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Les facteurs explicatifs de la confession en contexte d’interrogatoire policier chez les cyberdélinquants sexuels ayant pour victimes des enfants

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Academic year: 2021

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Les facteurs explicatifs de la confession en contexte

d’interrogatoire policier chez les cyberdélinquants

sexuels ayant pour victimes des enfants

Mémoire

Catherine Claveau-Thibault

Maîtrise sur mesure

Maître ès arts (M.A.)

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Les facteurs explicatifs de la confession en contexte

d’interrogatoire policier chez les cyberdélinquants

sexuels ayant pour victimes des enfants

Mémoire

Catherine Claveau-Thibault

Sous la direction de :

Nadine Deslauriers-Varin, directrice de recherche

Francis Fortin, codirecteur de recherche

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Résumé

L’objectif de cette recherche est de déterminer les facteurs explicatifs de la confession en contexte d’interrogatoire chez les cyberdélinquants sexuels ayant pour victimes des enfants. Pour ce faire, des analyses d’interrogatoires vidéos ont été réalisées. S’inscrivant dans un projet de recherche plus large, la présente étude est basée sur la codification et l’analyse de 80 interrogatoires vidéo menés par la division des enquêtes sur l’exploitation sexuelle des enfants sur Internet (ESEI) de la Sûreté du Québec. La codification de ces interrogatoires vidéo a été faite grâce à une grille de codification développée dans le cadre du projet et composée de 137 variables regroupant, notamment, des informations quant aux caractéristiques sociodémographiques, délictuelles et contextuelles des cas analysés.

Les résultats obtenus tendent à confirmer l’importance des variables contextuelles sur l’issue finale de l’interrogatoire (déni vs. confession partielle ou complète), et donc, la possibilité pour les enquêteurs de venir influencer le processus décisionnel du suspect par rapport à sa collaboration en contexte d’interrogatoire policier. Plus précisément ce sont les variables suivantes qui se sont avérés significativement reliées à la confession complète suite à une analyse de régression logistique : la durée de l’interrogatoire, le fait d’engager le suspect dès le départ dans la récapitulation de son arrestation ainsi que la relation entre l’interrogateur et le suspect.

Mots clés : confession, cyberdélinquants sexuels, interrogatoire policier, facteurs explicatifs, leurre informatique, pornographie juvénile, exploitation sexuelle des enfants.

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Abstract

The goal of this study is to determine which explanatory factors would influence confession during a police interrogation in cyber child sexual offense cases. In order to do so, video-recorded police interrogations were analysed. Part of a larger ongoing research project, the current study is based on the analyses of 80 video recorded interrogations conducted by Internet Child Exploitation (ICE) unit of the Sûreté du Québec. Interrogations were coded using a coding sheet specifically designed for this research project that included information regarding the suspect, the crime committed and the contextual characteristics of the interrogation.

The results showed the importance and the role of contextual variables on the outcome of the interview and suggest that investigators do have the power to influence the suspect’s decision-making process to collaborate and confess their crime during police interrogations. More specifically, the length of the interrogation, the fact that the interviewer engaged the suspect into describing the recapitulation of the arrest and the relation between the interviewer and the suspect were found to be statistically related to the outcome of the interrogation.

Key words: confession, cyber sexual offender, police interrogation, explanatory factors, Internet luring, child pornography, child sexual exploitation.

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Table des matières

Résumé ... ii

Abstract ... iii

Table des matières... iv

Liste des figures, tableaux, illustrations ... vi

Remerciements ... vii

Note ... ix

Introduction ... 1

Chapitre 1 <Recension des écrits> ... 2

L’enquête policière ... 2

L’enquête en ligne ... 4

Cyberdélinquant sexuel ... 5

Le délinquant sexuel en ligne et le délinquant sexuel hors ligne ... 8

L’interrogatoire de suspects ... 9

Les modèles explicatifs de la confession en contexte d’interrogatoire policier ... 11

Les études empiriques sur la confession ... 15

Confession chez les délinquants sexuels et ses facteurs explicatifs ... 19

Problématique ... 24 Chapitre 2 <Méthodologie> ... 26 Échantillon ... 26 Procédures ... 27 Analyses ... 36 Chapitre 3 <Résultats> ... 38 Analyse de khi-deux ... 38

Corrélation entre les variables indépendantes... 41

Régression logistique... 42

Chapitre 4 <Discussion> ... 45

Taux de confession d’auteurs de cybercrimes sexuels en ligne ... 45

L’importance des facteurs sociodémographiques et délictuels ... 48

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Apport pratique et scientifique ... 58

Limites de l’étude ... 60

Conclusion ... 63

Bibliographie ... 67

Annexe A <Cluster attitude du suspect > ... 73

Annexe B <Cluster attitude de l’interrogateur > ... 75

Annexe C <Cluster relation entre l’interrogateur et le suspect> ... 77 Annexe D <Régression logistique sans la relation entre l’interrogateur et le suspect>79

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Liste des figures, tableaux, illustrations

Tableau 1 : Présentation des variables à l’étude ………29 Tableau 2 : Analyses de Khi-2 entre les variables sociodémographiques, contextuelles et délictuelles et l’issue finale de l’interrogatoire ………..40 Tableau 3 : Matrice de corrélation (Rho de Spearman) des variables significatives …….... 42 Tableau 4 : Modèle de prédiction de la confession complète en contexte d’interrogatoire policier ...………... 44

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Remerciements

Il ne va sans dire que la réalisation de ce mémoire n’aurait pu se faire sans le soutien et l’aide précieuse de plusieurs personnes et organismes. Je prends donc ici la peine de les remercier.

Tout d’abord, je tiens à remercier sincèrement la Sûreté du Québec, plus particulièrement, la division des enquêtes sur l’exploitation sexuelle des enfants sur Internet (ESEI) qui m’a permis de concrétiser ce projet, mais également pour leur accueil plus que généreux. Un merci particulier à Sarah Paquette, spécialiste en délinquance sexuelle de l’ESEI, qui a été d’une grande importance dans la réalisation de ce projet de mémoire et qui a permis l’accès aux données de cette étude, mais aussi pour son support. Merci à tous les participants, de près ou de loin, qui ont favorisé l’avancement de ce projet et l’analyse des interrogatoires. Merci à l’Université Laval, l’Université de Montréal et au Centre International de Criminologie Comparée pour leur soutien financier grandement apprécié.

Un énorme merci à ma directrice, Nadine Deslauriers-Varin, et mon co-directeur, Francis Fortin, pour leur support, leurs encouragements et leur présence au cours des deux dernières années. Merci à Nadine d’avoir su me guider et me soutenir tout au long de cette réalisation, et ce, malgré ô combien d’embûches. Merci à Francis, malgré la distance de m’avoir aidé dans ce projet et de m’avoir fait confiance dans ce processus. La transmission de vos connaissances et de votre passion pour le domaine de la criminologie m’a grandement inspiré à poursuivre mon chemin.

Au plan plus personnel…

Un énorme merci à mes amies, à Québec ou à distance, qui ont su me soutenir tantôt en m’encourageant, tantôt en m’offrant des moments d’évasion et de divertissement. Merci pour ces moments qui m’ont permis d’oublier pendant quelques instants tout le travail qui m’attendait. Merci à Andréanne, qui au travers de ce merveilleux projet est devenue une amie qui m’a offert son aide précieuse mais également son soutien moral. Tu ne t’en rendais peut-être pas compte, mais à plusieurs reprises tu m’as convaincu de ne pas lâcher et de continuer jusqu’à cette lumière au bout du tunnel. Également, un merci particulier à Priscylla, qui au

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travers de ce projet, est devenue une amie dont les encouragements et le support ont été d’une grande importance. Les journées de travail et de récolte de données n’auraient pas été les mêmes sans ta présence et ton soutien!

À ma famille qui depuis le début me soutien et m’encourage dans mes projets, un grand merci. Vous avez toujours cru en moi et avez su me donner ce dont j’avais besoin pour poursuivre mes buts et mes rêves. Les valeurs que vous avez su me transmettre ont fait de moi la personne que je suis aujourd’hui, celle qui est allée jusqu’au bout de ses objectifs et qui est fière de ce qu’elle a accomplie.

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Note

NB : Les opinions exprimées dans ce document sont celles de l’auteur et ne reflètent pas nécessairement la vision de la Sûreté du Québec.

