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Orpaillage artisanal et développement rural

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Academic year: 2021

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Texte intégral

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Orpaillage artisanal et développement rural

Thèse

Lala Ouedraogo

Doctorat en agroéconomie

Philosophiæ doctor (Ph. D.)

Québec, Canada

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Orpaillage artisanal et développement rural

Thèse

Lala Ouedraogo

Sous la direction de:

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Résumé

Cette thèse est composée principalement de trois chapitres abordant des questions sur l’or-paillage artisanal au Burkina Faso. Avant d’exposer ces trois chapitres, dans l’introduction, nous décrivons d’abord le contexte socio-économique et le contexte legal du secteur miner du pays ; ensuite nous revenons sur la revue de littérature relative à la question de l’orpaillage notamment les impacts positifs comme les possibilité d’emplois et les impacts négatifs comme les problèmes sanitaires et de sécurité ; les autres questions dont la relation entre agriculture et extraction artisanale, la durabilité de l’orpaillage et la responsabilité sociale des entre-prises minières, la gouvernance locale des sites ; et enfin les différents cadres conceptuels mobilisés pour les trois thématiques à savoir le cadre d’analyse du développement institu-tionnel, celui des moyens d’existence durables et celui de l’«empowerment» pour étudier plus spécifiquement le rôle des femmes sur les sites d’orpaillage.

Dans le premier chapitre, La gouvernance locale et l’organisation du travail sur les sites miniers du Burkina Faso, nous nous basons sur le cadre d’analyse du développement institutionnel pour discuter de la gouvernance locale et de la division du travail dans les camps d’extraction aurifère artisanale au Bukina Faso ; un pays d’Afrique de l’Ouest qui, ces dernières années, exploite de plus en plus ses réserves d’or. Les données de terrain ont été recueillies sur trois sites dans les villages de Diosso, Siguinoguin et Zincko, conformément à l’échantillonnage raisonné. L’une des découvertes majeures tirées de la recherche sur site est que les formes de gouvernance varient le long d’un continuum allant de flexibles (appliqués par des puissances conjointes : syndicat des mineurs artisanaux, autorités coutumières et propriétaires fonciers) à rigides (appliqués par les propriétaires fonciers). Une autre conclusion est que le type de relation entre les communautés autochtones et les mineurs dépend de l’importance de l’autochtonie des mineurs artisanaux. En effet ils sont harmonieux à Zincko où les mineurs sont originaires du village alors qu’ils sont tendus à Siguinoguin qui est peuplée de migrants. Finalement, cet article s’appuie sur l’école française de proximité pour enrichir les définitions données aux attributs du monde physique et aux attributs de la communauté mis en évidence par la théorie d’Ostrom, la proximité géographique ne permettant pas de détailler les formes de proximité relationnelle organisées dans les camps miniers.

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une compréhension de la relation dynamique entre l’agriculture de subsistance et l’exploita-tion minière artisanale, en s’appuyant sur des preuves provenant de communautés minières artisanales des villages de Diosso, Siguinoguin et Zincko situés au Burkina Faso. La recherche montre que les communautés rurales sont confrontées à de nombreuses vulnérabilités telles que le manque de pluie et les catastrophes naturelles et l’insecurité grandissante au Nord. Ces vulnérabilités les obligent à poursuivre l’extraction artisanale comme autre moyen d’exis-tence.Notre étude a montré qu’en fait il existe une interaction dynamique entre ces deux activités. D’un coté l’agriculture soutient l’orpaillage en offrant aux fermiers les revenus nécéssaires pour s’engager dans l’activitité comme se payer le transport de leurs villages respectifs vers les camps miniers ; et d’autre part l’orpaillage soutient de manière considérable l’agriculture notamment soutenir les familles pendant les périodes de soudure de la saison sèche et contribuer à l’achat des intrants. Bien que cette interaction semble être bénéfique, les entrevues auprès des jeunes nous a fait découvrir un réel problème pour la succession agricole qui s’est habituée à la nouvelle vie moderne qu’il pouvait s’offir via l’orpaillage. Ainsi, elle développe des stratégies d’adaptation qui l’éloigne des activités agricoles et entraînent des moyens de subsistance non durables à long terme.

Dans le troisième chapitre, Obtenir l’«empowerment» dans un monde d’hommes, nous examinons l’autonomisation économique et sociale des femmes grâce à l’exploitation minière artisanale au Burkina Faso. Nous avons mené des entretiens individuels et des groupes de discussion sur trois camps miniers. Ces entretiens ont fourni des informations sur les différents rôles joués par les femmes dans les camps d’exploitation minière, leur accès aux ressources nécessaires et le pouvoir collectif qui s’est développé entre elles tout en travaillant les unes avec les autres dans les camps miniers. En général, les femmes rapportent qu’elles s’engagent dans l’exploitation minière artisanale pour des raisons financières précaires et la pauvreté agricole. Nos résultats indiquent que l’accès aux ressources dépend des positions, des investissements initiaux et de la situation matrimoniale des femmes. Nous avons constaté que seules les propriétaires de puits et les propriétaires de hangards atteignent facilement une plus forte autonomie économique et sociale en améliorant de manière générale leur niveau de vie. En ce qui concerne les «vanneuses», même s’ils améliorent leur estime de soi, leurs revenus restent faibles pour assurer une autonomie économique durable.

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Abstract

This thesis aims at addressing questions on artisanal gold mining in Burkina Faso. It is mainly composed of three chapters. Before discussing these three chapters, in the introduction, we first describe the socio-economic context and legal context of the country’s mining sector; then we review the literature on the issue of gold panning including positive impacts such as job opportunities and negative impacts such as health and safety issues; other issues including the relationship between agriculture and artisanal mining, the sustainability of gold washing and the social responsibility of mining companies, local governance of sites; and finally, the different conceptual frameworks mobilized for the three themes, namely the institutional development analysis framework, the sustainable livelihoods framework and women’s empowerment.

In the first chapter, Local governance and labor organizations on artisanal gold mining sites in Burkina Faso, we use the institutional development analysis framework to discuss local governance and the division of labor in the artisanal gold mining camps in Bukina Faso; a country in West Africa which, in recent years, is increasingly exploiting its gold reserves. Field data were collected from three sites in the villages of Diosso, Siguinoguin and Zincko, according to reasoned sampling. One of the major discoveries from on-site research is that forms of governance vary along a continuum ranging from flexible (applied by joint powers: artisanal miners’ union, customary authorities and landowners) to rigid (applied by landowners). Another conclusion is that the type of relationship between indigenous communities and minors depends on the importance of the autochtony of artisanal miners. Indeed they are harmonious in Zincko where the miners are from the village while they are stretched to Siguinoguin which is populated by migrants. Finally, this article is based on the French school of proximity to enrich the definitions given to the attributes of the physical world and to the attributes of the community highlighted by the Ostrom theory, the geographical proximity not allowing to detail the forms relational proximity organized in the mining camps.

In the second chapter, How do artisanal gold mining and smallholder farming coexist in Burkina Faso?, we propose an understanding of the dynamic relationship between subsistence agri-culture and artisanal mining, drawing on evidence from artisanal mining communities in

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the villages of Diosso, Siguinoguin and Zincko located in Burkina Faso. Research shows that communities face many vulnerabilities such as lack of rain and natural disasters and increas-ing safety concerns-related to terrorist attacks-in the Northern part of the country. On the one hand, agriculture supports artisanal gold mining by providing farmers with the income they need to engage in the activity, such as paying for the transport from their respective villages to mining camps; on the other hand, artisanal gold mining significantly supports agriculture by supporting families during lean periods of the dry season and by contributing to the purchase of agricultural inputs. While this interaction appears to be beneficial, the youth interviews revealed a real problem for farm succession that has become accustomed to the new modern life that could be offered through gold panning. Then, farm succession develops coping strategies that move it away from farming activities and lead it towards unsustainable long-term livelihoods.

In the last chapter, Obtaining empowerment in a man’s world, we examine the economic and social empowerment of women through artisanal mining in Burkina Faso. We conducted individual interviews and focus groups on three mining camps across the country. These interviews provided information on the different roles played by women in mining camps, their access to the necessary resources and the collective power that they develop while working together in the mining camps. In general, women report that they engage in artisanal mining for precarious financial reasons and agricultural poverty. Our results indicate that access to resources depends on women’s positions, initial investments and marital status. It tends to be provided by husbands for married women who need less than 50 USD in initial investments (these women usually perform winnowing tasks). We found that only pit owners and stall owners (stands where stones are crushed, washed and processed) easily achieve greater economic and social independence by improving their economic level, self-esteem and autonomy. As far as "panners" are concerned, even if they improve their self-esteem, their incomes remain low to ensure sustainable economic autonomy.

