• Aucun résultat trouvé

ARTheque - STEF - ENS Cachan | Les bulles de savon : un spectacle de mathématiques

N/A
N/A
Protected

Academic year: 2021

Partager "ARTheque - STEF - ENS Cachan | Les bulles de savon : un spectacle de mathématiques"

Copied!
10
0
0

Texte intégral

(1)

LES BULLES DE SAVON :

UN SPECTACLE DE MATHÉMATIQUES

Michele EMMER

UniversitéCa' Foscari, Venise Valeria MARCHIAFAVA III I.TAS.DeCillis, Rome

MOTS-CLÉS: MATHÉMATIQUE - VULGARISATION - EXPOSmON - FILMS

RÉSUMÉ: C'est un fait très positif que, depuis quelques années, des groupes de mathématiciens aient acquis une expérience directe de la préparation et de la réalisation d'expositions de mathématiques. Il est possible maintenantmettre en exposition les mathématiques;ilest possible aussi d'organiser un spectacle de mathématiques! Les bulles de savon constituent un sujet qui permet de parler de mathématiques, de science et d'art en utilisant toutes les techniques possibles, de la manipulation d'objetsàla projection de diapos et aux films.

SUMMARY: It is a very interesting and important fact that, in the last few years, several groups of mathematicians have become experienced in the projecting and producing of mathematical exhibitions. It is now possible tosJww mathematics ;ilis even possible to organize a math show! Soap bubbles are a subject that al10w to talk of mathematics, of science and of art using all possible techniques, like the projection of slides and films and the preparation of physical experiences.

(2)
(3)

1. INTRODUCTION

Les communautés mathématiques de nombreux pays ont commencé à prendre conscience, et plusieurs initiatives ont été prises en cette direction, du problème d'une plus vaste diffusion de celle qu'on peut appelé la culture mathématique. C'est maintenant une chose normale que tables rondes et débats soient organisés sur les rapports entre la communauté mathématique, les moyens d'information et le grand public.

Ils existent naturellement des problèmes, de deux types essentiellement : d'un côté, les difficultés inhérentesàtoutes activités de divulgation scientifique, de l'autre, la spécificité des arguments de mathématique. Dieudonné [1] a suggéré qu'on devrait au moins tenter de comprendre les raisons de l'incompréhension pour les mathématiques, même si l'entreprise est très difficile, pour ne pas dire impossible. Difficile aussi parce que, tandis qu'il existe de nombreux magazines consacrésàla divulgation des récentes théories scientifiques adressésàun grand public et pour chaque niveau de culture, on ne retrouve rien, avec quelques exceptions, sur les récents progrès des mathématiques, ce qui peut porterà conclure qu'ils n'existent pas de progrès!

D'ailleurs, Dieudonné n'est pas complètement d'accord avec la divulgation scientifique que l'on fait puisqu'on a tendance, par dessins et schémas où les cas particuliers sont éliminés et dont les explications simplifient les résultats d'années d'expériences et de recherches complexes, à donner au lecteur l'illusion de comprendre ce qu'est un atome, un gène ou une galaxie. Pour ce qui concerne les mathématiques, la question est encore plus complexe.Laplupart des gens ignore les mathématiques et ce que font les mathématiciens. Aujourd'hui, on pense probablement que les mathématiciens s'occupent des ordinateurs. Il n'est même pas clair le fait qu'en mathématiques on obtient de nouveaux résultats et l'on imagine que les mathématiques sont un livre déjà écrit dont on decouvre de temps en temps quelques nouvelles pages. Les mathématiques sont le langage de la science mais c'est un langage qu'on ne connaît pas.

Est-ce censé de se poser le problème de vulgariser les mathématiques? Lors d'un congrès qui s'est passé en Italieily a trois ans, congrès organisé par l'D.M.!. (Union Mathématique Italienne), un des participants répondit: "Probablement pas beaucoup, et, en tous cas, la question était et reste toujours très compliquée" [2]. Exactement pour le fait qu'on ignore d'une manière profonde les mathématiques, et que tout le monde a honte de le déclarer franchement,ilfaut dans un certain sens recommencer chaque fois. Il faut repartir des nombres, des opérations les plus simples ; on risque de ne jamais arriver à traiter les arguments les plus importants et actuels; on risque de ne pas informer sur rien du tout en donnant seulement des informations très génériques. Peut-être qu'une des causes réside aussi dans le fait que les mathématiques ne sont pas apprises dans leur processus historique, et alors on ne comprend même pas comment dans l'histoire des mathématiques puissent se trouver des théories différentes, des erreurs, des résultats redécouverts et coetera. Même si l'on est convaincu que la réelle diffusion de la culture mathématique se fait dans les écoles et dans les universités, cependant nous pensons que l'on puisse chercher de faire naître une curiosité, un intérêt àplus comprendre, chez le grand public aussi.