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Introduction

“Confession of errors is like a broom which sweeps away the dirt and leaves the surface brighter and clearer. I feel stronger for confession.”

Gandhi Bien que la confession soit un élément déterminant de l’interrogatoire policier dans le processus de justice, la connaissance scientifique sur le sujet demeure encore limitée (Deslauriers-Varin, Beauregard et Wong, 2011; Deslauriers-Varin, Lussier et St-Yves, 2011; Madon, Yang, Smalarz, Guyll et Scherr, 2013). Malgré ceci, il a été pourtant mis de l’avant que, dans 80% des cas, un interrogatoire a pour but d’obtenir une confession de la part du suspect (Stephenson & Moston, 1994). Ainsi, s’intéresser aux facteurs explicatifs de la confession en contexte d’interrogatoire policier peut être bénéfique autant pour les corps policiers, pour le système judiciaire que pour la société. Le phénomène étudié dans le cadre de ce projet, soit l’exploitation sexuelle en ligne d’enfants, en est un pouvant soulever de vives réactions auprès de la population générale. D’autant plus que le nombre de cybercrimes sexuels semble prendre de l’ampleur depuis quelques années. En effet, selon Statistiques Canada (2015), de 2014 à 2015, le nombre de cas reliés à la pornographie juvénile ayant été rapporté à la police a augmenté de 10%. Afin de mieux comprendre le phénomène de la confession chez cette population spécifique qui semble différente des autres types de délinquants, autant généraux que sexuels (Beauregard, Deslauriers-Varin et St-Yves, 2010; Beauregard et Mieczkowski, 2011, 2012), ce projet de recherche a été amorcé.

Cette étude présente d’abord l’état des connaissances sur l’enquête et sur les (cybers) délinquants sexuels, puis s’attarde ensuite à présenter les connaissances actuelles quant à l’interrogatoire policier et les facteurs explicatifs de la confession. Par la suite, la problématique, la méthodologie et les résultats de l’étude seront présentés. Pour terminer, la dernière partie de ce mémoire sera consacrée à la discussion des résultats obtenus dans le cadre de diverses analyses effectuées, et ce, à la lumière des connaissances actuelles au sujet de l’interrogatoire policier et de la confession.

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Chapitre 1 <Recension des écrits>

L’enquête policière

Depuis les années 1980, les organisations policières se sont transformées, notamment en matière d’enquête criminelle (Rogers, Lewis, John et Read, 2011). En effet, leur objectif principal s’est modifié (Stelfox, 2009). Au départ, le but ultime d’enquêter un crime était de traduire les auteurs de délits en justice. L’enquête était bâtie autour du fait que les policiers devaient identifier un suspect et trouver de la preuve afin de lancer des poursuites judiciaires contre le coupable (Stelfox, 2009). Aujourd’hui, prodiguer des soins aux victimes, rassurer la communauté, collecter de renseignements, démanteler de réseaux criminels ainsi que gérer le risque en matière de criminalité font également partie des objectifs fondamentaux du processus d’enquête et viennent s'ajouter aux tâches reliées à l'enquête (Rogers et coll., 2011). Dans le même ordre d’idée, Rogers, Lewis, John et Read (2011) spécifient qu'il existe quatre grands objectifs du processus d'enquête, soit de (1) déterminer si un crime a bel et bien été commis, (2) identifier et appréhender tout suspect, (3) récupérer tous les biens volés, ou ce qui est la propriété de la victime, ainsi que (4) d’assister à la poursuite de la ou les personnes qui sont accusées d’un crime. L’enquête criminelle implique donc la localisation, la collecte et l’utilisation d’informations pouvant servir à atteindre les objectifs mentionnés ci-dessus (Plecas et Garis, 2018; Stelfox, 2009). Également, Plecas et Garis (2018) ajoutent que les tâches reliées à l’enquête peuvent aussi impliquer l’identification de preuves physiques, la protection de la preuve, l’interview de témoins ainsi que l’interrogatoire. Selon Rogers et ses collaborateurs (2011), ainsi que Stelfox (2009), une enquête se définit par un processus mené par des policiers en vue de vérifier si une personne devrait ou non être accusée d’une infraction ou bien en vue de vérifier si un individu préalablement accusé d’une infraction est coupable ou non.

Notons que selon Newburn, Williamson et Wright (2007) l’enquête policière est structurée par la loi de deux façons: elle spécifie les objectifs de l’enquête et elle permet de la réguler. De manière générale, l’enquête a pour but d’élucider des crimes non résolus, d’identifier les individus responsables de ces crimes, de lancer des poursuites envers ceux-ci

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ainsi que de prouver la culpabilité d’un individu à la Cour (Newburn, Williamson et Wright, 2007). De plus, ces derniers affirment que les objectifs poursuivis par les enquêteurs sont également régis par la loi et qu’il existe aussi une loi sur la preuve qui vient spécifier les éléments devant être prouvés ou démontrés, par les enquêteurs, lors d’un procès. De surcroît, ces derniers énoncent que le but d’une enquête est de prouver tous les éléments qui permettent de déterminer qu’un geste, une action ou un évènement correspond bel et bien à un crime. C’est la preuve qui permet de déterminer ces éléments qui définissent un crime et c’est le devoir de l’enquêteur de découvrir, d’amasser, d’évaluer et d’organiser la preuve afin de prouver la culpabilité d’un suspect (Newburn et coll., 2007). La loi, d’un côté, donne du pouvoir aux enquêteurs et aux corps policiers, alors que de l’autre, elle les contraint à respecter des lois, des procédures et à se soumettre à certaines restrictions. C’est notamment pour ces raisons qu’il y a une procédure et plusieurs étapes à suivre lors d’une enquête policière (Newburn et coll., 2007).

Tout d’abord, une enquête policière débute avec ce que Stelfox (2009) nomme la réponse initiale. Celle-ci correspond au moment ou un crime ou une plainte est rapporté à la police. Suite à ce signalement, un policier est généralement déployé sur la scène de crime afin de protéger la preuve et procéder à une enquête préliminaire (Stelfox, 2009). Ensuite, une fois sur les lieux, le ou les policiers présents tentent de localiser du matériel. Celui-ci est défini par Rogers et Lewis (2007), comme étant du matériel de toutes sortes, incluant de l’information et des objets obtenus dans le cadre d’une enquête criminelle et qui sont susceptibles d’être pertinents et utiles à celle-ci. Également, lors de cette première étape, les policiers sur place procèdent aux entrevues initiales avec la ou les victimes ainsi que les témoins et arrêtent le ou les suspects, mais ce, seulement dans la mesure où leur identité est connue et où ils peuvent être localisés immédiatement (Rogers et Lewis, 2007; Stelfox, 2009).

Par la suite, les enquêteurs tentent d’identifier des lignes d’enquête en évaluant le matériel récolté; ils construisent différents scénarios des motifs de passage à l’acte, et ce, en fonction de leurs interprétations des éléments trouvés (Rogers et Lewis, 2007; Stelfox, 2009). Une fois qu’un suspect potentiel a été identifié, il est possible pour les policiers de décider

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quelles techniques pourront être utilisées afin de déterminer l’implication ou non de ce suspect dans la commission du délit, ou bien de l’éliminer de la liste des suspects potentiels (Stelfox, 2009). Les techniques peuvent impliquer une fouille du suspect, l’examen de tout endroit ou véhicule associé au suspect en question, le recourt à des procédures d’identification dans la mesure où il y a des témoins visuels, ainsi que l’interrogatoire du suspect afin d’obtenir sa version des faits de son implication dans le crime (Stelfox, 2009).

