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Adaptations neuronales dans les maladies psychiatriques associées à une hyperdopaminergie

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Academic year: 2021

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(1)

Pour obtenir le grade de

DOCTEUR DE L’UNIVERSITE DE POITIERS

Faculté des Sciences Fondamentales et Appliquées

Ecole doctorale : ICBG

Secteur : Physiologie, biologie cellulaire et moléculaire

Présentée par

Rana EL RAWAS

Adaptations neuronales dans les maladies psychiatriques associées

à une hyperdopaminergie

Soutenue le vendredi 28 novembre 2008 devant la commission de l’examen :

Madame le Docteur Christelle BAUNEZ

Rapporteur

Monsieur le Professeur Bertrand BLOCH

Rapporteur

Madame le Docteur Martine CADOR

Examinateur

Monsieur le Professeur Bernard FAUCONNEAU

Examinateur

Monsieur le Professeur Mohamed JABER

Directeur de thèse

(2)

Pour obtenir le grade de

DOCTEUR DE L’UNIVERSITE DE POITIERS

Faculté des Sciences Fondamentales et Appliquées

Ecole doctorale : ICBG

Secteur : Physiologie, biologie cellulaire et moléculaire

Présentée par

Rana EL RAWAS

Adaptations neuronales dans les maladies psychiatriques associées

à une hyperdopaminergie

Soutenue le vendredi 28 novembre 2008 devant la commission de l’examen :

Madame le Docteur Christelle BAUNEZ

Rapporteur

Monsieur le Professeur Bertrand BLOCH

Rapporteur

Madame le Docteur Martine CADOR

Examinateur

Monsieur le Professeur Bernard FAUCONNEAU

Examinateur

Monsieur le Professeur Mohamed JABER

Directeur de thèse

(3)

Mes remerciements s’adressent en premier lieu aux membres du jury pour m’avoir fait l’honneur de porter leur jugement expert sur ce travail.

Je voudrais remercier le Professeur Mohamed Jaber à qui j’adresse ma plus profonde reconnaissance pour m’avoir accueillie dans son groupe. Merci pour m’avoir permis de réaliser cette expérience dans les meilleures conditions, pour m’avoir encouragée et pour m’avoir aidée à surmonter les obstacles tout au long de cette thèse qui, sans vous, n’aurait certainement jamais commencé.

Je tiens à exprimer ma plus profonde reconnaissance au Docteur Marcello Solinas qui a marqué ma vie scientifique par sa passion à la recherche. Merci pour avoir résisté à mes nombreux défauts, pour m’avoir enseignée, pour avoir été disponible tout au long de cette expérience enrichissante. Merci pour votre amitié et j’aimerais bien vous dire que je suis sincèrement très fière d’avoir travaillé avec vous. Un grand merci pour le Docteur Nathalie Thiriet pour m’avoir accompagnée dans mes premières manipulations. Merci pour tes conseils, et surtout pour ton amitié. Je tiens aussi à remercier Virginie Lardeux et Claudia Chauvet avec qui j’ai partagé non seulement le même bureau durant ces années, mais aussi des moments très agréables et des souvenirs qui vont certainement me manquer… Merci pour votre aide et votre bonne humeur.

(4)

très contente pour avoir eu la chance de te connaitre avant mon départ…

Merci beaucoup à tous les membres de l’équipe « Neuro » qui m’ont très bien accueillie quand je suis arrivée en France et ont rendu mon séjour très agréable. Merci pour votre sympathie, pour votre gentillesse et pour votre amitié. Je n’oublierai jamais les moments que nous avons partagés ensemble.

Merci à Anni-Claire Balandre pour sa gentillesse et son aide. Merci pour avoir toujours les meilleures solutions à mes problèmes.

Merci à ceux avec qui nous étions des membres de la même famille, à ceux avec qui nous partageons le même amour et la même nostalgie. Je n’oublierai jamais la vie de tous les jours que nous avons passée ensemble, les sourires et les larmes que nous avons partagées, l’aide et le soutien que vous m’avez offerts. Merci pour avoir ajouté un petit gout « de chez nous » à mon séjour, j’espère qu’on se rencontrera un jour... Merci à ma meilleure amie et ma sœur Ghalia…Je te remercie pour ta présence pendant seize ans à coté de moi…Nous avons vraiment partagé des moments inoubliables…Ton amitié, pour moi, est un don du ciel. J’espère que ta vie après la thèse ne serait qu’un nouvel pas vers le bonheur et la réussite. J’aimerais t’assurer que la distance qui va nous séparer ne va jamais pouvoir affaiblir notre chère et vieille amitié…

(5)

Je souhaiterais remercier ma famille pour leur confiance et leur soutien. Merci pour avoir cru en moi, pour m’avoir toujours rassurée que je suis capable de continuer et pour avoir été ma source de motivation. C’était si dur de m’éloigner de vous…J’espère vous rendre aujourd’hui la fierté que j’ai de vous…

Un grand merci pour la personne qui a changé ma vie…Aucun mot ne pourrait exprimer ce que tu sais déjà !! C’est à toi, mon autre, que cette thèse est dédiée…Tu m’a déjà beaucoup donné mais notre bonheur ne fait que commencer…

(6)

Communications

El Rawas R, Solinas M, Thiriet N, Chauvet C, Jaber M.

Environmental stimulation reduces the rewarding and activating effects of cocaine.

ECNP Workshop on Neuropsychopharmacology for young scientists in Europe (Nice, March 2007).

El Rawas R, Jaber M, Thiriet N, Saadé N, Atweh S, Al-Amin H.

Gene expression regulation in Rats with Neonatal Ventral Hippocampus Lesion after Puberty. 8e colloque de la société des Neurosciences (Montpellier, May 2007).

EL Rawas R, Thiriet N, Jaber M and Solinas M.

Consequences of early environmental enrichment on effects of heroin (Oral presentation). ECNP Workshop on Neuropsychopharmacology for young scientists in Europe (Nice, March 2008).

EL Rawas R, Solinas M, Thiriet N and Jaber M.

Consequences of early environmental enrichment on effects of cocaine and heroin. 6th Forum of European Neuroscience (Geneva, July 2008).

Publications

Solinas M, Thiriet N, El Rawas R, Lardeux V, Jaber M.

Environmental enrichment during early stages of life reduces the behavioral, neurochemical and molecular effects of cocaine. Neuropsychopharmacology (sous presse).

Solinas M, Thiriet N, Chauvet C, El Rawas R, Jaber M.

Reversal of cocaine addiction by environmental enrichment. Proc. Natl. Acad. Sci. USA. (2008). 105(44):17145-50.

El Rawas R, Thiriet N, Lardeux V, Jaber M, Solinas M.

Environmental enrichment decreases the rewarding, but not the activating effects, of heroin through non-dopaminergic mechanisms. Psychopharmacology (sous presse).

El Rawas R, Saadé N, Thiriet N, Atweh SF, Jaber M, Al-Amine HA.

Developmental changes in the mRNA expression of neuropeptides and dopamine and glutamate receptors in Neonates and Adult Rats after Ventral Hippocampal Lesion (soumis).

(7)

dopaminergique. Ces projets portent sur deux maladies psychiatriques associées, d’une manière ou d’une autre, à une hyperdopaminergie : la dépendance aux drogues et la schizophrénie. La dépendance aux drogues constitue le projet principal de ma thèse et la schizophrénie est un projet en collaboration avec l’université Américaine de Beyrouth.

Dans un premier temps, nous avons étudié chez la souris l’influence d’un environnement qui mime les conditions positives comme l’environnement enrichi durant les premiers stades de vie sur la vulnérabilité aux drogues comme la cocaïne et l’héroïne ayant des mécanismes d’actions différentes. Nous nous sommes focalisés sur le système dopaminergique mésolimbique qui projette vers le striatum ventral et qui est considéré comme un maillon central de circuit de récompense. Nos résultats montrent que les conditions environnementales positives peuvent protéger contre les effets renforçants de la cocaïne et de l’héroïne. La protection contre les effets de la cocaïne semble être médiée par une réduction de la réactivité des neurones du striatum au niveau post synaptique. Nous avons trouvé aussi une dissociation entre les effets activants et récompensants de l’héroïne reflétant que les effets récompensants de l’héroïne sont, en partie, indépendants du système dopaminergique mésolimbique. Ces études montrent que l’environnement enrichi diminue la vulnérabilité à développer l’addiction aux drogues.