(4)

Nous croyons que le moment est favorable pour une plus vaste diffusion de la culture mathématique. En Italie aussi, pendant les dernières années, il y a eu une attention croissante vers ce problème par la communauté des mathématiciens. Depuis une quinzaine d'années, à la télévision italienne, a été réalisée une série de films sur les mathématiques surtout du point de vue culturel, de ses liens avec les autres sciences, avec la culture et avec l'art.Àcette série ont collaboré savants et artistes de nombreux pays; naturellement les films étaient centrés beaucoup sur les images; ils fournissaient exprès peu d'infonnations détaillées sur les différents arguments traités, mais ces images cherchaient à faire naître un intérêt, une envie d'approfondissement. En outre, les films avaient le grand avantage de donner, dans un espace de temps très limité, une grande quantité d'infonnations, de détails, d'observations, de faire parler aussi des mathématiciens très connus (par exemple: Coxeter, Penrose, Almgren), en utilisant le langage universel des images. Ainsi, il a été même possible d'aborder des arguments des mathématiques contemporaines en cherchant à faire comprendre quels sont les problèmes dont les mathématiciens s'occupent actuellement. En même temps, il s'agissait de réaliser des films et pas des leçons ou des séminaires filmés. C'est pour cette raison que les films ont été traduits en plusieurs langues et diffusés dans de nombreux pays du monde [3].

Cependant, le cinéma, le vidéodisque, l'ordinateur, toutes les images possibles ne portent à aucune connaissance et même pas à un intérêt réel si elles ne sont pas gérées d'une façon convenable, avec un juste équilibre entre la stupéfaction et l'indication de la difficulté, de la profondité des choses dont on parle. Les mathématiques ne sont pas faciles, ceci nous croyons être l'un des messages plus clairs de sa vulgarisation, mais pas parce qu'elles sont généralement apprises à l'école.

Jusqu'à ces dernières années, il n'arrivait pratiquement jamais de lire dans les quotidiens, du moins italiens, des articles sur les mathématiques, ni de voir publiés des livres de mathématiques pensés pour le grand public. Maintenant la situation a changé: l'édition a ouvert un espace à la publication de livres de mathématiques pour le grand public [4], [5],[ 6]. Il peut arriver, dans une mesure raisonnable, d'entendre parler à la radio de mathématiques d'une façon assez précise, ainsi que d'obtenir d'un quotidien de publier une démonstration avec les symboles appropriés ; aujourd'hui les journaux sont imprimés avec le même software utilisé dans l'expérience scientifique et donc, de ce point de vue, les choses sont très simplifiées. Naturellementilfaut faire attention aux arguments qu'on choisit pour relier les mathématiques à la culture, à la littérature, au cinéma, à la télévision. Il est très important de mettre en évidence l'aspect historique et d'insister dans les citations particulières des articles, de mathématiques aussi. Évidemment, il s'agit d'une lutte sans quartier oùil suffit que le directeur du journal change pour tout remettre en discussion.

Mais revenons à la question des images et au lien entre les mathématiques et l'art. Nous considérons très important le rôle que les images peuvent avoir dans une exposition comme dans un musée de mathématiques, sans négliger la réalisation de films et de vidéos. Et on peut aff'rrrner que, pendant ces dernières années, il y a eu une forte reprise en mathématiques du secteur des images ; d'un côté, pour l'utilisation toujours croissante de la computer graphies et, de l'autre, pour la renaissance de l'intérêt vers les images de la part de plusieurs communautés mathématiciennes. Les images mathématiques ont eu une remarquable relance au niveau du grand public aussi. Ilya en

