de matière 161 E Conditions opératoires des expériences de transfert de matière . . . 162

F Résultats d’analyse des expériences de nitration du toluène . . . 163

G Méthodologie pour la pré-conception d’appareils intensifiés continus . . . 166

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Nomenclature

Lettres latines A Absorbance (UA) a Aire interfaciale (m2/m3) Bo Nombre de Bond C Concentration en soluté (kg/m3) C1 Constante utilisée dans l’équation I.39

Ck Constante utilisée dans l’équation II.8

CP Capacité calorifique J/(kg·K)

Ca Nombre capillaire

D Coefficient de diffusion massique (m2/s) d Diamètre (m)

dt Pas de temps (s) dx Pas de longueur (m) dy Pas de largeur (m) Ea Facteur d’accélération

f Coefficient de Fanning (annexe H) f Fréquence (1/s)

F o Nombre de Fourier

g Accélération de la pesanteur (m/s2) h Profondeur (m)

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xvi nomenclature

hT Coefficient de transfert thermique (W/(m2·K))

Ha Critère de Hatta ~

JD Densité de flux de transfert diffusif (kg/(m2·s))

K Constante de vitesse de réaction (1/s) ou (L/(mol·s)) k Coefficient de transfert de matière (m/s)

L Longueur (m) l Largeur (m)

m Coefficient de partage

~n Vecteur unitaire normal à l’interface N u Nombre de Nusselt

P Pression (Pa)

p Constante utilisée dans l’équation II.8 pi Constantes utilisées dans l’équation III.38

P e Nombre de Péclet P r Nombre de Prandtl Q Débit volumique (m3/s) r Vitesse de réaction (kg/(m3·s)) Re Nombre de Reynolds S Surface (m2)

S Sélectivité de la réaction (chapitre IV)

s Vitesse de renouvellement de l’interface (théorie de Danckwerts) (1/s) Sc Nombre de Schmidt

Sh Nombre de Sherwood T Période de l’écoulement (s)

T Tenseur des contraintes visqueuses (N/m2) t Temps (s)

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nomenclature xvii tex Temps d’exposition (s) ~u Vecteur vitesse (m/s) U Vitesse (m/s) V Volume (m3) W Force acide (%) w Fraction massique W e Nombre de Weber X Conversion

x Coordonnée suivant la longueur (m) xm Fraction molaire

Y Coordonnée y mise sous forme adimensionnelle y Coordonnée suivant la largeur (m)

Lettres grecques

α Constante utilisée dans l’équation II.5

χ Concentration mise sous forme adimensionnelle ∆Tml Moyenne logarithmique de la température (K)

δ Epaisseur (m) δI Fonction Dirac

Λ Paramètre utilisé dans l’équation I.30 λ Longueur d’onde (m)

λT Diffusivité thermique (W/(m·K))

µ Viscosité (Pa.s)

Φ(t) Fonction de probabilité traduisant la distribution de l’âge des éléments de fluide à une interface (théorie de Danckwerts) (1/s)

Φm Flux massique (kg/(m2 s))

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xviii nomenclature

Ψ Fonction de courant (m2/s) ρ Masse volumique (kg/m3) σ Tension superficielle (N/m)

θC Concentration mise sous forme adimensionnelle

ε Ratio entre les volumes d’une inclusion et d’une période d’écoulement ϕ Taux de présence de phase

Indices

aq Phase aqueuse

b Bulle

C Canal ou capillaire c Phase continue

calc Fait référence à une grandeur calculée

cap Relatif aux extrémités des poches (gaz ou liquide) conv Convection

d Phase dispersée dif Diffusion

exp Fait référence à une grandeur obtenue expérimentalement f ilm Film

G Gaz

g Goutte

intervalle Intervalle

L Liquide

mod Fait référence à une grandeur modélisée org Phase organique

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nomenclature xix

U C Relatif à la période de l’écoulement, i.e. « unit cell » en anglais

Exposants

0 Relatif au temps initial

ˆ Réfère à une grandeur issue d’un changement de variable ∞ Correspond à un temps infini

e Entrée

g Réfère au référentiel de la goutte i Interface

L Sein du liquide

S Réfère à une grandeur superficielle s Sortie

sort Sortant du domaine de calcul

* Correspond à l’équilibre thermodynamique

Sigles

µ-PIV Micro-vélocimétrie par images de particules 2D, 3D Deux dimensions, trois dimensions

BBT Bleu de bromothymol

CPG Chromatographie en Phase Gazeuse DEHMP Diéthylhydroxyméthylphosphonate DEP Diéthylphosphite

DNT Dinitrotoluène

DTS Distribution du temps de séjour FC Régulateur de débit

FI Indicateur de débit

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xx nomenclature

FZK Forschungszentrum Karlsruhe

IMFT Institut de Mécanique des Fluides de Toulouse IMM Institut für Mikrotechnik Mainz GmbH

Impulse Integrated Multiscale Process Units with Locally Structured Elements INPT Institut National Polytechnique de Toulouse

LAAS Laboratoire d’Analyse et d’Architecture des Systèmes MNT Mononitrotoluène

PDMS Polydiméthylsiloxane PE Polytéthylène

PFA Polymère de Perfluoroalcoxy PI Indicateur de pression TI Indicateur de température UA Unité d’absorbance UV Ultraviolets

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Introduction

L’industrie chimique fait partie des secteurs industriels les plus développés car elle répond en grande partie à nos besoins quotidiens dans de nombreux domaines tels que l’agro-alimentaire, la pharmaceutique, le secteur de l’énergie, le textile. Pourtant, elle dis-pose d’une image peu glorieuse aux yeux du grand public. La crainte de l’industrie chi-mique est notamment alimentée par les multiples catastrophes qui ont eu lieu au cours des dernières années telles que Bhopal en 1984, Tchernobyl en 1986 et, plus proche de nous Toulouse en 2001. Afin de limiter les risques associés à ce secteur, de plus en plus de normes contraignent les industries en termes de sécurité et de respect de l’environnement. De plus, la mondialisation engendre une pression supplémentaire sur les entreprises qui se doivent de maintenir leur compétitivité par rapport à la concurrence internationale. C’est dans cette optique qu’est né le concept d’intensification des procédés devant permettre le développement d’installations plus propres, plus sûres et plus économiques [Stankiewicz et Moulijn 2000, Burns et Ramshaw 2001].

L’une des techniques d’intensification des procédés est de réduire la taille des unités en rapport avec leur capacité de production, leur consommation énergétique, . . . Cela peut être appliqué à toutes les étapes de production telles que la réaction [Renken et coll. 2007, Tade-palli et coll. 2007], la séparation [Errico et coll. 2008] ou la mise en forme [Rüttgers et coll. 2007]. A ce titre, la miniaturisation des procédés est une voie inévitable d’intensification [de Mello et Wootton 2002, Kralisch et Kreisel 2007]. En s’inspirant des avancées technolo-giques dans le domaine de la microélectronique, les technologies micro-structurées pour les procédés peuvent aujourd’hui atteindre des dimensions submillimétriques et présenter des motifs très complexes. De plus les micro-structures peuvent être obtenues dans différents types de matériaux compatibles avec une production chimique. Les micro-réacteurs offrent des perspectives en terme de contrôle de conditions opératoires qui laissent évidemment espérer le développement de procédés plus sûrs, mais aussi une amélioration de la qualité des produits, une diminution de l’utilisation de solvant et la réduction des étapes de

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sépara-2 introduction

tion. Ceci permet d’envisager une diminution du coût de fonctionnement des installations. C’est en partant de ce constat qu’a été mis en place le projet européen Impulse dont l’acro-nyme signifie « Integrated Multiscale Process Units with Locally Structured Elements ». Il a pour principal objectif de répondre à des problématiques industrielles (intensification d’étapes critiques) en intégrant des équipements innovants miniaturisés au sein de procédés existants. Le travail de doctorat présenté dans ce manuscrit a été en grande partie financé par ce projet européen.