Ensuite, nous avons étudié l’influence de l’environnement enrichi sur les effets stimulants et récompensants de la cocaïne après l’installation de la dépendance ainsi que sur la rechute à la cocaïne. Nous avons participé à une étude montrant que les influences de l’environnement enrichi ne sont pas restreintes à son rôle protecteur contre les effets des drogues. L’environnement enrichi est aussi capable d’éliminer les conséquences comportementales et neurochimiques des injections répétées des drogues et empêcher le phénomène de rechute. De ce fait, l’environnement enrichi possède aussi un rôle curatif de l’addiction aux drogues. Concernant le deuxième axe de l’étude, nous avons étudié par hybridation in situ l’expression des gènes des récepteurs dopaminergiques D1 et D2, de la sous unités NR1 et NR2A des récepteurs NMDA glutamatergiques et des neuropeptides (substance P, enképhaline, dynorphine) dans un modèle animal de la schizophrénie. Ce modèle s’agit des rats ayant une lésion néonatale de l’hippocampe ventrale et montrant après la puberté des changements comportementaux associés à une augmentation de l’activité dopaminergique dans le striatum et un dysfonctionnement du cortex préfrontal, consistants avec la schizophrénie. Nous avons montré que l’émergence de ces comportements après la puberté est associée à une diminution de l’expression du récepteur D2 et des neuropeptides (enképhaline et substance P) dans le striatum, et une augmentation de l’expression de NR1 dans le cortex. Ces changements semblent être des mécanismes compensatoires à l’augmentation de l’activité dopaminergique dans le striatum et à l’hypofonctionnement des récepteurs NMDA dans le cortex, qui n’apparaissent, similairement à la schizophrénie, qu’après la puberté.

(8)

I. Introduction générale

A. Cadre scientifique 1

1. La dopamine, données anatomiques 2

a. Les voies longues du système dopaminergique 2

b. La synapse dopaminergique 3

c. Les récepteurs dopaminergiques 5

d. Le transporteur à dopamine (DAT) 7

2. Problématique de la thèse 10

B. Dépendance aux drogues 11

1. Dépendance 11

a. Définition 12

b. L’addiction : de l’homme aux modèles animaux 14

• Sensibilisation comportementale 15

• Préférence de place conditionnée 16

• Auto-administration des drogues 18

c. Circuit de récompense 19

d. Modes d’action des drogues 22

e. Conséquences cellulaires et moléculaires en réponse aux drogues 24

• Modifications géniques 24

(9)

iii. CREB 29

iv. ERK 31

• Plasticité synaptique et drogues d’abus 33

• Modifications morphologiques 34

f. Théories de la dopamine dans la dépendance 36

2. Vulnérabilité 41

a. Les facteurs de vulnérabilité 42

• Les facteurs génétiques 42

i. Chez les humains 42

ii. Chez les animaux 43

• Les effets chroniques des drogues 46

• Facteurs environnementaux 47

i. Rôle du stress dans la vulnérabilité aux drogues 48

 Les effets facilitateurs du stress sur la réponse aux drogues dépendent

des glucocorticoïdes 49

 L’interaction neurobiologique entre le stress et les effets renforçants

des drogues 50

ii. Rôle de l’environnement enrichi dans la vulnérabilité aux drogues 52

 C’est quoi un environnement enrichi ? 52

 Les effets de l’environnement enrichi chez les rongeurs intacts 53

 Les effets bénéfiques de l’environnement enrichi contre la dépendance

(10)

4. Méthodologie 60

a. Les tests comportementaux 60

b. Les tests neurochimiques 63

c. Les tests moléculaires 64

C. Schizophrénie 67

1. La schizophrénie : un problème de santé publique 67

2. Etiologie de la schizophrénie 69

a. Hypothèse génétique 69

b. Hypothèse socio-environnementale 71

• Facteurs prénatales et complications obstétricales 71

• L’exposition aux drogues 71

• L’urbanisme 72

c. Hypothèse neuro-développementale 73

d. Hypothèse neurochimique 75

• L’hypothèse dopaminergique 75

• L’hypothèse glutamatergique 79

• Interactions entre la dopamine et le glutamate 79

i. Dopamine-glutamate 79

ii. Glutamate-dopamine 81

• Implication des neuropeptides 83

3. La schizophrénie : de l’homme aux modèles animaux 85

a. Pre-pulse inhibition 85

b. L’inhibition latente 87

(11)

• Les souris déficientes en STOP 90

e. Les modèles basés sur une lésion 92

• Modèle animal neuro-développemental de la schizophrénie :

les rats ayant une lésion néonatale de l’hippocampe ventral 92

4. Objectifs 96 II. Résultats A. Article I B. Article II C. Article III D. Article IV

III. Discussion générale

A. Dépendance 97

1. La différence entre les effets récompensants des drogues entre les souris

élevées en milieu standard ou enrichi 97

2. L’influence de l’environnement enrichi sur les effets de la cocaïne 98

a. L’expression des récepteurs dopaminergique D2 98

b. Le stress 101

c. La neurogenèse 103

3. L’influence de l’environnement enrichi sur les effets de l’héroïne 104

(12)

1. Influence de l’environnement enrichi sur l’auto-administration des drogues 108

2. Mécanismes post-synaptiques : GTP-Gamma [S35] binding et

la signalisation intracellulaire 108

3. La durée de protection d’un environnement enrichi contre la

dépendance aux drogues 112

4. Le système endocannabionoide en fonction des conditions d’élevage 114 5. Identification et purification des protéines exprimées différemment

chez les souris élevées en milieu standard ou enrichi dans les régions

du cerveau impliquées dans l’addiction aux drogues 115

B. Schizophrénie 117

IV.Conclusion générale 120

(13)

6-OHDA: 6- hydroxydopamine

BDNF: Brain derived neurotrophic factor

COMT: Catechol-O-Methyl Transférase

CREB: cAMP response element binding protein

DAT: transporteur à dopamine

ERK: Extracellular Signal-Regulated kinases

GABA: Acide Gamma Amino butyrique

HI/LI: rats high impulsive/low impulsive

HR/LR: rats high responder/Low responder

L-Dopa: Levo-Dopa

LTD: long term depression

LTP: long term potentiation

MEK: MAPK/ERK Kinase

MPTP: 1 - Méthyle 4 - Phényl 1,2,3,6-Tétrahydro Pyridine

NMDA: N-methyl-D-aspartate

PPI: Pre-pulse inhibition

(14)

Figure 1 : Les voies dopaminergiques à neurones longs 2

Figure 2: La synapse dopaminergique 4

Figure 3 : La dopamine et ses récepteurs 6

Figure 4: Le circuit de récompense 20

Figure 5 : Modes d’action des drogues 22

Figure 6: La production des facteurs de transcription Fos par les drogues 29 Figure 7 : Régulation de la transcription par ERK dans le striatum 34 Figure 8: Représentation schématique du développement de l’allostasie hédonique selon le

modèle des processus opposants 37

Figure 9 : Contribution des facteurs génétiques, environnementaux et associés à la drogue

dans le développement de l’addiction 42

Figure 10 : L’interaction entre les facteurs génétiques, environnementaux et associés à la prise

des drogues participant au développement de l’addiction 46

Figure 11: Les souris élevées dans un environnement enrichi et les souris élevées en

conditions standards selon nos conditions de laboratoire 53

Figure 12 : Appareil de préférence de place conditionnée utilisé dans le laboratoire 60 Figure 13 : Appareil de mesure d’activité locomotrice utilisé dans le laboratoire 62

Figure 14 : Microdialyse in vivo 63

Figure 15 : Hybridation in situ 65

Figure 16 : Représentation schématique des circuits limbiques ventraux impliqués dans les

symptômes positifs de la schizophrénie 78

Figure 17 : Synapse dopaminergique dans le striatum 80

Figure 18 : Représentation schématique du modèle de Carlsson et al. (1999) 82

Figure 19 : Pre-pulse inhibition (PPI) 86

Figure 20 : Cycle d’activation des protéines G hétérodimériques composés des sous unités

(15)

Figure 22: Préférence de place conditionnée à la cocaïne (10 mg/kg) chez les souris élevées dans un environnement standard (SE coc) et le souris élevées dans un environnement enrichi puis transférées pour 30 jours dans un environnement standard (EE coc) 113

(16)
(17)

1

A.