(5)

outre le lien entre computer graphies, mathématiques etart :l'utilisation de toutes ces possibilités peut donner une idée suffisamment precise des mathématiques et des mathématiciens contemporains; pourtant, ce lien doit être mieux utilisé. Nous voulons citer à cet égard le numéro spécial de la revue Leonardo dedié au thèmeVisual Marhematics[7]. Un phénomène très intéressant qui vient de se répandre en Italie pendant les dernières années, c'est l'organisation de véritables expositions itinérantes de mathématiques, adressées à un public de non spécialistes. II s'agit d'un phénomène très récent, inédit sous plusieurs aspects, et qui a comme bout la réalisation d'un véritable musée de mathématiques. Quelques-unes de ces expositions ont été pensées avec une esquisse de vulgarisation, d'autres par contre, plus scientifiques avec des implications artistiques importantes, comme c'est le cas de la grande expositionL'occhio di Horus: itinerari nell'irrunaginario maternatico [8]. C'est un fait très positif que, depuis quelques années, des groupes de mathématiciens aient acquis une expérience directe dans la concepion et dans la réalisation d'expositions de mathématiques. Même si différents ont été les thèmes traités et les façons de réaliser les parcours expositifs, en Italie les expositions de mathématiques sont devenues une réalité. On a aperçu d'une manière assez nette qu'il existait une demande d'initiatives de ce type. Ilyavait enfin la nécessité de remplir un espace qui avait été négligé pour longtemps dans le panorama, pas très excitant, des initiatives italiennes de vulgarisation scientifique. Il est possible maintenantmettre en exposition les mathématiques.

Après ces préliminaires, est arrivé le moment de proposer un exemple concret qui a étéàla base de la présentation aux Journées Internationales sur l'Éducation Scientifique à Chamonix.

Un exemple où on veut parler de mathématiques, de science et d'art en utilisant toutes les techniques possibles, de la manipulation d'objets à la projection de diapos, aux films. Nous nous sommes très amusés lors de son idéation et de sa réalisation!

2. LES BULLES DE SAVON

Qui ne s'est pas amusé pendant son enfance, et, peut-être, n'a jamais arrêté de s'amuser, en faisant des bulles de savon? Est-ce qu'ilya quelqu'un qui ne s'arrête pas lorsqu'il voit ces globes iridescents bouger dans l'air? Jouer aux bulles de savon est certainement l'un des passe-temps les plus connus, et d'une extrême simplicité aussi. On trouve dans tous les magasins ces petits tubes pleins d'eau savonneuse où est plongé un petit anneau en plastique; lorsqu'on rétire de l'eau l'anneau, yreste attachée une surface de savon et en soufflant on forme des nombreuses bulles de savon, toutes pareilles entre elles quant à la forme. Un jeu qu'on dirait monotone mais qui est toujours différent. Des structures sûrement plus complexes, composées de plusieurs surfaces savonneuses, se forment lorsqu'on lave la vaisselle. On a l'impression même, si on regarde avec attention, que les formes créées par les surfaces savonneuses sont complètement fortuites; en réalité la géométrie des bulles de savon et des surfaces de savon obéit à des règles très précises, et c'est peut-être ceci l'un des motifs qui peut pousser une personne qui aime le jeu des bulles de savon à

(6)
(7)

Mais est-ce qu'il existe quelque chose de plus inconsistant, de plus trompeur qu'une bulle de savon? Les bulles de savon, depuis toujours, ont représenté dans la littérature et dans l'art figuratif le symbole de la vanité des ambitions humaines, de la fragilité de la vie même. Mais, si les bulles de savon occupent une place importante dans la littérature et dans l'art figuratif, peu de gens pensent qu'elles aient un rôle important aussi dans la science, en particulier en mathématiques, en physique, en chimie, en biologie et même en architecture. Un savant fameux, Sir William Thompson (Lord Kelvin) a écrit: "Faites une bulle de savon et observez-la: vous pourriez passer toute votre vie en l'étudiant." Et cette affinnation n'est pas du tout excessive.

Pendant tout le XVIIe siècle, le thème de la Vanitas, et par conséquent, celui des bulles de savon, se répandit dans la peinture hollandaise à un tel point qu'il devint l'un des thèmes plus souvent repris; et l'intérêt pour ce sujet continue lors des siècles successifs. C'est en 1867 que Manet peint sa fameuse toileLes bulles de savon. Quelques années plus tard, les bulles de savon commenceront une carrière glorieuse dans le domaine de la publicité [9]. Pendant les même années où Manet peignait son oeuvre, la géométrie des bulles de savon et des surfaces savonneuses s'acheminaitàdevenir l'un des secteurs plus intéressants des mathématiques grâce aux études du physicien belge Joseph Plateau.

