• Aucun résultat trouvé

Succès et difficultés de la mise en œuvre des plans d'action de lutte contre les changements climatiques du gouvernement québécois 2006-2012 et 2013-2020

N/A
N/A
Protected

Academic year: 2021

Partager "Succès et difficultés de la mise en œuvre des plans d'action de lutte contre les changements climatiques du gouvernement québécois 2006-2012 et 2013-2020"

Copied!
281
0
0

Texte intégral

(1)

© Hélène Caron, 2019

Succès et difficultés de la mise en œuvre des plans

d'action de lutte contre les changements climatiques du

gouvernement québécois 2006-2012 et 2013-2020

Thèse

Hélène Caron

Doctorat en sociologie

Philosophiæ doctor (Ph. D.)

Québec, Canada

(2)

SUCCÈS ET DIFFICULTÉS DE LA MISE EN

ŒUVRE DES PLANS D’ACTION DE LUTTE

CONTRE LES CHANGEMENTS CLIMATIQUES

DU GOUVERNEMENT QUÉBÉCOIS

2006-2012 ET 2013-2020

Thèse

Hélène Caron

Sous la direction de :

Andrée Fortin, directrice de recherche

Louis Guay, codirecteur de recherche

(3)

II

RÉSUMÉ

Les changements climatiques « reflètent ce que la science dit et ce dont la politique tient de plus en plus compte » (Ouranos, 2015). La présente thèse consiste à documenter la mise en œuvre des deux derniers plans de lutte contre le réchauffement du climat préparés par le gouvernement québécois, soit Le Québec et les changements climatiques : un défi pour l’avenir. Plan d’action 2006-2012, ainsi que Le Québec en action. Vert 2020. Plan d’action 2013-2020 sur les changements climatiques. Au croisement des travaux en sociologie de l’action publique (Matland, 1995 ; Kübler et Maillard, 2009), des perspectives théoriques de la modernisation écologique et de sa tradition d’étude des politiques publiques (Béal, 2016), comment se déroule cette mise en œuvre, d’une part, et pourquoi y a-t-il des succès et des difficultés, d’autre part ?

Même si le Québec pénètre de plain-pied dans la société à faible carbone, grâce à son tandem énergétique éolien-hydroélectrique, la lutte contre les changements climatiques représente un défi considérable qu’il a accepté de relever en se dotant d’une cible ambitieuse. Le PACC 2006-2012 a fait avancer les choses, mais beaucoup reste à faire et il y a un bémol : le PACC 2013-2020 permettra-t-il d’atteindre sa cible de réduction de 20 % des émissions de GES par rapport au seuil de 1990 (Gouvernement du Québec, 2012a, p. I) ? Au 31 mars 2016, on constate la sous-utilisation du PACC 2013-2020, car à peine 22 % du budget prévu se trouve entamé (MDDELCC, 2017a, p. 46). Les baisses d’émissions de GES et l’adaptation aux changements climatiques se font attendre.

La thèse s’inscrit dans le cadre théorique de la modernisation écologique (Huber, 1982 ; Spaargaren et Mol, 1992 ; Hajer, 1995 ; Jänicke, 1995 ; Mol, 2003 ; Christoff, 2009 ; Spaargaren et al., 2009 ; Toke, 2011), que plusieurs dépeignent comme la version sociologique du projet du développement durable, centrée sur les acteurs gouvernementaux et industriels, puis la société civile (Buttel, 2003). Par ailleurs, source de richesse analytique et compréhensive qui échappe aux études quantitatives, la méthode privilégiée est l’entretien semi-dirigé (Fortin, 2013) auprès des maîtres d’œuvre de ces PACC, des fonctionnaires pour la plupart, ainsi que l’analyse de contenu (Leray, 2008) pour le traitement des données. Mais les limites évidentes des indicateurs et de la méthode

(4)

III

qualitative impliquent une vérification partielle des hypothèses. En outre, la thèse de la modernisation écologique se situe dans le long terme et a besoin de temps pour se soumettre à une vérification empirique (Guay, 2018).

Les résultats actuels s’interprètent à l’aide de deux hypothèses. 1) La 1ère hypothèse veut que les deux plans d’action liés à la lutte contre les changements climatiques s’inscrivent dans la mise en œuvre de la modernisation écologique. 2) La 2e

hypothèse veut que les PACC 2006-2012 et 2013-2020 proposent une mise en oeuvre originale des politiques publiques contemporaines (Matland, 1995 ; Kübler et Maillard, 2009), à cause de l’impondérabilité et du rôle des connaissances scientifiques, que recèlent les politiques publiques de lutte contre les changements climatiques.

Cette brève incursion dans la boîte noire des politiques publiques (Latour, 1999 ; Hackmann et al., 2014 ; Dunlap et Brulle, 2015) pose un regard sociologique sur le rôle et les représentations des maîtres d’œuvre gouvernementaux et citoyens de ces plans d’action. Les principaux résultats obtenus confirment en partie les hypothèses de recherche. La 1ère hypothèse se trouve partiellement infirmée, car la modernisation écologique en cours paraît inachevée. Deuxièmement, les résultats obtenus à partir des indicateurs montrent que le cheminement des deux PACC pourrait présager de la nouvelle mise en œuvre évolutive, qui prend acte des impondérables de la lutte contre les changements climatiques, et dont les enjeux se définissent en cours d’action, à cause des décrets compromissoires entre la société et la science. Les objectifs deviennent de plus en plus clairs et consensuels, quoique les moyens à privilégier posent problème.

Six apports majeurs découlent de la thèse. D’abord, trois nouveaux indicateurs de la modernisation écologique émergent de la mise en œuvre des deux PACC. Il s’agit de la transition énergétique, de l’articulation locale et globale de la lutte contre les changements climatiques, ainsi que la corrélation avec le prix du pétrole. Puis il s’avère pertinent d’ajouter deux nouveaux indicateurs de la mise en œuvre de toute politique publique contemporaine, à savoir l’adéquation entre l’équipe de conception et celle de la mise en œuvre (Rocher, 2010), de même que la volonté politique, scellée par l’acceptation sociale. Enfin et tel qu’explicité ci-haut, l’ajout de la catégorie de la mise en œuvre évolutive des

(5)

IV

politiques publiques contemporaines paraît pertinent. Au bilan, l’analyse des données montre que la thèse de la modernisation écologique conserve sa pertinence et peut encore servir de cadre théorique et normatif dans le domaine de la lutte contre les changements climatiques.

Finalement, de séduisantes recherches à saveur historique et anthropologique prolifèrent récemment, qui promeuvent le paradigme d’un déterminisme climatique (Dunlap et Brulle, 2015) sur le changement social (Issar et Zohar, 2004 ; Nunn, 2007 et 2018). En reconnaissant la responsabilité humaine dans le réchauffement planétaire, le présent propos se place à contre-courant du fatalisme ambiant et reflète la complexité, mais aussi la capacité des sociétés de changer les choses.

(6)

V

ABSTRACT

Climate change represents what science says and what politics is increasingly taking into account (Ouranos, 2015). The purpose of this thesis aims to document the implementation of the two last action plans against global warming, prepared by the Governement of Québec, namely Le Québec et les changements climatiques : un défi pour l’avenir. Plan d’action 2006-2012, and Le Québec en action. Vert 2020. Plan d’action 2013-2020 sur les changements climatiques. At the junction between the analysis of public action (Matland, 1995 ; Kübler et Maillard, 2009) and the theoretical framework of the ecological modernization and its tradition of the public policies sociology (Béal, 2016), this thesis tries to answer two questions : how is the implementation carried out and why are there successes and difficulties to this adoption?

Québec gets its foot in a low-carbon society, through the wind and hydroelectric energy tandem. However, fighting against climate change represents a major challenge, which Québec has accepted with an ambitious target. The PACC 2006-2012 got some basis implemented, but there remains a lot to do and outcomes remain unknown : will the PACC 2013-2020 achieve its greenhouse gas emissions reduction target of 20 % below the line of 1990 (Gouvernement du Québec, 2012a, p. I) ? At march 31, 2016, one notes the under-implementation of the PACC 2013-2020, since 22 % only of the planned budget had already been spent (MDDELCC, 2017a, p. 46). Greenhouse gas emissions reduction and climate change adaptation are lagging behind projections.