L’enquête en ligne

Avec l’évolution des technologies, certains s’entendent pour dire qu’Internet et l’environnement virtuel qu’il s’y crée favorisent l’émergence de nouvelles opportunités criminelles (Fortin et Paquette, 2018; Mitchell, Wolak, Finkelhor et Jones, 2011). D’ailleurs, si l’on reprend la théorie des activités routinières et des opportunités criminelles de Felson (1998), le contexte précis des crimes en ligne semble faciliter le passage à l’acte. En effet, Internet génère un contexte incluant la présence de victimes potentielles et l’absence de gardien, ce qui rend la situation attrayante pour le délinquant potentiel qui navigue sur différents lieux virtuels. Plus particulièrement dans le cas de cybercrimes sexuels envers des enfants, Internet est un environnement qui facilite et favorise la création d’opportunités de visionner, produire ou distribuer de la pornographie juvénile et permet aussi de cibler des victimes potentielles afin de commettre du leurre (Aslan, 2011; Babchishin, Hanson et Hermann, 2011). Il faut cependant garder en tête qu’Internet a aussi permis, par le fait même, le développement de nouvelles techniques d’enquête, telles que les méthodes sous couverture, qui ont facilité les enquêtes ainsi que les arrestations et/ou accusations pour ce type de crime (Wells, Finkelhor, Wolak et Mitchell, 2007). Les enquêtes sous couverture peuvent être conduites de diverses manières, soit en ayant des enquêteurs se faisant passer pour des mineurs, soit en ayant des policiers se faisant passer pour des mères de jeunes enfants vendant leurs services sexuels ou bien lorsque des officiers découvrent qu’un enfant a été sollicité sur Internet par des adultes (Mitchell, Wolak et Finkelhor, 2005; Mitchell et coll., 2011; Wells et coll, 2007). La technologie peut donc aussi fournir aux enquêteurs de bons outils et de bonnes preuves qui, normalement, dans des cas d’exploitation sexuelle d’enfants hors ligne, sont difficiles à obtenir. En effet, la plupart de ce qui est fait dans le

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monde virtuel laisse une trace, ce qui facilite les investigations policières. À cet effet, il est important d’aborder le fait que les enquêtes sur des cybercrimes sont significativement différentes des enquêtes criminelles qui impliquent des scènes de crimes physiques et non virtuelles (Marcumt, Higgins, Freiburgerm et Rickettst, 2010). Sur les scènes de crime de cyber enquêtes, tout le matériel numérique ou électronique impliqué ainsi que les ordinateurs font partie entière de la scène. D’autant plus, ce matériel peut être situé dans divers états, provinces et continents considérant que les infractions ont été commises via Internet (Marcumt et coll., 2010; Mitchell et coll., 2005).

Cyberdélinquant sexuel

Certains font état du fait que l’exploitation sexuelle des enfants sur Internet est une forme assez répandue d’utilisation malveillante du cyberespace, dont la production, le partage et la distribution de pornographie juvénile font partie (Babchishin, Paquette et Fortin, 2017). Babchishin, Hanson et VanZuylen (2014) expliquent d’ailleurs que les comportements sexuels criminels incluent le visionnement de pornographie illégale, la sollicitation sexuelle de mineurs, la prostitution ainsi que l’attentat à la pudeur. Cependant, selon ceux-ci, la forme la plus inquiétante serait le comportement criminel en ligne dirigé vers les enfants.

Les cyberdélinquants sexuels d’enfants font partie d’un groupe assez diversifié et il semble impossible de dresser un profil type de cyberdélinquants sexuels (Aslan, 2011). Ils font en fait partie d’un groupe assez hétérogène dans lequel chacun se définit par son histoire personnelle, sa personnalité, ses déficits, son contexte social, ce qui rend difficile la création d’une typologie de cyberdélinquants sexuels, bien que certains auteurs aient abordé le sujet (p.ex., Babchishin et coll., 2011; Elliot et Babchishin, 2012; Fortin et Roy, 2006; Seto, Reeves et Jung, 2010; Wolak, Finkelhor et Mitchell, 2011; Wolak, Mitchell et Finkelhor, 2003). Ainsi, une étude sur le sujet s’avère pertinente en raison de la connaissance limitée sur cette population, de sa complexité jusqu’à maintenant observée et de ses caractéristiques spécifiques encore peu étudiées. Aslan (2011) ajoute d’ailleurs que ces individus diffèrent en fonction de leurs cyber actions, par exemple certains vont télécharger de la pornographie

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juvénile alors que d’autres vont plutôt solliciter des enfants sur Internet. Également, ces délinquants diffèrent en fonction de la fréquence à laquelle ils consomment ou partagent des images indécentes d’enfants, par exemple, et aussi en fonction de l’âge et du sexe préféré de la victime (Wolak et coll., 2003). Certains peuvent aimer les garçons ou les filles prépubères, alors que d’autres les adolescents ou encore les jeunes enfants. D’ailleurs, ces différents types de cybercrimes sexuels envers les enfants inquiètent plusieurs parents, les autorités policières, les législateurs, les éducateurs ainsi que les avocats d’enfants (Wolak et coll., 2003). Ce sujet est même rendu au cœur des débats concernant la règlementation d’Internet. Selon Wolak, Mitchell et Finkelhor (2003), les cybercrimes sexuels sur mineurs comprennent un large éventail d’infractions, incluant l’agression sexuelle et la tentative d’agression sexuelle, l’utilisation illégale d’Internet afin de transmettre du matériel sexuellement explicite à des mineurs, ou encore solliciter des mineurs, ainsi que la possession, la distribution et la production de pornographie juvénile.

Le problème dans la facilité d’accès créée par Internet est qu’une minorité grandissante d’individus exploite ces nouvelles opportunités dans un but criminel (Staniforth, 2014). D’ailleurs, comme en témoigne la théorie du choix rationnel de Felson (1998), la rencontre des conditions pour qu’un crime se produise, soit un délinquant motivé, la présence d’une victime potentielle ainsi que l’absence de gardien, s’applique bien au phénomène de la cyberdélinquance sexuelle, et ce, considérant la grande absence de gardiens sur le web et les multiples opportunités s’offrant aux délinquants motivés. D’autant plus que les cyberdélinquants sont plus rapides pour repérer les vulnérabilités de chaque nouvelle technologie et pour les utiliser afin de commettre des délits (Staniforth, 2014). Internet est un moyen quasi parfait pour les délinquants sexuels envers les enfants puisqu’il assure la discrétion, l’anonymat ainsi qu’un nombre important d’enfants ou d’adolescents non supervisés et possiblement manipulables (Medaris et Girouard, 2002). D’ailleurs, Fortin et Paquette (2018) ajoutent que non seulement Internet favorise l’anonymat et les échanges privés, mais il crée également une lacune au niveau du contrôle puisqu’il est impossible d’assurer une surveillance complète de toutes les activités ayant lieu sur Internet. Ainsi, ces auteurs de délits n’ont plus à rôder dans les parcs ou les centres d’achats, mais n’ont qu’à se

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promener à travers les salons de clavardage afin de repérer leurs victimes (Medaris et Girouard, 2002).

Fortin, Paquette et Dupont (2017) ont fait mention du fait que plusieurs cyberdélinquants sexuels commencent par visionner de la pornographie adulte avant d’en arriver à la pornographie juvénile. Ainsi, le point de départ est la pornographie légale et, par la suite, l’exploration se poursuit et la découverte de la pornographie juvénile s’en suit. Ces auteurs suggèrent même que c’est en se familiarisant avec les plateformes des sites de pornographie adulte que le délinquant finit par tomber sur différentes offres, telles que des images d’enfants. La chaîne se poursuit alors et la personne en question continue de fréquenter ces sites pour y nourrir ses pulsions. Il est cependant important de mettre en lumière que ce n’est pas par inadvertance que ceux qui visionnent de la pornographie juvénile tombent sur des sites de ce genre. En fait, Fortin et ses collaborateurs (2017) expliquent que ce n’est pas sans effort qu’ils peuvent en arriver là. C’est à force de naviguer sur ces interfaces que les cyberdélinquants deviennent bons et en mesure d’accéder plus facilement à ce genre de contenu. Également, ils doivent connaître et apprendre les différents termes qui sont propres au milieu afin de faciliter leurs recherches, mais ils doivent aussi entretenir des conversations avec d’autres consommateurs afin d’apprendre les rudiments du milieu.

Selon Wolak et ses collaborateurs (2003), les cybercrimes sexuels contre des mineurs peuvent être séparés en trois types. Le premier comprend les cybercrimes commis envers des victimes identifiées impliquant des agressions sexuelles reliées à Internet ainsi que d’autres crimes sexuels comme la production de pornographie juvénile avec des victimes connues. Le second type inclut la sollicitation d’agent sous couverture se faisant passer pour des mineurs sur le web, ce qui implique des victimes inconnues. Le troisième et dernier type englobe la possession, la distribution et l’échange de pornographie juvénile par des délinquants qui ne se sont pas servis d’Internet pour exploiter sexuellement des victimes identifiées ou bien pour solliciter des agents sous couverture.