On dirait qu'il n'existe rien de plus simple qu'une bulle de savon. Chaque fois qu'on souffle sur les petits anneaux auxquels est attachée une surface d'eau savonneuse, on obtient toujours des bulles plus ou moins sphériques. Quelques fois les sphères, grandes ou petites, se touchent et alors on obtient des fOlmes plus complexes faites de portions de sphères attachées les unes aux autres.

Lorsqu'on dissout du détersif dans l'eau et qu'on produit une abondante mousse en faisant de la vaisselle, on obtient une grande variété de formes d'où la sphérique est pratiquement absente. Plus correctement,ilfaut parler de surfaces savonneuses plutôt que de bulles de savon. Chaque fois que nous faisons de la vaisselle, nous obtenons une géométrie très complexe et très simpleàla fois. S'apercevoir de la complexité, apparente au moins, c'est très facile, alors que s'apercevoir que les configurations possibles sont en réalité très peu nombreuses, est beaucoup moins évident. Ce sont les recherches de Plateau qui ont menéàcomprendre l'existence de lois, notamment l'existence d'une géométrie rigide qui estàla base de la formation des surfaces savonneuses.

En 1873, Plateau publia les résultats de ses recherches dans les deux volumes du traitéStatique expérimentale et théorique des liquides soumis

aux

seules forces moléculaires [10]. Afin de comprendre les problèmes concernant les bulles et les surfaces de savon, on peut donner un exemple très simple dont les mathématiciens parlent très souvent pour introduire ce domaine des mathématiques qui s'occupe de ces problèmes: leCalcul des Variations.

Les mathématiciens aiment considérer comme premier exemple de problème de Calcul des Variations qu'on a résolu, d'une façon empirique si l'on veut, la construction de la ville de Carthage de la part de la reine Didon. L'épisode a été raconté par Virgile dansl'Énéide [11]. Didon, arrivée aux côtes d'Afrique, avait demandé au roi Iarbas des terres pour y construire une ville. Le roi, pour se moquer d'elle, lui proposa tout le terrain qu'elle pourrait entourer avec une peau de taureau. Mais l'astucieuse Didon fut capable de renverser la situationàson avantage; elle coupa la peau du taureau en plusieurs bandes très minces et les cousit ensemble. Partant d'un point sur la côte elle entoura avec

(8)

les petites bandes le terrain où fonder Carthage.Leproblème que Didon devait résoudre consistait à entourer, avec la longueur des petites bandes, l'extension de terrain la plus grande possible, à savoir le meilleur résultat panni toutes les configurations possibles. Elle résolut brillament le problème ( ou du moins ainsi pensent les mathématiciens! ) en dessinant un demi-cercle.

Le problème analogue dans l'espace consiste à chercher la surface qui, à égal volume interne, ait la plus petite aire superficielle externe: la solution est la sphère. Chaque fois que l'on souffle pour faire une bulle de savon, on peut vérifier de façon expérimentale cette propriété déjà bien connue de mathématiciens grecs. On peut alors bien comprendre pourquoi le secteur des mathématiques qui étudie la géométrie des bulles et des surfaces de savon s'appelle Surfaces minimales.

Les surfaces minimales ou, plus généralement, les surfacesàcourbure moyenne assignée, comme c'est le cas des bulles de savon, ont la propriété caractéristique d'être minimales, en un sens qui doit être précisé, par rapport à toutes les surfaces qui leur sont assez proches. Une façon standard pour obtenir une surface minimale est celle de prendre unfilde fer fenné et de l'immerger dans une solution d'eau et de savon. En extrayant le châssis, on obtient une surface minimale qui reste attachée a un fil de fer. Ce problème s'appelle en mathématiques, en l'honneur du physicien belge, le problème de Plateau.Lesecteur des mathématiques que l'on indique par les mots Surfaces minimales est très vaste: il comprend les équations différentielles à dérivée partielle, le calcul des variations, la géométrie différentielle.

Un des aspects plus fascinants de l'étude des surfaces minimales consiste exactement en le fait que, dans le cas de problèmes situés dans l'espace euclidien à trois dimensions, on peut obtenir des modèles de surfaces minimales en utilisant l'eau savonneuse. C'est-à-dire qu'il est possible voir les solutions des problèmes. Comme l'avait déjà observé le physicien belge Plateau, on obtient par l'eau savonneuse des fonnes très intéressantes. Dans le livre de Plateau, on trouve les dessins des configurations obtenues en utilisant différentes structures métalliques immergées dans l'eau savonneuse. Plateau n'eut pas la possibilité de voir tous ses expériences parce qu'il était en train de dévénir complètement aveugle;ilse faisait décrire de ses collaborateurs ce qu'il arrivait.