The thesis fits into the theoretical framework of the ecological modernization (Huber, 1982 ; Spaargaren et Mol, 1992 ; Hajer, 1995 ; Jänicke, 1995 ; Mol, 2003 ; Christoff, 2009 ; Spaargaren et al., 2009 ; Toke, 2011), which many people present as the sociological version of the sustainable development project, focused on state and industrial actors, then the civil society (Buttel, 2003). Moreover, source of analytical and comprehensive wealth, which escapes from quantitative studies, the preferred method is semi-directive interviews (Fortin, 2013) with the supervisors of the two PACC, public authorities for the greater part, as well as content analysis (Leray, 2008) for data treatment. But the obvious limitations of the indicators and the qualitative method involve a partial validation of the hypotheses.

(7)

VI

Otherwise, the ecological modernization thesis takes place in a long-term perspective and requires time for an empirical testing (Guay, 2018).

The current results are interpreted with the aid of two hypotheses. 1) The first hypothesis states that the implementation is in keeping with the ecological modernization thesis and 2) the implementation modifies the typical contemporary public policies implementation (Matland, 1995 ; Kübler et Maillard, 2009), given the imponderability of the public policies related to the fight against climate change.

This brief foray into the black box of policy-making (Latour, 1999 ; Hackmann et al., 2014 ; Dunlap et Brulle, 2015) takes a sociological look at public authorities role and civil society in governmental action plans implementation. Furthermore, an assessment of the mid-term implementation of PACC 2013-2020 is relevant, provided that the trend continues after 2018. The main results achieved partially confirm the research hypotheses. The first hypothesis is in part invalidated by the seemingly unfinished ecological modernization. The indicators’ results of the second hypothesis allow us to categorize the two PACC under the new category of the evolving implementation, which takes into account the imponderability of the fight against climate change, and issues defined during implementation, with compromises between society and science. Goals are becoming clearer and consensual, although tools are problematic.

Six major contributions may result from this thesis. First, three new indicators of the ecological modernization theory arise from the implementation of PACC 2006-2012 and 2013-2020. That is the energetic transition, the articulation between local and global levels of the fight against climate change, and the correlation with the oil price. Then it seems appropriate to add two new indicators for the public policy implementation, that is the adequacy between the conception and the implementation teams (Rocher, 2010), as well as the political will, which includes the social acceptability. Finally, the addition of the category of evolving public policy implementation seems relevant. Finally, multiple attractive researches with a historical and anthropological flavour abound actually, promoting the paradigm of a climatic determinism (Dunlap et Brulle, 2015) for the social change (Issar et Zohar, 2004 ; Nunn, 2007 et 2018). Taking the human responsability for

(8)

VII

the global warming, the present work takes place against the surrounding fatalism and reflects the complexity, but also the social capacity to make things happen.

(9)

VIII

TABLE DES MATIÈRES

RÉSUMÉ ... II ABSTRACT ... V TABLE DES MATIÈRES ... VIII LISTE DES SIGLES ET ACRONYMES ... XI LISTE DES TABLEAUX ET MATRICES SYNTHÉTIQUES ... XIII LISTE DES FIGURES ... XIV REMERCIEMENTS ... XV

INTRODUCTION ... 1

PREMIÈRE PARTIE CHANGEMENTS CLIMATIQUES ET MODERNISATION ÉCOLOGIQUE ... 7

Chapitre 1 L’objet de recherche : Les plans d’action québécois de lutte contre les changements climatiques 2006-2012 et 2013-2020. ... 8

1.1 Institutionnalisation environnementale au Québec et au Canada ... 8

1.2 L’action gouvernementale québécoise contre les changements climatiques ... 10

1.3 Parenthèse comparative des plans d’action pour le climat ... 17

Chapitre 2 La lutte contre les changements climatiques : temps forts et acteurs globaux 19 2.1 Aperçu des changements climatiques ... 19

2.2 Genèse de la lutte contre les changements climatiques ... 24

2.2.1 Le rapport Brundtland et le projet du développement durable (1987) ... 25

2.2.2 La Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques (CCNUCC) en 1992 ... 27

2.2.3 Temps forts de l’action en faveur du climat ... 31

2.3 Quelques lanceurs d’alerte du réchauffement climatique sur la scène internationale ... 41

2.3.1 Influence majeure des scientifiques et du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) ... 41

2.3.2 Le secteur de l’assurance et de la réassurance ... 44

2.3.3 Les îles sur la ligne de front... 46

Chapitre 3 Cadre théorique ... 48

3.1 La sociologie de l’environnement ... 48

3.2 Le cadre théorique de la modernisation écologique ... 57

3.2.1 Les indicateurs de la modernisation écologique ... 68

3.3 La mise en œuvre des politiques publiques contemporaines ... 73

3.3.1 L’action étatique ... 74

(10)

IX

3.3.3 Les indicateurs de la mise en œuvre des politiques publiques contemporaines

... 81

3.3.4 La typologie de la mise en œuvre des politiques publiques contemporaines (Matland, 1995) ... 84

Chapitre 4 Problématique ... 88

4.1 Changement social et climat ... 90

4.2 La réforme institutionnelle de la lutte contre les changements climatiques ... 96

4.2.1 Droit et climat ... 96

4.2.2 La nouvelle gouvernance du climat ... 98

4.3 La question des indicateurs ... 102

Chapitre 5 Aspects méthodologiques ... 103

5.1 Collecte des données : les entretiens. ... 104

5.2 Traitement des données ... 106

5.3 Analyse documentaire ... 108

DEUXIÈME PARTIE LA MISE EN ŒUVRE DES PACC 2006-2012 ET 2013-2020 ... 109

Chapitre 6 Présentation des résultats ... 110

6.1 Conception et maîtrise d’œuvre des PACC 2006-2012 et 2013-2020 ... 111

6.1.1 Les maîtres d’œuvre ... 111

6.1.2 Ouranos, expertise québécoise de la recherche en modélisation climatique régionale et en adaptation au changement climatique ... 112

6.1.3 Le comité consultatif du ministre du Développement durable, de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques, pour la conception et la mise en œuvre des plans d’action 2006-2012 et 2013-2020 ... 112

6.1.4 Un acteur majeur : les municipalités, les villes et leur engagement contre le changement climatique. ... 115

6.2 Cheminement de la mise en œuvre des actions et priorités des PACC 2006-2012 et 2013-2020 ... 118

6.2.1 Des mesures de réduction rapide des émissions de GES ... 119

6.2.1.1 Transport : la part du lion et des baisses de GES depuis 2011. ... 119

6.2.1.1.1 Hausse de l’achalandage du transport en commun ... 120

6.2.1.1.2 Gains de l’industrie du camionnage ... 121

6.2.1.1.3 Efforts du transport ferroviaire, maritime et aérien ... 124

6.2.1.1.4 Progressive électrification des transports ... 125

6.2.1.2 Le gaz, emblématique de la transition énergétique. ... 130

6.2.1.3 Les poubelles débordent de gaz à effet de serre. ... 132

6.2.1.4 Haro sur les SACO et les halocarbures ... 138

6.2.2 Des mesures structurantes ... 140

(11)

X

6.2.2.2 Les débuts de l’adaptation ... 143

6.2.3 Des mesures de surveillance liées aux changements climatiques ... 148

6.2.3.1 Les puits de carbone : forêts et tourbières. ... 148

6.2.3.2 Surveillance de la qualité de l’air et du climat ... 151

6.2.3.3 Vulnérabilité hydrique ... 154

6.2.3.4 Santé humaine ... 158

6.2.3.5 La biodiversité en mutation ... 160

6.2.4 Des mesures à prédominance symbolique ... 162

Chapitre 7 La modernisation écologique et la mise en œuvre des politiques publiques contemporaines à l’épreuve de l’action en faveur du climat ... 168

7.1 La 1ère hypothèse ... 168

7.2 La 2e hypothèse... 194

Chapitre 8 L’apport de la thèse : de nouveaux indicateurs pour la mise en œuvre évolutive de la lutte contre les changements climatiques. ... 218

8.1 De nouveaux indicateurs pour la mise en œuvre des politiques de lutte contre les changements climatiques ... 218

8.2 Les connaissances scientifiques et la mise en œuvre évolutive... 219

CONCLUSION ... 226

ANNEXES... 236

ANNEXE 1 ... 237

ANNEXE 2 ... 238

(12)

XI

LISTE DES SIGLES ET ACRONYMES

AEÉ Agence de l’efficacité énergétique ALÉNA Accord de libre-échange nord-américain

ANACDE Accord nord-américain de coopération dans le domaine de l’environnement AOSIS Alliance of Small Island States ou Alliance des petits États insulaires.