En plus de cet aspect intensification des procédés, les micro-technologies peuvent éga-lement être utilisées comme « laboratoires sur puces » pour répondre à plusieurs objectifs : – l’acquisition de données pour une meilleure connaissance des systèmes chimiques. L’utilisation des micro-technologies offre l’avantage de pouvoir mener rapidement de nombreuses expériences avec des quantités minimales de produits. Cette application peut servir à l’acquisition de données cinétiques [Sarrazin 2006, Tsoligkas et coll. 2007], ou encore de propriétés physico-chimiques [Guillot et coll. 2006].

– la caractérisation des phénomènes à l’échelle micrométrique. En effet, la compréhen-sion et la maîtrise des mécanismes physico-chimiques à une telle échelle est nécessaire pour le développement de procédés miniaturisés.

Le travail présenté dans ce manuscrit porte essentiellement sur cette deuxième application, en particulier sur l’étude du transfert de matière entre deux phases liquides qui est peu décrit dans la littérature.

Dans le premier chapitre de ce manuscrit, nous fournirons un état de l’art général sur les perspectives qu’offrent l’usage de micro-technologies dans le domaine du procédé. Pour cela, nous décrirons l’impact de la miniaturisation sur les appareils et leur efficacité. Puis nous axerons cette étude bibliographique sur le transfert de matière liquide-liquide : quand observe-t-on ce mécanisme, comment le modélise-t-on à l’échelle conventionnelle et submil-limétrique. Ce chapitre posera donc les bases de notre étude, son contexte et ses objectifs. La description de nos travaux s’articulera ensuite autour de trois chapitres.

Le second chapitre traitera de l’hydrodynamique des écoulements liquide-liquide en micro-canal. Hydrodynamique et transfert étant des mécanismes intimement liés, nous avons jugé nécessaire d’analyser quels étaient les facteurs qui pouvait influencer la carto-graphie des écoulements, et notamment la génération d’écoulements à gouttes. Au travers

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introduction 3

d’une étude numérique, nous avons cherché à identifier les structures hydrodynamiques locales caractérisant ce type d’écoulement afin de noter leur impact sur le transfert dans le chapitre suivant.

Dans le troisième chapitre, nous avons étudié le transfert entre phase continue et phase dispersée. Nous nous sommes appuyés sur des simulations numériques directes permettant le calcul de champs de concentration au sein d’un micro-canal. Des expériences de trans-fert liquide-liquide, également présentées dans le troisième chapitre, ont été mises en œuvre pour compléter l’étude numérique.

Enfin, dans le dernier chapitre de ce manuscrit, nous nous sommes intéressés au cou-plage entre réaction et transfert en micro-canal. Il s’articule autour de deux réflexions : la manière d’appréhender le transfert de matière en milieu réactionnel à l’échelle macro-métrique est-elle transposable à l’échelle submillimacro-métrique ? Quel est l’impact du transfert et transport de matière en milieu liquide-liquide dans un micro-canal sur la sélectivité d’un système réactif complexe. Ce travail a également fait l’objet de simulations et d’ex-périences. L’étude expérimentale pour la caractérisation de l’influence du transport de matière en micro-canal sur la réaction a été effectuée au travers de la réaction de nitration du toluène.

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Chapitre I

Micro-technologies : état de l’art et

perspectives

I.1

Pourquoi miniaturiser les procédés ?

La miniaturisation est une des voies aujourd’hui envisagées pour l’intensification des procédés chimiques [Stankiewicz et Moulijn 2000]. Elle consiste à réduire les tailles de cer-tains appareils afin de diminuer les contraintes technologiques au profit de la chimie, de l’environnement et de la sûreté des procédés. A ce titre, les micro-technologies vont être utilisées sous différentes formes pour répondre à des besoins spécifiques (micro-réacteurs, micro-mélangeurs, micro-échangeurs de chaleur, . . .). De nombreuses études démontrent d’ores et déjà le potentiel de ces appareils [Ahmed et coll. 2006]. A titre d’exemple, nous pouvons citer les travaux de Wörz et coll. (2001). Ils ont utilisé les micro-technologies pour mettre en œuvre une réaction liquide-liquide exothermique : le réactif est en phase organique et réagit avec une phase aqueuse concentrée en acide sulfurique. Le produit de la réaction est aqueux. Le réactif, le produit ainsi que les intermédiaires réactionnels peuvent mener à la formation de sous-produits. Cette réaction est habituellement menée en réacteur semi-batch avec un rendement de 70 %. Le micro-réacteur utilisé se compose d’un module de mélange (temps de séjour de 0.2 s pour atteindre une conversion de 50 %) et d’un échangeur pour maintenir la température du milieu à 50 ˚C pour terminer la réaction (la réaction se produit dans 32 canaux de section 900 µm × 60 µm). Dans de telles conditions, le rendement atteint 80-85 %. Enfin en maintenant la température à 20 ˚C dans le module échangeur, Wörz et coll. (2001) ont même atteint une conversion de 90-95 %. Ainsi, le passage du réacteur semi-batch aux micro-technologies a permis de produire

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6 Micro-technologies : état de l’art et perspectives

plus de moitié moins de sous-produits.

Nous pouvons également mentionner les travaux de Mary et coll. (2008) basés sur l’étude qualitative du transfert liquide-liquide en micro-canal en dispersant des gouttes d’eau dans de l’octanol. Les solutés utilisés pour étudier l’enrichissement ou l’appauvris-sement de la phase aqueuse sont respectivement la fluorescéine et la rhodamine. Dans des canaux de 205 µm de largeur et 30-95 µm de profondeur, ils ont obtenu des temps de saturation de l’ordre de quelques secondes, d’où un transfert très rapide comparé aux vi-tesses de transfert en colonnes d’extraction conventionnelles. En effet si l’on considère une colonne à garnissage, sa capacité maximale est d’environ 30 m3/(h·m2) [Leybros 2004]. Ainsi, pour une hauteur de 5 m, le temps de contact est de 10 min. Benz et coll. (2001) ont également obtenu des temps de transfert très courts, inférieurs à 0.25 s, en utilisant des micro-mélangeurs en guise de contacteurs liquide-liquide.