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Contents

Résumé iii

Abstract v

Contents vii

List of Tables xi

List of Figures xii

Remerciements xiv Avant-propos xv Introduction 1 0.1 Contexte . . . 3 0.1.1 Contexte socio-économique . . . 3 0.1.2 Contexte légal . . . 5 0.1.2.1 L’exploitation industrielle . . . 5

0.1.2.2 L’extraction à petite échelle . . . 5

L’exploitation minière semi-mécanisée. . . 6

La petite mine . . . 6

L’extraction minière artisanale et traditionnelle . . . 6

Les carrières . . . 7

0.1.2.3 Évolution de l’industrie minière . . . 7

0.2 Revue de littérature générale . . . 7

0.2.1 Impact négatifs . . . 8

0.2.1.1 Impacts sur les ressources naturelles et l’environnement . 8 0.2.1.2 Les problèmes sociaux . . . 10

Problèmes sanitaires et de sécurité . . . 10

Les autres maux sociaux . . . 11

0.2.2 Les impacts positifs . . . 12

0.2.2.1 Possibilité d’emplois . . . 12

0.2.2.2 Accès aux produits et services pour les communautés locales 13 0.2.3 Les questions diverses . . . 13

0.2.3.1 La question du genre . . . 14

0.2.3.2 Relation entre les acteurs impliqués dans le secteur . . . . 15

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0.2.3.4 La durabilité de l’orpaillage et la responsabilité sociale des

entreprises minières . . . 19

0.2.3.5 L’or comme produit issu du commerce équitable . . . 21

0.2.3.6 Gouvernance des sites. . . 22

0.3 Objectif et questions de recherche . . . 24

0.3.1 Gouvernance locale des sites . . . 25

0.3.1.1 L’or comme bien communautaire . . . 26

Rivalité de l’or . . . 27

Excluabilité de l’or . . . 27

0.3.1.2 Gestion de l’or organisée par les communautés . . . 28

0.3.2 Gestion des ressources communes : le cadre de développement institutionnel . . . 29

0.3.2.1 Application du cadre "Analyse et Développement Institu-tionnel" . . . 30

0.3.2.2 Justification du cadre conceptuel . . . 31

0.3.3 Interaction dynamique entre agriculture et orpaillage artisanal . . . 31

0.3.3.1 Le cadre des moyens d’existence durable. . . 32

Définition . . . 33

Principes du cadre des moyens d’existence durables. . . 33

0.3.3.2 Forces et faiblesses du cadre . . . 35

0.3.3.3 Justification de l’utilisation du cadre des moyens d’existence durables. . . 36

0.3.4 Obtenir l’empowerment dans un monde masculin . . . 36

0.3.4.1 Concept de l’«empowerment» des femmes. . . 37

0.3.4.2 Justification du cadre de l’«empowerment» selon les fémin-istes . . . 38

0.4 Méthodologie de recherche . . . 39

0.4.1 Le recueil de données et les considérations éthiques . . . 39

0.4.2 Zones d’étude . . . 40

0.4.2.1 Commune rurale de Karangasso Vigué . . . 41

0.4.2.2 Commune de Boromo . . . 41 0.4.2.3 Commune de Mané . . . 42 0.4.2.4 Échantillonnage . . . 42 0.5 Figures . . . 45 0.6 Tables . . . 49 0.7 Bibliography . . . 53

1 Local governance and labor organizations on artisanal gold mining sites in Burkina Faso 63 1.1 Résumé . . . 63 1.2 Abstract . . . 64 1.3 Introduction . . . 64 1.4 Literature review . . . 66 1.4.1 Artisanal mining . . . 66

1.4.2 Mining in Burkina Faso . . . 68

1.5 Methodology of the study . . . 70

1.5.1 Attributes of the physical world . . . 70

(9)

1.5.3 Analytical framework . . . 70

1.5.4 Data collection . . . 71

1.6 Results . . . 72

1.6.1 Attributes of the communities . . . 72

1.6.2 Action arena. . . 72

1.6.2.1 Working rules, positions and participants . . . 72

1.6.2.2 Outcomes . . . 77

1.6.3 Performance . . . 78

1.6.4 Sustainable development indicators . . . 79

1.6.4.1 Social indicators . . . 79

1.6.4.2 Economic indicators . . . 80

1.6.4.3 Environmental indicators . . . 81

1.7 Discussion and concluding remarks . . . 82

1.8 Figures . . . 86

1.9 Tables . . . 88

1.10 Bibliography . . . 90

2 How do artisanal gold mining and smallholder farming coexist in Burkina Faso? 97 2.1 Résumé . . . 97 2.2 Abstract . . . 97 2.3 Introduction . . . 98 2.4 Literature review . . . 99 2.4.1 Artisanal mining . . . 99

2.4.2 Artisanal mining and farming in Burkina Faso . . . 101

2.5 Research questions and conceptual framework . . . 101

2.5.1 Objectives . . . 101

2.5.2 Sustainable Livelihood Approach (SLA) . . . 102

2.5.3 Description of study locations . . . 103

2.5.4 Data collection . . . 103

2.5.5 Sample . . . 104

2.6 Results . . . 104

2.6.1 Context. . . 104

2.6.2 Resources . . . 106

2.6.3 Institutions and organizations . . . 107

2.6.3.1 Migration . . . 108

2.6.3.2 Agricultural intensification . . . 109

2.6.3.3 Livelihood diversification . . . 110

2.6.4 Sustainable livelihood outcomes . . . 111

2.6.4.1 Livelihood: poverty reduction and well being . . . 111

2.6.4.2 Sustainability . . . 111

2.7 Discussion and concluding remarks . . . 114

2.8 Figures . . . 115

2.9 Tables . . . 116

2.10 Bibliography . . . 119

3 Achieving empowerment in a man’s world in Burkina Faso 124 3.1 Résumé . . . 124

(10)

3.2 Abstract . . . 125

3.3 Introduction . . . 125

3.4 Literature review: women in artisanal mining. . . 126

3.5 Methodology of the study . . . 128

3.5.1 Study areas . . . 128 3.5.2 Objectives . . . 128 3.5.3 Conceptual framework . . . 128 3.5.4 Data collection . . . 130 3.5.5 Sample . . . 130 3.6 Results . . . 131

3.6.1 Power to artisanal mining . . . 131

3.6.2 Power with others . . . 133

3.6.3 Power within . . . 135

3.6.4 Power over . . . 136

3.7 Discussion and conclusion . . . 137

3.8 Figures . . . 140

3.9 Tables . . . 141

3.10 Bibliography . . . 142

Conclusion 146 3.11 Bibliography . . . 148

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List of Tables

0.1 Classification des types de biens (Ostrom et al., 1994) . . . 49

0.2 Adaptation du cadre conceptuel de Ostrom (1990); Ostrom et al. (1994) . . . . 50

0.3 Caractéristiques de la population. Source: Enquete de terrain (2017). . . 51

0.4 Caractéristiques de la population. Source: Enquete de terrain (2017). . . 52

0.5 Caractéristiques de la population. Source: Enquete de terrain (2017). . . 53

1.1 Data on the study zones . . . 88

1.2 IAD framework adapted from Ostrom (1990) . . . 88

1.3 Sociodemographic characteristics of the sample. Source: Fieldwork (2017) . . 89

1.4 Percentage breakdown of workers according to job category. Source: Fieldwork (2017) . . . 90

1.5 Determinants of performance according to the respondents. Source: Fieldwork (2017) . . . 90

1.6 The economic effects of artisanal mining according to respondents. Source: Fieldwork (2017) . . . 90

2.1 Data on the study zones . . . 116

2.2 Demographic characteristics of the sample. Source: Fieldwork (2017) . . . 117

2.3 Factors driving rural diversification. Source: Fieldwork (2017) . . . 117

2.4 Distress-push and demand-pull factors. Source: Fieldwork (2017) . . . 118

2.5 Agricultural resources. Source: Fieldwork (2017) . . . 118

2.6 Demographic characteristics of the sample. Source: Fieldwork (2017) . . . 118

2.7 Livelihood strategies. Source: Fieldwork (2017) . . . 119

2.8 Economic situation after mining. Source: Fieldwork (2017) . . . 119

3.1 Data on the study zones . . . 141

3.2 Sociodemographic characteristics of the sample. Source: Fieldwork (2017) . . . 141

3.3 Percentage breakdown of workers according to job category. Source: Fieldwork (2017) . . . 141

3.4 Motives for artisanal mining. Source: Fieldwork (2017) . . . 142

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List of Figures

0.1 Production aurifère au Burkina Faso de 2008 à 2014 Source: Direction Générale

des Mines et de la Géologie du Burkina Faso . . . 45

0.2 Cadre des moyens d’existence durable: Source: Scoones (1998) . . . 46

0.3 Hexagone des ressources (Solesbury, 2003; Morse and McNamara, 2013) . . 46

0.4 Location of the study areas . . . 47

0.5 La commune de Karangasso Vigué . . . 47

0.6 La commune de Boromo . . . 48

0.7 Les communes de Kaya, de Boussouma et de Mané. . . 48

1.1 Location of the study areas . . . 86

1.2 Representation of the different modes of governance . . . 87

2.1 Location of the study areas . . . 115

2.2 Continuum . . . 116

3.1 Location of the study areas . . . 140

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Remerciements

Je tiens tout d’abord à remercier mon époux pour sa présence et son appui inconditionnels durant ces années d’études. Merci à mes parents pour leurs appuis et leurs conseils très précieux spécifiquement durant la phase de collecte de données sur le terrain au Burkina Faso et mes frères pour leurs soutiens et leurs encouragements.