L’AOSIS regroupe 44 petits États insulaires des océans Pacifique, Atlantique et Indien, des Caraïbes, du Sud de la Chine et de la Méditerranée.

AQLPA Association québécoise de lutte contre la pollution atmosphérique BAPE Bureau d’audiences publiques sur l’environnement

BEIE Bureau de l’efficacité et de l’innovation énergétiques, qui a remplacé l’appellation de l’Agence de l’efficacité énergétique à partir de 2014.

BNQ Bureau de normalisation du Québec

BRIC(S) Brésil, Russie, Inde, Chine (et Afrique du Sud)

CCNUCC Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques CDPQ Caisse de dépôt et placement du Québec

COP Conférence des Parties

CRE Conseil régional de l’environnement CSC Captage et séquestration de carbone

DPQA Direction des politiques sur la qualité de l’atmosphère

FAO Organisation des Nations Unies pour l'Alimentation et l'Agriculture FQM Fédération québécoise des municipalités

FSC Forest Stewardship Council GES Gaz à effet de serre

GIEC Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat INSPQ Institut national de santé publique du Québec

IRÉC Institut de recherche en économie contemporaine IRENA International Renewable Energy Agency

ISO International Organization of Standardization ISQ Institut de la statistique du Québec

LULUCF Land use, land-use change and forestry (Utilisation des terres, changement d’affectation des terres et foresterie)

MAMOT Ministère des Affaires municipales et de l’Occupation du territoire MAPAQ Ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation du Québec MERN Ministère de l’Énergie et des Ressources naturelles

MDDELCC Ministère du Développement durable, de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques

(13)

XII

MDEIE Ministère du Développement économique, de l’Innovation et de l’Exportation qui devient le ministère des Finances et de l’Économie à l’automne 2012.

MÉ Modernisation écologique

MESRST Ministère de l’Enseignement supérieur, de la Recherche, de la Science et de la Technologie

MFÉQ Ministère des Finances et de l’Économie MRC Municipalité régionale de comté

MERN Ministère de l’Énergie et des Ressources naturelles MSP Ministère de la Sécurité publique

MSSS Ministère de la Santé et des Services sociaux

MTMDET Ministère des Transports, de la Mobilité durable et de l’Électrification des transports

OCDE Organisation de Coopération et de Développement économiques OGM Organismes génétiquement modifiés

OMC Organisation mondiale du commerce ONG Organisations non gouvernementales ONU Organisation des Nations unies

PACC Plan d’action sur les changements climatiques PEID Petits États insulaires en développement PIB Produit intérieur brut

PME Petites et moyennes entreprises

PNUE Programme des Nations unies pour l’environnement

REDD Reduction Emissions from deforestation and forest degradation (Programme de réduction des émissions liées à la dégradation des forêts et à la déforestation)

RNCREQ Regroupement national des conseils régionaux de l’environnement du Québec

SACO Substances appauvrissant la couche d’ozone

SPEDE Système de plafonnement et d’échange de droits d’émissions TIC Technologies de l’information et des communications

UE Union européenne

(14)

XIII

LISTE DES TABLEAUX ET MATRICES SYNTHÉTIQUES

Tableau 1 Pays avec changements nets de surfaces forestières de 2000 à 2005 …..… 30 Tableau 2 Des années marquantes ……….... 32 Tableau 3 Matrice ambiguïté / conflit de Matland (Matland, 1995) ………..….. 85 Tableau 4 Demandes de remboursement à l’achat et location de véhicules électriques

ou hybrides ………. 128 Tableau 5 Rapport d’achat entre véhicules électriques / véhicules traditionnels

en 2014 ... 128 Tableau 6 Réductions ciblées et estimées du PACC 2006-2012

(en kilotonnes éq. CO2) ………. 166

Tableau 7 Tarification du carbone ………..……… 169 Tableau 8 Indicateurs de la mise en œuvre de la modernisation écologique ……….. 211 Tableau 9 Indicateurs de la mise en œuvre des politiques publiques

contemporaines ……….. 212 Tableau 10 Matrice impondérabilité / conflit ………...…… 225

(15)

XIV

LISTE DES FIGURES

Figure 1 Le triangle du développement durable ………..…….. 25 Figure 2 Émissions mondiales réelles de gaz à effet de serre (1970-2015) ………... 35

(16)

XV

REMERCIEMENTS

D’une part, notre reconnaissance va aux professeurE du département de sociologie de l’Université Laval Andrée Fortin, dont le travail porte sur la mobilité durable et la ville, ainsi qu’à Louis Guay, spécialiste de la sociologie de l’environnement, pour leur soutien et leur marge de confiance. Leur retraite n’entame pas leur dévouement.

Par ailleurs, les conférences et les activités de l’Institut Hydro-Québec en environnement, développement et société de l’Université Laval (www.ihqeds.ulaval.ca) ont su entretenir la flamme pour le développement durable et les changements climatiques. En outre, il convient de souligner la formule féconde des cercles de discussion du GRIMS, le Groupe de recherche sur les institutions et les mouvements sociaux. Longtemps animés par les professeurs Louis Guay et Pierre Hamel (Université de Montréal), relayés par Geneviève Cloutier et Emiliano Scanu de l’Université Laval, ces échanges propulsent des idées nouvelles et un enthousiasme communicatif aux étudiantEs. Enfin, cette thèse n’aurait pas été menée à terme sans l’excellent esprit de collaboration et la grande transparence des fonctionnaires, en particulier celles et ceux du ministère du Développement durable, de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques, devenu le ministère de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques, ainsi que le ministère de l’Énergie et des Ressources naturelles. Les propos recueillis auprès des porte-parole institutionnels n’engagent pas les organismes qu’ils ou elles représentent.

(17)

1

INTRODUCTION

En espérant faire œuvre utile, la présente thèse plonge dans la boîte noire (Latour, 1999 ; Hackmann et al., 2014 ; Dunlap et Brulle, 2015) des politiques publiques. Elle se veut un hommage à tous les maîtres d’œuvre qui veulent faire bouger les choses dans les ministères et ailleurs, celles et ceux dont le travail demeure souvent méconnu du large public et qui s’acharnent à triompher de la force d’inertie (Pierson, 2000) et des impondérables qui surgissent sur la route de la lutte contre les changements climatiques. Les impondérables désignent des « éléments difficilement quantifiables ou prévisibles qui peuvent déterminer les enjeux et les résultats » de la mise en œuvre d’une politique publique. L’impondérabilité englobe également des conditions organisationnelles, d’accompagnement et contextuelles (Mahy et Carle, 2012), ambiguës et imprévisibles, qui président au changement émergent, tel que celui de la lutte contre les changements climatiques.

Depuis un quart de siècle, le climat est devenu un sujet brûlant d’actualité qui ameute les quotidiens, revues spécialisées, médias sociaux, universités, scientifiques, gouvernements et la société civile. Il  reflète « ce que la science dit et ce dont la politique tient de plus en plus compte » (Ouranos, 2015). Avec la forte probabilité d’un réchauffement supérieur à deux degrés Celsius d’ici 2100, les changements climatiques inquiètent et menacent la planète. Tout le monde devient partie prenante.