Cadre scientifique :

Les monoamines forment une classe de neurotransmetteurs très répandus qui comprend la dopamine, la norépinephrine et la sérotonine. En 1957, Carlsson a été le premier à démontrer que la dopamine, formée à partir de la levo-dopa (L-Dopa) agit comme un neurotransmetteur dans le cerveau. Il a montré que l’injection de L-Dopa restore la propagation des signaux électriques dans le cerveau des animaux rendus catatoniques, restaurant leur activité motrice (Carlsson et al, 1957). Malgré l’intérêt de ses travaux, la communauté scientifique n’avait pas accordé de crédits à ses résultats, car le dogme à cette époque stipulait que la dopamine n’était qu’un précurseur d’autres neurotransmetteurs comme la norépinephrine. Quatre ans après, la L-Dopa a montré son efficacité dans le traitement des patients ayant la maladie de Parkinson (Birkmayer et al, 1961). Depuis, la dopamine est devenue pour la communauté scientifique un neurotransmetteur majeur, et les dysfonctionnements du système de transmission dopaminergique ont été impliqués dans une variété de maladies psychiatriques et neurologiques comme la schizophrénie, le trouble déficitaire de l'attention associé à l’hyperactivité ADHD, l’addiction aux drogues et la maladie de parkinson citée ci-dessus (Iversen et Iversen, 2007, Schultz, 2001). Les neurones dopaminergiques dans le cerveau ne représentent pas plus de 1% des neurones. Pourtant, ils jouent un rôle important dans plusieurs fonctions vitales. Ces neurones semblent réguler des comportements physiologiques divers allant du contrôle du mouvement à la modulation de la cognition et du désir notamment l’humeur, l’attention et la récompense (Smidt et al, 2003, Schultz, 2007). L’importance de ces neurones dopaminergiques s’avère donc primordiale pour un fonctionnement normal du cerveau.

(18)

2

1.

La dopamine, données anatomiques :

a. Les voies longues du système dopaminergique :

Les neurones dopaminergiques à longue projection sont principalement localisés dans l’aire tegmentale ventrale du mésencéphale et la substance noire pars compacta (Van den Heuvel et Pasterkamp, 2008).

Les systèmes de projection à neurones longs :

Figure 1 : Les voies dopaminergiques à neurones longs

1. La voie nigrostriée : Les corps cellulaires des neurones dopaminergiques présents dans la substance noire pars compacta (aire mésencéphalique A9) projettent vers le striatum (noyau caudé et putamen). Cette voie joue un rôle essentiel dans la régulation des fonctions motrices. La dégénérescence de ces neurones nigro-striataux est responsable de la maladie de Parkinson (Ehringer et Hornykiewicz, 1960, Moore, 2003).

2. La voie dopaminergique mésocorticolimbique : Les corps cellulaires des neurones dopaminergiques de cette voie sont dans l’aire tegmentale ventrale (ou aire mésencéphalique A10) et projettent vers le cortex (surtout la partie antérieur), le système

(19)

3

limbique (le septum et l’amygdale et le noyau accumbens). Cette voie est impliquée dans le processus de récompense (Wise et Bozarth, 1987, Ikemoto, 2007). Les récompenses naturelles ainsi que les drogues d’abus augmentent la libération de dopamine dans le noyau accumbens (Di Chiara et al, 1993). De plus, les symptômes positifs de la schizophrénie comme par exemple les délires et les hallucinations semblent être dus à l’hyperactivité de ces neurones (Guillin et al, 2007).

b. La synapse dopaminergique :

La dopamine est synthétisée à partir de la tyrosine dans le cytosol des neurones catécholaminergiques (voir figure 2). L’enzyme clé de la synthèse de la dopamine est la tyrosine hydroxylase qui transforme la tyrosine circulante en L-DOPA, qui sera ensuite décarboxylée en dopamine par l’enzyme DOPA-décarboxylase. Alors que les décarboxylases sont des enzymes peu spécifiques, la tyrosine hydroxylase est spécifique et est l’enzyme de l’étape limitante de la synthèse de la dopamine (Jaber et al, 1998). Ensuite, la dopamine est stockée dans des vésicules au niveau des terminaisons neuronales via le transporteur VMAT (vesicular monoamine transporters). Enfin, elle est libérée par l’entrée de calcium induite par l’arrivée de potentiels d’action dans les terminaisons synaptiques. Une fois libérée, elle peut être soit dégradée, soit recaptée par les terminaisons qui l’ont libérée. La recapture, assurée par un transporteur de la membrane plasmique, le transporteur de la dopamine (DAT), représente le principal processus d’inactivation et de recyclage de la dopamine (80%) (Jaber et al, 1998). Une fois dans le cytosol, la dopamine est soit dégradée, soit re-stockée dans les vésicules via VMAT (Jaber et al, 1998).

(20)

4

Figure 2: La synapse dopaminergique. La dopamine (DA) est synthétisée à partir de la L-Tyr par la TH en L-DOPA puis en DA par la DDC. La DA est ensuite stockée dans des vésicules par le transporteur VMAT ; puis à l’arrivée d’un potentiel d’action, la dopamine sera libérée dans l’espace extracellulaire. Au niveau post-synaptique, la dopamine agit sur les récepteurs D1 qui sont couplés à la protéine Gs et exprimés sur des neurones co-exprimant les neuropeptides SP et Dyn, et sur les récepteurs D2 qui sont couplés à la protéine Gi et exprimés sur des neurones co-exprimant le neuropeptide PPA. Ensuite la DA pourrait être recaptée par le transporteur de la dopamine DAT qui constitue le processus principal d’inactivation et de recyclage de la DA. La dégradation de la dopamine fait intervenir deux enzymes : la COMT et la MAO. Enfin, la DA peut agir au niveau pré-synaptique sur les « auto-récepteurs » et inhiber sa propre synthèse par un rétro-contrôle négatif. Tyr : L-tyrosine, TH : Tyrosine hydroxylase, L-Dopa : levo-dopa, DDC : dopa-décarboxylase, DA : dopamine, BHE : barrière hémato-encéphalique, MAO : monoamine oxydase, DOPAC : 3,4-dihydroxyphenylacetic acid, DAT : transporteur de la dopamine, VMAT : vesicular monoamine transporters, HVA : acide homovanilique, 3-MT : 3-methoxytyramine, COMT : catéchol-O-méthyltransférase, SP : substance P, Dyn :dynorphine, PPA : preproenkephalin A.

(21)

5

c. Les récepteurs dopaminergiques :

La dopamine agit sur deux classes de récepteurs "D1-like" et "D2-like" (voir figure 3) qui sont métabotropiques, constitués de 7 domaines transmembranaires et qui ont des effets presque inverses (Jaber et al, 1996).

Les D1-like (D1 et D5) sont couplés via la protéine Gs/Golf à l'adénylate cyclase et permettent

la production d'AMPc qui déclenche de nombreuses réponses métaboliques dépendantes de la protéine kinase A (Kebabian et al, 1984). Les récepteurs D1 sont plus représentés que les récepteurs D5 dans le cerveau (Weiner et al, 1991) surtout dans le striatum, le noyau accumbens, les tubercules olfactifs (Fremeau et al, 1991). Ils se trouvent en particulier sur les neurones GABA (Acide Gamma-Amino Butyrique) co-exprimant la substance P et la dynorphine (Le Moine et al, 1991). Les récepteurs D5 sont exprimés dans l’hippocampe, le noyau mamillaire médian et le noyau parafasciculaire du thalamus (Meador-Woodruff et al, 1992).