Enfin Hisamoto et coll. (2001) nous présentent une application intéressante des micro-réacteurs. Ils ont mis en œuvre le couplage diazoïque entre le 5-methylrésorcinol (phase organique) et le 4-nitrobenzene diazonium tetrafluoroborate (phase aqueuse). Le résorcinol est faiblement soluble en phase aqueuse. Son transfert dans cette phase permet la forma-tion du produit de la réacforma-tion. Ce dernier étant également plus soluble en phase organique, il transfère vers cette phase après sa formation. La réaction a été effectuée à l’échelle ma-croscopique dans un réacteur agité (20 mL de solution) : une augmentation de la vitesse d’agitation, et donc de l’aire interfaciale, a permis d’augmenter la conversion jusqu’à 80 % au bout de 30 min de contact. Cependant, dans de telles conditions, Hisamoto et coll. ont noté la formation d’un précipité de sous-produits issus de la réaction entre le produit désiré et le 4-nitrobenzene diazonium tetrafluoroborate. La même réaction a été mise en œuvre dans un micro-canal de 250 µm de largeur et 100 µm de profondeur. Dans ce réacteur, l’aire interfaciale obtenue est deux fois plus grande que celle atteinte sous forte agitation dans le réacteur agité : une conversion de 100 % est alors obtenue en 2.3 s. De plus, la formation de sous-produits n’est pas observée : la laminarité de l’écoulement et les faibles distances de diffusion permettent au produit de la réaction de rapidement retourner en phase organique, avant que celui-ci ne réagisse en phase aqueuse.

Ces quelques exemples illustrent donc le potentiel de l’utilisation des micro-technologies dans le domaine du procédé. Mais quel est l’impact réel de la miniaturisation sur les pro-cédés ? En quoi est-elle source d’intensification ?

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I.1 Pourquoi miniaturiser les procédés ? 7

La réponse à ces questions s’obtient principalement en analysant l’impact de la longueur sur les grandeurs géométriques des appareils. Si l’on considère la longueur caractéristique L d’un système. La surface et le volume de ce système sont respectivement proportionnels au carré et au cube de cette longueur (S ∝ L2, V ∝ L3). Le ratio S/V est donc

globale-ment inverseglobale-ment proportionnel à la longueur. En effet, prenons l’exemple d’une conduite circulaire de longueur LC et de diamètre dC. Ce ratio s’écrit :

S V = LC· ΠdC LC · ΠdC2/4 = 4 dC (I.1)

Ainsi, pour une conduite de 10 mm de diamètre on a S/V = 400 m2/m3 alors que pour un canal de 100 µm on obtient S/V = 40 000 m2/m3. Colin (2004) décrit l’impact de l’augmentation de ce ratio par miniaturisation des procédés :

« La simple augmentation du rapport de l’aire [S] sur le volume V est déjà lourde de conséquences. Dans les différents bilans de conservation, elle donne un poids prépondérant à tous les termes de flux, qu’ils soient de masse, de quantité de mouvement ou d’énergie, vis-à-vis des termes de stockage ou de production. » [Colin 2004]

En d’autres termes, la miniaturisation engendre une augmentation du rapport S/V , favo-risant ainsi les échanges thermiques et les transferts de matière.

La miniaturisation des procédés a également un effet sur les structures d’écoulement. En effet, le nombre de Reynolds Re représentant le ratio entre les effets inertiels et les effets visqueux est proportionnel à la longueur caractéristique du système comme le montre l’équation I.2.

Re = ρU L

µ (I.2)

Ce nombre adimensionnel diminue avec la longueur. En micro-réacteur, les écoulements obtenus sont majoritairement laminaires (Re ∼ 1) [Colin 2004] et sont donc caractérisés par une absence de turbulence. Ceci n’est pas favorable aux transferts thermiques et mas-siques. Cependant, nous verrons par la suite que l’augmentation des effets de surface au profit des effets volumiques suffit à compenser la diminution de l’efficacité des transferts induite par la laminarité des écoulements.

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8 Micro-technologies : état de l’art et perspectives

I.1.1 Intensification des transferts thermiques

L’intérêt porté aux micro-technologies est notamment dû aux perspectives qu’elles offrent en terme de contrôle de température pour la mise en œuvre de processus exo-ou endothermiques [Jähnisch et coll. 2004, Commenge et coll. 2004]. En effet, les micro-réacteurs peuvent fournir des rapports surface/volume bien supérieurs à 10 000 m2/m3 (micro-canal circulaire de 400 µm de diamètre), alors que ce rapport est de l’ordre de 2.5 m2/m3pour le réacteur batch à double-enveloppe, et de l’ordre de 400 m2/m3pour les réac-teurs multi-tubulaires [Ferrouillat et coll. 2006]. Ce rapport, nommé aire spécifique ou aire d’échange, traduit la grande surface de contact aux parois fournie par les micro-réacteurs permettant de refroidir ou de chauffer un faible volume de fluide. De plus, les coefficients de transferts de chaleur hT dans les réacteurs micro-structurés peuvent atteindre jusqu’à 25 000 W/(m2·K), ce qui représente environ cinq fois les coefficients obtenus avec un échan-geur compact multifonctionnel comme le montre le tableau I.1 [Schubert et coll. 2001, Prat et coll. 2005, Ferrouillat et coll. 2006]. On constate donc que malgré les faibles nombre de Reynolds obtenus en micro-réacteurs, ces appareils sont caractérisés par des coefficients d’échange thermique par unité de volume très importants.

Tab. I.1 – Caractéristiques thermiques de réacteurs échangeurs de chaleur [Schubert et coll. 2001, Ferrouillat et coll. 2006]

Technologie Micro-échangeur Echangeur compact multifonctionnel Réacteur tubulaire Réacteur batch à double-enveloppe Aire spécifique S/V (m2/m3) 10 000 800 400 2.5 Coefficient d’échange hT (W/(m2·K)) 25 000 5000 500 400 Coefficient d’échange par unité de volume hTS/V (kW/(m3·K))

(29)

I.1 Pourquoi miniaturiser les procédés ? 9

I.1.2 Intensification des transferts massiques

Les micro-technologies permettent également une accélération des transferts de matière par rapport aux transferts en appareils conventionnels. Cette caractéristique s’explique en premier lieu par la taille même des micro-canaux qui permet de diminuer les temps de diffusion de matière au sein d’une phase. En effet, dans le cas d’un transfert massique uni-directionnel dans un fluide, l’équation de transfert en régime de pure diffusion moléculaire peut s’écrire : D∂ 2C(x, t) ∂x2 = ∂C(x, t) ∂t (I.3)

Afin de montrer l’impact de la longueur sur le temps de diffusion, on considère le cas d’un fluide dans un demi-espace infini initialement à concentration constante C0, auquel on impose brutalement une concentration Cp à la paroi (équation I.4). La matière va

progressivement diffuser dans le demi-espace, entraînant une modification du profil de concentration comme le montre la figure I.1, où θC représente la concentration mise sous forme adimensionnelle (équation I.5).

       C(0, t) = Cp C(∞, t) = C0 C(x, 0) = C0 (I.4)

Fig. I.1 – Profil de concentration en régime de diffusion moléculaire au cours du temps. Nous avons posé un coefficient de diffusion D = 10−9 m2/s.

L’intégration de l’équation de diffusion amène à l’expression suivante : θC(x, t) = C(x, t) − C

0

Cp− C0

= 1 − erf (u) (I.5)

u = x

(30)

10 Micro-technologies : état de l’art et perspectives

Pour u = 2, erf(u) est supérieur à 99 %. Ainsi, on peut définir un temps de diffusion en fonction de l’épaisseur de diffusion (équation I.7).

tdif =

δdif2

16D (I.7)

On peut constater que tdif est proportionnel au carré de l’épaisseur de diffusion ou de pénétration de la matière. Cela donne un poids important à cette grandeur dimensionnelle et justifie donc l’intérêt de la miniaturisation.