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Le délinquant sexuel en ligne et le délinquant sexuel hors ligne

À des fins de précision, il est important de tout d’abord définir ce qui est considéré comme étant un délinquant sexuel, population à laquelle les cyberdélinquants sexuels sont comparés pour les besoins de cette étude. La comparaison avec le délinquant sexuel, déjà bien étudié, semble être une option intéressante dans la mesure où très peu d’informations quant aux caractéristiques spécifiques des cyberdélinquants sexuels sont disponibles et qu’aucune étude n’a fait état des facteurs explicatifs de la confession chez cette population encore peu connue. Selon l’Institut National de Santé Publique du Québec (2017), est désigné comme délinquant sexuel tout individu qui a été reconnu coupable d’une infraction sexuelle.

Afin d’apporter davantage de précision, il est aussi important d’établir la différence entre l’auteur d’un crime sexuel hors ligne et l’auteur d’un cybercrime sexuel. Certains auteurs ont tenté de comparer les personnes impliquées dans la pornographie juvénile avec les délinquants sexuels s’en prenant à des mineurs. Par exemple, Babchishin et ses collaborateurs (2014), suite à leur méta-analyse, ont obtenu des résultats indiquant que ceux consommant de la pornographie juvénile ont souvent un moins grand accès direct à des enfants, mais démontrent une plus grande utilisation d’Internet. L’étude met de l'avant le fait que ces auteurs sont souvent plus jeunes, qu'ils ont un meilleur revenu et un plus haut niveau d’éducation que les agresseurs sexuels d’enfants hors ligne. D’autant plus, il semblerait, toujours selon ces auteurs, que les cyberdélinquants sexuels arrêtés pour de la pornographie juvénile aient tendance à présenter une plus grande déviance sexuelle (p. ex., pédophilie), mais aient davantage de barrières mentales les empêchant de passer à l’acte. Ces barrières mentales sont, par exemple, un plus grand niveau d’empathie envers les victimes, moins d’identification émotionnelle envers les enfants, ainsi que la présence de moins de distorsions cognitives à l’égard des enfants (Babchishin, Hanson et VanZuylen, 2014; Elliot et Babchishin, 2012). Par ailleurs, d’après les méta-analyses de Babchishin, Hanson et Hermann (2011) et d’Elliot et Babchishin (2012), les cyberdélinquants sexuels rapportent généralement moins d’abus physiques que les délinquants sexuels hors ligne. En d’autres mots, à plusieurs égards, il fut mis de l’avant que les délinquants sexuels hors ligne sont ainsi différents des délinquants sexuels en ligne (Babchishin et coll., 2011). Ceci dit, il s’avère intéressant de porter une attention particulière à la population des cyberdélinquants sexuels

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qui présente ces différences au niveau des caractéristiques sociodémographiques, ce qui pourrait également vouloir dire que des divergences en matière de facteurs explicatifs au niveau de la confession pourraient être observées dans le cadre de cette étude.

L’interrogatoire de suspects

L’interrogatoire policier ainsi que la confession d’un crime sont des éléments cruciaux lors d’une enquête policière. L’interrogatoire implique une forme de questionnement s’appliquant soit à un témoin, une victime ou bien un suspect (Gudjonsson, 2003). Dans tous les cas, il s’agit d’une façon de recueillir des renseignements, et ce, à des fins judiciaires (Gudjonsson, 2003). Bien que plusieurs facteurs, qui seront détaillés dans les pages suivantes, aient été présentés comme ayant un rôle déterminant dans la confession, il ne faut pas oublier un élément important de l’interrogatoire policier, soit les stratégies ou les techniques utilisées par les enquêteurs dans le but d’obtenir une confession. Deux modèles de l’interrogatoire policier sont majoritairement reconnus dans la littérature, soit la technique Reid et le modèle PEACE. La technique Reid a été développée dans les années 1940-1950 aux États-Unis par John E. Reid et ses collaborateurs (Inbau, Reid, Buckely et Jayne, 2004). C’est d’ailleurs la méthode d’interrogatoire la plus répandue en Amérique du Nord (Goodman, 2006; King et Snook, 2009; Moore et Fitzsimmons, 2011). Elle est enseignée aux États-Unis, au Canada, en Europe ainsi qu’en Asie (Inbau et coll., 2004). Le modèle PEACE (Planning & Preparation, Engage & Explain, Account, Closure, Evaluation) a quant à lui été développé au Royaume-Uni et s’est étendu vers d’autres pays, dont la Norvège et la Nouvelle-Zélande (Gudjonsson et Pearse, 2011). Dans le modèle PEACE, les techniques utilisées ont, selon les auteurs, pour but de favoriser la collecte de renseignements exacts (Kassin et McNall, 1991; Kelly, Miller, Redlich et Kleinman, 2013; Soukara, Bull, Vrij, Turner, et Cherryman, 2009). Ces techniques misent sur le respect et le développement d’une relation entre l’enquêteur et le suspect interrogé. Des questions ouvertes sont posées en interrogatoire afin d’obtenir la vérité, et ce, tout en considérant la présomption d’innocence. Dans le cas du modèle REID, considéré comme plus accusatoire par plusieurs auteurs (Inbau et coll., 2004; Kassin et McNall, 1991; Kelly et coll., 2013), l’enquêteur semble davantage miser sur le contrôle de la conversation et l’obtention d’aveux. En raison de ces objectifs,

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l’enquêteur est ainsi amené à parfois utiliser des techniques de manipulation afin de confronter la personne interrogée. Ce genre de méthode permet notamment à l’enquêteur de mentir ou modifier certains éléments de l’enquête lors de l’interrogatoire (p. ex., la preuve détenue), de même qu’utiliser l’intimidation et l’isolation du suspect (p.ex., faire en sorte que le suspect se sente seul et isolé, le laisser seul dans la pièce). Certaines stratégies de maximisation (p.ex., mettre l’emphase sur la preuve et la gravité morale des gestes) et de minimisation (p.ex., présenter de manière sympathique des justifications morales ou fournir des explications aux crimes afin de le rendre moins odieux aux yeux du suspect) sont aussi parfois utilisées afin de manipuler le suspect dans le but d’obtenir sa confession (Moore et Fitzsimmons, 2011).

Le modèle québécois de l’interrogatoire policier, quant à lui, s’inspire davantage du modèle PEACE où la collecte d’informations et la création d’un lien priment, bien que ce soit un modèle hybride qui inclut certaines notions du modèle Reid. Brièvement, l’interrogatoire policier au Québec, expliqué par St-Yves (2014) et St-Yves et Deslauriers-Varin (2019), se définit à travers sept étapes. La première consiste à accueillir le suspect et l’informer de ses droits. L’enquêteur doit alors s’informer de la condition du suspect, de ses inquiétudes et l’informer de tous ses droits. De plus, il est nécessaire que le policier s’assure que l’individu comprenne bel et bien les droits qui lui sont expliqués. La seconde étape repose sur la création d’un lien entre l’enquêteur et le suspect et la collecte d’informations. Durant cette étape, l’enquêteur est encouragé à établir un lien avec le suspect afin de favoriser la discussion notamment en favorisant le contact physique empathique (p.ex., mettre une main sur l’épaule, lui prendre la main), à l’appeler par son prénom et à l’écouter activement. Il peut aussi poser des questions indirectes reliées au crime et démontrer de l’intérêt et de l’empathie pour ce que la personne révèle. De manière générale, les questions sont préalablement préparées et partent du sujet plus général pour terminer avec un ton plus accusateur. L’étape se termine normalement avec une question sur l’implication du suspect dans le crime. La troisième étape est celle de l’obtention de la version des faits du suspect. Elle permet d’obtenir de nouveaux éléments qui étaient peut-être inconnus jusqu’ici, de laisser la chance à la personne de s’expliquer et de prouver son innocence. Notons que la formulation de questions ouvertes est privilégiée tout comme dans le modèle PEACE. La