Je remercie infiniment mon directeur de thèse Patrick Mundler pour l’encadrement, les con-seils et l’appui financier qu’il m’a accordé pendant ces années de doctorat qui ont largement contribué à ma formation de chercheure. En plus, sa simplicité, son accessibilité et son coté humain ont été très bénéfique pour ma personne et pour le bon déroulement de ma thèse de doctorat.

Je voudrais aussi remercier le professeur Ibrahima Bocoum pour la relecture du document de thèse, le professeur Guy Deballeuil pour ses critiques et ses conseils durant la thèse et la professeure Bonnie Campbell pour la relecture du document et ses remarques pertinentes pendant la période d’évaluation du présent document. Enfin, je tiens à remercier toute autre personne ayant apporté son aide d’une quelconque manière au bon déroulement de cette thèse.

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Avant-propos

Cette thèse comprend trois chapitres.

Je suis auteur principale du chapitre 1. Je l’ai écrit en collaboration avec le professeur Patrick Mundler. J’ai réalisé les enquêtes de terrain au Burkina Faso, la compilation et l’analyse des données. Le professeur Mundler m’a apporté plusieurs éléments nouveaux sur les possibles liens avec d’autres théories. Il a été soumis pour publication à la revue "Journal of Sustainability" le 05 Novembre 2018.

Je suis seule auteure des chapitres (articles) 2 et 3. J’ai néanmoins bénéficié pour ces deux articles de la relecture et des conseils du professeur Mundler. L’article 2 a été soumis le 07 Septembre 2018 à La revue canadienne des études africaines et l’article 3 à La revue canadienne des études internationales le 05 Septembre 2018.

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Introduction

Les travaux des anthropologues sur l’extraction aurifère, nous renseignent que, l’activité serait apparue au Moyen Age en Afrique de l’Ouest notamment au Burkina, en Côte d’Ivoire où le commerce de l’or était pratiqué dans la zone transsaharienne ainsi que dans celle du golfe de Guinée (Kiethega,1983;Bantenga,1995;Amutabi and Lutta-Mukhebi,2001). Cette technique qui consiste à extraire les métaux précieux en utilisant des outils rudimentaires tels que les pioches et les dabas fait appel à une large main d’œuvre (Labonne,1996;Hinton et al.,2003) et est souvent pratiquée dans des conditions dangereuses et illégales. À partir des années 1980 cette activité suscite un intérêt progressif du fait de la sècheresse abondante qui sévit dans le Sahel, créant une grande famine et un manque de revenus pour les populations concernées (Kiethega,1983;Werthmann,2003a). Dès lors, elle est officiellement reconnue par les agences de développment internationales comme l’ONU comme activité à part entière pouvant générer des revenus pour les ménages dans les zones rurales des pays les moins développés permettant de ce fait de réduire la pauvreté et d’améliorer les conditions de vie de ces populations (Noetsaller,1987).

Dans cette perspective, un rapport de l’organisation internationale pour le travail (OIT) montrait que le nombre de personnes travaillant dans les mines avait presque doublé en six ans allant de 6 millions en 1992 à 13 millions en 1999 parmi lesquelles on distinguait 4 à 5 millions de femmes et d’enfants (Jennings,1999). Par ailleurs, ce même rapport indiquait qu’entre 80 et 100 millions de personnes dépendaient de la pratique de l’orpaillage tradi-tionnel à travers le monde plus particulièrement dans les pays en voie de développement. En Afrique, on compterait entre 6 et 8 millions de personnes engagées dans l’extraction artisanale avec 20 millions de personnes vivant directement de l’activité à savoir les or-pailleurs et les membres de leur famille ainsi que les personnes et leur dépendantes vivant des métiers périphériques comme marchand de biens et services sur les sites miniers (Jennings,

1999). Au cours des dernières décennies, les pays en voie de développement ont connu d’importants investissements dans le secteur minier principalement favorisés par les réformes de la Banque Mondiale dans les années 1980. Ces investissements ont été aussi motivés par un assouplissement majeur des codes miniers nationaux de ces pays afin d’attirer davantage d’investissements étrangers. Cet assouplissement des codes miniers a conduit à une présence accentuée d’entreprises minières telles que Iamgold, Semafo, et Truemining dans les pays

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en voie de développement à l’instar du Burkina Faso, du Ghana ou de la Tanzanie (Hilson and Potter,2003,2005;Kumah,2006;Mutagwaba,2006;Banchirigah,2006). Cette présence a occasionné quant à elle une croissance accélérée de la population d’orpailleurs. La pre-mière hypothèse serait que les investisseurs étrangers s’étant emparé d’une partie de la main d’œuvre agricole en s’accaparant des terres agricoles à des fin d’exploration et d’exploitation minière, les populations ont dû trouver d’autres moyens de subsistance dont l’extraction arti-sanale (Banchirigah,2006). La deuxième hypothèse serait que les programmes d’ajustements structurels ont occasionné la diminution voire la suppression des aides octroyées au secteur agricole dans les pays en développement rendant les agriculteurs plus que jamais vulnérables (Hilson and Okoh,2011;Hilson and Potter,2005)1.

Ainsi la contribution de l’exploitation artisanale et minière à petite échelle a explosé pour divers produits dans le continent. Par exemple elle contribue à 80% de la production mondiale de saphir et 10 à 20% de la production aurifère (United Nations Environment Programme, 2013)2. Dans certains pays comme la Sierra Leone et la République Démocratique du Congo, la production artisanale contribue à 75% de la production nationale de diamant et d’or (World Bank,2009).

Comme nous l’avons vu dans les paragraphes précédents, plusieurs constats émergent ces dernières années dans les pays en développement suite à l’intérêt grandissant pour l’extraction industrielle et artisanale. Ces constats portent sur des impacts positifs comme le développement de l’entreprenariat rural et l’augmentation des revenus ruraux au niveau des individus comme des collectivités locales. Mais ils portent aussi, comme nous le détaillerons plus loin, sur des impacts négatifs, principalement sociaux et environnementaux. Tout cela a pour conséquence que le monde rural des pays en voie de développement est profondément modifié par le développement de l’orpaillage. L’agriculture se trouve concurrencée par l’orpaillage traditionnel, tant dans l’usage des sols, que dans l’emploi de la main d’œuvre et des migrations entre régions transformant les dynamiques sociales. Cette situation interroge donc fondamentalement la stabilité du monde rural et la façon dont les transformations qui l’affectent sont gérées tant localement que nationalement.

En conséquence, trois thèmes sont plus particulièrement étudiés dans notre thèse. Le premier concerne la gouvernance locale des sites miniers dont la compréhension reste primordiale afin de formaliser le secteur. Nous verrons dans les sections suivantes que cette gouvernance est souvent vue comme inexistante, l’orpaillage artisanal étant perçu comme une activité se déroulant en dehors de tout contrôle et générant de multiples effets négatifs. Le second concerne les interactions entre l’extraction artisanale et l’agriculture, dans la mesure où comme nous le verrons plus loin, les relations entre les deux secteurs restent ambiguës : d’un

1Avant les reformes agricoles des années 1980, les agriculteurs africains recevaient des subsides pour l’achat

de certains intrants (Hilson and Okoh,2011).