Cependant nous avons vu précédemment que l’écoulement en micro-canal ou capil-laire était généralement laminaire, d’où un mélange des fluides par transport convectif limité. Pour pallier à la laminarité de l’écoulement, les transferts massiques peuvent être intensifiés en utilisant des micro-mélangeurs susceptibles de fournir des temps de mélange de quelques millisecondes [Kockmann et coll. 2006, Sarrazin et coll. 2007]. Hessel et coll. (2005a) répertorient les micro-mélangeurs en deux catégories :

– les micro-mélangeurs passifs : ils font partie intégrante du réacteur. Le mélangeur de base dans le cas de systèmes monophasiques et la jonction en T ou Y qui permet de créer des turbulences à la rencontre des deux courants [Bökenkamp et coll. 1998]. L’intensité des turbulences augmente avec les débits mis en jeu [Engler et coll. 2004]. Sur ce même principe, il a été imaginé des mélangeurs basés sur la séparation d’un canal en plusieurs canaux puis recombinaison en un canal : on peut par exemple cité les mélangeurs de type StarLam fabriqués par l’Institut für Mikrotechnik Mainz GmbH (IMM) dont le principe est donné en figure I.2 [Werner et coll. 2005].

Fig. I.2 – Principe du mélangeur StarLam (IMM [Werner et coll. 2005]).

Un mélange chaotique peut également être obtenu en insérant un micro-mélangeur statique dans le canal ou en gravant des chevrons sur la surface du canal [Bertsch et coll. 2001, Stroock et coll. 2002, Aubin et coll. 2005]. Enfin, dans le cas

(31)

d’écoule-I.1 Pourquoi miniaturiser les procédés ? 11

ment diphasique, le mélange est souvent accentué en utilisant des canaux en zigzags [Günther et coll. 2005, Sarrazin et coll. 2006].

– les micro-mélangeurs actifs : des instabilités sont créées au sein de l’écoulement en utilisant des sources externes d’énergie telles que les ultrasons [Yang et coll. 2001] ou encore en faisant osciller les débits de fluides à mélanger [Glasgow et Aubry 2003]. Le mélange peut également être favorisé par des perturbations de l’écoulement sous l’action de micro-vannes ou micro-pompes qui déforment la géométrie du canal [Ta-beling et coll. 2004, Goulpeau et coll. 2005, Woias 2005].

Enfin, dans le cas de systèmes diphasiques, de grandes aires interfaciales peuvent être obtenues, favorisant ainsi le transfert entre phases. En effet, Yue et coll. (2007) ont comparé l’aire interfaciale spécifique produite par différents contacteurs gaz-liquide : en appareils conventionnels, ce paramètre peut atteindre jusqu’à 2 000 m2/m3, alors qu’en micro-canal Hessel et coll. (2005b) ont généré des dispersions gaz-liquide avec des aires interfaciales de 20 000 m2/m3.

I.1.3 Conclusion

Comme nous venons de le voir, outre la meilleure maîtrise de l’exo- ou l’endother-micité de certains systèmes chimiques par amplification des performances thermiques, la miniaturisation des procédés permet de diminuer les temps caractéristiques de transfert de matière. Ces raisons font que l’insertion de micro-technologies au sein de procédés est de plus en plus envisagée notamment pour des opérations basées sur les transferts thermiques et massiques telles que la réaction et l’extraction en milieu liquide-liquide. Cependant, si les effets de la miniaturisation sur des paramètres globaux tels que les aires d’échange ther-mique et massique sont aujourd’hui démontrés, l’impact de l’hydrodynather-mique locale des écoulements confinés sur l’intensification des procédés est bien moins évident. Concernant les systèmes liquide-liquide en micro-canal, les différents types d’écoulement observables et les caractéristiques de leur hydrodynamique locale sont aujourd’hui connus. Néanmoins, nous verrons par la suite que l’association entre hydrodynamique et transfert de matière est encore peu exploitée.

(32)

12 Micro-technologies : état de l’art et perspectives

I.2

Ecoulements diphasiques liquide-liquide en micro-canal

I.2.1 Cartographie des écoulements

L’hydrodynamique des écoulements diphasiques peut être influencée par différents pa-ramètres que sont :

– le ratio entre les masses volumiques ρ des deux phases, – le ratio entre les viscosités µ des deux phases,

– les débits Q et vitesses U des fluides, – la tension interfaciale σ,

– le diamètre hydraulique de la conduite dC,

– et l’orientation de la conduite.

En fonction de ces paramètres, on distingue plusieurs types d’écoulements (figure I.3) : – les écoulements dispersés : cette catégorie comprend les écoulements à bulles ou

gouttes en fonction du système diphasique considéré (gaz-liquide ou liquide-liquide) et les écoulements à poches ou bouchons. Les poches ou bouchons ont la particularité de s’étendre sur presque toute la largeur de la conduite.

– les écoulements annulaires : l’interface entre les phases est continue. Une des phases s’écoule sous forme d’un film le long des parois de la conduite alors que l’autre phase circule au centre.

– l’écoulement stratifié : les deux phases sont parfaitement séparées sous l’effet de la gravité dans des conduites inclinées ou horizontales (phase légère dans la partie haute de la canalisation, phase lourde dans la partie basse).

Fig. I.3 – Ecoulement diphasique (1), (2), (3) dispersé, (4), (5) annulaire, (6) stratifié [Fitremann 1983].

(33)

I.2 Ecoulements diphasiques liquide-liquide en micro-canal 13

Les mêmes familles d’écoulement sont observées dans le cas de systèmes liquide-liquide en micro-canal comme le montre le tableau I.2. Cependant les paramètres qui régissent l’hydrodynamique de ces systèmes en macro- et micro-canaux sont différents.

Tab. I.2 – Cartographie d’écoulements liquide-liquide en micro-canal. Auteurs Système Géométrie du canal Ecoulements observés Beretta et coll. (1997) eau/huile Section circulaire, dC = 3 mm A gouttes, à bouchons et annulaire Zhao et coll. (2006) eau/kérosène Section rectangulaire, dC = 400 µm (300 µm × 600 µm ) A gouttes, à bouchons et stratifié Kashid et Agar (2007) eau/cyclohexane Section circulaire, dC = 0.25 − 1 mm A gouttes et à bouchons

En premier lieu, l’effet de la gravité n’est pas observé. Ceci s’explique notamment par la définition que Kreutzer et coll. (2005) donnent au terme « capillaire » : un canal dans lequel les effets de tension de surface dominent les effets de la gravité. Bretherton (1961) a défini un nombre de Bond Bo limite en dessous duquel une bulle dans un milieu liquide stagnant est également stagnante (équation I.8). Une estimation rapide de la taille du capillaire limite montre que pour les systèmes gaz-liquide, la gravité peut être négligée pour des capillaires de diamètre dC < 5 mm (tableau I.3). Pour les systèmes liquide-liquide, on obtient dC < 10 mm.

