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Étude systémique de l'évolution culturelle de l'apprenant et du système éducatif primaire en Côte-d'Ivoire

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Academic year: 2021

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(1)

L ß

5 . 5

U U

FACULTE DES SCIENCES DE L'EDUCATION

THESE PRESENTEE

A L'ECOLE DES GRADUES DE L'UNIVERSITE LAVAL

POUR L'OBTENTION DU GRADE DE MAITRE ES ARTS EN TECHNOLOGIE DE L'ENSEIGNEMENT

PAR

FIRMIN KPAI GUELADE

ETUDE SYSTEMIQUE_DE L'EVOLUTION ÇULTURELLE_DE

L'APPRENANT ET DU SYSTEME EDUCATIF PRIMAIRE EN COTE D'IVOIRE

(2)

REMERCIEMENTS

Je remercie mon épouse Thérèse Yaf, madame Jacynthe Leblanc et sur­ tout messieurs Jacques Lapointe et Jean-Pierre Fournier pour leur aide et leur support dans la réalisation de cette thèse.

(3)

TABLE DES MATIERES

LISTE DES FIGURES ... viii

CHAPITRE I - INTRODUCTION ... .... ... 1

1.1 Position du problème ... 1

1.2 Objet de la recherche ... 6

CHAPITRE II - CARACTERISTIQUES"DE L'ENSEIGNEMENT PRIMAIRE PUBLIC DE LA COTE-D'IVOIRE ... 17

2.1 Structure de l'enseignement primaire dans la période coloniale (R. Millet, 1970) ... 18

2.2 Politiques coloniales en matière d'éducation en Afrique occidentale française ... 23

2.2.1 Avant les deux guerres ... 23

2.2.2 Entre les deux guerres ... 24

2.2.3 De 1945 à 1960 ... 26

2. 3 Programmes d'enseignement du système colonial ... 27

2 .4 Structure actuelle de l'enseignement primaire public en Côte-d'Ivoire ... 27

2¿4.1 Caractéristique générale ... 28

CHAPITRE n i - LA THEORIE DES SYSTEMES ... 29

Page LISTE DES TABLEAUX ... vii

(4)

iv.

Page

3.1 Historique de la théorie des systèmes ... ... 29

3.1.1 Contribution des biologistes ... 31

3.1.2 Contribution des ingénieurs mathématiciens ... 31

3.1.3 Contribution des physiciens ... 32

3.1.4 Contribution des administrateurs ... 33

3.2 Définition et caractéristiques du système ... 35

3.2.1 Définition du système ... 35

3.2.2 Caractéristiques et propriétés du système ... 36

3.2.2.1 Selon J. De Rosnay ... 36

3.2.2.1.1 Aspect structural ... 38

3.2.2.1.2 Aspect fonctionnel ... 38

3-2.2.1.3 Dynamique des systèmes .... 39

3.2.2.1.4 Rétroaction ... 40

3 V2.2.1.5 Rôle des flux et des réser­ voirs 40 3.2.2.2 Selon J. Mélèse ... 41 3.2.2.2.1 Eléments ... 41 3.2.2.2.2 Complexité ... 41 3.2.2.2.3 Ouverture ... 41 3.2.2.2.4 Incertitude ... 42 3.2.2.2.5 Evolution ... 42 3.2.2.2.6 Rationalité limitée ... 42 3.2.2.2.7 Finalité ... 42

3.2.2.2.8 Dynamique des systèmes .... 43

3.2.2.2.9 Transformation entrées-sorties ... 43

3.2.2.2.10 Variables d'action et varia­ bles essentielles ... 44 3.2.2.2.11 Transformation déterminée et indéterminée ... 44 3.2.2.2.12 Contrôle et régulation .... 44 3 .2.2.3 Selon J.L. Le Moigne ... 47 3.2.2.3.1 Structure ... 49

3 .2.2.3.2 Contrôle, régulation et évo­ lution 50

3.2.2.3.2.1 Régulation ... 51 3.2.2.3.2.1.1 Adaptation par programme 52

(5)

V.