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quatrième étape est la présentation de la preuve. Pour le suspect, la perception de la force de la preuve est très importante. C’est un élément déterminant qui augmente les chances de l’enquêteur d’obtenir une confession (St-Yves, 2014). La cinquième étape consiste à explorer les motivations du suspect et surmonter ses peurs. Le policier doit alors laisser la personne expliquer la ou les raisons pour lesquelles elle a commis le crime. Normalement, les peurs de l’individu seront en lien avec les conséquences du crime commis, donc en lien avec le type de délit (p.ex., un suspect accusé d’agression sexuelle envers un mineur pourrait avoir peur d’être étiqueté comme pédophile, peur d’aller en prison ou de ne plus pouvoir voir ses enfants, etc.). Ainsi, afin de surmonter ces peurs, l’enquêteur doit les identifier et les anticiper en fonction du crime commis. Ensuite, il sera en mesure d’aider la personne à trouver une méthode plus acceptable de confesser tout en maintenant son estime et son intégrité. L’enquêteur peut demander directement au suspect quelles sont ses peurs afin d’en discuter et d’explorer ses appréhensions. La sixième étape permet d’établir l’authenticité de la confession. Toutefois, afin de s’assurer de cette authenticité, la preuve est nécessaire. L’enquêteur doit alors connaître la vérité ou être en mesure de corroborer la version du suspect et inclure dans celle-ci des éléments que seul le coupable peut connaître. Finalement, l’interrogatoire se termine avec la septième étape qui est la conclusion. Souvent, durant celle-ci, le suspect est émotionnel et craintif. Afin de maintenir le lien établit préalablement, il est du ressort du policier de lui expliquer les procédures légales qui suivront et de répondre à toutes ses questions. Le but est que le suspect préserve ou retrouve sa dignité. De plus, St-Yves et Deslauriers–Varin (2019) ajoutent qu’un bon interrogatoire se qualifie notamment par la présence d’une bonne relation entre l’interrogateur et le suspect, une bonne écoute de la part de l’interrogateur ainsi que l’importance de maintenir son professionnalisme tout au long de l’entrevue d’enquête.

Les modèles explicatifs de la confession en contexte d’interrogatoire policier

D’après Kassin et Gudjonsson (2004) la confession constitue une déclaration verbale ou écrite dans laquelle une personne admet avoir commis une quelconque transgression et dans laquelle la personne reconnait sa culpabilité en lien avec un crime. Dans certains cas, la confession est présumée nécessaire afin d’obtenir l’absolution, l’acceptation sociale, la

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liberté ou bien la santé physique et mentale. Dans d’autres cas, les auteurs mettent de l’avant que la confession peut être dommageable pour le confesseur et ainsi amener des conséquences personnelles qui pourraient notamment se traduire par la perte d’argent, la perte de la liberté ou même de la vie pour le confesseur. Dans le contexte ci-présent, la confession est le fait d’avouer les gestes reprochés; les accusations criminelles portées à l’égard d’un suspect. La confession peut être un élément permettant de porter des accusations envers un individu ayant commis un crime, tout autant qu’un élément favorisant la corroboration des indices trouvés sur les scènes de crimes ainsi que les facteurs incriminants. Bien souvent, lors d’une enquête policière, lorsque les enquêteurs détiennent des preuves sans obtenir d’aveu en interrogatoire, cela est insuffisant afin de pouvoir porter des accusations envers un suspect et de le considérer coupable hors de tout doute raisonnable. Ainsi, la confession en interrogatoire devient un élément déterminant dans le processus de justice (Deslauriers-Varin, Beauregard et Wong, 2011; Deslauriers-Varin, Lussier et St-Yves, 2011; Madon et coll., 2013). Certains affirment d’ailleurs que l’obtention d’une confession d’un crime est la raison principale de l’interrogatoire policier. Dans 80% des cas, le but principal d’amener un suspect en interrogatoire est en fait d’obtenir une confession de sa part. Cependant, l’interrogatoire s’avère aussi pertinent dans d’autres situations : établir l’innocence d’un individu, déterminer ce qui s’est réellement passé et si un crime a bel et bien été commis et, parfois, simplement recueillir des informations pertinentes à l’enquête (Stephenson et Moston, 1994). Gudjonsson (2003) a mentionné que dans plusieurs cas, sans confession, les policiers n’auraient rien contre l’accusé.

Différents modèles ont été proposés au fil des années afin d’expliquer le phénomène de la confession. L’un des premiers à avoir proposé un modèle en lien avec la confession est Horowitz (1956). Ce dernier a mis en lumière l’importance de cinq conditions psychosociales à la confession. La première est l’accusation. Horowitz (1956) explique qu’il est primordial que le suspect perçoive qu’il est accusé justement ou à tort, c’est-à-dire qu’il doit croire que l’interrogateur le croit coupable. Il est également important qu’il ait l’impression que son espace pour se déplacer est limité, qu’il ressente de l’insécurité et qu’il soit confronté à une personne en autorité. La seconde est la preuve. L’auteur explique l’importance de la perception qu’a le suspect de la preuve; seul le fait de croire que les enquêteurs détiennent

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des éléments prouvant sa culpabilité serait suffisant pour mener à l’aveu. La troisième désigne l’importance d’un climat hostile dans lequel le suspect se sent seul, laissé à lui-même et dans lequel il est le seul à pouvoir se sortir de cette situation. La quatrième condition réfère au sentiment de culpabilité. Il semblerait selon Horowitz (1956) que le fait de se sentir coupable face aux gestes reprochés joue un rôle important dans la confession. Le but est de faire en sorte que la personne accusée en vienne à ressentir de l’hostilité envers elle-même et que la confession devienne en quelque sorte une porte de sortie vers un état émotionnel plus serein. La cinquième et dernière condition consiste en la perception du suspect que la confession constitue le seul chemin vers la liberté psychologique. Le suspect est alors amené à percevoir l’aveu comme une résolution à son conflit interne.

Quelques années plus tard, Reik (1973) a proposé un modèle explicatif similaire à celui d’Horowitz s’inspirant des théories psychanalytiques. Tout comme Horowitz (1956), Reik (1973) aborde la confession comme une manière de résoudre le conflit interne vécu par le suspect et comme un retour vers l’équilibre. Il ajoute cependant que la confession découlerait d’une tendance à l’autopunition. En ce sens, l’accusé, en avouant ses délits, exprime sa volonté de se réinsérer dans la société, et ce, en acceptant le fait de devoir être puni afin de pouvoir retrouver l’équilibre. Contrairement à Horowitz (1956), Reik (1973) établit donc qu’une seule condition est nécessaire à l’aveu : le fait de ressentir de la culpabilité.

Au fil du temps et du développement des connaissances sur le sujet, un troisième modèle a été développé par Irving et Hilgendorf en 1980. Le modèle de ces auteurs propose une approche différente qui ne met pas l’accent sur l’inconscient, mais plutôt sur la notion de choix, de décisions en fonction des coûts et bénéfices perçus. Il est ainsi avancé que, dans un contexte où un individu est accusé d’un crime, cet individu procèdera au calcul des coûts et des bénéfices associés au fait de confesser ou non, dire la vérité ou mentir. Il s’agit donc d’un choix rationnel, basé sur un processus décisionnel. Il est important de noter que, après réflexion, l’individu confronté aux accusations fera un choix en fonction de sa perception de la situation, de ses connaissances et de son expérience et non pas en fonction d’une évaluation objective de la situation et des éléments retenus contre lui.

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Ce modèle s’apparente ainsi à la théorie du choix rationnel de Cornish et Clarke (1986), bien connue en criminologie, développé quelques années plus tard : tout individu fait des choix en fonction de son analyse des coûts et des bénéfices retirés dans diverses situations. Ainsi, un individu peut décider de commettre un délit lorsqu’il considère qu’il en retirera davantage de bénéfices (Cornish et Clarke, 1986). Au cours de l’interrogatoire, le suspect interrogé doit faire un choix qui influencera l’issue de l’interrogatoire (confession ou négation) et passe ainsi par un processus décisionnel caractérisé par des mécanismes psychologiques (Yang, Guyll et Madon, 2017). Selon Yang, Guyll et Madon (2017), l’individu prend une décision en choisissant parmi les options qui s’offrent à lui, dans un espace décisionnel que ces auteurs définissent comme étant l’amalgame des choix qui se présentent à une personne selon une situation donnée. Yang et ses collaborateurs (2017) expliquent aussi que le choix qui est fait par la personne en question l’est en fonction de l’utilité qu’il représente pour celle-ci. C’est pourquoi le choix du suspect dans le cadre d’un interrogatoire policier n’est pas basé sur ce qui risque réellement de se produire, mais bien sur ce que l’individu croit qui se produira suite à la confession ou la non-confession (Gudjonsson, 2003).