Bo = ∆ρ · g · dC

2

σ < 3.368 (I.8)

Tab. I.3 – Diamètre de capillaire limite au dessous duquel les effets de la gravité sont négligeables

Système air/eau toluène/eau

∆ρ (kg/m3) ∼ 1 000 ∼ 100

σ (N/m) 0.072 0.035

dC (m) < 0.005 < 0.01

Cependant, l’écoulement stratifié en micro-canal peut être observé, notamment quand l’in-troduction des fluides s’opère dans une jonction en T comme le montre la figure I.4 [Zhao et coll. 2006].

(34)

14 Micro-technologies : état de l’art et perspectives

Fig. I.4 – Ecoulement stratifié en micro-canal [Zhao et coll. 2006].

De plus, les interactions fluide/paroi influencent fortement l’écoulement en micro-canal par rapport à de larges conduites [Dreyfus et coll. 2003]. Cela s’explique par le ratio entre la surface et le volume S/V qui augmente quand la taille du canal diminue : les deux fluides sont globalement plus en contact avec les parois, ils interagissent donc plus avec elles. Ainsi dans le cas de deux fluides A et B :

– si A mouille plus la paroi que B, seul A pourra être en contact avec la paroi du capillaire (B dispersé dans A ou écoulement annulaire),

– si les deux fluides mouillent la paroi, Dreyfus et coll. (2003) ont montré que les écoulements obtenus sont irréguliers en temps et dans l’espace.

Quand les propriétés de surface des parois ne permettent pas d’obtenir la dispersion sou-haitée, il est cependant possible d’opérer un traitement de surface [Baroud et Willaime 2004, Zhao et coll. 2006]. Cependant ces traitements sont généralement temporaires et doivent régulièrement être répétés.

Dans notre étude, nous nous sommes particulièrement intéressés aux écoulements dis-persés. Outre le fait que cet écoulement puisse être obtenu pour une large gamme de débit et ratio de débit de fluides, il possède une hydrodynamique locale intéressante vis-à-vis du transfert de matière entre les phases comme nous allons le voir par la suite.

I.2.2 L’écoulement dispersé

I.2.2.1 Génération des gouttes

Le mécanisme de formation des gouttes s’opère par cisaillement d’une phase par une autre. Ce cisaillement provoque une déformation de l’interface qui peut ou non mener à la rupture d’une goutte [Bazhlekov et coll. 2006]. Le nombre adimensionnel permettant de représenter ce phénomène est le nombre capillaire Ca : il compare les contraintes de cisaillement qui tendent à déformer l’interface, et s’expriment en fonction d’une vitesse

(35)

I.2 Ecoulements diphasiques liquide-liquide en micro-canal 15

caractéristique du système U , et les forces de tension interfaciale qui traduisent sa rigidité (équation I.9).

Ca = µU

σ (I.9)

Le cisaillement au niveau de l’interface dépend des propriétés physico-chimiques des fluides, mais également de la géométrie du canal. Ainsi, on peut distinguer plusieurs géométries utilisées pour générer un écoulement dispersé :

– en forme de T (figure I.5) : la phase dispersée arrive perpendiculairement au canal principal [Garstecki et coll. 2006]. Le mécanisme de formation des gouttes est dû à un effet couplé de phénomènes d’élongation de la phase à disperser et de cisaillement par la phase continue au niveau de l’interface comme le montre Debas et coll. (2007). Cette technologie offre l’avantage de produire des gouttes monodisperses [Thorsen et coll. 2001, Nisisako et coll. 2002, Tice et coll. 2003, Okushima et coll. 2004].

Fig. I.5 – Géométrie en T pour la formation de gouttes en micro-canal.

– en croix ou « flow focusing » (figure I.6) : cette géométrie fut initialement utilisée par Knight et coll. (1998) pour créer des jets de fluide. Cette technologie permet de créer des dispersions très fines puisque le cisaillement de la phase à disperser se fait par deux côtés [Ganan Calvo 1998, Ganan Calvo et Cordillo 2001].

(36)

16 Micro-technologies : état de l’art et perspectives

Cependant, en fonction des conditions opératoires, on peut obtenir des gouttes poly-disperses comme le montre la figure I.7 extraite des travaux d’Anna et coll. (2003). Cet effet s’explique par les turbulences au niveau du centre de la croix dues à la rencontre des deux flux de phase continue. En fonction de l’intensité de ces turbu-lences, le cisaillement sur l’interface peut devenir complexe menant à la formation de gouttes satellites lors de la rupture de la goutte principale.

Fig. I.7 – Ecoulement dispersé obtenu dans une jonction en croix [Anna et coll. 2003].

I.2.2.2 Hydrodynamique des dispersions liquide-liquide

Les écoulements à gouttes en micro-canal ont des propriétés hydrodynamiques intéres-santes [Thulasidas et coll. 1995, Kreutzer et coll. 2005, Kashid et coll. 2005, Sarrazin et coll. 2006, Taha et Cui 2006]. Des structures différentes sont repérées dans trois volumes caractéristiques (figure I.8) :

– dans la goutte, avec une hydrodynamique caractérisée par des mouvements de convec-tion forcée sous forme de boucles de recirculaconvec-tion,

– dans le film de phase continue qui mouille toute la paroi et caractérisé par des lignes de courant rectilignes,

– dans le pont liquide entre deux gouttes successives que nous appellerons plus com-munément l’intervalle. L’allure des lignes de courant dans l’intervalle est analogue à celle générée dans les gouttes, et caractérisée par des boucles de recirculation.

(37)

I.3 Le transfert de matière en écoulement dispersé 17

Fig. I.8 – Illustration de l’hydrodynamique des écoulements dispersés en micro-canal [Sar-razin et coll. 2006].

L’intensité des mouvements de recirculation est plus grande en micro-canal qu’en macro-canal : le confinement de la goutte impose des gradients de vitesse importants entre la paroi du canal (vitesse nulle) et l’axe central de la goutte. En terme de transport massique, Sar-razin (2006b) a montré que ces mouvements de convection au sein de la goutte ont un impact majeur sur le temps de mélange dans la goutte. Ce temps est évidemment lié à la vitesse de transfert. Afin de modéliser le transfert liquide-liquide, il est donc fondamental de le corréler à l’hydrodynamique des écoulements à gouttes. La partie suivante présente les modèles couramment utilisés pour représenter les transferts interfaciaux afin de discuter de leur applicabilité dans le cas de l’écoulement dispersé en micro-canal.

I.3

Le transfert de matière en écoulement dispersé

I.3.1 Le coefficient de transfert de matière

Le transport de matière est régi par deux processus : le transport par diffusion (dû au mouvement brownien) et le transport convectif (induit par l’écoulement d’un fluide). En considérant que la densité de flux de matière diffusif ~JD peut être représenté par la loi de

Fick (équation I.10), l’équation de transport de matière s’écrit selon l’équation I.11. ~

JD = −D∇C (I.10)

∂C

∂t + ∇ · (~uC) − D∇

2C = 0 (I.11)

La prédiction du transfert de matière à une interface repose sur l’estimation du laplacien de la concentration ∇2C. Dans une même phase, les concentrations à l’interface, à proxi-mité de l’interface et au sein de la phase (loin de l’interface) sont généralement différentes. L’estimation de ∇2C requiert donc la connaissance du profil de concentration au sein des deux phases. Cependant, la détermination de ce profil près des interfaces est complexe car il dépend notamment de l’hydrodynamique du système.