2Banque Mondiale, Extraction artisanale et à petite échelle, http://www.worldbank.org/en/topic/

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côté il y a risque de substitution puisque l’agriculture n’offre plus les revenus nécessaires pour la survie des ménages ruraux; de l’autre il y a un potentiel de complémentarité, l’orpaillage permettant de fournir des revenus complémentaires aux ménages agricoles, revenus pouvant être réinvestis dans l’amélioration de la productivité des exploitations. Le troisième évalue les opportunités que l’extraction artisanale offre comme moyen d’atteindre l’empowerment social et économique des femmes. En effet, nous allons montrer plus loin que l’orpaillage artisanal a octroyé à de nombreuses femmes possédant des attributs sociaux similaires un tremplin pour réaliser leur autonomie financière et sociale dans un monde a priori masculin. Dans la section suivante, nous posons le contexte social et économique du Burkina Faso. Ensuite, nous présentons l’état des connaissances sur la thématique de l’extraction artisanale. La quatrième section expose l’objectif général de la thèse. La dernière section énonce la méthodologie utilisée dans cette recherche.

0.1

Contexte

Le Burkina Faso est un pays riche en minéraux particulièrement l’or qui est le minéral le plus important dans le pays. L‘or est devenu le premier produit en termes de valeur d’exportation, supplantant ainsi le coton en 2009 qui était le produit d’exportation le plus important en termes de valeur depuis 19653. L’histoire retrace l’exploitation artisanale des mines d’or à l’époque précoloniale (Kiethega, 1983). Néanmoins, l’exploitation artisanale a commencé à prendre de l’ampleur dans les années 1980 suite à la sècheresse qui a touché les pays d’Afrique occidentale dans le Sahel et la région de la savane (Werthmann,2003a). À partir de là, la population burkinabè a trouvé, dans l’orpaillage artisanal, une alternative à d’autres moyens de subsistance comme l’agriculture, le petit commerce ou la migration. En 1998, une importante quantité d’or a été découverte sur un territoire anciennement occupé par un village fondé en 1978 dans le cadre d’un programme de réinstallation agricole également connu sous le nom "Aménagement des Vallées des Voltas” (Gueye,2001;Werthmann,2003a). Suite à cette découverte, des villes et nouveaux commerces ont émergé autour des zones d’orpaillage. À l’heure actuelle, la même tendance continue à se produire parce que de plus en plus de réserves d’or sont découvertes dans différentes parties du pays.

0.1.1 Contexte socio-économique

Situé dans la partie occidentale de l’Afrique, le Burkina Faso est classé comme l’un des pays les plus pauvres d’après le rapport du PNUD 20144. En fait, avec un indice de

développe-3Food and Agricultural Organisation of the United Nations, Agricultural Trade,http://faostat.fao.org/

site/342/default.aspx, consulté le 15 Février 2016.

4Programme des Nations Unies pour le Développement, Index du développement humain 2015, http:

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ment humain de 0,402, il occupe le 183ème rang sur 188. Une proportion importante de la population (44,5%) vit en dessous du seuil de pauvreté de 1,25 dollar5. En ce qui concerne le niveau de l’éducation, il est aussi l’un des plus bas du monde avec un taux d’alphabétisation estimé à 28,7%6. A l’instar des autres économies africaines, le secteur majeur du pays est l’agriculture qui a contribué à plus de 30% du PIB du pays en 20127. Les produits principaux sont respectivement le sorgho, le mil et le maïs. Le poids démographique de l’agriculture est encore plus important : la population agricole du pays représente plus de 80% de la population active totale8.

Toutefois, dans les dernières années, la contribution historique de l’agriculture à l’économie nationale a changé du fait de la réforme des années 1980 de la Banque mondiale qui a oc-casionné une ouverture des politiques nationales d’investissement des pays africain afin d’attirer les investisseurs au Burkina Faso, ainsi que dans les autres pays africains ( Banchiri-gah,2006). Même si le pays compte une population agricole importante, la faible productivité et les conditions climatiques très difficiles ne permettent pas une autosuffisance alimentaire permanente. En fait, le pays a enregistré un taux de malnutrition estimé à environ 30% de 2000 à 20129. On peut donc constater que globalement, le pays est toujours confronté à de nombreux défis de développement tels que la sécurité alimentaire, la réduction de la pauvreté et la promotion de l’éducation.

En ce qui concerne la production d’or, le Burkina Faso a connu une énorme progression. La production annuelle est passée d’approximativement quatre tonnes en 2007 à 31 tonnes en 2014, ce qui représente une augmentation de 675% de la production d’or10. Même si cette augmentation est spectaculaire, le revenu fiscal sous-jacent recueilli par le gouvernement est resté très faible pour plusieurs raisons. Tout d’abord, l’ancien gouvernement dirigé par le président, Blaise Compaoré avait adopté un code minier en 2003, qui a accordé beaucoup d’avantages aux grandes sociétés minières11. Ces avantages comprennent une franchise de

droit sur tout matériel importé dans le pays. En outre, ces entreprises ont été exemptées de taxes sur la valeur ajoutée lors de la phase de recherche. Enfin, au cours de la phase d’exploitation, toute entreprise à grande échelle qui acquiert un permis d’exploitation est

5Programme des Nations Unies pour le Développement, Index du développement humain 2015, http:

//hdr.undp.org/en/composite/HDI, consulté le 30 Mars 2016.

6Programme des Nations Unies pour le Développement, Rapport développement humain 2015,http://hdr.

undp.org/en/countries/profiles/BF.

7Banque Mondiale, Agriculture, Valeur ajoutée, http://donnees.banquemondiale.org/indicateur/NV.

AGR.TOTL.ZS?locations=BF, consulté le 30 Mars 2016.

8https://www.usaid.gov/sites/default/files/documents/1860/Fact_Sheet-AgFS_EN.pdf, consulté le

11 Septembre 2018.

9Programme des Nations Unies pour le Développement, Rapport développement humain 2015,http://hdr.

undp.org/en/countries/profiles/BF, consulté le 30 Mars 2016.

10Chambre des Mines du Burkina Faso, Évolution de la production minière,http://chambredesmines.bf/

?Evolution-de-la-production-miniere, consulté le 30 Mars 2016.

11Assemblée nationale du Burkina Faso. Code Minier 2003,http://www.droit-afrique.com/upload/doc/

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soumise à une réduction de 50% de l’impôt sur les sociétés. En 2017, le pays a produit 45.8 tonnes d’or (industriel) générant une recette estimée à 226 milliards de FCFA correspondant approximativement à 525 millions de dollars Canadiens (selon le taux en vigueur du 21 Mai 2018)12sur une recette totale de 1444.791 milliards de FCFA (3.3 milliards de dollars Canadiens) pour la même année13.

0.1.2 Contexte légal

Toute mine d’or située dans le sous-sol ou le sol du pays est la propriété de l’État selon les différents codes miniers du Burkina Faso (Werthmann,2003a; Nyame and Blocher,2010). L’industrie minière est divisée en deux groupes. Le premier groupe est l’exploitation minière industrielle qui concerne la majorité de la production de toute substance minérale du pays. Le deuxième groupe est l’exploitation à petite échelle comprenant l’exploitation minière semi-mécanisée, la petite mine et l’exploitation minière artisanale. L’exploitation à petite échelle emploie une main-d’œuvre rurale plus importante mais ne contribue qu’à une proportion marginale de la production totale du pays et des carrières.

0.1.2.1 L’exploitation industrielle

Précédemment non définie dans le code minier de 2003, l’exploitation industrielle est définie dans le nouveau code de 2015 comme « l’ensemble des opérations qui consistent à extraire et concentrer des substances minérales et à en récupérer les produits marchands pour en disposer en utilisant des méthodes et procédés modernes et fortement mécanisés dans la chaîne des opérations »14.

0.1.2.2 L’extraction à petite échelle

Selon le Code minier de 2003, l’exploitation minière à petite échelle comprend quatre branches différentes:15

12Ignace Ismael Nabolé, Burkina: L’or a rapporté 226 milliards de francs CFA en 2017, Burkina 24, 17 Avril

2018, https://burkina24.com/2018/04/17/burkina-lor-a-rapporte-226-milliards-de-f-cfa-en-2017/, consulté le 21 Mai 2018.

13L’économiste du Faso, Recettes fiscales en 2018: La contribution des impôts et

des douanes en hausse, 5 Février 2018, https://www.leconomistedufaso.bf/2018/02/05/ recettes-fiscales-2018-contribution-impots-douanes-hausse/, consulté le 18 Juillet 2018.

14Conseil National de la Transition du Burkina Faso, Code minier 2015,http://www.eisourcebook.org/cms/

February%202016/Burkina%20Faso%20Mining%20Code%20(in%20French%20).pdf, consulté le 17 Août 2016. Il s’agit du code miner 2003 revisité par la transition politique de 2015 suite aux pressions de la population nationale ainsi que des bailleurs de fonds.