Àpropos des expériences qu'il avait pu suivre avec ses yeux, Plateau avait observé que:

"n

y a un charme très intense dans la contemplation de ces fonnes légères, réduites dans leur essence à de surfaces mathématiques, que l'on peut observer parées des couleurs les plus brillantes, et qui, contrairement à leur extrême fragilité, durent longtemps." En particulier, Plateau fut tellement fasciné par la beauté d'une de ces configurations qu'il arriva jusqu'à écrire que les surfaces qui la composent se réalisent "comme pour un enchantement". Il s'agit de la configuration que l'on obtient en immergeant dans l'eau savonneuse un contour cubique. Il se réalise une fonne symétrique où paraît, au centre, un carré, les côtés légèrement courbes, qui se joint au contour cubique par des surfaces savonneuses. Puis, si l'on immerge de nouveau dans l'eau la structure savonneuse obtenue, on capture une bulle qui, pour des raisons de symétrie, se range au centre du système des surfaces.

Cette forme ressemble beaucoup à une des projections possibles dans l'espace tridimensionnel, d'un cube à quatre dimensions ou hypercube. Plateau, de façon incroyableàpremière vue, avait observé que:

(9)

2) quel que soit le nombre des surfaces savonneuses qui entrent en contact, il ne peut exister que deux types de configurations. Précisément, trois surfaces se rencontrent le long d'une ligne ou bien six surfaces fonnent quatre courbes d'intersection se rencontrant à leur tour en un sommet; dans le premier cas à 120°, dans le second à 109°28'.

Les seuls types d'angles que les surfaces savonneuses forment entre elles sont ceux indiqués par Plateau. Et il n'existe pas d'autres possibilités !Et Plateau fut le premier à être surpris de ce résultat. C'est seulement en 1976 que la mathématicienne Jean Taylor a été capable de demontrer que les lois de Plateau étaient correctes [12]. La même année, Jean Taylor et Fred Almgren publièrent pour le périodique americainScientific American [13] un article de vulgarisation sur la géométrie des bulles de savon, un article qui était accompagné de magnifiques photos.Àcette occasion naquit l'idée de réaliser un film sur les structures des surfaces savonneuses; la caméra permit de voir des effets qui, autrement, ne seraient pas visibles à l'oeil nu [14].

Voilà qu'il est possible faire devenir spectaculaire une séquence d'images qui sont, avant tout, d'intérêt mathématique. Tourner de très près avec une caméra quelques modèles des surfaces savonneuses que Plateau a observées le premier peut constituer une succession d'images très intense du point de vue spectaculaire. En ayant l'adresse de tourner les modèles qui bougent dans l'espace, si l'on ajoute une musique genreLavalse de la rose, on peut réaliser un spectacle mathématique qui peut se révéler intéressant aussi pour les personnes non affectées aux travaux et même pour celles qui s'intéresse àl'art.Lefilm sur les bulles de savon a été projeté à laBiennale d'Art de Venise en 1986, Biennale qui était consacrée au thème de l'an et de la science [15].

3. OBSERVATIONS FINALES

Le problème demettre en exposition la scienceest très difficile et délicat, en particulier pour les mathématiques. Il yale risque d'un côté de faire prévaloir l'aspect spectaculaire et, de l'autre, de susciter l'ennuie et le désintéressement. D'autre part, c'est le même risque que l'on court chaque fois qu'on apprend quelque chose à quelqu'un.Leproblème quand on utilise les différents média à notre disposition pour parler de science, c'est que les média aient le dessus et que l'on perde de vue l'objectif primaire: c'est-à-dire de faire naître un intérêt pour l'argument scientifique traité. TI est clair que personne, en particulier les experts en communication de masse, a la bonne recette pour répondre d'une façon satisfaisante à la question. Organiser une exposition, un musée, réaliser un film, écrire un article sur un quotidien ou bien un livre pensé pour le grand public, exige une grande attention: s'il est difficile faire naître un intérêt pour la science, c'est beaucoup plus facile l'effacer ou plus simplement faire passer pour vulgarisation scientifique une simple manipulation d'images, de sons et de données.