(38)

18 Micro-technologies : état de l’art et perspectives

Afin de simplifier la résolution de l’équation de transport pour le transfert d’un soluté entre deux phases, de nombreux modèles ont été proposés pour l’estimation du terme diffusif en ayant recours à la notion de coefficient de transfert de matière k [Skelland 1992, Javed 1992, Kessler et Greenkorn 1999]. Ces modèles diffèrent notamment dans l’expression de ce coefficient. Ce paramètre est fondamental puisqu’il intervient dans la modélisation du flux en soluté transféré d’une phase à l’autre comme le montre l’équation I.12, où ∆C représente la force motrice du transfert (différence de concentrations), et ~n le vecteur unitaire normal à l’interface. La valeur du coefficient de transfert dépend de l’expression de la force motrice.

~

JD = −k∆C · ~n (I.12)

Les modèles les plus utilisés pour l’estimation du coefficient de transfert sont la théorie du double film, de la couche limite, la théorie de la pénétration et celle du renouvellement de l’interface. Cette partie est axée sur la description de ces quatre modèles : leur fondement et leurs limites.

I.3.1.1 Théories du double film et de la couche limite

La théorie du double film a été suggérée par Lewis et Whitman en 1924. Elle considère que l’interface entre deux fluides est composée de deux films stagnants dans lesquels le transfert s’opère par pure diffusion. Cette théorie suppose que la résistance au transfert dans une phase est entièrement contenue dans ce film : la concentration en soluté au delà du film est supposée homogène. La théorie du double film stipule que le coefficient de transfert de matière dans une phase est inversement proportionnel à l’épaisseur de film δ comme le montre l’équation I.13. Une première difficulté inspirée par ce modèle est la détermination de l’épaisseur du film qui dépend de l’hydrodynamique dans la phase considérée. La complexité des écoulements rend généralement difficile l’estimation de ce paramètre.

k = D

δ (I.13)

Ce modèle considère que l’interface est rigide pour satisfaire l’hypothèse des films stag-nants. En microfluidique diphasique, des mesures de micro-vélocimétrie par images de particules (µ-PIV) ainsi que des travaux de simulations ont montré que les éléments de fluide à l’interface subissaient des mouvements de convection [Sarrazin et coll. 2006]. De plus, les micro-canaux sont généralement si fins que les gradients de concentration induits par un processus de transfert de matière sont importants au sein même des phases [Har-ries et coll. 2003]. Ainsi, à l’échelle d’un micro-canal, la résistance au transfert n’est pas

(39)

I.3 Le transfert de matière en écoulement dispersé 19

seulement localisée au voisinage de l’interface. La théorie du double film repose donc sur des hypothèses trop simplificatrices pour pouvoir modéliser le transfert de matière entre deux phases dans un micro-réacteur.

La théorie de la couche limite s’inspire du modèle du double film. Cependant, elle ne considère pas que le film est stagnant mais qu’il circule à une vitesse dépendante de l’hydrodynamique du système. L’épaisseur de ce film, ou couche limite, est généralement estimée à partir de corrélations qui associent trois nombres adimensionnels : les nombres de Sherwood Sh , Reynolds Re et Schmidt Sc (équations I.2, p. 7, I.14 et I.15). Le nombre de Sherwood représente le ratio entre la dimension caractéristique d’un système L choisie en fonction du processus étudié (diamètre de goutte, taille d’un canal, . . .) et l’épaisseur de la couche limite. Les nombres de Reynolds et Schmidt traduisent respectivement l’ef-fet de l’hydrodynamique du système et des propriétés physico-chimiques des fluides sur le transfert de matière. Cependant, ce modèle ne s’adapte également pas aux systèmes mi-crofluidiques puisqu’il est lui aussi basé sur l’existence d’un film au voisinage de l’interface contenant la totalité de la résistance au transfert.

Sh = kL

D (I.14)

Sc = µ

ρD (I.15)

I.3.1.2 Théories de la pénétration et du renouvellement de l’interface

La théorie de la pénétration a été proposée par Higbie en 1935, puis améliorée par Danckwerts en 1951 sous le nom de théorie du renouvellement de l’interface. Elles modé-lisent le transfert de matière comme un mouvement perpétuel d’éléments de fluide qui sont transportés par convection du sein de la phase jusqu’à l’interface. Ces éléments de fluide séjournent à l’interface pendant un intervalle de temps appelé temps d’exposition tex.

Du-rant cette période, ils jouent le rôle d’accumulateurs de masse, le transfert de matière entre deux éléments s’opérant par diffusion moléculaire. Puis, par convection, ils sont de nou-veaux transportés au sein de la phase où ils transmettent la matière accumulée pendant le temps d’exposition aux autres éléments de fluide. Dans la théorie de la pénétration, le coefficient de transfert de matière est donné par la relation suivante :

k = 2 r

D Π · tex

(I.16) Contrairement à la théorie avancée par Higbie, celle de Danckwerts admet que tous les éléments de fluide n’ont pas le même temps d’exposition. Selon cette théorie, l’interface

(40)

20 Micro-technologies : état de l’art et perspectives

est donc composée d’une population d’éléments de fluide de différents âges allant de zéro à l’infini. Cette distribution de l’âge est représentée par une fonction de probabilité Φ(t) :

Φ(t) = s · e−st (I.17)

où s est la vitesse de renouvellement de l’interface. Celle-ci est constante pour des condi-tions hydrodynamiques données. Cette représentation mène à l’expression du coefficient de transfert de matière suivante :

k = √

Ds (I.18)

Ces modèles reposent sur l’estimation des paramètres tex ou s qui dépendent tous deux de

l’hydrodynamique de l’écoulement.

D’après Toor et Marchello (1958), ces théories sont valides tant que le renouvellement de la surface est rapide par rapport au temps de diffusion au sein des phases. En d’autres termes, ces modèles supposent que les éléments de fluides ne sont transportés à l’interface que par un processus convectif (processus de diffusion infiniment plus lent). L’applicabilité de cette hypothèse peut se vérifier par l’estimation du nombre de Péclet P e. Ce nombre adimensionnel, défini dans les termes de l’équation I.19, représente le ratio entre le temps tdif et le temps tconv nécessaire à une molécule pour migrer de l’interface jusqu’au centre

de la goutte respectivement par diffusion (calculé sur une demi-largeur de goutte) et par convection. P e = tdif tconv (I.19) tdif = lg2 8D (I.20) tconv= Lg Ug (I.21) lg , Lg et Ug représente respectivement la largeur, la longueur et la vitesse de la goutte.

Comme le montre la figure I.9, le transport par diffusion se fait successivement d’une ligne de courant à une autre, alors que le transport par convection s’effectue suivant une même ligne de courant (ligne extérieure).

Sarrazin (2006b) a estimé la valeur de P e dans des canaux de section carrée de largeur comprise entre 100 µm et 1 mm. En fonction des conditions opératoires, ce critère était compris entre 10 et 300. Nous pouvons donc en déduire que le processus de diffusion sur une demi-largeur de goutte est généralement beaucoup plus lent que le processus de convection. Ainsi, les théories de la pénétration et du renouvellement de surface semblent être appropriées quant à la modélisation du transfert de matière en micro-canal.

(41)

I.3 Le transfert de matière en écoulement dispersé 21

Fig. I.9 – Comparaison des chemins parcourus par un élément de fluide transporté de l’interface jusqu’au centre de la goutte par diffusion et convection.