15Assemblée Nationale du Burkina Faso, Code Minier 2003,

http://www.droit-afrique.com/upload/doc/burkina/Burkina-Code-minier-2009.pdf, consulté le 30 Mars 2016. Ce code minier a été révisé sous la Transition politique en Mai 2015 mais ne modifie pas ces définitions. Cependant, le

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1. l’exploitation minière semi-mécanisée, 2. la petite mine,

3. l’exploitation minière artisanale et traditionnelle 4. les carrières

L’exploitation minière semi-mécanisée

L’exploitation semi mécanisée est définie comme toute opération qui consiste à extraire et à concentrer les substances minérales afin de récupérer des biens échangeables. Ces substances minérales seraient plus tard traitées dans la chaîne d’approvisionnement grâce à des outils mécaniques.

La petite mine

La petite mine est définie comme une exploitation minière à petite échelle permanente qui fonctionne sur un gisement de minerai en utilisant des outils et des méthodes industrielles ou semi-industrielles. En outre, sa production devrait être inférieure à une certaine quantité d’or par an en fonction de la politique minière en cours.

L’extraction minière artisanale et traditionnelle

L’exploitation minière artisanale est définie comme toute activité qui consiste à extraire et à traiter les minéraux pour récupérer des biens échangeables en utilisant des outils et des méthodes traditionnelles et artisanales. Ces méthodes n’utilisent ni énergie mécanique, ni appareil sophistiqué. L’autorisation légale d’exercer l’exploitation minière artisanale doit être obtenue auprès de l’ "Administration des Mines" après une discussion avec les gouvernements locaux respectifs et les représentants des communautés locales. L’autorisation légale n’empêche pas qu’il puisse y avoir des activités de prospection sur le même périmètre effectuées par les compagnies minières. Ainsi, l’autorité judiciaire peut fournir un permis d’exploitation pour la même surface rendant le renouvellement de l’autorisation impossible. Dans un tel cas, le titulaire de l’autorisation d’exploitation artisanale sera indemnisé par le nouvel opérateur selon les dispositions légales actuelles.

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Les carrières

Le code minier de 2015 définit une carrière comme le lieu « d’où sont extraits des substances minérales telles que les minéraux industriels, les roches industrielles, les pierres ornementales et les matériaux de construction»16.

0.1.2.3 Évolution de l’industrie minière

Avant 2006, la production d’or était insignifiante au Burkina Faso parce qu’elle était unique-ment basée sur des techniques artisanales. Au fil du temps, cette production n’a cessé d’augmenter avec de nouvelles découvertes d’or et l’acquisition de nouveaux permis d’ex-ploitation par de grandes compagnies minières.

Graphique0.1ici

Le graphique0.1montre comment cette production a évolué de 2007 à 2012. Elle augmente significativement de 2008 à 2011 avant de diminuer légèrement. Même si la production totale représente une augmentation étonnante au fil du temps, cette augmentation provient uniquement de l’extraction industrielle. Comme le montre le graphique0.1, la capacité de production de l’exploitation minière artisanale reste faible et constante au fil du temps en raison certes des instruments artisanaux utilisés pour l’extraction, mais également du fait qu’une partie importante de l’or récolté de façon artisanale échappe à la comptabilisation par les autorités publiques. En effet, un reportage conduit parGueniat and White (2015) montre qu’une part importante de cette production passe en contrebande à travers le pays voisin, le Togo qui est un pays non-producteur d’or. Cette contrebande est organisée par des comptoirs comme SOMIKA qui appartient à certains entrepreneurs de renom qui achètent l’or artisanalement extrait auprès des orpailleurs à des prix défiant toute concurrence (cet or est cédé par les orpailleurs à la suite de menaces proférées à leur égard). Cet or est revendu au groupe Ammar qui le transite à travers le Togo dans le but d’éviter de payer les taxes à l’exportation au Burkina Faso qui sont en réalité très minimales au Togo. Une fois au Togo cet or est exporté vers la Suisse sous la dénomination d’or Togolais.

0.2

Revue de littérature générale

Étant donné l’importance de la main d’œuvre qui dépend de l’orpaillage artisanal, de nom-breux auteurs se sont lancés dans la documentation de plusieurs thématiques liées à cette question. Ces thématiques peuvent être regroupées en deux catégories. D’une part, les

16Conseil National de la Transition du Burkina Faso, Code minier 2015,http://www.eisourcebook.org/cms/

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travaux qui décrivent les impacts négatifs liés à ce secteur. Ceux-ci englobent les effets envi-ronnementaux, les effets sociaux, les conflits existant entre les orpailleurs et les compagnies minières, les conflits entre les communautés locales et les compagnies minières et les commu-nautés locales et les orpailleurs. D’autre part, les travaux qui expliquent les impacts positifs tels que la création d’emplois sur les sites miniers et l’amélioration des conditions de vie des ménages. Au-delà de ces impacts, des questions diverses telles que la question du genre dans l’extraction artisanale, la durabilité, les relations entre les différents acteurs (orpailleurs, compagnies minières, communautés locales et agriculteurs), la responsabilité sociale des compagnies minières et le lien entre agriculture et extraction artisanale sont abordées. Dans la section qui suit, nous détaillons brièvement ces thématiques. Dans la première section, nous recensons les travaux liés aux impacts négatifs. Dans la deuxième section nous décrivons les travaux qui discutent des impacts positifs. Dans une dernière section, nous examinons les autres effets.

0.2.1 Impact négatifs

Parmi les impacts négatifs, on distingue les impacts sur les ressources naturelles, les problèmes sociaux et la pauvreté.

0.2.1.1 Impacts sur les ressources naturelles et l’environnement

Un des thèmes les plus discutés dans la littérature sur l’extraction minière reste son impact sur l’environnement à travers les problèmes causés par cette activité à savoir : la pollution de l’air et des cours d’eau, la contribution au réchauffement climatique et les nuisances sonores (Azapagic,2004;Banchirigah,2006;Kitula,2006;Garvin et al.,2009;Aragon and Rud,2012;

Arnaldi di Balme and Lanzano,2014). La pollution des cours d’eau vient principalement de l’utilisation massive du mercure et du cyanure de par leur facilité d’utilisation, leur efficacité dans la capture de l’or, leur accessibilité (facilité de transport) et leur faible prix (Lacerda,1997;

Hilson,2002c;Maponga and Ngorima,2003;Kitula,2006;Telmer and Veiga,2009). De manière précise, le mercure est relâché dans l’environnement via l’air et l’eau pendant les différents processus de traitement de l’or (Hilson,2002b;Hinton et al.,2003;Telmer and Veiga,2009). Il est relâché dans l’atmosphère pendant la phase de fusion lorsque l’alliage est réchauffé pour extraire l’or. Pendant cette phase, une partie du mercure se volatilise directement dans les eaux et dans les airs. Grace à des micro-organismes, ce mercure est transformé facilement et rapidement en un alliage de methylmercure qui est hautement toxique (Lacerda and Marins,1997;Hilson,2002c). Ce methylmercure relâché dans les eaux contamine la faune et la flore aquatique. Plusieurs études dans différentes parties du globe démontrent ce fait. Par exemple, des études menées parIkingura et al.(1997) sur 71 échantillons prélevés dans l’eau, les sédiments et les résidus miniers des rivières près des camps miniers du lac Victoria

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en Tanzanie démontrent que dans 25% des cas, la concentration en mercure est supérieure au maximum recommandé par l’Organisation Mondiale de la Santé. Dans le même pays, Harada et al. (1999) ont analysé des poissons à l’instar du tilapia et de la sardine dans le lac Victoria en Tanzanie près des sites miniers et ont trouvé des quantités assez importantes de mercure. Au Zimbabwe,Maponga and Ngorima(2003) estiment que la moitié du mercure utilisé dans l’extraction artisanale de l’or est relâché dans la nature; ce qui est une menace directe pour l’environnement. Un autre exemple dans une autre région du monde est donné par Lin et al.(1997) lorsqu’ils étudient la concentration du taux de mercure dans l’air dans certaines zone d’extraction artisanale de l’or dans la région du Sud de la Chine dans la province de Jiangxhi . Ils trouvent en effet que la concentration de mercure dans l’air est de 80 à 300 fois plus importante que la limite permise. En plus du mercure, le cyanure est également utilisé sur certains sites miniers. Ce dernier est également transporté par les eaux de pluie qui les relâchent dans les cours d’eau. Ces deux composants chimiques vont contaminer la faune et la flore aquatique (Maponga and Ngorima,2003;Telmer and Veiga,2009).