En 2015, le pergélisol fond et la température se réchauffe dans la région arctique (Hydro-Québec, 1996-2016). Quoique certains y trouvent leur profit, il serait faux de prétendre que la tolérance à une hausse de température fasse l’unanimité. De petits États insulaires en Développement (PEID), composés d’atolls à fleur d’eau, deviennent très vulnérables aux variations du niveau de la mer. Ces petites îles réclament que la hausse de température soit contenue sous 1,5 degré Celsius. La cause est entendue à la Conférence des Parties (CdP 21) de la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques (CCNUCC) de Paris en 2015 et la cible de 1,5 0C (Nations unies et Convention-cadre sur les changements climatiques, 2015b, p. 24) fait une percée, quoique l’objectif global soit fixé en deçà de 2 0C. La mise en œuvre de l’Accord de Paris (Nations unies et Convention-cadre

(18)

2

sur les changements climatiques, 2015b, p. 2) doit démarrer en 2020, sans contrainte prévue.

En dépit de cela, il y a un certain progrès dans la lutte contre les changements climatiques. Selon le Programme des Nations unies pour l’environnement (PNUE, 2012), on observe entre autres un accès élargi à l’eau potable et l’élimination progressive des substances appauvrissant la couche d’ozone (SACO). La croissance du PIB mondial de 3,4 % en 2014 et 3,1 % en 2015 (Données préliminaires de l’Agence internationale de l’énergie dans Bilodeau, 2016a) et une stagnation momentanée des émissions mondiales de GES autour de 50 gigatonnes de CO2 en 2015 (Stern, 2015, p. 3) suggèrent un début de découplage entre la

croissance économique et les émissions de GES dans plusieurs pays développés, mais ceci reste à confirmer. Dans la foulée, le Québec a abaissé ses émissions de GES depuis 1990, tout en maintenant sa croissance économique dans un contexte d’accroissement de sa population (Ministère du Développement durable, de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques, 2016a, p. 23). En gardant toutefois à l’esprit le flou comptable qui règne autour des gaz à effet de serre (GES) 1, ou les « incertitudes sur les estimations des réductions d’émissions » (Karsenty et Pirard, 2007, p. 360), un tel succès s’expliquerait principalement par l’implantation du gaz comme substitution au pétrole et au charbon pour la transition énergétique 2 à l’échelle planétaire, mais aussi par la progression

1 D’abord, la recherche scientifique n’a pas fini de traquer les émanations de gaz industrielles possédant un potentiel de réchauffement cumulatif et en découvre encore. Ensuite, l’imprécision qui entache l’inventaire des émissions provient précisément des incertitudes scientifiques et des incertitudes d’estimation — liées aux paramètres et modèles utilisés ; de même que des incertitudes statistiques — occasionnées par la variabilité aléatoire des observations — et les incertitudes systématiques, comme le décompte de GES des voitures individuelles non inclus dans le bilan municipal, etc. Créé en 2001, ayant pour mot d’ordre que « tout ce qui se mesure se gère » (Newell et Paterson, 2010, p. 65), le Carbon Disclosure Project déplore l’absence totale de vérification des déclarations par des tiers et le manque d’homogénéité dans les calculs. Des entreprises deviennent de plus en plus opaques avec le temps, tandis que la marge d’erreur des inventaires nationaux pourrait s’élever jusqu’à 20 % (Global Reporting Initiative, 2018).

2 C’est à partir des deux chocs pétroliers que l’utilisation du gaz suscite plus d’intérêt. Par la suite, les discours politiques et économiques sur la scène internationale (Sinaï, 2012) commencent à associer le gaz à l’énergie reine de la transition énergétique. Aussitôt élue à la tête de l’Agence internationale de l’énergie en 2011, madame Van der Hoeven annonce triomphalement la prépondérance du gaz de schiste comme solution de transition énergétique d’ici au moins 2035. Son bas prix, sa disponibilité et son efficacité pour la chauffe industrielle le rendent fort attrayant. Il dégage très peu de particules fines, génératrices du smog appelé à s’accentuer avec le réchauffement planétaire, et élimine presque totalement les émissions d’autres polluants atmosphériques. En outre, il alimente le marché du carbone. Le gaz s’affiche de plus en plus sur la scène mondiale par de gros producteurs pétroliers du Moyen-Orient, de l’Afrique du Nord, mais aussi la Russie, Israël, le Qatar, la Tanzanie, l’Australie, l’Asie, l’Amérique du Sud et le Mozambique. Consommé

(19)

3

des énergies renouvelables (Fonds mondial pour la nature, 2016) 3. En outre, il ne faut pas négliger l’impact de 40 ans d’action en faveur de l’environnement, de l’économie circulaire, de l’amélioration de l’efficacité énergétique, d’initiatives institutionnelles et citoyennes en incluant des mesures structurantes, telles l’élimination des déchets, l’amélioration du transport collectif, etc.

*

Quoique les publications sur le climat prolifèrent depuis les années 1990 (Lever-Tracy, 2010 ; Dryzek et al., 2011), seulement 3 % de toutes les études portant sur le changement environnemental global (couche d’ozone, érosion de la biodiversité et changement du climat) proviennent de la sociologie (Dunlap et Brulle, 2015). Il est vrai que les sciences de la nature figurent à la base de la problématique. Malgré la réceptivité croissante des sciences de la nature vis-à-vis des sciences sociales (Dietz et al., 2007 ; Brulle et Dunlap, 2015), leur mainmise se perpétue (Dunlap et Brulle, 2015), avec un déterminisme climatique en corollaire (Hackmann et St. Clair, 2012 ; Weaver et al., 2014). Cela signifie que la dimension sociale y tient encore peu de place. Or la sociologie possède un champ disciplinaire riche en concepts nichés dans l’angle mort d’autres disciplines. On pense entre autres à l’acceptation sociale, aux représentations collectives, à la méthode comparative (unique instrument de la preuve en sociologie selon Durkheim, 1894), au changement social, aux effets pervers et contre-intuitifs.

Le changement social passe fréquemment par les politiques publiques qui participent de la transformation des représentations et des comportements. Plusieurs études portent sur la mise à l’agenda politique, la prise de décision et l’évaluation des politiques environnementales, mais peu s’attardent au rôle des maîtres d’œuvre. L’inventaire des

dans les trois pays de l’Accord de libre-échange nord-américain (ALÉNA), en Inde et en Chine, le gaz naturel ou de schiste en surproduction et au prix concurrentiel — qui abaisse celui du pétrole et du charbon — se présente comme un moindre mal, parce qu’il émet « 33 % moins de gaz à effet de serre (GES) que le mazout » (27), « 40 % moins de CO2 que le charbon et 19 % moins de CO2 que l’essence » (Pineda, 2018). En Amérique du Nord, l’extraction gazière repose sur une révolution technologique, celle opérée en 2008-2009 par la fracturation hydraulique, qui permet d’accumuler les surplus aux États-Unis.

3 En 2016, « la part des énergies renouvelables dans la consommation d’énergie a atteint 17% » (Eurostat, 1953) dans l’Union européenne. Le marché de la biomasse, de la géothermie et de l’éolien terrestre s’approche de la maturité et la présence de l’énergie solaire s’accentue un peu partout.

(20)

4

fiches de suivi des ministères impliqués dans Le Québec et les changements climatiques : un défi pour l’avenir. Plan d’action 2006-2012 (ou le PACC 2006-2012), ainsi que Le Québec en action. Vert 2020. Plan d’action 2013-2020 sur les changements climatiques (ou le PACC 2013-2020), révèle que les fonctionnaires ignorent souvent l’impact de leurs mesures sur ce problème (Croteau, 2016).