Si personne n'a la recette définitive, si le problème doit être affronté et résolu à chaque fois, il vaut la peine de souligner qu'un aspect très important en mettant en spectacle la science doit être l'enthousiasme et même le divertissement de celui qui est en train de s'embarquer dans cet affaire.

(10)

Sans amusement et sans une profonde participation personnelle, c'est difficile de transmettre l'enthousiasme aux autres. Enfin, s'amuser pour amuser!

BIBLIOGRAPHIE

[I]DIEUDONNÉ (J.), Pour l'honneur de l'esprit humain, Paris: Hachette, 1987.

[2] EMMER,(M.),E' possibile la divulgazione in matematica ?, Actes de "Il pensiero matematico ne/la cultura e nella società degli anni 90", quademi P.RI.ST.EM., Università Bocconi, Milano, 1990.

[3] EMMER(M.),Art et Mathématiques, 18 films dans la série, 27 minutes, FILM 7 International, Rome, 1979-1990.

[4] EMMER (M.),Laperfezione visibile, Roma: Theoria ed., 1991.

[5] PENROSE (R.), The Emperor's New Mind, New York: Oxford University Press, 1989 ; Milano : ed. it., Rizzoli" 1991.

[6]CHANGEUX (J.-P.),CONNES (A.), Matière à Pensée, Paris: Odile Jacob, 1989; Torino : BoUati, 1991.

[7]EMMER (M.), ed., Visual Mathematics, special, Leonardo, Pergamon Press, vol. 25 n. 314 (1992) ;

EMMER (M.), ed., Ars Mathematica , Boston: MIT Press,àparaître.

[8]EMMER (M.), ed., L'occhio di Horus: itinerari nell'immaginario matematico, Ist. Enciclopedia Italiana, Roma, 1989.

[9]EMMER (M.), Soap Bubbles in Art and Science: from the Past to the Future of Math Art, Leonardo, Pergamon Press, vol. 20 n. 4 (1987), pp. 327-334.

EMMER(M.),Le bolle di sapone: un itinerario su arte, scienza efantasia, Firenze: La Nuova 1talia, 1991.

[10] PLATEAU (J.), Statique expérimentale et théorique de liquides soumis aux seules forces moléculaires, Paris: Gauthier-Villars, 1873.

[11] VIRGILIO MARONE (P.), Eneide, livre I, 360-368.

[12] TAYLOR (J.E.), The Structure of Singularities in Soap-bubbles-like and Soap-film-like Minimal Surfaces, Annals of Mathematics, 1976, 103, pp. 489-539.

[13] ALMGREN (F.J.), TAYLOR (I.E.), The Geometry of Soap Films and Soap Bubbles, Scientijic American, luglio 1976, p. 82-93.

[14] EMMER(M.),Bulles de savon, film de la série An and Mathematics, Roma, FILM 7,16 mm, 27 minutes.

[15]LaBiennale di Venezia, Catalogue de la section Technologie et Informatique, Venice : Edizioni La Biennale, 1986, p. 83.

Références

Documents relatifs

En contraste marqué avec la rupture lente de cette bulle particu- lière, je puis vous montrer que la vitesse de rupture d’une vraie bulle de savon, qui peut être

Regulation of Osteoclast Activation and Autophagy through Altered Protein Kinase Pathways in Paget’s Disease of

Comme les systèmes naturels aiment bien être dans un état d’énergie minimale, les bulles de savon cherchent à avoir la surface la plus petite possible... Pavage 3D et

Comme les systèmes naturels aiment bien être dans un état d’énergie minimale, les bulles de savon cherchent à avoir la surface la plus petite possible.... Water Cube : c'est le nom

Beniamin Bogosel Partitions minimales sur des surfaces 8.. Diff´erences finies - n´egliger les points a l’ext´erieur du domaine... probl`emes pr´es

Several microscopic mechanisms that may a priori contribute to the decay of the EFG-ACF occur in fact over too long time scales: entrance /exit of individual water molecules into

Dans cette section, j'étudie Qy sur un bout minimal immergé de courbure totale finie dans R 3 ou R 3 /^ On sait qu'un tel bout est conforme à D — {0}, où D est le disque unité de

Cette relation peut être réécrite comme dV/dt = ±V max /16τ, indiquant que le taux dV/dt d’intensification ou de déclin des tourbillons est lié simplement à la