La contribution au réchauffement climatique provient de la déforestation, la dégradation des sols provenant de l’abandon des puits de mine abandonnés qui détruisent les terres notamment agricoles, les prairies, les ressources de la faune et de la flore (Kitula,2006;Aragon and Rud,2012;Arnaldi di Balme and Lanzano,2014). La déforestation est effectuée pour deux principales raisons. La première raison est pour satisfaire les besoins de construction d’habitats et autres infrastructures dus à la pression démographique exercée par la densité importante de la population minière (Hilson,2002a,c;Maponga and Ngorima,2003; Mwaku-manya et al.,2016). La deuxième raison est pour les besoins directs de l’orpaillage à savoir le creusage des trous pour extraire ou traiter les minerais d’or (Amegbey et al.,1997;Hilson,

2002a,c;Maponga and Ngorima, 2003; Mwakumanya et al., 2016). L’extraction terminée ces trous sont abandonnés. L’abandon de ces trous entraîne une série de conséquences. La première conséquence est l’accentuation de l’érosion des sols pendant les fortes pluies. Une autre conséquence est la prolifération de la malaria due à l’accumulation non contrôlée des eaux de pluies. Une autre conséquence est la destruction de la flore et de la faune nécessaire à la survie des êtres vivants comme les oiseaux entre autres. Par exemple, il a été estimé que la déforestation pour les besoins de l’extraction minière menace trois principales réserves forestières au Ghana à savoir Bonsa, Ekumfi et Neung dans la région de Tarkwa (Akabzaa and Darimani,2001). Cette déforestation induit également non seulement une perte immense des terres agricoles vu que les trous laissent souvent des terres impossibles à récupérer par l’agriculture, mais également une grande perte économique du fait de la diminution de la période de jachère (Akabzaa and Darimani, 2001;Nyame and Blocher,2010). En effet, le système traditionnel de jachère qui permet de renouveler les nutriments nécessaires pour les cultures prochaines ne peut plus être maintenu à cause de l’utilisation des terres agricoles pour les besoins de l’orpaillage. Ce qui a pour effet direct une diminution de la surface agricole ainsi que de la fertilité des sols et donc un impact considérable sur la production

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agricole.

Les nuisances sonores proviennent des vibrations et des bruits occasionnés par les dynamites utilisées dans les trous ainsi que les autres machines servant à pomper l’eau hors des puits de mine et à concasser les minerais (Akabzaa and Darimani,2001). Ces bruits affectent les personnes, les animaux ainsi que les biens matériels. Pour le premier groupe, le système audi-tif peut être endommagé. Pour les animaux vivant aux alentours, de tels bruits engendrent de la peur. Ce qui peut perturber leur cycle de reproduction, leurs habitats naturels et ainsi diminuer drastiquement leur population (Akabzaa and Darimani,2001).

0.2.1.2 Les problèmes sociaux

Dans cette section, nous discutons de deux types de problèmes sociaux générés dans les communautés minières : les problèmes sanitaire liés à l’exposition aux produits chimiques ou aux conditions de travail et les problèmes de sécurité tels que les accidents de travail; ainsi que les maux sociaux de façon générale tels que la prostitution, le travail des enfants, la déscolarisation.

Problèmes sanitaires et de sécurité

Divers problèmes sanitaires et de sécurité liés à l’extraction artisanale ont été observés dans les recherches. Les problèmes de santé proviennent de deux sources : l’exposition au mercure et au cyanure et ceux directement liés aux conditions de pratique de l’activité. L’empoisonnement au mercure peut se faire au travers de la peau lorsque le processus d’amalgame est réalisé sans port de gant ou de vêtements de travail non lavés, au travers de la respiration pendant la combustion du métal et au travers de l’alimentation contaminée préalablement via l’eau comme nous l’avons vu dans la section précédente avec les tilapias et les sardines du lac Victoria qui présentent des taux élevés de mercure (Amegbey et al.,

1997;Harada et al.,1999). Cet empoisonnement ainsi que celui au cyanure fait apparaître au sein des communautés minières des cas de syndromes psycho-pathologiques tels que la dépression, la gingivite, les tremblements musculaires, le dysfonctionnement rénal et urinal, les vomissements et des morts potentielles (Amegbey et al.,1997;Hilson,2002c;Kumah,2006;

Garvin et al.,2009;Telmer and Veiga,2009;Mwakumanya et al.,2016).

Pour les problèmes de santé liés directement aux conditions de pratique de l’activité, l’exposition continuelle à la poussière provenant du sol pendant le travail favorise l’apparition et le développement de maladies telles que la toux, la pneumonie, les maux d’yeux (Amegbey et al.,1997;Azapagic,2004;Banchirigah,2006). La pratique de l’orpaillage fait apparaître des trous qui deviennent les nids des moustiques responsables du paludisme, une des maladies les plus dangereuses en Afrique. Par exemple, une étude sur des mineurs dans la région de

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Tarkwa au Ghana en 1994 a montré que 75% des mineurs portent le parasite du paludisme. Quant aux mineurs qui pratiquent l’extraction alluviale, la contamination aux pathogènes tels les vers de Guinée apparaît à cause de leur présence continuelle dans les rivières (Amegbey et al.,1997).

Les problèmes de sécurité proviennent principalement des conditions difficiles de travail au sein des puits de mine. Par exemple pour les mineurs qui introduisent les dynamites dans les trous, une tentative d’accélérer le processus peut entraîner des accidents parfois mortels (Amegbey et al.,1997). Un autre exemple concerne l’effondrement des galeries lors du creusage des tunnels (Amegbey et al.,1997). Les mineurs sont également exposés pendant la montée ou de la descente dans les puits de mine. Ceux-ci comptent un taux de mortalité élevé suite aux accidents de travail (Azapagic,2004;Banchirigah,2006; Kitula,2006). Au Ghana, une recherche a mis en évidence plusieurs situations potentiellement mortelles telles que citées ci-dessus sur les sites miniers localisés à Kumasi dans le Sud du pays (Tschakert and Singha,2007). Finalement, des situations dangereuses se produisent également lors du transport de cailloux hors du trou à l’aide de poulies faites de corde de nylon qui peuvent facilement céder.

Les autres maux sociaux

En dehors des problèmes de santé et de sécurité, il existe des maux sociaux engendrés par le développement du secteur de l’extraction artisanale. On distingue une propagation des maladies sexuellement transmissibles telles que la syphilis et le sida. Par exemple une étude sur les camps miniers de Tarkwa au Ghana a montré une augmentation du pourcentage de personnes atteintes du sida sur une période allant de 1992 à 1996 (Akabzaa and Darimani,

2001). En outre on reporte de nombreux cas de la prostitution près des camps miniers où des filles gérées par des proxénètes quittent la métropole ou des pays voisins pour s’installer dans les zones d’orpaillage (Azapagic,2004;Banchirigah,2006;Kitula,2006;Sangaré,2016). Certains auteurs notent également la présence de stupéfiants sur les sites (Sangaré,2016), ces derniers étant acquis par les orpailleurs pour les rendre plus efficaces et s’adapter facilement aux conditions de travail difficiles. Enfin divers autres problèmes sont soulevés comme la transgression des coutumes lors de l’acquisition des terres qui sont souvent classées comme sacrées; la déscolarisation du fait que les enfants vont dans les mines plutôt qu’à l’école, la criminalité comme le vol; et la migration (Kitula, 2006; Banchirigah, 2006; Arnaldi di Balme and Lanzano,2014). Cette dernière peut devenir un problème social dans les cas de figure ou les populations autochtones et les migrants sont confrontés à des disputes liées à l’appropriation et à l’utilisation des ressources telles que la terre, l’eau et les ressources minieres.

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En conclusion, l’orpaillage artisanal s’exerce dans des conditions difficiles générant un certain nombre d’impacts negatifs sur le plan social. Certains travaux soutiennent d’ailleurs l’idée que cette activité dégrade les conditions de vie des populations (Kumah,2006;Tschakert and Singha,2007;Aragon and Rud, 2012). Selon ces derniers, l’extraction artisanale peut être considérée comme un catalyseur de la pauvreté dans les pays en voie de développement dans le sens ou les orpailleurs sont coincés dans un cercle vicieux de pauvreté. En effet, bien que l’activité génère un revenu, il se retrouve dilapidé dans les dépenses liées à la pratique même de l’orpaillage, c’est-à-dire la guérison des maladies et les accidents de travail. Mais comme nous allons le voir dans la section suivante, plusieurs auteurs insistent plutôt sur le fait que l’orpaillage artisanal offre des possibilités d’emploi et génère des revenus directs et indirects permettant aux populations concernées d’améliorer leurs moyens d’existence.

0.2.2 Les impacts positifs

Les impacts positifs regroupent principalement les impacts économiques occasionnés par l’extraction artisanale à savoir la création d’emploi et l’accès à de nouveaux produits et services.