D’autre part, il existe une certaine collaboration entre le savant et le politique (Weber, 2000). Le corps scientifique tente d’abord de fournir des données fiables, préalables à toute décision, pour s’autoriser ensuite à évaluer l’action publique. L’évaluation se présente comme une « activité de rassemblement, d’analyse et d’interprétation de l’information concernant la mise en œuvre et l’impact de mesures visant à agir sur une situation sociale, ainsi que la préparation de mesures nouvelles » (Leca dans Muller, 2011, p. 115). Pour toute administration gouvernementale qui se veut efficace, la recherche publique englobe l’évaluation des politiques. Deux grands types d’évaluation prédominent : l’évaluation technocratique, axée sur les résultats et les indicateurs quantitatifs, et l’évaluation de la participation (Hassenteufel, 2011, p. 235-236), centrée sur la mise en œuvre et les indicateurs qualitatifs. L’évaluation a néanmoins ses limites, car

les résultats des exercices d’évaluation risquent d’avoir les mêmes limites que celles soulevées dans des rapports de vérification précédents, par exemple dans celui portant sur le Plan d’action 2006-2012 sur les changements climatiques. D’une part, le ministère rend compte des activités réalisées pour mettre en œuvre un plan d’action. D’autre part, il dresse un état de situation global à un moment donné, mais sans déterminer dans quelle mesure les actions énoncées dans ce plan ont réellement contribué à l’évolution de la situation observée. Par conséquent, il est impossible de démontrer si les ressources investies apportent une réelle valeur ajoutée (Gouvernement du Québec, 2013b, p. 14).

D’autres facteurs entrent en ligne de compte, qui empêchent d’isoler les répercussions des plans. Peu importe les résultats, les gains peuvent être annulés par d’autres mesures. En plus, la mise en œuvre des plans se résume au « faire ensemble », génère un « apprentissage collectif » (Irwin, 1995) et continu des parties prenantes, se déployant dans le long terme, qui s’avère difficile à mesurer. Pour ces raisons, on peut parler d’un suivi plutôt que d’une évaluation (Dinshaw et al., 2014). Dans les limites du terrain et des données disponibles,

(21)

5

cette thèse propose donc un regard sociologique sur la mise en œuvre du PACC 2006-2012 et jusqu’en 2017, au mi-parcours du PACC 2013-2020.

*

Comment se déroule donc la mise en œuvre des deux plans de lutte contre le réchauffement du climat que constituent les deux PACC québécois ? Le PACC 2006-2012 prend du retard en cours de route, de même que le PACC 2013-2020 : serait-ce dû à des difficultés rencontrées lors de la mise en œuvre de ces plans d’action ? L’atteinte de la cible de réduction des GES de 20 % en 2020 (Gouvernement du Québec, 2012a, p. I) par rapport au seuil québécois de 1990 est aujourd’hui remise en question. Pourquoi en va-t-il ainsi ? Comment les maîtres d’œuvre des PACC agissent-ils sur le terrain, qu’en disent-ils et quels résultats obtiennent-ils des plans d’action 2006-2012 et 2013-2020 ? Cela n’a jamais été étudié à notre connaissance. Avec le souci de maximiser l’accessibilité de l’enquête, ce projet se justifie par la nécessité de faire connaître à la population citoyenne et à la communauté scientifique, par le libre accès à cette thèse électronique, les efforts du gouvernement québécois pour contrer et s’adapter aux changements climatiques.

La thèse se divise en deux parties. La première aborde les changements climatiques dans leur ensemble, ainsi que la fabrication d’un intérêt général cristallisé autour du climat. Par la suite, elle présente la sociologie de l’environnement, qui s’enquiert des acteurs et nombreuses parties prenantes qui façonnent la crise du climat, selon le cadre théorique de la modernisation écologique (Huber, 1982 ; Spaargaren et Mol, 1992 ; Hajer, 1995 ; Jänicke, 1995 ; Mol, 2003 ; Christoff, 2009 ; Spaargaren et al., 2009 ; Toke, 2011), que plusieurs dépeignent comme la version sociologique du projet du développement durable, centrée sur les acteurs gouvernementaux et industriels, puis la société civile (Buttel, 2003).

La 2e partie plonge dans le cheminement de la mise en œuvre des Plans d’action sur les changements climatiques 2006-2012 et 2013-2020. Les résultats actuels, sur lesquels nous reviendrons plus loin, s’interprètent à l’aide de deux hypothèses. La 1ère

hypothèse veut que les deux plans d’action liés à la lutte contre les changements climatiques s’inscrivent dans la mise en œuvre de la modernisation écologique. La 2e

(22)

6

PACC 2006-2012 et 2013-2020 proposent une mise en oeuvre originale des politiques publiques contemporaines (Matland, 1995 ; Kübler et Maillard, 2009), essentiellement à cause de l’importance de l’évolution rapide du climat et des connaissances scientifiques qui s’y relient.

En s’appuyant sur la mise en œuvre des mesures d’atténuation et d’adaptation des PACC 2006-2012 et 2013-2020 coordonnées par les acteurs institutionnels, le but de cette thèse se résume donc à faire avancer les connaissances et son intérêt sociologique consiste à soumettre la théorie de la modernisation écologique et la typologie de la mise en œuvre des politiques publiques contemporaines (Matland, 1995) à l’épreuve des changements climatiques, tout en ajoutant de nouveaux indicateurs.

* * *

(23)

7

PREMIÈRE PARTIE

CHANGEMENTS CLIMATIQUES ET MODERNISATION

ÉCOLOGIQUE

(24)

8

Chapitre 1

L’objet de recherche : Les plans d’action québécois de lutte contre les

changements climatiques 2006-2012 et 2013-2020.

Les PACC 2006-2012 et 2013-2020 s’inscrivent dans la modernisation écologique du Québec et du Canada. L’enjeu climatique émerge progressivement à partir des années 1990 et prend de plus en plus de place sur la scène publique. Fruits de l’institutionnalisation de la lutte contre les changements climatiques, les PACC 2006-2012 et 2013-2020 s’appuient sur le marché du carbone et la constitution du Fonds vert. Le PACC 2013-2020 s’inscrit par la suite dans le cadre de la transition énergétique du Québec, apparue dans le discours public vers 2013-2014. Enfin, en ouvrant une parenthèse comparative sur le reste du monde, on verra que les deux derniers plans d’action du Québec font assez bonne figure.

1.1 Institutionnalisation environnementale au Québec et au Canada

Le Québec édictait sa Loi sur la qualité de l’environnement dès 1972, après avoir mis sur pied le ministère de l’Environnement. Typique de la première législation contre la pollution (radioactivité, bruit, contaminants du sol, de l’air et des eaux de surface), il s’orientait rapidement vers les études d’impact environnemental à cause des barrages hydroélectriques de la Baie-James. Dans cet esprit, le Parti Québécois créait en 1978 le Bureau d’audiences publiques sur l’environnement (BAPE). Le BAPE est un instrument de la participation publique, quoique son rôle soit consultatif et non décisionnel. Il a fait école dans le monde entier et sert encore d’expertise sociale, économique, citoyenne et scientifique.

Le 1er choc pétrolier de 1973 a ouvert le débat sur l’énergie au Québec. L’urgence énergétique s’est d’abord accompagnée de la montée du mouvement anti-nucléaire. Les QuébécoisEs se sont ainsi dressés contre les centrales nucléaires entre 1975 et 1978. À partir de 1990, sous l’effet conjugué des déréglementations néolibérales, des compressions étatiques, de la mondialisation et de l’émergence de l’Organisation mondiale du commerce (OMC), la Loi sur la qualité de l’environnement subissait les assauts des accommodements et arrangements discrétionnaires exigés par les secteurs industriel et commercial. Une 3e période allait commencer dans les années 2000 pour la Loi sur la qualité de l’environnement, en concordance avec l’harmonisation exigée par le marché du carbone

(25)

9

californien (2009), la gestion des matières résiduelles (2011) et des substances appauvrissant la couche d’ozone (2013). Enfin, après trois ans de consultations, une nouvelle mouture de la Loi sur la qualité de l’environnement sortait en 2017.

Pendant ce temps, le Canada faisait aussi figure d’avant-gardiste, lorsque le gouvernement de Brian Mulroney sortait son Canada’s Green Plan for a Healthy Environment en 1990 (Weaver, 2008, p. 30). Puis la signature de la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques (CCNUCC) en 1992 l’engageait à ramener en l’an 2000 ses émissions de GES au niveau de 1990 (Weaver, 2008, p. 30). Cependant, il y a loin de la coupe aux lèvres puisqu’en 2002, le Canada avait haussé de 20,1 % ses émissions établies au niveau de 1990 (Weaver, 2008, p. 33).