Les D2-like (D2, D3, D4) sont couplés à la protéine Gi/o et diminuent la synthèse d'AMPc via l’inhibition de l’adénylate cyclase (Odagaki et al, 1998). Au niveau post-synaptique, ils sont exprimés surtout dans le striatum, tubercules olfactifs et le noyau accumbens sur les neurones GABAergiques co-exprimant l’enképhaline (Le Moine et Bloch, 1995). Les récepteurs D2 existent aussi comme autorécepteurs. Les autorécepteurs sont des récepteurs localisés sur les corps cellulaires, les dendrites et les terminaisons nerveuses des neurones, qui répondent à la libération du neurotransmetteur par ce neurone et contribuent à la régulation de la synthèse et la libération du neurotransmetteur (Meltzer, 1980). Les autorécepteurs ont été identifiés sur les neurones dopaminergiques dans la substance noire et l’aire tegmentale ventrale (Meltzer, 1980). La libération de dopamine inhibe l’activité des neurones dopaminergiques par rétrocontrôle négatif à travers l’activation de ces autorécepteurs qui sont du type D2

(22)

6

(Drukarch et Stoof, 1990). Ces récepteurs sont localisés sur la région somato-dendritique des neurones dopaminergiques où ils sont impliqués dans la réduction de la fréquence de l’activité des neurones dopaminergiques et sur les terminaisons dopaminergiques où ils sont impliqués dans l’inhibition de la libération et la synthèse de dopamine (Drukarch et Stoof, 1990). Ainsi, la dopamine, en se fixant sur les autorécepteurs des neurones dopaminergiques, hyperpolarise la membrane ; ce qui induit un ralentissement de l’activité électrique neuronale et donc une diminution de la libération de la dopamine dans les aires de projections (Zapata et Shippenberg, 2002, Gobert et al, 1996).

Figure 3 : La dopamine et ses récepteurs. La dopamine agit sur deux classes de récepteurs "D1-like" et "D2-like" qui sont tous les deux métabotropiques mais qui ont des effets presque inverses : les D1-like (D1 et D5) sont couplés via Gs à l'adénylate cyclase (AC) et permettent la production d'AMPc qui déclenche de nombreuses réponses métaboliques dépendantes de la protéine kinase A (PKA) ; citons en particulier la phosphorylation des canaux ioniques qui active les conductances Na+ et inhibe les courants K+, ce qui résulte en une excitation neuronale. Les D2-like (D2, D3, D4) sont couplés à Gi/o et inhibent la synthèse d'AMPc ; ce qui en particulier facilite l'ouverture de canaux K+ hyperpolarisant et donc inhibe les neurones.

(23)

7

Les récepteurs D3 sont exprimés dans les aires limbiques (ilots de calleja, tubercules olfactifs, hippocampe, amygdale et l’aire tegmentale ventrale) (Sokoloff et al, 1990, Bouthenet et al, 1991, Diaz et al, 1995, Levant, 1998) et les récepteurs D4 sont exprimés dans le cortex frontal, amygdale, l’hypothalamus, le cervelet, le striatum et le noyau accumbens (khan et al, 1998, Svingos et al, 2000, Wedzony et al, 2000). Le fait que les récepteurs D2-like soient surtout exprimés dans les aires limbiques et corticales met en lumière leur potentiel clinique comme étant des cibles pour les antipsychotiques (Wilson et al, 1998, Sokoloff et al, 2006).

d. Le transporteur de la dopamine :

Le transporteur de la dopamine semble jouer des rôles essentiels dans le développement des pathologies liées à la transmission dopaminergique comme l’addiction, la neurotoxicité, et les troubles neurologiques et physiologiques. Les psychostimulants comme la cocaïne et les amphétamines induisent leurs effets appétitifs en bloquant la recapture de la dopamine au niveau du transporteur de la dopamine et en augmentant le niveau de la dopamine dans les terminaisons dopaminergiques (Kuhar et al, 1991). D’autre part, l’administration d’amphétamines exacerbe les expressions psychotiques chez des patients schizophrènes (Lieberman et al, 1987), alors qu’elle peut déclencher des symptômes schizophréniques chez des individus préalablement sains (Griffith et al, 1972, Tomiyama, 1990). Les amphétamines inhibent la recapture neuronale en bloquant le transporteur de la dopamine et augmentent la libération de dopamine en agissant au niveau du transporteur vésiculaire (Bunney et Aghajanian, 1978). Les toxines comme le 1 - Méthyle 4 - Phényl 1,2,3,6-Tétrahydro Pyridine (MPTP) et la six hydroxydopamine (6-OHDA) entrent dans les neurones dopaminergiques via le transporteur de la dopamine causant une dégénérescence de ces neurones ainsi que l’apparition des symptômes parkinsoniens (Edwards, 1993).

(24)

8

L’utilisation des souris transgéniques dépourvues du transporteur de la dopamine (DAT-/- ) a permis une meilleure compréhension du rôle essentiel du transporteur de la dopamine dans le contrôle des niveaux de dopamine extracellulaire (Giros et al, 1996, Jones et al, 1998, Benoit-Marand et al, 2000), la synthèse (Jaber et al, 1999), les mécanismes de stockage (Jones et al, 1998), la régulation de la transmission dopaminergique au niveau post-synaptique (Dumartin et al, 2000) et la régulation de l’expression des gènes (Fauchey et al, 2000 a et b, Le Moine et al, 2002). Les souris DAT-/- présentent une hyperactivité dopaminergique reflétée par une activité locomotrice spontanée élevée dans un nouvel environnement (Spielewoy et al, 2000) et des déficits d’intégration sensorimoteur (Fernagut et al, 2003). Chez ses souris, la dopamine persiste dans l’espace extracellulaire 300 fois plus longtemps que chez les souris contrôles (Giros et al, 1996). La sur-stimulation de la transmission dopaminergique est associée à des niveaux faibles de dopamine endogène et une diminution de l’expression des récepteurs dopaminergiques post-synaptiques D1 et D2 (Giros et al, 1996, Jones et al, 1998, Fauchey et al, 2000a et b). Ceci reflète le rôle important du transporteur de la dopamine dans la régulation de l’homéostasie de la dopamine dans les ganglions de la base (Jones et al, 1998, Jaber et al, 1999).

En absence du transporteur de la dopamine chez ces souris DAT-/- , la cocaine n’induit plus d’augmentation de l’activité locomotrice (Giros et al, 1996); cependant, il a été évoqué que ces souris montrent une préférence de place conditionnée à la cocaïne (Sora et al, 1998). D’autre part, en prenant en considération l’hyperdopaminergie persistante chez les souris DAT-/-, il a été proposé que ces souris présentent plusieurs aspects de la schizophrénie qui

est caractérisée notamment par une activité dopaminergique exacerbée dans le striatum (Gainetdinov et al, 2001). De plus, les souris DAT-/- sont protégées contre le MPTP (Bezard et

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9

al, 1999) puisque le nombre des neurones dopaminergiques dans la substance noire compacta des souris DAT-/- n’est pas affecté par le traitement au MPTP.

Ces données montrent que le transporteur de la dopamine possède un rôle primordial dans le contrôle des niveaux de la dopamine extracellulaire. La réduction ou l’augmentation des niveaux de la dopamine extracellulaire a été décrite comme étant impliquée dans de nombreuses pathologies comme la maladie de parkinson, la schizophrénie et la dépendance aux drogues.

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2.

Problématique de ma thèse :

Durant ma thèse, j’ai travaillé sur deux projets ayant pour fil conducteur la transmission dopaminergique. Ces deux projets portent sur deux maladies associées à une hyperdopaminergie :

Un projet principal qui porte sur l’influence de la stimulation environnementale sur la

dépendance aux drogues au niveau comportemental et neurobiologique.

Un projet secondaire en collaboration avec l’Université Américaine de Beyrouth-Liban, qui porte sur les changements développementaux de l’expression des gènes dans les systèmes dopamine-glutamate chez les rats ayant une lésion de l’hippocampe ventral, utilisé comme un modèle animal de la schizophrénie.

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B.

Dépendance aux drogues

1.

Dépendance

La toxicomanie est un problème préoccupant de santé publique. La prévalence au cours de la vie de la population européenne âgée entre 15-64 ans pour les drogues illicites est 22% pour le cannabis, 4% pour la cocaïne, 3% pour l’ecstasy, 3.6 % pour l’amphétamine et 0.8 % pour les opiacées qui constituent la principale drogue consommée dans environ 50% de toutes les demandes de traitement (Observatoire européen des drogues et des toxicomanies (OFDT), rapport 2007). Il a aussi été évoqué que la cocaïne, la deuxième drogue illicite la plus consommée en Europe, après le cannabis, est un problème de santé publique grandissant. En effet, dans certains pays européens, il a été observé au cours de ces dernières années une augmentation significative de la consommation de cocaïne, des demandes de traitement pour des problèmes liés à la cocaïne et des saisies de drogues (OFDT, rapport 2007). D’autre part, l’héroïne ne touche plus seulement les usagers traditionnels d'opiacés, âgés en général de plus de 30 ans, mais se diffuse dans des populations plus jeunes. Deux nouveaux publics sont concernés, souligne l'observatoire français des drogues et des toxicomanies (OFDT). Il s'agit, d'une part, des jeunes en situation de grande précarité évoluant en milieu urbain et, d'autre part, de jeunes relativement intégrés qui expérimentent cette drogue en milieu festif de manière occasionnelle. En 2006, sur 177 décès survenus par overdose, 21 % étaient imputables à l'héroïne seule, selon l'enquête annuelle effectuée par l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (Afssaps).