3.2.2.3.2.1.2 Adaptation par découplage 53 3.2.2.3.2.1.3 Adaptation par apprentis­

sage ... 53

3.2.2.3.2.1.4 Adaptation de la structure 53 3.2.2.3.2.1.5 Evolution de la structure 54 3.2.2.3.2.2 Variables d'entrées et sor­ ties. Variables de structu­ res et variables d'activités 55 3.3 Justification de la modélisation ... 57

CHAPITRE IV - SYSTEMOGRAPHIE DE L'ENSEIGNEMENT ... 65

4.1 Construction du modèle ... 65

4.1.1 Caractéristiques du système général ... 65

4.1.2 Système général ... 69 4.2 Description du modèle ... 70 Y 4.2.1 Système ... 70 4.2.1.1 Structure ... 70 4.2.1.1.1 Limites ou frontières ...--- 71 4.2.1.1.2 Eléments ou composants ... 71 4.2.1.1.3 Réservoirs ... 72 4.2.1.1.4 Réseaux de communication --- 72 4.2.1.2 Fonction ... 72 4.2.1.2.1 Flux ... 73

4.2.1.2.2 "Vannes" ou centre de décision 74 4.2.1.2.3 "Délais" ... 74 4.2.1.2.4 Boucles de rétroaction ... 74 4.2.1.3 Evolution ... 75 4.2.1.4 Ouverture ... 76 4.2.1.5 Finalité ... 81 4 .2.2 Transformation entrées-sorties ... 82 4.2.3 Environnement ... 85

4.2.4 Variables d'action et variables essentielles --- 86

Page 4.2.4.1 Variables d'action ... 86

(6)

vi. 4.2.4.2 Variables essentielles ... 88 4.2.5 Contrôle et régulation ... 89 4.2.5.1 Contrôle ... 89 4 .2.5.2 Régulateur ... 92 4.2.6 Régulation et évolution ... 92 4.2.6.1 Régulation ... 93 4.2.6.2 Adaptation ... 93 4.2.6.3 Adaptation de la structure ... 94 4.2.6.4 Evolution de la structure ... 95 CHAPITRE V - CONCLUSION ... 96 BIBLIOGRAPHIE ... '00 Page

(7)

LISTE DES TABLEAUX

Tableau Page

1 Approche systëmique vs approche analytique ... 58

2 Vision statique vs vision dynamique ... 59

3 Niveaux de généralité des objectifs pédagogiques . 90

(8)

Page 32 36 37 39 39 40 44 45 45 46 47 48 49 66 67 LISTE DES FIGURES

L'effet retour ou "feed-back" principe de la cyber­ nétique ... Des systèmes ouverts ... Un système fermé ...

y

Aspect structural et fonctionnel du système ... Le fonctionnement d'un système ...

Rétroaction positive et rétroaction négative ... La transformation ... Un système sous contrôle ... Un système perturbé ... Un système avec régulateur ... Le système ultra-stable de Ashby ... Le paradigme de la mécanique classique, le paradig­ me de la mécanique statistique et le paradigme struc­ turaliste ... Le paradigme systémique ... La boîte noire ... Définition triangulaire d'un objet ...

(9)

Figure Pa9e 16 Le système de représentation ... 68 17 Le système général ... 69

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CHAPITRE I

INTRODUCTION

Il est connu que l'Afrique, pour sortir de son sous développement, doit promouvoir l'éducation des populations. A cet égard, des efforts sont consen tis au niveau de chacun des états africains. Les fonds accrédités à l'ensei­ gnement correspondent en moyenne à 50% du budget de fonctionnement de ces

v

pays. Cela peut s'avérer un investissement inutile dans la mesure où les ré sultats escomptés sont inférieurs aux attentes. La cause d'une pareille si­ tuation est très connue. On parle partout de réforme pour adapter le système éducatif aux réalités africaines. En Afrique, des solutions sont proposées et notre démarche s'inscrit dans cette perspective.

1.1 Position du problème

Les systèmes d'enseignement hérités de l'époque coloniale sont dans leur conception, leur orientation et leur structure généralement inadaptés au contexte social, économique et culturel des pays africains (Philippe Decraene, 1982). C'est le reproche que l'on fait aujourd'hui aux systèmes éducatifs actuels, hérités de la colonisation.

"Dans leurs contenus et leurs structures, dans leurs institutions, dans leurs bâtiments, dans leurs modes de fonctionnement et leurs coûts, dans leurs finalités même, ils sont trop souvent restés proches des systèmes hérités de la pério­ de coloniale. Ils ne correspondent ni aux op­ tions politiques des nouveaux états africains,

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ni à leurs conditions géographiques, physiques, humaines, ni aux traditions de leurs cultures, ni aux exigences du développement, ni â leurs pro­ pres ressources.