Le Québec a adhéré spontanément à la CCNUCC en 1992. Par la suite, en même temps qu’il signait l’Accord de libre-échange nord-américain (ALÉNA) (Gouvernement du Canada, 1994), le Québec se joignait à l’Accord nord-américain de coopération dans le domaine de l’environnement (ANACDE). Ce dernier visait à harmoniser les législations et règlements environnementaux aux dispositions de l’ALÉNA, sans nuire à la concurrence des États concernés. Pour une première fois dans l’histoire mondiale, une entente commerciale touchant plusieurs pays s’assortissait d’une démarche parallèle sur l’environnement. L’ANACDE (Secrétariat de la Commission de coopération environnementale, 1993) insistait sur la qualité de l’air, problème déjà présent à cause des pluies acides au Canada et en Nouvelle-Angleterre dans les années 1980-1990. L’ANACDE était appelé à prendre plus de place à l’avenir à cause du réchauffement climatique et des politiques énergétiques qui s’imposaient. De fait, l’ANACDE a donné naissance à la Commission de coopération environnementale (Secrétariat de la Commission de coopération environnementale, 1993, p. 8) 4, qui faisait la promotion d’une économie à

4 La Commission de coopération environnementale a un Conseil consultatif formé de trois ministres de l’Environnement ou l’équivalent, un Secrétariat et un Comité consultatif public mixte constitué de cinq personnes pour chaque pays de l’ALÉNA ; ce dernier donne son avis quant au mandat de l’ANACDE. Elle se prononce sur la protection des marsouins du golfe de Californie, le bâti vert, la gestion des déchets électroniques, les chaînes d’approvisionnement de l’industrie automobile nord-américaine, le maïs transgénique, le commerce et les échanges transfrontaliers d’électricité abordable, abondante, propre et sécuritaire, etc. Néanmoins, la Commission de coopération environnementale et l’ANACDE ont les mains liées car le commerce prévaut encore sur l’environnement.

(26)

10

faibles émissions de carbone. Les pays de l’ALÉNA produisaient alors près du quart des GES mondiaux. Puis le Canada adhérait à l’Initiative mondiale pour le méthane en 2005 (Gouvernement du Canada, 2005). Cette entente multilatérale visait la réduction des fuites de méthane dues aux sites d’enfouissement, à l’agriculture — en passant par l’élevage, aux eaux usées, mines de charbon, sites gaziers et pétroliers. En 2016, s’érigeait le Partenariat nord-américain sur le climat entre les trois pays de l’ALÉNA, avec un objectif de production de 50 % d’énergie propre pour 2025 (Gouvernement du Canada, 2016).

1.2 L’action gouvernementale québécoise contre les changements climatiques

Au Québec, la stratégie pour le climat s’est mise rapidement en œuvre par des plans d’action dès 1995 et 2000. En 1995, le Québec sortait le premier Plan d’action québécois de mise en œuvre de la Convention cadre des Nations unies sur les changements climatiques (Gouvernement du Québec, 1995), qui visait modestement la stabilisation des émissions de gaz à effet de serre par l’adoption de mesures volontaires. En 1996, les ministères de l’Environnement et des Ressources naturelles innovaient avec le programme ÉcoGESte, programme québécois d’enregistrement des mesures volontaires de réduction des émissions de gaz à effet de serre (GES). Plus ambitieux, le Plan d’action québécois 2000-2002 sur les changements climatiques (PAQCC 2000-2002) (Gouvernement du Québec, 2000) lui succédait. Il misait sur l’exemplarité gouvernementale et une approche volontaire. Il suggérait 36 actions et prévoyait plusieurs études de faisabilité et des projets pilotes, éparpillés dans plusieurs ministères. Les mesures relatives aux déchets et au transport en commun à Montréal et Québec, continuaient d’abaisser les émissions de GES. En 2002, le ministre Paul Bégin mettait sur pied le Bureau des changements climatiques du Québec. Le petit PAQCC 2000-2002 esquissait les grandes lignes de ce qui allait devenir le Plan d’action sur les changements climatiques 2006-2012.

La stratégie du Québec en matière de changements climatiques s’est concrétisée par deux plans d’action à mettre en œuvre, à savoir Le Québec et les changements climatiques : un défi pour l’avenir ou le Plan d’action 2006-2012 sur les changements climatiques, ainsi que Le Québec en action. Vert 2020. Plan d’action 2013-2020 sur les changements climatiques. Le gouvernement du Québec votait une taxe sur le carburant et les

(27)

11

combustibles fossiles (les énergies fossiles sont le charbon, le pétrole et le gaz naturel) en 2006, qui finançait le Fonds vert consacré à la lutte contre le réchauffement climatique. Les deux PACC prévoyaient au départ un budget d’environ 4,8 milliards de dollars, avec respectivement 1,5 milliard et 3,3 milliards de dollars. Au 31 mars 2016, le budget prévu pour le PACC 2013-2020 se haussait à 3,7 milliards de dollars (MDDELCC, 2017a, p. 46). Comparé aux 20 milliards de dollars annuels réservés à la santé et aux services sociaux, ou aux 23 milliards de dollars consacrés aux routes et ponts de 2013 à 2023 (Sansfaçon, 2013, p. A6), la stratégie relative aux changements climatiques demeurait somme toute modeste, ce qui confirmait d’emblée son statut de « petite politique ».

En 2009, le Québec se dotait d’une première liste de 20 indicateurs du développement durable, appelée à grossir suivant un processus évolutif. En 2016, cette liste ne comptait encore qu’un seul indicateur spécifique au climat, témoignage d’une institutionnalisation inachevée : la tendance des températures annuelles moyennes. On constate que la température moyenne a augmenté de 1,3 degré Celsius entre 1961 et 2010 au Québec méridional (www.mddelcc.gouv.qc.ca/climat/tendances/index.htm).

La conception des deux plans d’action épousait les mesures proposées par certains ministères, le Bureau des changements climatiques, l’expertise climatique d’Ouranos et le comité consultatif 5 mis sur pied par un ministre du Développement durable, de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques. Ouverts et évolutifs, les PACC laissaient le champ libre à d’autres projets proposés par la société civile, l’industrie et les instances municipales ou régionales. D’autre part, de nouveaux maîtres d’œuvre s’ajoutaient avec le PACC 2013-2020, dont le ministère des Affaires municipales et de l’Occupation du territoire pour l’aménagement durable. Le transport collectif en accaparait une bonne part, mais l’industrie réclamait davantage du Fonds vert avec le dernier PACC. Enfin, l’implantation du marché du carbone du Québec avec la Californie et un leadership industriel commençaient à prendre de la place.

(28)

12

Grosso modo, ces plans d’action résultaient de causes multiples et se présentaient comme un assemblage de remaniements, refontes de programmes et mesures ministérielles et transversales diverses, plus ou moins hétérogènes, s’apparentant à un changement à la fois planifié et diffus. Dans une telle politique publique d’assemblage et d’encadrement d’actions multiscalaires, programmes et mesures se retrouvaient obligatoirement dans d’autres politiques ministérielles ou gouvernementales, et affectaient le suivi des résultats et données budgétaires. Les mesures évoluaient. On les modifiait parfois en cours de route. Par ailleurs, en dépit de recoupements occasionnels entre les mesures d’atténuation des émissions de GES et d’adaptation au réchauffement, le financement accordé à l’atténuation des émissions de gaz à effet de serre l’emportait largement sur le montant attribué à l’adaptation climatique stricto sensu (Actions 21 à 26 du PACC 2006-2012 et priorités 26 à 30 du PACC 2013-2020), qui accaparait à peine près de quatre pour cent (4 %) des deux PACC dans leurs prévisions budgétaires préliminaires.