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a. Définition

Les drogues d’abus sont récompensantes (interprétées par le cerveau comme étant essentiellement positives et agréables) (Wise, 1978) et renforçantes (les comportements associés avec la prise des drogues tendent à être répétés) (White, 1989). Chez certains individus, les propriétés récompensantes et renforçantes des drogues conduisent à un usage répété qui provoque des changements moléculaires dans le cerveau dites neuroadaptations (Nestler, 2001a). La conséquence de cette prise répétée des drogues est l’addiction (Hyman et Malenka, 2001). L’addiction est définie comme étant une maladie cérébrale chronique (Leshner, 1997) caractérisée par une prise sans contrôle des drogues malgré la connaissance des conséquences néfastes sanitaires, sociales et économiques. D’après la définition de l’organisation mondiale de la santé (OMS), l’addiction est un syndrome où la consommation d’un produit devient une exigence supérieure à celle d’autres comportements auparavant d’importances maximales. La dépendance s’installe avec la répétition des prises de drogues et se caractérise par un besoin impérieux de la drogue qui conduit à sa recherche compulsive.

Le problème majeur de l’addiction est que, une fois installée, elle devient un cercle vicieux chronique: des périodes d’abstinence sont suivies par des phénomènes de rechute (McLellan et al, 2000). En fait, le conditionnement environnemental (ou rappel contextuel) est responsable des rechutes chez les individus sevrés de leur envie de se droguer depuis très longtemps. Même des années après le sevrage, le conditionnement environnemental peut réveiller l’envie et le besoin de drogues (O’Brien et al, 1991). Ce phénomène est lié à un apprentissage qui associe de manière extrêmement forte la drogue à son contexte de consommation (lieux, activités, entourage…) (Hyman, 2005). L’assimilation du contexte de

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consommation à la drogue est si puissante que l’apparition du contexte peut raviver, à lui seul, la motivation pour la recherche et l’usage des drogues (Childress et al, 1986).

Les définitions de la dépendance qui tiennent lieu aujourd’hui sont issues du DMS IV (Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux, révision IV) et la CIM-10 (Classification internationale des maladies et des problèmes de santé connexes).

Tableau 1 : Critères de la dépendance selon DMS-IV :

La dépendance est un mode d’utilisation inapproprié d’une substance, entraînant une détresse ou un dysfonctionnement cliniquement significatif, comme en témoignent trois (ou

plus) des manifestations suivantes, survenant à n’importe quel moment sur la même période de douze mois :

1. Tolérance, définie par l’une ou l’autre des manifestations suivantes :

- besoin de quantités nettement majorées des la substance pour obtenir une intoxication ou l’effet désiré.

- effet nettement diminué en cas d’usage continu de la même quantité de substance. 2. Sevrage caractérisé par l’une ou l’autre des manifestations suivantes :

- syndrome de sevrage caractéristique de la substance.

- La même substance (ou une substance apparentée) est prise dans le but de soulager ou d’éviter les symptômes de sevrage.

3. Substance souvent prise en quantité supérieure ou sur un laps de temps plus long que ce que la personne avait envisagé.

4. Désir persistant ou efforts infructueux pour réduire ou contrôler l’utilisation de la substance.

5. Temps considérable passé à faire le nécessaire pour se procurer la substance, la consommer ou récupérer de ses effets.

6. D’importantes activités sociales, occupationnelles ou de loisirs sont abandonnées ou réduites en raison de l’utilisation de la substance.

7. Poursuite de l’utilisation de la substance malgré la connaissance de l’existence d’un problème physique ou psychologique persistant ou récurrent déterminé ou exacerbé par la substance.

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Avec dépendance physique : signes de tolérance ou de sevrage (item 1 ou 2 présents). Sans dépendance physique : pas de signes de tolérance ou de sevrage (item 1 ou 2 absents). Tableau 2 : Critères de la dépendance selon L’organisation mondiale de la santé CIM-10 (1992):

Certains symptômes du trouble ont persisté au moins un mois ou sont survenus de façon répétée sur une période prolongée.

Au moins trois des manifestations suivantes sont présentes en même temps au cours de la dernière année :

1. Désir puissant ou compulsif d’utiliser une substance psychoactive.

2. Difficultés à contrôler l’utilisation de la substance (début ou interruption de la consommation au niveau de l’utilisation).

3. Syndrome de sevrage physiologique quand le sujet diminue ou arrête la consommation d’une substance psychoactive, comme en témoignent la survenue d’un syndrome de sevrage caractéristique de la substance, ou l’utilisation de la même substance (ou d’une substance apparentée) pour soulager ou éviter les symptômes de sevrage.

4. Mise en évidence d’une tolérance aux effets de la substance psychoactive : le sujet a besoin d’une quantité plus importante de la substance pour obtenir l’effet désiré.

5. Abandon progressif d’autres sources de plaisir et d’intérêt au profit de l’utilisation de la substance psychoactive, et augmentation du temps passé à se procurer la substance, la consommer ou récupérer ses effets.

6. Poursuite de la consommation de la substance malgré la survenue de conséquences manifestement nocives.

b. L’addiction : de l’homme aux modèles animaux

Le développement des modèles animaux de pharmacodépendance a constitué une étape primordiale afin de comprendre les mécanismes qui sont à l’origine des effets récompensants des drogues et du phénomène de rechute.

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sensibilisation comportementale :

La sensibilisation comportementale est l’augmentation progressive de la réponse comportementale induite par des administrations répétées d’une même dose de drogue. Ce phénomène, qui persiste après des périodes de sevrage très longues (Paulson et al, 1991, Kalivas et Duffy, 1993, Hooks et al, 1994a), est considéré comme un modèle animal de l’intensification du désir de la drogue qui serait responsable de la prise ultérieure de la drogue par les toxicomanes (Vanderschuren et Kalivas, 2000). La sensibilisation comportementale est constituée de deux phases : i) le développement qui correspond aux changements transitoires cellulaires et moléculaires suite à l’administration répétée des drogues; et ii) l’expression qui correspond aux altérations durables dans la fonction neuronale après la période de sevrage (Anderson et Pierce, 2005).

Durant la phase de développement de la sensibilisation comportementale, l’activité locomotrice de l’animal augmente progressivement suite à l’administration répétée de la même dose de la drogue. Ensuite, après une période de sevrage plus ou moins longue, l’expression de la sensibilisation comportementale est observée après administration de la drogue à l’animal.

Il a été montré que la sensibilisation comportementale aux drogues est accompagnée par une potentialisation de la libération de la dopamine dans le noyau accumbens (Robinson et Berridge, 2000). Pourtant, le noyau accumbens peut être divisé en deux parties shell et core sur des bases anatomiques (Heimer et al, 1991) mais aussi fonctionnelles (Pierce et Kalivas, 1995). Par exemple, le shell et le core du noyau accumbens répondent différemment aux récompenses naturelles ainsi qu’aux drogues d’abus (Pontieri et al, 1995, 1996, Bassareo et Di Chiara, 1999). En mesurant les niveaux de dopamine dans ces sous-divisions du noyau accumbens, Di Chiara et ses collaborateurs ont montré que la sensibilisation comportementale

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à la morphine (Cadoni et Di Chiara, 1999) et au delta-9-tetrahydrocannabinol (THC) (Cadoni et al, 2008) est associée à une augmentation de libération de la dopamine en réponse à la drogue dans le core du noyau accumbens et à une réduction de la transmission dopaminergique dans le shell du noyau accumbens. De plus, la sensibilisation comportementale à l’amphétamine est associée à une sensibilisation de la transmission dopaminergique dans le core du noyau accumbens tandis que la sensibilisation comportementale à la cocaïne est associée à une réduction de la transmission dopaminergique dans le shell du noyau accumbens (Cadoni et al, 2000). Ces données montrent que la sensibilisation comportementale semble être le résultat d’une sensibilisation de la transmission dopaminergique dans la partie core du noyau accumbens ou d’une réduction de l’activité dopaminergique dans la partie shell du noyau accumbens ou les deux (Cadoni et al, 2000).