Quelques années plus tard, Gudjonsson (1992) a présenté un modèle cognitivo comportemental développé à partir des modèles antérieurs et issu de la théorie de l’apprentissage social. Ce modèle présente la confession comme le résultat d’une relation entre le suspect et son environnement. Brièvement, le modèle de Gudjonsson (1992) a permis d’approfondir davantage l’explication des relations pouvant exister entre les facteurs interagissant dans le processus de la confession. D’après ce dernier, cinq éléments visent à expliquer ce qui peut favoriser ou nuire au processus de l’aveu : 1) les évènements sociaux provenant du contexte (p.ex., pression exercée par la police, isolement), 2) les évènements émotionnels (p.ex., sentiment de culpabilité), 3) les évènements cognitifs (p.ex., discours/conflit interne), 4) les évènements physiologiques (p.ex., fatigue, intoxication à la drogue ou à l’alcool), et 5) les évènements situationnels (p.ex., avoir eu les conseils d’un avocat, connaissance du processus judiciaire, arrestation). En résumé, le modèle fait état de l’importance de la relation entre le suspect et son contexte dans l’explication de la confession. Également, Gudjonsson (1992) suggère que ces facteurs sont étroitement liés aux

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conséquences perçues par le suspect de la confession, lesquelles peuvent influencer la décision du suspect quant à la confession ou la non-confession. Encore une fois, la perception du suspect de la situation et des conséquences pouvant suivre sa décision joue un rôle significatif dans le processus de l’aveu. Ces divers modèles théoriques ne prennent pas, pour la plupart, en considération les facteurs externes à l’individu (p.ex., les techniques d’interrogatoire utilisées, le fait d’avoir eu les conseils d’un avocat) pouvant expliquer la confession. Il apparaît alors intéressant de pousser davantage la réflexion vers l’importance de facteurs externes au phénomène de confession en contexte d’interrogatoire, ce qui sera abordé dans le cadre de la présente étude tout comme Gudjonsson (1992) l’a présenté à l’aide du modèle cognitivo comportemental de l’aveu.

Les études empiriques sur la confession

Depuis plusieurs années, certains chercheurs ont tenté d’expliquer la confession et d’en vérifier empiriquement les facteurs déterminants. En fin de compte, ce qui ressort de l’ensemble des études sur le processus décisionnel entourant la confession d’un acte criminel, c’est que plusieurs catégories de facteurs contribuent à l’aveu. Plus précisément, les caractéristiques individuelles du délinquant, les facteurs criminologiques, ainsi que le contexte dans lequel l’interrogatoire a lieu jouent tous un rôle dans ce processus (Deslauriers-Varin, Lussier et St-Yves, 2011).

Quelques auteurs ont étudié les facteurs influençant la confession, notamment Gudjonsson et Petursson (1991). Leur étude comprenait 74 suspects dont 68 des hommes et 6 des femmes purgeant des peines dans des prisons islandaises pour des crimes violents incluant, entre autres, des homicides (17%), des crimes sexuels (11%) et des crimes contre la propriété (38%). Les individus ont eu à répondre à différents questionnaires, dont le Confession Questionnaire. En ordre de priorité, les délinquants ont mentionné avoir confessé puisqu’ils pensaient qu’un jour ou l’autre, la police allait être en mesure de prouver leur implication dans le crime, avaient un besoin interne de confesser, ressentaient de la pression venant de l’extérieur, notamment de l’environnement policier, craignaient d’être emprisonnés et en raison de la force de persuasion de la police. Ces facteurs ont été

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déterminés comme jouant un rôle important dans la décision de confesser son crime lors d’un interrogatoire policier. Également, les pressions externes, par exemple les techniques d’interrogatoires utilisées et la peur du procès, se sont avérées être des éléments expliquant la confession, tout comme le sentiment de culpabilité et le besoin de se confesser qui relèvent davantage de pressions internes (Gudjonsson, 2003; Kassin et Gudjonsson, 2004; St-Yves et Landry, 2004).

Malgré l’existence de quelques études sur la confession, et malgré un essor assez important des études sur le sujet au cours des dernières années, celles-ci demeurent limitées et peu se sont intéressées au processus décisionnel. Dans le cadre de la présente étude, il devient intéressant de se pencher particulièrement sur les données d’études canadiennes puisque peu d’auteurs ont abordé le thème de la confession auprès d’une population québécoise. Notons d’ailleurs que celle-ci se veut être une première au Québec, d’où l’intérêt de se baser sur ce qui a été réalisé jusqu’à maintenant au Canada, puisque les données sont en fait ce qui se rapproche le plus du présent projet de recherche considérant que peu d’informations sont disponibles dans les études antérieures quant à ce thème et à la population spécifique étudiée. Ceci devient possible en observant les données provenant des études de Deslauriers-Varin, Lussier et St-Yves (2011) et Deslauriers-Varin, Beauregard et Wong (2011) qui ont décidé d’approfondir la question dans le cadre d’études réalisées auprès de 254 hommes incarcérés, pour des crimes variés, au Centre Régional de Réception dans la province de Québec. Tous les détenus ont rempli un questionnaire et les dossiers de ceux-ci ont également été consultés dans le cadre des études afin de connaître les éléments reliés à la confession. Aux termes de leur étude, Deslauriers-Varin, Lussier et St-Yves (2011) ainsi que Deslauriers-Varin, Beauregard et Wong (2011) ont été en mesure de déterminer, premièrement, que les caractéristiques sociodémographiques de l’individu n’ont pas de lien significatif avec la confession d’un crime.

Deuxièmement, Deslauriers-Varin, Lussier et St-Yves (2011) ont constaté que les facteurs criminologiques tels que la gravité du crime ont une influence significative et positive sur la confession en interrogatoire policier. Notons toutefois que Madon, Yang, Smalarz, Guyll et Scherr (2013) sont arrivés à une conclusion contradictoire, c’est-à-dire que

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la gravité du crime aurait plutôt une influence négative sur la confession. Leur étude a été réalisée auprès de 118 étudiants, dont 53 femmes et 65 hommes de premier cycle suivant des cours de psychologie à l’Iowa State University. Les étudiants ont tous été questionnés à propos de 20 comportements criminels et non éthiques pour lesquels il leur avait été demandé de nier ou d’avouer. Les étudiants étaient par la suite questionnés sur s’ils avaient été engagés ou non dans ces comportements non éthiques ou criminels. Selon les auteurs, plus un crime est grave et sérieux, moins le suspect aura tendance à confesser. Au contraire, c’est le fait que le crime ne soit pas si grave qui favorise la confession. Notons qu’il est possible de penser qu’une différence au niveau des résultats entre l’étude de Madon et ses collaborateurs (2013) et celle de Deslauriers-Varin, Lussier et St-Yves (2011) pourrait être dû à l’échantillon qui d’un côté est composé de réels détenus et de l’autre d’étudiants. On compare alors une étude sur une population réelle à une expérimentation sur des étudiants.

Finalement, les études antérieures ont mises de l’avant que les facteurs contextuels jouent le rôle le plus important et le plus déterminant dans la confession (p.ex., Deslauriers-Varin, Lussier et St-Yves, 2011; Deslauriers-Deslauriers-Varin, Beauregard et Wong, 2011; Gudjonsson, 2003; Snook et coll., 2015). En effet, le fait de se sentir coupable, de ne pas avoir recours à l’aide juridique ainsi que le fait de percevoir la preuve contre soi comme étant forte sont tous des éléments faisant en sorte qu’un individu est plus enclin à confesser. Toutefois, il ne faut pas mettre de côté l’importance de la preuve qui, également, a démontré sa valeur dans la résolution d’enquêtes. En fait, autant Deslauriers-Varin, Beauregard et Wong (2011), Gudjonsson (2003), Snook et ses collaborateurs (2015), que Stephenson et Moston (1994) ont abordé l’importance de la force de la preuve dans la confession d’un crime. En effet, plus la preuve est solide et forte aux yeux du délinquant, plus il sera enclin à confesser. Les résultats de l’étude de Deslauriers-Varin, Beauregard et Wong (2011) ont permis de déterminer que la force de la preuve est un des facteurs les plus importants dans la décision de confesser en contexte d’interrogatoire policier. Les résultats indiquent également que le fait d’avoir bénéficié de conseils juridiques, l’historique criminel, la présence de complices et le type de crime ont eux aussi leur rôle à jouer dans le processus décisionnel de la confession d’un crime. Ces dires sont également appuyés par Snook et ses collaborateurs (2015) qui ont réalisé une étude auprès de 100 hommes canadiens détenus pour des crimes