0.2.2.1 Possibilité d’emplois

L’extraction artisanale peut constituer un moyen de diminuer la précarité des populations lorsque celles ci-arrivent à éviter le cercle vicieux de pauvreté dont on a discuté dans le para-graphe précédent et à mieux gérer leurs gains en évitant les gaspillages par exemple. En effet cette activité augmente le revenu des personnes directement impliquées aussi bien que celles indirectement impliquées. Les personnes directement impliquées sont les orpailleurs qui voient leur revenu augmenter au-delà de la barre du seuil de pauvreté établi par les Nations Unies (Kitula,2006;Dondeyne and Ndunguru,2009). En plus des orpailleurs, les agriculteurs qui pratiquent l’orpaillage pendant la saison sèche tirent un revenu supplémentaire qui leur sert à soit acheter des intrants pour leur activité ou encore améliorer leur quotidien en s’offrant des repas supplémentaires (Banchirigah and Hilson,2010). Indirectement, les personnes qui dépendent des orpailleurs ou des agriculteurs voient leur condition de vie s’améliorer. Par exemple, les agriculteurs arrivent à offrir une meilleure éducation aux enfants et à constituer une épargne. Aussi, les populations locales vivant dans les communes où se trouvent les camps miniers obtiennent un revenu supplémentaire en tenant des activités commerciales diverses telles que la vente de produits alimentaires, vestimentaires ou électroniques (Kitula,

2006;Maconachie and Binns,2007;Hilson and Okoh,2011). Il existe plusieurs catégories de travailleurs périphériques qui profitent de l’orpaillage: les commerçants, les vendeurs d’eau et de bois de chauffage, les chauffeurs qui font la navette entre la ville la plus proche et les sites miniers, les femmes qui vendent des aliments ou de l’eau, les coiffeurs,. . . .

(28)

Certains auteurs décrivent des situations dans lesquelles, en dehors des personnes physiques, l’orpaillage aurait permis de créer des richesses au niveau des institutions locales en générant des revenus liés aux taxes sur les engins utilisés pour l’extraction de l’or (Teschner,2014). Dans son étude, cet auteur a montré comment le coup d’état survenu au Mali en 2012 a suscité de l’entreprenariat basé sur l’extraction artisanale. Ce dernier était basé sur une avancée de la technologie dans l’extraction artisanale passant des outils rudimentaires à l’achat des machines diesel capables de concasser et fusionner l’alliage. Suite au coup d’état mené par le capitaine Sanogo, les partenaires de développement du Mali tels que la Banque mondiale et l’Union Européenne ont suspendu toute aide envers le pays. Face à ces événements, la commune (collectivité locale) de Yallankoro-Soloba a initié la taxation des engins (utilisés dans le cadre de l’extraction artisanale) pour refaire son budget. Dès lors, le maire de la commune qui ne percevait plus de recettes, a commencé à taxer ces engins ainsi qu’à percevoir d’autres taxes liées à la pratique de l’extraction si bien que la commune a soutenu les dépenses liées à la gestion quotidienne des infrastructures publiques (telles que les paies des enseignants des écoles) grâce aux retombées économiques de cette activité (Teschner,2014).

0.2.2.2 Accès aux produits et services pour les communautés locales

Certains auteurs ont souligné les bienfaits que la présence des sites miniers procure aux popu-lations locales. On peut noter l’accès permanent à plusieurs produits et services (Werthmann,

2010;Sangaré,2016). Parmi les services, on peut citer la présence des points de cinéma où des films de plusieurs coins du monde sont accessibles, des bars, des salons de coiffures pour hommes comme pour femmes, des points de vente et service d’operateurs de téléphonie et des garages d’entretien mécanique d’autos, de voitures et également des outils utilisés dans l’orpaillage à savoir les motopompes et les broyeurs. Quant aux produits, on peut citer ceux venus de la métropole dont les produits périssables comme les aliments (mets cuisinés, viande) et les produits non périssables comme les pagnes, les radios, les sacs d’emballage, l’essence pour approvisionner les outils de travail comme les motopompes et les groupes électrogènes ainsi que les moyens de déplacement comme les motocyclettes, les tricycles ou même les voitures.

0.2.3 Les questions diverses

La littérature discute de plusieurs autres questions relatives à la question de l’orpaillage artisanal à savoir la question du genre, la relation entre les différents acteurs au sein du secteur minier, la relation entre l’agriculture et l’orpaillage, la responsabilité sociale et envi-ronnementale des entreprises minières, la possibilité de certifier l’or artisanalement extrait en tant que produit équitable et la gouvernance des sites d’orpaillage artisanal.

(29)

0.2.3.1 La question du genre

Sur les questions de genre, la participation des femmes dans l’industrie minière artisanale n’est pas négligeable, même si celle-ci est généralement moins reconnue (Labonne, 1996;

Amutabi and Lutta-Mukhebi,2001;Mercier and Gier,2007;Bashwira et al.,2014). En effet, dans le monde on estime que 30% des mineurs artisanaux sont des femmes. Cette proportion se situe entre 40% et 50% pour les pays africains (Hinton et al.,2003). Bien que ce nombre semble important, la plupart du temps ces femmes occupent les postes les moins nantis du secteur telles que vanneuses ou ramasseuses de minerais. Non seulement leurs gains ne sont pas très importants mais elles sont plus vulnérables aux maladies.

Le corpus croissant de la littérature souligne trois sujets différents liés aux femmes (et aux filles) dans l’exploitation minière artisanale. Tout d’abord, il y a des discussions sur les raisons pour lesquelles elles s’engagent des activités liées à l’exploitation minière artisanale (Amutabi and Lutta-Mukhebi,2001;Werthmann,2009;Bashwira et al.,2014;Pijpers,2014). Les femmes et les filles s’engagent dans l’activité pour combler leurs besoins journaliers allant de la collection des fonds pour les études ou la survie. D’autres s’engagent afin de perpétuer une tradition familiale ancrée dans l’exploitation minière. Enfin, certaines s’engagent dans l’orpaillage en le considérant comme un emploi ordinaire dans lequel elles ont accumulé de l’expérience (Amutabi and Lutta-Mukhebi,2001).

Deuxièmement, la littérature aborde les différentes catégories de femmes travaillant dans les mines artisanales (Amutabi and Lutta-Mukhebi,2001). Le groupe des adolescentes est la première catégorie de travailleurs indépendants c ‘est à dire celles qui sont parvenues sur les sites non accompagnées de leurs maris ou ne travaillant pas pour une tierce personne. Généralement elles sont chargées des tâches quotidiennes nécessaires à la bonne marche de l’activité entre autres apporter de l’eau ou de la nourriture. La deuxième catégorie de travailleurs représente des femmes adultes. Ces femmes sont soit célibataires travaillant pour leur propre compte, soit mariées travaillant principalement avec leur famille.

Le troisième sujet abordé dans la littérature concerne les rôles des femmes dans les camps miniers (Labonne,1996;Amutabi and Lutta-Mukhebi,2001;Ofei-Aboagye,2004;Hinton et al.,

2006;Werthmann,2009;Bashwira et al.,2014;Teschner,2014;Buss Doris and Hinton,2017). Sur les sites miniers, les femmes comme les hommes occupent généralement deux types d’activités. Le premier type concerne les travaux lies directement à la pratique de l’orpaillage. On y retrouve des rôles tels que propriétaires de puits de mines et vanneurs. En tant que propriétaires de trous, comme les hommes, les femmes investissent dans les puits de mines à travers l’achat de matériel nécessaire pour le creusage et la prise en charge quotidienne des travailleurs (alimentation et santé). En tant que vanneuses, elles utilisent de grands récipients pour extraire certaines particules lourdes (pépites d’or entre autres). Il s’agit d‘ une activité qui nécessite de la prudence et de la patience ; de ce fait, elle est souvent effectuée par les femmes

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et transmise de génération en génération (Labonne,1996;Amutabi and Lutta-Mukhebi,2001). La deuxième concerne les activités indirectement liées à l’orpaillage à l’instar de la vente de produits et des services.

0.2.3.2 Relation entre les acteurs impliqués dans le secteur

Depuis l’installation des multinationales minières dans les pays en voie de développement, on retrouve aussi bien des partenariats pacifiques entre les différents acteurs que des cas de conflits. Tout d’abord il est important de distinguer les quatre différents acteurs en présence : le gouvernement central qui émet les permis d’exploration ou d’exploitation, les compagnies minières, les orpailleurs artisanaux, les communautés locales constituées des habitants des communes dans lesquelles sont localisés les camps miniers (Hilson,2002b;Pijpers,2014). Dans les communautés locales il existe un chef traditionnel, les villageois, le gouvernement local qui peut être représenté par le maire ou le préfet de la commune.