Il est certain que le manque de pertinence des contenus et des activités de beaucoup de systèmes éducatifs, leur éloignement par rapport à la vie active et par rapport à la culture nationale, constituent des éléments importants de désaffec­ tion ou de mauvais résultats scolaires des élèves. L'école telle qu'elle a été implantée en Afrique, est malheureusement une école insulaire, une éco­ le pour ainsi dire parachutée et qui constitue un kyste dans le tissu social ambiant." (Ki-Zerbo, 1961, p. 20)

Cette déclaration quelque peu radicale reflétait cependant la réalité du moment. Conséquemment, les élèves formés à cette école sont-ils victimes d'une dépersonnalisation culturelle, d'autant plus que cette école est un puissant facteur de déracinement et de déformation. Ce sont les jeunes qui subissent les effets négatifs de cette école déformatrice. Par son éducation de base qui est caractérisée, dans un tout premier temps, par sa participation au milieu social que constitue la cellule familiale dans laquelle il vit,

l'enfant n'est pas du tout prêt pour affronter un enseignement qui est en rien, comparable 5 celui qu'il a eu auparavant, et rien dans ce nouvel envi­ ronnement ne suscite son intérêt, ni sa curiosité. Dans ce nouvel environne­ ment, il se trouve dépaysé, même intellectuellement, d'autant plus que les objets d'enseignement sont trop rarement empruntés à son milieu, à son envi­ ronnement socio-culturel. Cette rupture avec le milieu socio-culturel est d'au tant plus importante que l'école, elle-même, est considérée comme une "enclave urbaine" dans le monde rural africain.

Les racines de l'inadéquation des structures de l'enseignement sont con­ nues. Elle origine dans la quasi inexistence d'objectifs assignés â l'éduca­ tion. La plupart des pays africains ont gardé les programmes et les systèmes éducatifs mis en place pendant la colonisation, quand il s'agissait plus d'ëdu quer de fidèles subalternes que de former des agents capables de prendre en main l 'économie :de leurs pays.

Dans le cas de la Côte-d'Ivoire qui nous intéresse, le système éducatif actuel, copie conforme du système français,existe depuis 1948. Aujourd'hui,

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il est dépassé. Monsieur Amon Tanah Lambert, ministre de l'Education natio­ nale de la Côte-d'Ivoire, disait:

"D convient tout d'abord de reconnaître que jus­ que là nous avons subi la scolarisation au lieu de la diriger. Cela s'explique par le fait qu'à- près la période coloniale, nous avons assisté à une explosion scolaire salutaire et inéluctable mais anarchique opérée sous la pression secondai­ re des besoins et sous les pressions aussi, il faut le dire, des élus, des responsables locaux ou de la population depuis longtemps frustrée du droit de l'instruction et, par le fait même, impa­ tiente et assoiffée de s'instruire. Les condi­ tions historiques de la scolarisation de la Côte- d'Ivoire explique donc pour une large part les faiblesses de notre système d'éducation. Celles- ci résident dans l'inadaptation de l'enseignement devenu, hélas, un moyen d'évasion et de rupture avec le milieu originel. Il en résulte un manque d'insertion de nos jeunes dans la réalité économi­ que, sociale et culturelle du pays. L'une des plaies donc de l'éducation est, selon le mot du président de la République, «un manque de réalis­ me» et parlant d'efficacité due surtout à l'ab­ sence d'une doctrine cohérente et dynamique."

(R. Millet, 1970, p . '23)

D'une façon générale, que ce.soit en Côte-d'Ivoire ou ailleurs en Afrique, l'unanimité est faite sur l'inadéquation et sur le caractère dépersonnalisant du système éducatif actuel, qui est en fait le système éducatif colonial actua­ lisé.

A travers le bilan de l'éducation coloniale, nous comprendrons pourquoi le système éducatif doit être repensé en Afrique en général et en Côte-d'Ivoire en particulier,afin qu'il soit adapté aux réalités africaines en général et aux réalités ivoiriennes en particulier.

En parlant du bilan de l'éducation coloniale en Afrique occidentale fran­ çaise (A.O.F.), nous ne considérerons que l'aspect culturel, laissant de côté les aspects politiques ou économiques, ne nous limitant qu'aux incidences cul­ turelles qui découlent de cette éducation coloniale, depuis son implantation en Afrique autour des années 1800 à 1960. Les avantages de ce système d'édu­ cation coloniale,certes importants, ne seront pas non plus considérés.

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Nous sommes d'avis pour dire que les objectifs de 1 'éducation colonia­ le ont été atteints. Nous savons qu'à chacun des objectifs définis ont cor­ respondu des programmes et des contenus de cours appropriés qui étaient con­ gruents avec les objectifs visés.