La sensibilisation comportementale à une drogue peut être croisée avec les effets d’une autre drogue (Horger et al, 1992) ou avec le stress (Antelman et al, 1980). Ainsi, l’injection répétée d’une drogue peut induire une sensibilisation aux effets d’une autre drogue (Horger et al, 1992) ou induire une réaction accrue au stress (Antelman et al, 1980). Vice-versa, les rats exposés à des événements stressants montrent une réaction accrue aux psychostimulants (Antelman et al, 1980, Prasad et al, 1995).

préférence de place conditionnée :

La préférence de place conditionnée (Tzschentke, 1998, Cunningham et al, 2006) est un apprentissage de type pavlovien basé sur l’association des effets subjectifs des drogues (stimulus non conditionné ou primaire) à un environnement initialement neutre. Cet environnement associé d’une manière répétée au stimulus primaire, acquière des propriétés

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motivationnelles et devient un stimulus conditionné ou secondaire. Le stimulus secondaire peut donc exercer des effets attractifs sur l’animal après le conditionnement suivant les propriétés récompensantes du stimulus primaire.

Dans la préférence de place conditionnée, la drogue est administrée d’une manière passive à l’animal. Ainsi, il n’a pas de réponse spécifique à émettre ou à apprendre pour obtenir la drogue. La préférence de place conditionnée se déroule dans un dispositif à deux compartiments différents (décors des parois, texture du sol…) généralement séparés par un compartiment central. Dans la procédure commune, une séance de pré-test consiste à mesurer la préférence naturelle ou spontanée de l’animal aux compartiments de l’appareil. Ensuite au cours des séances de conditionnement ou d’acquisition, les animaux reçoivent la drogue avant d’être placés dans l’un des compartiments. Ainsi, ils associent les effets de la drogue avec un contexte environnemental et alternativement, ils associent l’absence de la drogue (ou placebo) avec l’autre compartiment. Au cours d’une séance test, en général unique, durant laquelle l’animal a libre accès aux deux compartiments, l’expression du comportement motivationnel conditionné est évalué en absence de la drogue. La préférence est évaluée comme étant la différence entre le temps passé dans le compartiment associé à l’injection de la drogue avant et après le conditionnement. Si l’animal montre une préférence pour le compartiment associé à l’injection de la drogue, cette drogue sera qualifiée de renforçante. La préférence de place conditionnée permet donc d’évaluer la valeur motivationnelle assignée aux stimuli associés à la prise de drogues.

Récemment, la préférence de place conditionnée a été utilisée pour évaluer le comportement de la réinstallation de la recherche de drogue après une période d’extinction. Cette procédure

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s’avère particulièrement intéressante puisque les stimuli conditionnés associés à la prise des drogues sont décrits comme largement responsables de la recherche de la drogue et de la rechute après une période de sevrage chez les toxicomanes. Pour ceci, le conditionnement peut être aboli en exposant l’animal de façon répétée au stimulus conditionné en absence du stimulus primaire (Calcagnetti et Schechter, 1993). Ensuite, l’animal est injecté par la drogue avant la séance test. L’animal passerait plus de temps en présence des stimuli associés à la drogue suite à l’amplification de la valeur motivationnelle positive de ces stimuli (Mueller et Stewart, 2000).

Auto-administration des drogues :

L’auto-administration des drogues psychoactives est généralement considérée comme étant la mesure la plus directe de ses effets renforçants. Les animaux peuvent s’auto-administrer la plupart des drogues abusées par les humains comme la cocaïne, l’alcool, la nicotine et l’héroïne par les mêmes voies d’administration utilisées par les humains telles l’administration intraveineuse, orale et l’inhalation (Griffiths, 1980). Dans les procédures d’auto-administration intraveineuse, un cathéter est implanté dans la veine jugulaire permettant à l’animal de s’auto-administrer une petite dose unitaire de drogue suite à la pression sur un levier ou à l’introduction du museau dans un trou. L’infusion de la drogue renforce les réponses et si la fréquence des infusions augmente lors des sessions expérimentales, on considère que la drogue a des effets récompensants. Dans les procédures d’auto-administration des drogues, les stimuli sonores ou visuels, qui sont associés à la prise de la drogue, acquièrent une valeur motivationnelle par un conditionnement de type pavlovien et des processus d’apprentissage associatif. Ces stimuli vont ainsi maintenir le comportement de recherche et de la prise de drogue, et aussi de réinstaller ce comportement après une période d’extinction (Stewart, 1983, Arroyo et al, 1998, Le Foll et Goldberg, 2005).

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c. Circuit de récompense :

Le circuit de récompense comporte un axe principal composé des projections dopaminergiques des neurones de l’aire tegmentale ventrale vers, entre autres, le noyau accumbens qui constitue un substrat majeur de récompense et de renforcement des drogues d'abus et des récompenses naturelles (Wise et Bozarth, 1987, McBride et al, 1999, Hyman et Malenka, 2001). Les drogues abusées par les humains (opiacés, la nicotine, l’amphétamine et la cocaïne) augmentent la concentration extracellulaire de la dopamine dans le noyau accumbens (Di Chiara et Imperato, 1988, Kuczenski et al, 1991). Ces drogues usurpent le fonctionnement du circuit neuronal qui normalement contrôle la motivation pour les récompenses naturelles comme la nutrition (Hernandez et Hoebel, 1988, Kiyatkin et Gratton, 1994, Carr, 2002), l’activité sexuelle (Melis et Argiolas, 1995, Pfaus et al, 1995), et la vie socio-affective (Hansen et al, 1993, Insel, 2003). En effet, la quantité de dopamine libérée est bien plus importante et plus prolongée que celle engendrée par une récompense «naturelle» (Wolf, 2002). De plus, à la différence des récompenses naturelles, l’administration répétée des drogues n’engendre pas une habituation ou adaptation à la réponse (Di Chiara, 1999). Ainsi, chaque dose administrée stimule la libération de la dopamine (Di Chiara, 1999).

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Figure 4 : Représentation schématique simplifiée de l’organisation du circuit de récompense (Everitt et Wolf, 2002): le BLA permet l’expression des conditionnements de type pavlovien en intégrant la valeur motivationnelle apprise des stimuli conditionnés tandis que l’hippocampe est impliqué dans l’intégration des stimuli contextuels associés à la prise de drogue. Le noyau accumbens correspond à l’interface émotion-motivation/actions du système. Quant au striatum dorsal, il est impliqué dans la formation des habitudes ou l’apprentissage de l’association « stimulus-réponse ». Le cortex préfrontal contrôle les sorties comportementales. La représentation subjective de la valeur motivationnelle des stimuli implique à la fois le BLA ainsi que le cortex orbitofrontal, une structure du cortex préfrontal. Les représentations subjectives comme le manque (craving) impliquent ces deux structures ainsi que le cortex cingulaire. Enfin, la sortie des commandes motrices dirigées incorpore les projections striato-pallidales dorsale et ventrale ainsi que la boucle thalamo-corticale. Les flèches bleues indiquent les projections glutamatergiques, les jaunes indiquent les projections GABAergiques et les rouges indiquent les projections dopaminergiques. BLA : noyau basolatéral de l’amygdale, CeN : noyau central de l’amygdale, NAc : noyau accumbens, VGP et DGP : pallidum ventral et dorsal, VTA : aire tegmentale ventrale, SNc : substance noire compactée.

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Autour de cet axe, s’agencent des structures permettant l’intégration des signaux environnementaux (hippocampe et amygdale) ou la mise en place des commandes motrices (striatum dorsal, thalamus et pallidum) (voir Figure 4).

En fait, l’amygdale est impliquée dans le traitement des émotions et la régulation de l’état affectif (Ledoux et al, 1993), modulant ainsi avec l’hippocampe les entrées émotionnelles associées au contexte ou aux stimuli conditionnés (Everitt et Wolf, 2002).