Le PACC 2006-2012 élaborait 26 actions et neuf mesures additionnelles (Annexe 1) entièrement financées par le Fonds vert. Ses instruments privilégiés se résumaient à la réglementation, l’aide financière, la sensibilisation, l’information, et enfin, la recherche et le développement. Le PACC 2013-2020 promettait d’être plus inclusif. Par rapport au PACC 2006-2012 et relativement aux politiques de qualité de l’air, il représentait effectivement un élargissement des parties prenantes et des déclarations obligatoires d’inventaires atmosphériques. Par ailleurs, le PACC 2013-2020 se présentait initialement comme la stratégie québécoise d’adaptation aux changements climatiques et l’accent devait porter sur l’éradication de la vulnérabilité de la population (Gouvernement du Québec, 2013b). Des groupes de discussion de spécialistes, des consultations publiques et en ligne auprès d’intervenantEs municipaux, industriels, nordiques et écologistes étaient menés de 2010 à 2012. Une première version du PACC 2013-2020 — dite « la version libérale » (23)6 — sortait en 2012. Les grandes lignes de l’adaptation se traçaient sous la direction du MDDELCC, avec la collaboration du ministère des Affaires municipales et de l’Occupation du territoire (MAMOT), du ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation

6 Les extraits d’entretiens sont suivis du numéro d’identification entre parenthèses des personnes interviewées dans le cadre de la présente thèse. Le recrutement de ces informateurs et informatrices sera expliqué dans le chapitre 5.

(29)

13

du Québec (MAPAQ), du ministère de l’Énergie et des Ressources naturelles (MERN), du ministère de la Sécurité publique (MSP), du ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS), du ministère des Transports, de la Mobilité durable et de l’Électrification des transports (MTMDET), du ministère de l’Économie, de la Science et de l’Innovation, de l’Institut national de santé publique du Québec (INSPQ), du ministère du Tourisme, du ministère de la Famille et des Aînés, ministère de l’Éducation, du Loisir et du Sport, Ouranos et Hydro-Québec. Ce « PACC 2013-2020 s’inscrivait en continuité avec le PACC 2006-2012. C’était un PACC amélioré en quelque sorte. Il comportait des plans d’action locaux et mettait plus d’emphase sur la sécurité publique. Il prenait en considération que l’on construit pour 50 ans » (2) au moins.

Cette version faisait l’objet d’une révision en 2013 et sortait en version définitive après la tenue de la vaste consultation publique de la Commission sur les enjeux énergétiques du Québec à l’automne 2013 (Lanoue et Mousseau, 2014). Le transport accaparait près des deux tiers du budget consacré au PACC 2013-2020. Cet effort, certes louable pour atteindre l’ambitieuse cible de réduction de 20 % de GES en 2020 (Gouvernement du Québec, 2012a, p. I), volait au secours des actions initiales d’atténuation contenues dans le 1er PACC (2006-2012) ; cependant, à la lecture des diminutions de GES réalisées en 2016 par rapport à l’objectif de 2020, on pouvait se demander si le Québec a les moyens de ses ambitions.

Totalisant quelque 183 actions coordonnées par 15 ministères et organismes gouvernementaux (Shields, 2018a, p. A1), le PACC 2013-2020 foisonnait d’objectifs, de moyens et de mesures. Il était également le fruit de la collaboration entre le MDDELCC, Ouranos (pour le volet scientifique, la gestion des risques climatiques et la stratégie d’adaptation au changement climatique), des consultations ministérielles, publiques et le comité consultatif (qui s’était concentré jusqu’ici sur les mesures de réduction des émissions de GES). Sa mise en œuvre exigeait parfois un remaniement, de nouvelles équipes de pilotage et d’expertise. Le succès de la mise en œuvre du PACC 2013-2020 passait par l’établissement de partenariats entre le gouvernement et les acteurs-clés de la société québécoise. Le secteur privé devait être à l’affût des meilleures pratiques afin de se

(30)

14

projeter efficacement vers un avenir plus sobre en carbone. À ce titre, le gouvernement du Québec reconnaissait la contribution cruciale des établissements et des organismes de recherche pour l’innovation, la recherche, le développement et la démonstration de technologies québécoises visant une réduction substantielle des émissions de GES à l’horizon 2020. Cette reconnaissance se manifestait en particulier par le nouveau programme ÉcoPerformance (priorité 20), ainsi que la priorité 4 du PACC 2013-2020. Une différence notable entre les deux plans d’action tenait à la petite dimension du comité consultatif formé de huit personnes, choisies par l’ancien ministre Arcand pour le PACC 2006-2012, par comparaison avec celui des 15 personnes sélectionnées pour le PACC 2013-2020. La représentation universitaire, écologiste et patronale se maintenait, tandis que la partie syndicale — la Confédération des syndicats nationaux (CSN) — se faisait évincer. Le transport collectif et l’adaptation, avec un représentant de la santé, s’ajoutaient. Les femmes demeuraient sous-représentées. On soulignait une présence accrue du secteur privé au sein du comité consultatif du PACC 2013-2020, dont l’entrée remarquée de Gaz Métro, joueur majeur de la transition énergétique, rebaptisé Énergir en 2017. Cela confirmait un leadership industriel.

Enfin, les PACC 2006-2012 et 2013-2020 tiraient leurs revenus d’un marché du carbone et du Fonds vert. Le marché du carbone était né parce que les provinces canadiennes et plusieurs États américains s’étaient regroupés au sein de la Western Climate Initiative, en réaction au faible effort de leurs gouvernements respectifs face à leurs émissions néfastes et à leur dépendance envers les hydrocarbures. Ils souhaitaient une diminution accélérée des six principaux gaz à effet de serre et l’embrayage du second marché du carbone mondial après celui de l’Union européenne. Symbole fort de la fin de l’impunité pour la destruction environnementale par les entreprises, le premier marché réglementé du carbone d’Amérique du Nord se mettait en marche dans les années 2000, en profitant d’une rare unanimité entre les partis politiques, l’État québécois et l’industrie.

Dès 2005, l’implantation du marché du carbone volontaire commençait par des milliers de tonnes échangées. Le marché du carbone obligatoire se mettait en branle en 2013, alors que les grands émetteurs industriels, soit les entreprises, personnes physiques ou morales,

(31)

15

générant annuellement plus de 25 000 tonnes de gaz à effet de serre (GES), devaient se plier à la règle du Système de plafonnement et d’échange de droits d’émissions (SPEDE) du Québec. Celui-ci entrait en vigueur en 2015 pour les producteurs et distributeurs de combustibles fossiles. Les petits émetteurs de moins de 25 000 téqCO2, dont une majorité

de petites et moyennes entreprises (PME), en étaient exemptés. Une modification du règlement était adoptée en 2015, en réponse aux attentes des distributeurs de carburants et de combustibles, qui demandaient que le seuil d’assujettissement au marché du carbone soit abaissé à 200 litres. Ce nouveau seuil, entré en vigueur dès 2016, assurerait une plus grande équité entre les petits, les moyens et les grands distributeurs, tout en permettant de couvrir la presque totalité des carburants et des combustibles distribués au Québec.

Tel que véhiculé par les séances de formation destinées aux entreprises et aux organismes sur les différents systèmes de crédits de CO2, le marché du carbone représentait aussi une

occasion d’affaires pour les entreprises québécoises. Le SPEDE devait couvrir près de 85 % des émissions totales du Québec et financer le PACC 2013-2020 à partir de 2015. L’ancien Bureau des changements climatiques du ministère du Développement durable, de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques (MDDELCC) et la Western Climate Initiative en assuraient l’encadrement législatif et financier. Un arrimage de juridictions politiques et techniques s’installait entre les partenaires, quoique d’aucuns y voyaient « un Québec passif et une Californie active » (7). En vue d’implanter le marché du carbone et de s’harmoniser avec la législation californienne, la Loi sur la qualité de l’environnement subissait des transformations. Par exemple, le MDDELCC modifiait en 2013 son Règlement sur la déclaration obligatoire de certaines émissions de contaminants dans l’atmosphère pour quelque 800 entreprises québécoises qui devaient déclarer chaque année, en vertu de la Loi sur la qualité de l’environnement, leurs contaminants qui contribuaient à l’accroissement de l’effet de serre, des pluies acides, du smog et de la pollution. Dans cette déclaration annuelle, la biomasse, les combustibles utilisés pour le chauffage et le transport entraient en ligne de compte.