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variés dans différents établissements correctionnels ou en attente d’une sentence, d’un verdict ou d’un procès, dont certains provinciaux et d’autres fédéraux. Pour recueillir les informations, des entrevues ont été réalisées avec les individus à partir d’un protocole préalablement établi. Les auteurs ont mis en lumière le fait qu’un suspect est plus enclin à confesser lorsque la force de la preuve est élevée, lorsque l’interrogateur fait preuve d’humanité, lorsque le suspect possède peu ou pas d’antécédents criminels et lorsqu’il n’a pas reçu de conseils juridiques. Notons également que plusieurs autres auteurs s’entendent pour affirmer l’importance d’une relation humaine dans le processus de l’aveu (Deslauriers-Varin, St-Yves et Gagnon, 2020; Kebbell, Alison, Hurren, et Mazerolle, 2010; Snook et coll., 2015; St-Yves, 2014; St-Yves et Deslauriers-Varin (2019); Wachi et coll., 2014). En effet, il semblerait qu’une approche plus éthique et humaine, se rapprochant davantage de la relation d’aide, favoriserait l’obtention d’une confession chez les suspects. Toutes les études ne mènent pas aux mêmes résultats, toutefois, comme il a été montré précédemment, la majorité de celles-ci permettent de déterminer environ les mêmes facteurs entrant en jeu dans le processus décisionnel de la confession, notamment la force de la preuve, le sentiment de culpabilité et les techniques d’interrogatoire utilisées. Ceci dit, elles révèlent des résultats variés et parfois contradictoires.

Mentionnons également que des différences quant aux taux de confession ont été constatées dans la littérature en fonction du type de crimes commis. D’après divers auteurs, la nature du crime commis peut jouer un rôle dans la décision de confesser (Faller, Birdsall, Henry, Vandervort et Silverschanz, 2002). Par exemple, les suspects impliqués dans des crimes contre les biens, par rapport à ceux impliqués dans des crimes violents, confessent davantage (St-Yves et Landry, 2004). Il a d’ailleurs été suggéré que les différences entre les taux de confession en fonction du type de crime pourraient être expliquées par la gravité du crime. Ainsi, les suspects ayant commis des crimes moins sérieux seraient plus enclins à confesser que ceux ayant commis des crimes dont la gravité est perçue comme étant modérée ou élevée (St-Yves et Landry, 2004). Notons que les études de Beauregard et Mieczkowski (2012) et de Gudjonsson et Sigurdsson (2000) ont également permis d’observer que le type de délit a bel et bien une influence sur les taux de confession lors de l’interrogatoire policier. En effet Beauregard et Mieczkowski (2012), dans leur étude réalisée auprès de 624

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délinquants sexuels incarcérés dans un pénitencier canadien entre 1994 et 2005, ont été en mesure de constater que les individus ayant commis une agression sexuelle sur une victime de 14 ans et plus avaient tendance à moins confesser que les agresseurs d’enfants dont les victimes avaient moins de 14 ans. Gudjonsson et Sigurdsson (2000) ont aussi réalisé une étude en Islande auprès d’individus incarcérés pour des crimes violents ou des crimes sexuels. Encore une fois, les auteurs ont pu constater que les individus ayant commis des agressions sexuelles envers des femmes (31%) confessaient moins que ceux ayant commis des crimes violents (77%) et que ceux ayant commis des agressions sur des enfants (83%). Il apparaît donc que le type de délit commis joue bel et bien un rôle sur la probabilité de confession d’un suspect, particulièrement dans le cas de crimes sexuels. C’est pourquoi certaines études se sont spécifiquement attardées à cette sous-population de délinquants afin de mieux comprendre le processus décisionnel en jeu lors d’interrogatoire policier pour ce type de délit. Ceci rappelle également l’intérêt d’étudier le phénomène de la confession chez les cyberdélinquants sexuels afin de pouvoir déterminer si ce groupe d’individus a tendance à confesser davantage que d’autres ou non. Ceci pourrait permettre de soutenir ou de contredire l’hypothèse selon laquelle le type de crime joue un rôle dans la probabilité de confession.

Confession chez les délinquants sexuels et ses facteurs explicatifs

Dans le cadre d’enquêtes visant des crimes sexuels hors ligne/avec contact, trois éléments permettent généralement de prouver la culpabilité d’un suspect, soit la déclaration d’un témoin ou d’une victime, la présence d’une preuve physique ou la confession du crime (Klockars et Mastrofski, 1991). Encore une fois, la confession se trouve à être un élément crucial comme pour les autres crimes. Il s’agit bien souvent de la principale, voire même la seule preuve de culpabilité pour ce type de crime (St-Yves, 2002). Or, tel que susmentionné, le type de délit semble influencer les taux de confession et plusieurs études ont, rappelons-le, permis de constater que les délinquants sexuels sont moins enclins à confesser leur crime en contexte d’interrogatoire. Le taux de confession chez les individus ayant commis un meurtre, par exemple, s’élève à 49% alors que chez les délinquants sexuels, ce taux est de seulement 28% (Holmberg et Christianson, 2002). St-Yves (2002) a obtenu des résultats

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similaires dans une étude sur la confession des délinquants sexuels québécois alors que seulement 33,5% ont confessé. Ce plus faible taux de confession pourrait notamment être expliqué en raison de l’humiliation que ces individus peuvent vivre lors de l’interrogatoire policier (Beauregard et coll., 2010; Beauregard et Mieczkowski, 2011, 2012). Il faut cependant noter que Mitchell (1983), dans une des premières études sur l’interrogatoire auprès de délinquants sexuels et de délinquants ayant commis d’autres types de délits, fait quant à lui état de résultats différents. Il semblerait, selon cet auteur, que les délinquants sexuels confessent davantage que les autres catégories de suspect, tel que ceux commettant des crimes contre les biens ou des crimes violents (89,3% vs. 52,5%). Ce résultat pourrait être expliqué, selon Gudjonsson (1992), par la pression interne vécue par le délinquant sexuel, et ce, en lien avec le sentiment de culpabilité.

Jusqu’à maintenant, certaines études ont abordé le sujet de la confession chez les délinquants sexuels et tout comme pour les études auprès d’échantillons généraux de contrevenants, ces études ont mesuré l’influence de trois catégories de facteurs reliés à la confession : sociodémographiques (p.ex., âge, ethnicité, statut matrimonial, personnalité), délictuels (p.ex., antécédents criminels, type de geste posé, la fréquence des abus) et situationnels/contextuels (p.ex., présence d’un avocat, techniques utilisées, sentiment de culpabilité) dans l’explication de la confession en contexte d’interrogatoire policier. Similaires aux résultats obtenus dans les études auprès d’échantillons généraux de délinquants, les quelques auteurs s’étant intéressés à ce sujet ont été en mesure d’associer la confession chez les délinquants sexuels à des caractéristiques variées comme le fait d’être jeune, célibataire, caucasien, d’avoir une personnalité introvertie ainsi que le fait de ressentir de la culpabilité (Beauregard et coll., 2010; Beauregard et Mieczkowski, 2012; Faller et coll., 2002; Lippert et coll., 2010; St-Yves, 2002).

Plus particulièrement, certaines études ont permis de confirmer que l’âge est lié positivement à la confession chez les auteurs de crimes sexuels (Beauregard et coll., 2010; Beauregard et Mieczkowski, 2012; Faller et coll., 2002). À cet effet, les suspects plus jeunes seraient plus enclins à confesser que les plus âgés (St-Yves et Landry, 2004). Ensuite, les résultats de Faller et ses collaborateurs (2002) ont mis en lumière le fait que l’emploi a

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également son rôle à jouer dans la confession. Ainsi, les suspects de crimes sexuels sans emploi ou bien ayant des emplois peu qualifiés sont ressortis comme plus enclins à se confesser. Au niveau de la personnalité, le fait d’être introvertie est associé positivement à la confession (Beauregard et coll., 2010; Beauregard et Mieczkowski, 2012; Gudjonsson et Sigurdsson, 2000). Faller et ses collaborateurs (2002), dans leur étude réalisée auprès de 318 suspects du Michigan âgés de 14 à 73 ans et ayant commis des crimes sexuels à l’égard d’enfants, ont aussi mis de l’avant que les comportements commis lors du crime sexuel envers un enfant peut jouer un rôle dans la confession. En effet, dans les cas incluant un acte de pénétration, le taux de confession partielle s’élevait à 37,5% alors que le taux de confession complète à 31%. Les résultats mettent aussi en lumière que la fréquence des abus joue un rôle significatif dans la confession. Plus précisément, dans les cas où les abus ont été répétés à plus de 10 reprises, le taux de confession se trouve à 80% par rapport à 55 à 60% dans les cas où il y avait moins d’abus. Également, certains s’entendent pour dire que les agresseurs sexuels d’adultes ont tendance à être moins enclins à confesser que les agresseurs d’enfants (Beauregard et Mieczkowski, 2012; Gudjonsson et Sijurdsson, 2000). En fait, les agresseurs d’enfants tendraient davantage vers la confession en raison d’une pression interne plus importante que les agresseurs d’adultes ou des gens commettant des crimes violents par exemple. De surcroît, certaines études semblent suggérer que de ne pas connaître la victime a une influence positive sur la confession du délinquant sexuel (Beauregard et coll., 2010). Dans l’étude de Beauregard et ses collaborateurs (2010), 76% des individus qui ont confessé connaissaient leur victime alors que cette prévalence monte à 85% chez ceux qui ont nié.