I.3.2 Transfert de matière en micro-canal

I.3.2.1 Transfert liquide-liquide

Le transfert d’une espèce entre deux phases liquides en système miniaturisé a été prin-cipalement étudié au travers de réactions de titration acide/base [Burns et Ramshaw 2001, Harries et coll. 2003, Xu et coll. 2008] ou de nitration de composés aromatiques [Dummann et coll. 2003]. La titration offre l’avantage de pouvoir suivre le transfert de matière par une simple analyse optique. En effet, en utilisant un indicateur de pH co-loré, cette réaction est caractérisée par la décoloration de la phase où se passe la réaction. L’acide acétique est généralement l’espèce qui transfère d’une phase organique à une phase aqueuse basique car il est soluble dans ces deux phases. Ainsi, au cours du transfert, l’acide va neutraliser la base (généralement NaOH ou KOH) ce qui provoque une modification du pH, d’où une décoloration de la phase aqueuse.

NaOH + CH3COOH −−*)−− CH3COO–Na++ H2O

La neutralisation est extrêmement rapide : dès que l’acide acétique transfère dans la phase aqueuse il réagit instantanément avec la base. Ainsi le suivi de la couleur de la phase donne une indication directe sur la vitesse de transfert de l’acide. Burns et Ramshaw (2001) ont mis en œuvre cette réaction dans des canaux de section carrée de 380 µm de profondeur. La phase organique utilisée est du kérosène, l’indicateur coloré dissout dans la phase aqueuse est le rouge de phénol (zone de virage pour un pH entre 6.6 et 8.4 ; couleur rouge sous la forme basique et jaune sous la forme acide). La phase aqueuse est dispersée dans le kérosène. La force motrice ∆C utilisée pour l’estimation du coefficient de transfert est la différence de concentration entre les deux phases (équation I.22). Les indices d et c font respectivement référence aux phases continue et dispersée.

dCc

(42)

22 Micro-technologies : état de l’art et perspectives

Ils ont obtenu des valeurs de k entre 0.16×10−3m/s et 0.56×10−3m/s pour des vitesses de gouttes variant de 0.1 cm/s à quelques cm/s. Au travers de ces expériences, Burns et Ram-shaw ont montré que le coefficient de transfert k augmentait avec la vitesse des gouttes. Dessimoz et coll. (2008) ont adopté une méthodologie similaire pour estimer les coefficients de transfert en micro-canaux. Ils ont travaillé avec de l’acide tricholoroacétique, plutôt que de l’acide acétique. Ils ont également constaté une augmentation de ce coefficient avec la vitesse des gouttes.

La nitration de composés aromatiques est une réaction très exothermique (−120 kJ/mol à −150 kJ/mol pour la mononitration du toluène [Zaldivar et coll. 1992, Chen et Wu 1996]). Sa mise en œuvre est donc particulièrement intéressante en micro-réacteurs puisqu’elle nécessite un bon contrôle de la température pour éviter la formation de produit di- voire trinitrés. La cinétique chimique de cette réaction est aujourd’hui bien connue [Zaldivar et coll. 1995, Zaldivar et coll. 1996]. Le composé aromatique ArH (phase organique) diffuse dans la phase aqueuse constituée d’eau et d’un mélange d’acides nitrique et sulfurique. La réaction a lieu en phase aqueuse selon le mécanisme réactionnel décrit ci-dessous. Puis le composé mononitré formé transfère de nouveau vers la phase organique.

HNO3+ 2 H2SO4−−*)−− NO+

2 + H3O++ 2 HSO4–

ArH + NO+2 −−→ ArNO2+ H+

Dummann et coll. (2003) ont mis en œuvre la nitration de composés aromatiques mono-cycliques en capillaire circulaire de 750 µm de diamètre. La connaissance de la cinétique chimique leur a permis de déduire d’une mesure de la sélectivité la cinétique de trans-fert pour chacune de leurs expériences. Ils ont obtenu des coefficients de transtrans-fert k entre 2 × 10−3 m/s et 7 × 10−3 m/s en augmentant la vitesse des gouttes.

Ces études concluent donc à une augmentation du coefficient de transfert de matière k avec la vitesse des gouttes. L’influence des autres paramètres de l’écoulement tels que le diamètre du canal et la taille des gouttes n’a pas été clairement identifiée. Xu et coll. (2008) ont mis en avant une augmentation du coefficient ka (produit du coefficient de transfert de matière et de l’aire interfaciale spécifique) avec une diminution de la taille des gouttes (dg = 130-250 µm, ka = 0.23-0.5 s−1; dg = 350-550 µm, ka = 0.02-0.1 s−1; en colonne

d’extraction dg = 2-3 mm, ka = 10−4-10−3 s−1). Cependant, cet effet est principalement

(43)

I.3 Le transfert de matière en écoulement dispersé 23

du confinement des gouttes sur le coefficient de transfert k. Le transfert en système gaz-liquide dans des micro-canaux ou capillaires a été plus largement étudié [Bercic et Pintar 1997, Kreutzer 2003, van Baten et Krishna 2004, Vandu et coll. 2005]. La section suivante présente les conclusions des travaux menés pour ces systèmes.

I.3.2.2 Transfert gaz-liquide

Le transfert de matière d’un gaz à une phase liquide en micro-canaux fait l’objet de nombreuses publications récentes puisque beaucoup de réactions catalysées gaz-liquide sont exothermiques. Ainsi, mettre en œuvre ces réactions dans des micro-réacteurs permet gé-néralement une augmentation de la sélectivité tout en travaillant dans des conditions plus sûres [Jähnisch et coll. 2004, Hessel et coll. 2005b]. Bercic et Pintar (1997) propose un modèle pour estimer le coefficient kLa donnée par la corrélation suivante :

kLa =

0.111 · Ub1.19

((1 − εG) · LU C)0.57

(I.23) où Ub représente la vitesse des bulles. εG est le taux de rétention de la phase gazeuse (vo-lume d’une bulle sur le vo(vo-lume d’une période de l’écoulement). LU C est la longueur de la période de l’écoulement (« unit cell » en anglais). Enfin, kLexprime le transfert côté phase

liquide. Cette corrélation a été obtenue à partir d’expériences d’absorption de méthane dans de l’eau, par identification de l’influence des différents paramètres opératoires sur le kLa. Cette étude s’est concentrée sur des capillaires circulaires de 1.5, 2.5 et 3.1 mm de

diamètre. Les longueurs de la période d’écoulement obtenues sont grandes (jusqu’à 0.22 m), et les vitesses superficielles faibles ((UG+ UL) inférieur à 0.16 m/s).