Parallèlement au SPEDE, le Conseil patronal de l’environnement du Québec mettait en ligne une plate-forme québécoise qui permettait à des vendeurs et des acheteurs de crédits

(32)

16

carbone d’être mis en relation anonymement. Le Conseil patronal de l’environnement du Québec avait été créé en 1992 par des représentants des grands secteurs industriels et d’affaires, et cherchait à concilier les intérêts de ses membres en matière d’environnement et de développement durable. Le conseil regroupait plus de 200 entreprises et 20 associations au Québec. Il siégeait au sein du comité consultatif des PACC 2006-2012 et 2013-2020.

En 2006, l’article 26 du chapitre 3 de la Loi sur le ministère du Développement durable, de l’Environnement et des Parcs instituait le Fonds vert du Québec. Au départ, la redevance prélevée sur l’élimination des matières résiduelles, les ressources pécuniaires en lien avec les autorisations environnementales et la Loi sur la qualité de l’environnement, ainsi que la taxe verte sur les carburants et combustibles fossiles, alimentaient le Fonds. Puis à partir de 2015, s’ajoutaient les revenus tirés du Système de plafonnement et d’échange de droits d’émissions (SPEDE). Le Conseil de gestion du Fonds vert était institué en 2017 lors d’une modification de la Loi sur la qualité de l’environnement, en vertu de la Loi sur le ministère du Développement durable, de l’Environnement et des Parcs (M-30.001). Le Conseil de gestion était dirigé par une présidente-directrice générale et huit autres membres, dont trois membres du gouvernement québécois et cinq membres de l’extérieur. Il comptait un membre du ministère Développement durable, de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques, un autre du ministère des Transports, de la Mobilité durable et de l’Électrification des transports et enfin, un membre du ministère des Finances. Le Contrôleur des finances encadrait la gestion du nouveau Conseil de gestion du Fonds vert. La nouvelle gouvernance du Fonds vert prévoyait une reddition de compte plus transparente et complète, une communication centralisée, une plus grande cohérence et une plus grande coordination des projets soutenus par Transition énergétique Québec et les différents ministères. La nouvelle gouvernance de ce Fonds visait en outre à élaborer des indicateurs de performance, formuler des recommandations sur les mesures et programmes, assurer le respect des engagements financiers et évaluer les résultats.

Au passage, l’ancien Bureau de l’efficacité et de l’innovation énergétiques (BEIE) était devenu l’organisme dédié de Transition énergétique Québec. Celui-ci avait été mis sur pied

(33)

17

par le gouvernement l’année suivant la rencontre des Parties de la CCNUCC à Paris en 2015. Sa création résultait aussi du travail mené par la jeune alliance SWITCH (Audet, 2015), composée d’écologistes et d’acteurs économiques de l’énergie, militant en faveur d’une économie verte. Ses membres se recrutaient parmi la Fondation David Suzuki, Équiterre, le Réseau des ingénieurs du Québec, Écotech, Cycle Capital Management, les caisses Desjardins, des syndicats et l’Association de l’aluminium du Canada, visant à pénétrer le marché illimité des technologies propres, renouvelables et celui de l’efficacité énergétique. Énergir (l’ancien Gaz Métro) et Transport Robert s’y joignaient, qui rêvaient de transformer le diesel des véhicules lourds en gaz liquéfié, puis en biocarburant. Le document fondateur de l’alliance, intitulé L’économie que nous voulons. Positionner le Québec dans un monde en transition (SWITCH, 2013), proposait une sorte de plan vert axé sur l’emploi, l’innovation sociale, l’approvisionnement des marchés publics québécois (alors que près du quart des emplois au Québec appartiennent au secteur public) et une meilleure fiscalité verte. SWITCH incluait également l’économie circulaire et la production de véhicules en aluminium dans l’économie verte. Au demeurant, SWITCH rêvait d’une Silicon Valley québécoise avec ses surplus éoliens-hydroélectriques, son électrification des transports et son aluminium — l’aluminium vert québécois en quelque sorte, unique au monde parce qu’il serait produit avec de l’hydroélectricité et du vent — devenu fer de lance d’une innovation technologique verte, la batterie aluminium-air, en remplacement de la batterie lithium-ion.

Pour clore cette partie, ajoutons que les récents plans d’action contre les changements climatiques du Québec, visaient un découplage entre la croissance économique et les émissions de gaz à effet de serre (GES), de même que le début de la mise en œuvre de l’adaptation. Ces préoccupations des PACC 2006-2012 et 2013-2020 expliquent que le Québec fasse bonne figure sur la scène climatique canadienne et internationale.

1.3 Parenthèse comparative des plans d’action pour le climat

En 2015, se déroulait une importante démarche préparatoire en vue de recueillir les engagements volontaires des Parties de la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques, lesquels seraient inscrits à la fin de l’année dans l’Accord de

(34)

18

Paris (Nations unies et Convention-cadre sur les changements climatiques, 2015b). À cette fin, le Secrétariat de la CCNUCC notait, dans son Rapport de synthèse sur l'effet global des contributions prévues déterminées au niveau national, que

119 contributions avaient été reçues, correspondant à 147 Parties à la Convention, (…) ce qui représente 75 % des Parties et 86 % des émissions mondiales en 2010. Certains secteurs et gaz n’étant pas pris compte dans les contributions communiquées, celles-ci couvrent 80 % des émissions mondiales. Toutes les Parties ont fourni des informations sur leurs contributions en matière d’atténuation. Au total, 100 Parties (84 % des contributions) ont aussi inclus un élément d’adaptation dans leur contribution (…) La contribution de l’Union européenne et de ses États membres est comptée comme une seule contribution représentant 29 Parties (Nations unies et Convention-cadre sur les changements climatiques, 2015a, p. 4).

Le Secrétariat commentait avec satisfaction que « la détermination croissante des Parties à engager une action nationale pour lutter contre les changements climatiques, conjuguée à la capacité accrue de s’y employer, se manifeste clairement par le nombre appréciable de Parties ayant soumis des contributions et le renforcement de leur champ d’action » (Nations unies et Convention-cadre sur les changements climatiques, 2015a, p. 15). La majorité des Parties investissaient « déjà des ressources importantes dans le domaine de l’adaptation » (Nations unies et Convention-cadre sur les changements climatiques, 2015a, p. 18). Des Parties cherchaient à mettre l’accent sur les synergies entre les mesures d’atténuation et d’adaptation, et faisaient appel à des indicateurs quantitatifs et qualitatifs pour évaluer leur portée.

Le Québec se conformait ainsi à la tendance observée, à la différence de son ambition de réduire rapidement de 20 % ses émissions de GES pour 2020, à partir du seuil de 1990 (Gouvernement du Québec, 2012a, p. I), alors que, par exemple, les États-Unis et la Chine élevaient leur seuil de référence à l’année 2005 et s’autorisaient respectivement un délai jusqu’en 2025 et 2030. En outre, le Québec s’inscrivait parmi la minorité des Parties qui avaient prévu un échéancier inconditionnel de mise en œuvre débutant avant 2020 (Nations unies et Convention-cadre sur les changements climatiques, 2015a, p. 6).

Références

Documents relatifs

Cinq ans après son entrée en vigueur et dans l’optique de la procédure d’évaluation à venir par le Groupe d’experts sur la lutte contre la violence à l’égard des

• Programme d’aide visant la réduction ou l’évitement des émissions de gaz à effet de serre par l’implantation de projets intermodaux dans le transport des marchandises

Depuis le lancement en 2008 du Programme d’aide visant la réduction ou l’évitement des émissions de GES par l’implantation de projets intermodaux dans le transport

• Offrir une alternative à l’installation d’une fosse de rétention pour les terrains riverains : pour les résidences existantes, il sera permis d’installer

Le projet de règlement modifiant le Règlement relatif à l’évaluation et l’examen des impacts sur l’environnement de certains projets (chapitre Q-2, r.23.1)

Encadré par le Règlement sur la compensation pour les services municipaux fournis en vue d’assurer la récupération et la valorisation de matières résiduelles (chapitre Q ‑2,

L’ajout de cette RBP aux aires protégées existantes sur l’île permettrait de protéger les éléments représentatifs des caractéristiques du bien ayant potentiellement une

Également, les responsables de systèmes résidentiels desservant plus de 20 personnes auraient des obligations supplémentaires liées aux formalités administratives