L’étude de Faller et ses collaborateurs (2002) réalisée auprès d’agresseurs sexuels d’enfants a également permis d’observer que le corps policier enquêtant sur le crime commis a une influence sur la confession. Les corps policiers situés dans les grandes villes, contrairement à ceux de petites villes, de municipalité ou de comtés obtiennent davantage de confession (75 % versus 66%). Également, il semblerait que la collaboration entre la police des grandes villes et les services sociaux favorise un meilleur taux de confession que lorsque la collaboration avec les services sociaux se fait avec un autre type de corps policier (84% versus 61%). En comparaison avec le Québec, la police des grandes villes pourrait être la Sûreté du Québec ou le Service de Police de la Ville de Montréal par exemple. Par la suite,

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l’étude a mis en lumière le fait que le type d’avocat a une influence sur la confession. Les résultats ont permis de conclure que d’avoir un avocat provenant de l’aide juridique (commis d’office aux États-Unis) influence davantage la confession (70%) par rapport au fait d’avoir engagé un avocat (45%). Autrement, Gudjonsson et Sigurdsson (2000), tel que susmentionné, ont constaté une relation positive entre le fait que le suspect perçoive la preuve comme étant forte et solide et une confession dans le cas d’agresseurs sexuels d’enfants. Finalement, la variable du sentiment de culpabilité est également associée positivement à la confession ainsi que la personnalité du suspect (Beauregard et Mieczkowski, 2012). Beauregard et Mieczkowski (2012) associent d’ailleurs la présence d’un sentiment de culpabilité par rapport aux gestes reprochés à un plus haut taux de confession chez un suspect ayant commis un ou des crimes à caractère sexuel.

Considérant le fait que le type de crime peut avoir une influence sur la propension à confesser, il s’avère intéressant de vérifier si dans le cas d’une sous-population comme les cyberdélinquants sexuels ayant pour victimes des enfants, des différences ou des similarités sont observées en termes de confession. En regard des études plus récentes sur le sujet, il est possible de croire que les délinquants sexuels sont moins enclins à confesser que les autres types de délinquants. Il est aussi intéressant, en regard des études antérieures, de constater que les délinquants sexuels hors ligne et ceux en ligne se distinguent les uns des autres (p.ex., Babchishin et coll., 2011). Il est donc possible de croire, puisqu’étant différents au niveau de leurs caractéristiques sociodémographiques, psychologiques et criminologiques (Babchishin et coll., 2011; Babchishin et coll., 2014; Elliot et Babchishin, 2012), que cette différence puisse aussi être observée lorsqu’il est question de leur propension à confesser et des facteurs explicatifs favorisant leur confession. Or, aucune étude à ce jour ne s’est penchée sur cette question.

Notons que ce sont les mêmes catégories de facteurs que ceux qui expliquent la confession de délinquants non sexuels qui ressortent, ceci dit, ils n’ont pas tous le même poids dans le processus décisionnel de la confession. Par exemple, comme il a été abordé précédemment, la pression interne en lien avec le sentiment de culpabilité joue un rôle important dans la confession de délinquants sexuels, alors qu’elle est moins importante dans

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des cas tels que des crimes contre les biens (Gudjonsson, 1992). Autrement, pour d’autres, il se peut que ce soit la force de la preuve qui ait une influence plus importante sur la confession ou encore le fait d’avoir ou non des antécédents criminels (Deslauriers-Varin, Beauregard et Wong, 2011; Snook et coll., 2015). Cela pourrait probablement permettre d’expliquer la différence au niveau des taux de confession chez divers types de délinquants et notamment probablement même au sein de la population à l’étude. Comme le poids des facteurs explicatifs entourant la confession semble varier en fonction du type de délit, il est possible de croire que cela s’appliquera également à la population à l’étude d’autant plus qu’aucune étude ne s’est encore penchée sur la question.

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Problématique

Au Québec, les connaissances sur la confession en contexte d’interrogatoire policier sont limitées. En effet, peu d’études sur le sujet ont été réalisées, d’autant plus que la majeure partie des travaux sur le thème provient du Royaume-Uni ou des États-Unis (Deslauriers-Varin, Lussier et St-Yves, 2011; Deslauriers-(Deslauriers-Varin, St-Yves et Gagnon, 2020). De plus, malgré le nombre grandissant de crimes sexuels commis en ligne, les connaissances sur ce type de délit et leurs auteurs sont plutôt limitées et encore aucune étude, à ce jour, n’a abordé la confession en contexte d’interrogatoire chez les cyberdélinquants sexuels ayant pour victimes des enfants. En ce sens, il devient pertinent de porter une attention particulière à cette population en ce qui concerne la confession alors que les cyberdélinquants sexuels envers des mineurs semblent très différents des agresseurs sexuels avec contact (Babchishin et coll., 2014). En effet, certains auteurs ont mis de l’avant que les délinquants sexuels « traditionnels » (c.-à-d., ceux qui n’opèrent pas sur Internet, donc hors ligne) divergent des autres types de délinquants de tout genre quant aux facteurs qui expliquent la confession en contexte d’interrogatoire policier (Gudjonssion, 1992). D’autant plus qu’il existe également des différences au sein des délinquants sexuels traditionnels quant aux facteurs explicatifs de la confession (Beauregard et coll., 2010; Beauregard et Mieczkowski, 2011, 2012), il est alors possible de croire que cette différence s’applique et s’étend aux cyberdélinquants sexuels puisqu’ils semblent, d’après le peu d’études réalisées jusqu’à maintenant sur cette population, se caractériser différemment des délinquants sexuels (Babchishin et coll., 2011).

Comme la population à l’étude semble faire partie d’une classe à part de délinquants tout comme les délinquants sexuels traditionnels et que la connaissance des facteurs spécifiques à ces cyberdélinquants est encore très limitée, il est envisageable de penser que le phénomène de confession s’explique par différents facteurs que ceux s’appliquant aux autres types de délinquants. C’est pourquoi la présente étude tentera de déterminer les facteurs explicatifs de la confession chez cette sous-population de délinquants sexuels précise, afin, ultimement, de développer des stratégies d’interrogatoire spécifiquement adaptées pour les auteurs de ce type de délit. Cela pourra par exemple donner des pistes aux enquêteurs quant à la meilleure façon d’aborder la question de la culpabilité lors de leurs interrogatoires avec des cyberdélinquants sexuels envers des mineurs. Sur le plan des

Figure

Tableau 1. Présentation des variables à l’étude – Fréquence (%)   Variables  Fréquence (%)  Variables sociodémographiques  Âge   17 à 34 ans  35 ans et plus  41 (51,2) 39 (48,8)  Statut matrimonial  Célibataire  En couple  46 (57,5) 31 (38,8)  Statut paren
Tableau  2.  Analyses  de  Khi-2  entre  les  variables  sociodémographiques,  contextuelles  et  délictuelles et l’issue finale de l’interrogatoire – n (%)
Tableau 3. Matrice de corrélation (Rho de Spearman) des variables significatives   Relation  interrogateur /suspect  Attitude suspect  Engage dès le départ  Remords  Durée de
Tableau  4.  Modèle  de  prédiction  de  la  confession  complète  en  contexte  d’interrogatoire  policier

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