Le premier type de lien entre acteurs concerne les relations entre les compagnies minières et les orpailleurs artisanaux. Dans certaines circonstances, les relations sont conflictuelles, par exemple lorsque les orpailleurs se retrouvent sur des terres allouées par le gouvernement à des compagnies minières (Hilson,2002b). Ce que rapporte cet auteur, c’est que les orpailleurs réfutent toute idée de se délocaliser du fait des raisons culturelles qui les lient à ces terres. Plusieurs exemple ont été documentés dans la littérature. Un des exemples illustratifs de ce type de conflit s’est opéré sur un des sites les plus riches en or du monde localisé dans la région d’Ashanti au Ghana (Hilson,2002b). Le conflit qui a opposé les orpailleurs artisanaux à la multinationale Ashanti Goldfield, a engendré une perte de un million de dollars pour cette entreprise, qui était le onzième producteur de minerai au monde en 1996. Le problème principal étant le fait que le gouvernement ne semble pas avoir consulté les orpailleurs avant d’allouer ces terres (Nyame and Blocher,2010). Un deuxième exemple concerne les affrontements qui se sont déroulés en Juillet 1996 dans le même pays à Obuasi, entre les orpailleurs et des agents de sécurité de la minière Ashanti Gold qui ont occasionné une perte de 10 millions de dollars américains pour cette dernière (Aubynn,2009). Bien qu’il existe des relations conflictuelles entre les compagnies minières et les orpailleurs, dans certains cas des relations de partenariat ont été observées (Hilson,2002b;Hilson and Garforth,2012). Dans ces cas, la compagnie minière qui commence à explorer ou exploiter les gisements, identifie les zones qui ne sont pas rentables économiquement et les rétrocède aux orpailleurs. De plus, elle supervise l’activité des orpailleurs en installant des comptoirs d’achat de l’or. C’est l’exemple de l’entreprise: "Gold Fields Ghana Ltd" qui a rétrocédé une partie de ses terres aux orpailleurs en 1999.

Le deuxième type de lien concerne les relations entre le gouvernement et les compagnies minières (Nyame and Blocher,2010). Généralement, cette relation est harmonieuse et régulée

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par des politiques et des lois bien établies. Cela permet aux gouvernements de tirer bénéfice des revenus de taxations, des opportunités d’emplois, du transfert de technologie. Par exemple au Ghana, le gouvernement central reçoit 3% des ventes brutes des compagnies minières.

Le troisième type de lien est relatif aux relations entre les compagnies minières et les pop-ulations locales. A l’instar des relations du premier type qui existent entre les compagnies minières et les orpailleurs, la plupart du temps, ces dernières sont très tendues à cause des disputes sur les terres et les ressources (Hilson,2006;Garvin et al.,2009;Nyame and Blocher,

2010). Ces conflits viennent de plusieurs sources. Tout d’abord, les promesses des politiques concernant le reversement des recettes fiscales ne sont généralement pas respectées parce qu’elles sont rarement documentées dans des contrats formels (Kumah, 2006). Ensuite, il subsiste une grande opposition entre la propriété des terres basée sur les droits coutumiers pour les populations d’une part et la propriété des terres basée sur le droit légal d’autre part (Aubynn,2009). Les populations locales réclamant leur droit d’occuper les terres depuis les années avant l’arrivée des compagnies minières accusées de vouloir les exproprier de leur héritage. Afin de minimiser ces conflits, les compagnies minières ont développé un agenda de responsabilité sociale vis-à-vis des communautés locales (Jenkins,2004;Schaefer,2004;

Yankson,2010). Cet agenda inclut le développement de moyens d’existences alternatifs tels que l’aquaculture, l’agriculture, l’élevage; le développement d’infrastructures publiques telles que les écoles, les routes, les hôpitaux; le développement des compétences et l’octroi de soins médicaux pour les mineurs afin de limiter la pauvreté.

Cependant, bien que les résultats de ces agendas semblent louables, il reste prudent de garder à l’esprit que souvent ces agendas engendrent la délocalisation des populations locales qui ont des attaches culturelles très fortes avec leur terres a travers des pratiques coutumières spécifiques. Ce qui a comme conséquence de dénaturer les structures culturelles et sociales de ces communautés. En plus de ces initiatives, il existe également des lois concernant les bénéfices que les entreprises minières doivent reverser aux communautés locales. Au Ghana, cette proportion s’élève a 10% (Kumah, 2006).. Cependant cette part prévue aux communautés locales est rarement distribuée à cause de la non-formalité de ce reversement. Le même problème est observé au Burkina Faso où le quota de 1% du chiffre d’affaire des compagnies minières à reverser au fond minier de développement local prévu par le code minier n’est pas totalement respecté17.

Le quatrième type de lien est celui qui existe entre les orpailleurs artisanaux et les habitants de la commune rurale ou urbaine. Celui-ci est bivalent : soit il est pacifique et harmonieux; soit il est assez conflictuel. Dans le premier cas, les deux acteurs comprennent et appliquent

17Elie Kaboré, Fond minier de développement local: un gap de plus de 27 milliards

FCFA, L’économiste du Faso, 21 Mai 2018, http://www.leconomistedufaso.bf/2018/05/21/ fonds-minier-de-developpement-local-un-gap-de-plus-de-27-milliards-de-f-cfa/, consulté le 18 Juin 2018.

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les droits coutumiers (Nyame and Blocher, 2010). Ainsi, les propriétaires de terre de la communauté locale peuvent louer aux orpailleurs moyennant un paiement en nature ou en espèce selon les us et coutumes de la dite communauté. Dans le deuxième cas, des conflits assez violents peuvent émerger entre les communautés locales et les orpailleurs artisanaux (Werthmann,2003b;Hilson et al.,2016;Crawford and Botchwey,2017a). Un exemple récent est le conflit mortel survenu dans le village de Loto, commune de Diébougou dans la région du Sud-Ouest du Burkina Faso18. L’origine de ce conflit serait le refus d’un orpailleur de partager ses gains avec le propriétaire terrien comme le suggèrent les règles informelles des sites d’orpaillage. Cet orpailleur aurait agressé le propriétaire terrien suite à ce heurt. Par la suite, les autochtones ayant été informés de l’incident se sont armés de flèches et de machettes afin de chasser les orpailleurs sans distinction. Comme résultat, on a dénombré un mort, une dizaine de personnes blessées ainsi que des dégâts matériels suite à la destruction du camp miniers par les autochtones vivant dans les villages environnants.

0.2.3.3 Relation entre agriculture et extraction artisanale

Le rôle grandissant de l’extraction artisanale suscite des inquiétudes au niveau des gouverne-ments africains et des institutions de développement du fait de sa substitution graduelle, pour les ménages, comme source de revenu au détriment de l’agriculture. Concrètement quels types de relations entretiennent l’agriculture et l’extraction artisanale? Les travaux qui se sont penchés sur la question ont révélé deux types d’interaction entre ces deux activités. Le premier type est une relation de substitution (Kumah,2006;Maconachie and Binns,2007;

Aragon and Rud,2012;Pijpers,2014). Dans ce cas les deux activités sont concurrentes au niveau des intrants utilisés notamment la main d’œuvre et la terre. En ce qui concerne la main d’œuvre, certains agriculteurs font une transition permanente de l’agriculture vers l’orpaillage. Une des raisons est que les revenus miniers sont largement supérieurs à ceux permis par l’agriculture. Une deuxième raison est que l’agriculture n’est plus capable d’offrir un moyen d’existence durable à ceux qui la pratiquent à cause d’une part de la dégrada-tion des condidégrada-tions climatiques qui donnent lieu à de mauvaises récoltes et d’autre part la suppression des subventions accordées aux agriculteurs occasionnées par les programmes d’ajustements structurels dans la plupart des pays africains (Reardon et al.,1992;Bryceson,

1999;Akabzaa and Darimani,2001;Kitula,2006;Hilson,2010;Cartier and Bürge,2011;Hilson and Van Bockstael,2012;Garforth and Hilson,2013). En ce qui concerne la terre, une partie des terres cultivables sont détournées de l’agriculture vers l’orpaillage ou l’exploitation in-dustrielle à des fins d’exploration ou d’exploitation (Banchirigah,2006;Jaques et al.,2006;

Nyame and Blocher,2010).

18Dalou Mathieu Da, Affrontement dans un site d’orpaillage à Diébougou : Un mort et des blessés graves,

Figure

Figure 0.1 – Production aurifère au Burkina Faso de 2008 à 2014 Source: Direction Générale des Mines et de la Géologie du Burkina Faso
Figure 0.2 – Cadre des moyens d’existence durable: Source: Scoones (1998) .
Figure 0.5 – La commune de Karangasso Vigué
Figure 0.7 – Les communes de Kaya, de Boussouma et de Mané
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