L’axe cortico-striato-pallidal est impliqué dans la formation des habitudes et aussi dans la mise en place du comportement dirigé (Everitt et Wolf, 2002). Ce comportement est issu de l’activité du noyau accumbens qui correspond à l’interface entre les émotions et les actions (Mogenson et al, 1980). En fait, les comportements dirigés sont médiés par les projections glutamatergiques issues des régions limbiques et corticales vers le noyau accumbens, tandis que les projections GABAergiques issues du noyau accumbens vers les régions motrices sont responsables de l’exécution motrice de ces comportements (Wolf, 2002). Quant au cortex préfrontal, il régule la valeur motivationnelle des stimuli, il contrôle la sortie comportementale et en détermine l’intensité la plus adaptée aux stimuli (Schoenbaum et al, 1999). De plus ses projections vers le noyau accumbens et l’aire tegmentale ventrale, les retours des sorties motrices à travers le thalamus confèrent au cortex préfrontal un rôle de contrôle du comportement (Kelley, 2004 ; Everitt et Wolf, 2002).

Enfin, l’hypothalamus permet la sortie des commandes régulant le système autonome alors que le pallidum permet la sortie des commandes motrices dirigées (Kelley, 2004 ; Everitt et Wolf, 2002).

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d. Modes d’action des drogues :

Les nombreuses substances addictives (nicotine, alcool, cannabis, opiacés, stimulants...) divergent par leurs structures chimiques et leurs modes d’action sur une multitude de cibles moléculaires :

Figure 5 : Modes d’action des drogues. Les psychostimulants (amphétamine et cocaïne) interagissent avec le transporteur de la dopamine pour élever les concentrations de dopamine extracellulaires dans le noyau accumbens. La nicotine, à travers les récepteurs nicotiniques à l’acétylcholine (nAchR) activent directement les neurones dopaminergiques et augmentent la libération de glutamate des terminaisons glutamatergiques (Glu) dans l’aire tegmentale ventrale. Les opiacés, à travers les récepteurs opioïdes, inhibent les neurones GABAergiques dans l’aire tegmentale ventrale, désinhibant par la suite les neurones dopaminergiques. L’éthanol et les cannabinoïdes interagissent aussi avec les neurones GABA de l’aire tegmentale ventrale pour désinhiber les neurones dopaminergiques. L’éthanol agit au niveau des récepteurs GABA-A tandis que les cannabinoïdes activent les récepteurs CB1 pré-synaptiques qui inhibent la libération de GABA. (Wolf, 2003).

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L’amphétamine et la cocaïne (les psychostimulants) agissent directement sur le système dopaminergique et augmentent le niveau de la dopamine dans la fente synaptique. La cocaïne et l’amphétamine agissent dans le striatum ventral (Ikemoto, 2003, Ikemoto et al, 2005) en bloquant le transporteur de la dopamine localisé sur les terminaisons pré-synaptiques, inhibant par la suite la recapture de la dopamine par le transporteur de la dopamine (Jaber et al, 1997) et l’amphétamine entre dans le bouton pré-synaptique par les transporteurs à dopamine (Sulzer et al, 2005). Une fois à l’intérieur du neurone pré-synaptique, les amphétamines empêchent l’encapsidation de la dopamine dans leurs vésicules de stockage, et expulsent celles-ci dans la fente synaptique en inversant le fonctionnement du transporteur de la dopamine qui va donc libérer la dopamine au lieu de la recapter (Bunney et Aghajanian, 1978, Jones et al, 1999, Sulzer et al, 2005).

Les peptides opioïdes endogènes (beta-endorphine, l’enképhaline et la dynorphine) possèdent des récepteurs endogènes couplés à une protéine Gi qui sont les récepteurs mu, delta et kappa (Gerrits et al, 2003, Mansour et al, 1995). Les opiacés comme l’héroïne et la morphine produisent leurs effets récompensants en agissant principalement sur les récepteurs des opioïdes µ dans l’aire tegmentale ventrale, levant l’inhibition sur les neurones dopaminergiques et augmentant indirectement la concentration de la dopamine dans le noyau accumbens (Di Chiara et North 1992, Johnson et North 1992).

La nicotine agit sur les récepteurs nicotiniques localisés dans la région somato-dendritique des neurones dopaminergiques (Calabresi et al, 1989, Pidoplichko et al, 1997, Mansvelder et McGehee 2002) ou au niveau pré-synaptique des terminaisons glutamatergiques sur l’aire tegmentale ventrale (McGehee et al, 1995, Mansvelder et McGehee, 2000). La transmission glutamatergique est ainsi facilitée, activant par la suite les neurones dopaminergiques de l’aire tegmentale ventrale (Mansvelder et McGehee, 2000).

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Les cannabinoïdes (Delta-9- tetrahydrocannabinol THC) agissent au niveau des récepteurs CB1 des endocannabinoides dans l’aire tegmentale ventrale (Zangen et al, 2006), impliquant des mécanismes de désinhibition pour activer les neurones dopaminergiques (Lupica et al, 2004; Gardner, 2005).

e. Conséquences cellulaires et moléculaires en réponse aux drogues :

La transition de l’usage occasionnel à l’addiction semble être le résultat des neuroadaptations principalement dans le système dopaminergique mésolimbique suite à une exposition répétée aux drogues (Chao et Nestler, 2004). La plasticité cérébrale sous-jacente aux caractéristiques durables de l’addiction aux drogues s’appuie sur des modifications de l’expression génique, du traitement post-traductionnel des protéines, de l’excitabilité membranaire (plasticité synaptique) et de l’architecture cellulaire du neurone (Hyman et Malenka, 2001).

Modifications géniques :

i. Gènes intermédiaires précoces : Les psychostimulants et les opiacées provoquent une induction des gènes intermédiaires précoces (fos, Jun et Zif-268) dans le striatum dorsal et le noyau accumbens (Young et al, 1991, Liu et al, 1994, Graybiel et al, 1990, Hope et al, 1992, Cole et al, 1992, Jaber et al, 1995). Cette induction est d’une importance particulière car les gènes intermédiaires précoces, considérés comme des marqueurs d’activité neuronale (Hughes et Dragunow, 1995), représentent une étape initiale des changements à long terme dans la fonction neuronale produits par les drogues (Nestler, 2001b, Hyman et Malenka, 2001).

Zif-268 est un gène intermédiaire précoce codant pour un facteur de transcription de la famille EGR (Early Growth Factor). Il est induit d’une manière rapide et transitoire en

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réponse à divers stimuli extracellulaires (Beckmann et Wilce, 1997, Knapska et Kaczamarek, 2004). L’activation de Zif-268 induite par la cocaïne et l’amphétamine dans le striatum implique le système dopaminergique. En effet, cette activation est abolie par l’antagoniste des récepteurs D1 SCH23390 ainsi que par la lésion du système dopaminergique dans le striatum par la 6-OHDA (Cole et al, 1992, Bhat et al, 1992). D’autre part, l’activation des récepteurs métabotropiques à glutamate par un agoniste sélectif induit l’expression de Zif-268 dans le striatum dorsal (Wang, 1998). Cette expression est réduite suite à un prétraitement par un antagoniste des récepteurs ionotropiques N-methyl-D-aspartate (NMDA) à glutamate. Ceci suggère que l’induction de Zif-268 est médiée en partie par les récepteurs NMDA glutamatergiques (Wang, 1998).

Zif-268 semble jouer un rôle crucial dans plusieurs formes d’apprentissage associatif (Davis et al, 2003) et apparait essentiel pour la reconsolidation des mémoires aversives et appétitives (Lee et al, 2004, 2005). En effet, il a été démontré que l’expression de Zif-268 est augmentée par les stimuli conditionnés associés à l’auto-administration de la cocaïne dans le noyau accumbens, l’aire tegmentale ventrale, le cortex frontal et le noyau basolatéral de l’amygdale (Thomas et al, 2003). De plus, l’injection des oligonucléotides antisens de Zif-268 dans le noyau basolatéral de l’amygdale abolie la reconsolidation des mémoires appétitives associées à la cocaïne (Lee et al, 2005), la reconsolidation des mémoires aversives associées à la période de sevrage de l’héroïne (Hellemans et al, 2006) et réduit le comportement de recherche et la rechute à la cocaïne (Lee et al, 2005). D’autre part, les souris Zif-268 Knockout ne montrent pas une préférence de place conditionnée à la cocaïne reflétant l’importance de Zif-268 pour les effets récompensants de la cocaïne (Valjent et al, 2006a). De plus, la sensibilisation comportementale à la cocaïne est réduite chez ces souris (Valjent et al, 2006a).