Vandu et coll. (2005) ont effectué des mesures de kLa à partir d’expériences

d’absorp-tion d’oxygène dans de l’eau. Les capillaires utilisés étaient de secd’absorp-tion circulaire ou carrée avec un diamètre ou une largeur de 1, 2 et 3 mm. Ils ont constaté que l’équation I.23 suggé-rée par Bercic et Pintar (1997) ne permettait pas une bonne représentation de leurs valeurs expérimentales. Ce résultat s’explique en premier lieu par l’indépendance de la corrélation de Bercic et Pintar envers le diamètre du capillaire. En effet, Vandu et coll. ont démontré l’impact de ce facteur sur le transfert de matière : ils ont observé une diminution du facteur kLa avec l’augmentation de la taille du capillaire. En second lieu, l’étude expérimentale

de Vandu et coll. s’est majoritairement axée vers de petites longueurs de période d’écou-lement (entre 0.005 et 0.06 m) comparée à celle menée par Bercic et Pintar. De plus, ils ont fait varier (UG+ UL) entre 0.09 et 0.65 m/s, balayant ainsi une plus grande plage de

(44)

24 Micro-technologies : état de l’art et perspectives

modéliser le processus de transfert entre les deux phases ainsi que l’avaient précédemment suggéré les travaux de simulation de van Baten et Krishna (2004). En effet, ils supposent que pour de grandes valeurs de LU C et de faibles vitesses de bulles, le film liquide va très rapidement se saturer. Dans de telles conditions, le film n’interviendra donc plus dans le transfert de soluté entre les deux phases. Ceci revient à une réduction de l’aire interfaciale « active » vis-à-vis du transfert de matière.

La tendance actuelle, initialement suggérée par Irandoust et coll. (1992), est d’adopter une approche plus fondamentale en modélisant le transfert gaz-liquide en micro-canal ou capillaire comme la somme de deux contributions [Kreutzer 2003, van Baten et Krishna 2004] : une première représentant le transfert du soluté de la phase gaz à la poche liquide aux travers des extrémités de la poche gazeuse (« cap » en anglais) kL,capacap ; une seconde

traduisant le transfert de la phase gaz au film liquide kL,f ilmaf ilm.

kLa = kL,capacap+ kL,f ilmaf ilm (I.24)

L’estimation de kL,cap repose sur le modèle de Higbie (renouvellement de l’interface). Le temps d’exposition tex,cap est obtenu en considérant qu’un élément de fluide de la

poche liquide reste à l’interface sur une distance représentant la moitié de la longueur de l’extrémité de la poche comme le montre la figure I.10 (distance AB).

Fig. I.10 – Illustration de la longueur de contact aux extrémités de la bulle [van Baten et Krishna 2004].

Dans le cas de capillaires circulaires de diamètre dC , ceci représente une longueur de contact de (Πdb/4), où db est le diamètre de la partie cylindrique de la bulle. Or chaque

élément de la poche liquide circulant selon la ligne de courant extérieure va être deux fois au contact de la phase gazeuse (poche liquide entourée de deux poches gazeuses). Ainsi, en supposant que cette ligne de courant a la même vitesse que la bulle, on peut déduire le temps d’exposition :

tex,cap =

Π · db

2Ub

(I.25) Pour des capillaires circulaires l’équation I.16 peut donc s’écrire :

kL,cap= 2

r 2D · Ub

Π · db

(45)

I.3 Le transfert de matière en écoulement dispersé 25

Enfin l’aire interfaciale acap est calculée en considérant chaque extrémité de bulles comme des demi-sphères :

acap=

Π · db2

LU C · Π · dC2/4

(I.27) En approximant le diamètre des bulles au diamètre du capillaire (le rapport δf ilm/dC varie

généralement entre 10−1 et 10−4 [Kreutzer et coll. 2005]), la contribution au transfert de matière par les extrémités des bulles s’exprime donc comme suit :

kL,capacap= 8 LU C r 2D · Ub Π · db (I.28) van Baten et Krishna (2004) ont exprimé la contribution du film en se référant au modèle du film tombant laminaire en section circulaire [Sherwood et coll. 1975] :

kL,f ilm =

Qf ilm

Π · dCLf ilm

ln(1/Λ) (I.29)

où Qf ilmest le débit volumique du film tombant, et Λ un nombre adimensionnel fonction du

nombre de Fourier F o comme le montre l’équation I.30. F o compare le temps de saturation du film estimé comme le carré de l’épaisseur du film sur le coefficient de diffusion, et le temps d’exposition (équation I.31).

Λ = 0.7857exp(−5.121F o) + 0.1001exp(−39.21F o) + 0.0360exp(−105.6F o) + · · · (I.30)

F o = tex,f ilmD δf ilm2

(I.31) Le nombre de Fourier est un critère permettant de vérifier la vitesse de saturation du film [Pohorecki 2007]. En effet, deux cas extrêmes peuvent être identifiés :

– pour un temps de contact court (F o < 0.1), l’équation I.29 peut s’écrire :

kL,f ilm= 2 s D Π · tex,f ilm ln(1/Λ) (1 − Λ) pour F o < 0.1 (I.32) – pour un temps de contact long (F o > 1), le film se sature très vite. Ainsi, dans le cas de l’écoulement dispersé en micro-canal sous de telles conditions, la contribution du film au transfert peut rapidement devenir négligeable par rapport au transfert à travers les extrémités des bulles.

kL,f ilm= 3.41

D δf ilm

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26 Micro-technologies : état de l’art et perspectives

Le coefficient de transfert du film est ensuite multiplié par son aire interfaciale af ilm afin d’obtenir la contribution du film au transfert :

af ilm= Lf ilm· Π · db LU C · Π · dC2/4 ≈ 4 Lf ilm LU C· dC (I.34)

van Baten et Krishna (2004) ont effectué des travaux de simulation de transfert gaz-liquide en capillaire circulaire de diamètre de 1.5-3 mm (LU C = 0.015-0.050 m, Ub =

0.15-0.55 m/s). Ces simulations leur permettent de visualiser l’évolution du champ de concentration en traceur dans une période de l’écoulement au cours du temps. Ils ont ensuite calculé le transfert de matière kL en posant :

kL=

Φm

Ci

L− CLsort

(I.35) où Φm représente le flux de matière qui a transféré de la bulle au liquide entre deux pas de temps. CLi est la concentration à la surface de la bulle, et a été fixée à 1 : la bulle est consi-dérée comme un réservoir inépuisable en traceur. CLsort est la concentration moyenne dans le volume qui sort du domaine de calcul par la limite supérieure de ce domaine entre deux pas de temps. Les valeurs de kLa ainsi obtenues sont comparées à celles calculées à partir de l’équation I.24, où kL,f ilm est obtenu à partir de l’équation I.32 (F o < 0.1). van Baten et Krishna obtiennent une très bonne adéquation entre les deux méthodes de calcul. Dans la majorité des cas simulés, la contribution du film représente 60 à 80 % des valeurs de kLa. Vandu et coll. (2005) ont également vérifié la validité de l’équation I.24 quant à la prédiction de leur résultats expérimentaux obtenus par absorption d’oxygène dans de l’eau en capillaire de section carrée et circulaire. L’expression de la force motrice du transfert ∆C utilisée pour identifier les kL expérimentaux à partir des mesures de concentrations

dans les phases gaz et liquide est proche de celle utilisée par van Baten et Krishna (2004) : kL=

Φm

CG/m − CL

(I.36) m est le coefficient de partage de l’espèce transférée, traduisant la distribution de cette es-pèce entre les deux phases à l’équilibre. CGet CLsont les concentrations respectivement en phase gaz et liquide moyennées sur une période d’écoulement. Le rapport CG/m représente

donc la concentration à l’interface en supposant celle-ci à l’équilibre thermodynamique. Ils ont simplifié l’équation I.24 en considérant que tout le transfert s’opérait uniquement par

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