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L’exposition aigue aux substances d’abus entraine une activation rapide et transitoire des facteurs de transcription de la famille Fos dans le noyau accumbens (Graybiel et al, 1990, Hope et al, 1992). Elles sont synthétisées à partir de 7 gènes dont 3 (jun B, c-jun et jun D) codent les protéines Jun et 4 (cfos, fosB, fra-1 et fra-2) codent les protéines Fos. Les protéines Fos forment un hétérodimère avec les protéines de la famille Jun formant le complexe transcriptionnel AP-1 (Activation protein-1) et régulant l’expression des gènes cibles (Morgan et Curran, 1991).

Le récepteur dopaminergique D1 semble être important pour l’activation de c-fos. En effet, l’activation de c-Fos par les psychostimulants est augmentée d’une manière synergique par la stimulation des récepteurs D1 et D2, cependant, il a été montré que l’activation des récepteurs D1 est suffisante pour induire une activation de c-Fos (Cole et al, 1992, Keefe et Gerfen, 1995, Cho et al, 2007). D’autre part, l’induction de c-fos par la morphine dans le noyau accumbens et le striatum nécessite aussi l’activation des récepteurs D1 (Liu et al, 1994). De plus, Jaber et al, (1995) ont montré que l’activation de c-Fos après un traitement aigu d’amphétamine est induite d’une manière prédominante dans les neurones du striatum exprimant la substance P (ayant comme récepteur à dopamine D1) (Jaber et al, 1995). Les souris déficientes de Fos dans leurs neurones exprimant le récepteur D1, montrent une altération de l’expression des gènes ayant un site de couplage avec le complexe AP-1 dans leur promoteur tels les sous unités des récepteurs glutamatergiques et les molécules de signalisation (Zhang et al, 2006). Ces souris ne montrent pas une augmentation de la densité des épines dendritiques induite par les psychostimulants (Zhang et al, 2006). De plus, les souris déficientes de Fos dans leurs neurones exprimant le récepteur D1, montrent aussi une sensibilisation comportementale atténuée à la cocaïne ainsi qu’une extinction retardée de la préférence de place conditionnée induite par la cocaïne (Zhang et al, 2006).

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Ces résultats montrent que l’induction de c-Fos induite dans les neurones exprimant les récepteurs D1 médie les changements persistants évoqués par un traitement répété à la cocaïne.

Plusieurs études ont investigué comment le traitement répété aux psychostimulants induisant un phénomène de sensibilisation comportementale pourrait affecter l’induction de l’expression de c-fos, mais, la plupart de ces études se sont focalisées sur le striatum dorsal plus que le noyau accumbens. Une partie de ces études ont évoqué une diminution de l’expression de c-fos et d’autres, au contraire, ont rapporté une augmentation de l’expression de c-fos avec les injections répétées de psychostimulants. Ceci semble dépendre, en partie, de la durée de la période de sevrage après la dernière injection de drogue.

En fait, dans la majorité de ces études, les rats sont testés 24 heures après la dernière injection de la drogue. Dans ces conditions, il a été montré que le traitement répété aux drogues engendre une réduction de l’expression (tolérance) de c-fos induite par l’amphétamine (Jaber et al, 1995), ou de cocaïne (Ennulat et al, 1994, Moratalla et al, 1996, Rosen et al, 1994) dans le striatum dorsal. En revanche, quand les rats ont été testés après une période de sevrage de plus de 24 heures, les résultats semblent être variés. Dans ces conditions, il a été montré une tolérance de l’expression de c-fos induite par la cocaïne (Canales et Graybiel, 2000, Curran et al, 1996). D’autre part, il a été montré que le traitement répété à l’amphétamine provoque une augmentation de l’induction de c-fos par l’amphétamine (Norman et al, 1993) dans le striatum dorsal.

Dans le noyau accumbens, il a été montré une tolérance (Hope et al, 1992) de l’induction de c-fos induite par la cocaïne 24 heures après la dernière injection de la drogue. Cependant, Curran et al, (1996) ont réalisé le test après une période de sevrage de 14 jours et ont noté que

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la cocaïne produit une sensibilisation des niveaux de c-fos dans le noyau accumbens. De plus, Crombag et al, (2002), ont montré que cette sensibilisation de l’expression de c-fos induite par la cocaïne dans le noyau accumbens est dose-dépendante.

ii. Delta Fos B : Suite à des traitements chroniques par des drogues, la protéine delta Fos B qui est une variante tronquée résultant de l’épissage alternatif du gène codant pour le gène intermédiaire précoce FosB, s’accumule progressivement du fait de sa stabilité (voir figure 6) (Chen et al, 1997, McCLung et al, 2004). L’expression de delta Fos B est déclenchée, de manière significative, en réponse à l’exposition chronique à plusieurs substances, notamment la cocaïne, les amphétamines, les opiacés, la nicotine (Hope et al, 1994 ; Moratalla et al, 1996, Nye et Nestler, 1996, Nye et al, 1995, Pich et al, 1997). Cette expression est majeure au niveau du noyau accumbens et du striatum dorsal, mais existe aussi dans d’autres régions cérébrales impliquées dans l’addiction, telles que l’amygdale et le cortex préfrontal (McClung et al, 2004). Delta Fos B pourrait donc représenter un « interrupteur » moléculaire entretenu, qui faciliterait l’initiation et le maintien de l’état d’addiction (McClung et al, 2004).

Les souris transgéniques sur-exprimant delta Fos-B dans le striatum dorsal et le noyau accumbens montrent une préférence de place conditionnée élevée à la cocaïne (Kelz et al, 1999) et la morphine (Zachariou et al, 2006), et une grande motivation à s’auto-administrer de la cocaïne (Colby et al, 2003). En parallèle, la préférence de place conditionnée à la morphine est abolie chez les souris Knockout pour Fos B (Solecki et al, 2008) qui montrent aussi une préférence de place conditionnée réduite à la nicotine (Zhu et al, 2007). Au contraire, il a été démontré que les souris Knockout pour Fos B montrent plus de préférence de place conditionnée à la cocaïne (Hiroi et al, 1997). Ces données suggèrent un rôle important de la protéine FosB dans les effets récompensants des drogues d’abus.

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Figure 6: La production des facteurs de transcription Fos par les drogues. A la suite d’une prise aiguë (en haut) la synthèse des protéines cFos, Fra 1 et 2 est accrue de manière importante mais transitoire dans le noyau accumbens. Cependant, l’augmentation modeste de la synthèse de delta FosB est soutenue dans le temps. Avec la répétition des prises de drogues en usage chronique (en bas) la persistance de petites quantités de delta FosB, liée à l’effet aigu de la drogue, conduit à une importante accumulation de delta FosB. (Nestler, 2001 b).

iii. CREB (cAMP response element binding protein): CREB est un facteur de transcription qui se lie sous forme de dimère à un site CRE (cAMP Response Element) présents dans la région régulatrice de nombreux gènes codant, parmi d’autres, pour Fos, la tyrosine hydroxylase, le brain derived neurotrophic factor (BDNF), la dynorphine et l’enképhaline (Carlezon et al, 2005). La transcription médiée par CRE implique l’activation de CREB via une phosphorylation par la protéine kinase A (PKA), Ca2+-calmoduline kinase (CaMK) ou d’autres protéines kinases régulatrices des facteurs de croissance (Shaywitz et

Figure

Figure 1 : Les voies dopaminergiques à neurones longs
Figure 2: La synapse dopaminergique. La dopamine (DA) est synthétisée à partir de la L-Tyr  par la  TH en L-DOPA puis en DA par la DDC
Figure  3 :  La  dopamine  et  ses  récepteurs.  La  dopamine  agit  sur  deux  classes  de  récepteurs
Figure  4 :  Représentation  schématique  simplifiée  de  l’organisation  du  circuit  de  récompense (Everitt  et  Wolf,  2002):  le  BLA  permet  l’expression  des  conditionnements  de  type pavlovien en intégrant la valeur motivationnelle apprise des s
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