Au début de son implantation, l'enseignement colonial, qui se destinait à former des cadres subalternes, a conçu un programme d'enseignement en consé­ quence. Plus tard, pour s'attacher les populations, il entreprit une croisa­ de contre les cultures des autochtones pour réaliser leur assimilation la plus totale, s'étant fixé comme objectif de "franciser" les populations africaines sur tous les plans. Pour cela, il fallait assimiler le jeune africain, ce qui nécessita un programme approprié dont les éléments les plus saillants sont la relégation des langues locales au deuxième plan, voire leur interdiction dans l'enceinte de l'établissement et la valorisation de la civilisation occiden­ tale au détriment des cultures locales.

L'extrait suivant de Jean-Suret-Canale (1964) illustre au mieux le rôle qu'a joué l'éducation dans cette politique d'assimilation et de dépersonnali­ sation de 1 ' "indigène".

"Et, puisqu'on ne peut pas se passer de l'enseigne­ ment, on cherchera à l'utiliser au mieux aux inté­

rêts de la colonisation. La dépersonnalisation cul­ turelle entre ici dans les moyens de cette politi­ que. On donnera à ces agents subalternes une forma­ tion purement française, on les convaincra de la su­ périorité exclusive de cette culture européenne dont ils ont le privilège d'obtenir quelques miettes et on leur inculquera qu'elle les place bien au-dessus de leurs frères restés "sauvages", "incultes".

En même temps, on s'efforcera de les modeler suivant les règles du "bon esprit": Ils doivent reconnaître la supériorité du Blanc, de sa civilisation qui les a sauvés de la cruauté sanguinaire des "roitelets" barbares , lui vouer respect, reconnaissance et sur­ tout obéissance. S'ils sont autorisés à marquer la distance qui les sépare de la vile multitude, ils sont expressément invités à ne pas oublier celle qui les sépare des maîtres européens: on leur rappelle qu'on ne peut en quelques années, s'élever au niveau d'une civilisation millénaire." (Jean-Suret-Canale, 1964, pp. 474-475)

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En gros, le système éducatif colonial a misé sur le développement de l'attrait de 1 'occident,tout en dénigrant tout ce qui est différent de la ci­ vilisation occidentale,en développant chez l'africain le culte du "Blanc". L'enseignement dispensé en français, les programmes et les manuels scolaires de l'époque ont contribué à convaincre le jeune africain de l'infériorité du noir, de la bonté et de la générosité de la nation colonisatrice qui, en met­ tant fin â la tyrannie des chefs Noirs, a apporté avec elle la paix, l'école, le dispensaire. Les programmes d'enseignement ont fini pas mystifier le jeune africain.

Nous n'avons pas l'intention d'aborder ici le problème des rapports so­ ciaux qui résultent de l'enseignement colonial, mais n é a n m o i n s ^ serait in­ téressant de se rendre compte de l'ampleur de cette dépersonnalisation par l'enseignement colonial au niveau de ceux qui sont issus de cette école: les fonctionnaires formés à cette école ont fini par s'identifier aux colons qu'ils vénèrent,et à être arrogants avec leurs compatriotes qu'ils considèrent infé­ rieurs â eux,de par leur condition matérielle et leur position sociale qu'ils doivent à leur éducation. »

Cette éducation, comme le dit A. Noumouni, a été un conditionnement idéo­ logique dont les conséquences psychologiques, en réussissant à vider de façon substantielle le contenu humain de leur vie, a appauvri leur vie spirituelle.

La conséquence de cette attitude est un détachement complet et radical vis-à-vis du peuple et une imitation effrénée de tout ce qui émanait du " Blanc". Pour résumer la situation des "évolués" africains issus de cette école colonia­ le, référons-nous à cet extrait.

"Obnubilés par la puissance matérielle et la supério­ rité technique du colonisateur, assurés de "manger" et de "boire" en échange d'une loyauté et d'une doci­ lité envers les maîtres puissants de l'heure, limités dans leur compréhension des événements et des faits politiques, économiques et sociaux par leur position et une formation découlant des méthodes et du contenu de l'enseignement colonial, les fonctionnaires indi­ gènes de l'administration coloniale se livraient, à l'exemple de leurs supérieurs européens, aux "jouis­ sances" de la vie coloniale avec une mentalité digne de parvenus; les manifestations matérielles et spiri­ tuelles de la société capitaliste moderne ne faisaient, à leurs yetncr que confirmer la "supériorité" du "Blanc",

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avec comme pendant inséparable "l'infériorité" et "l'incapacité" du "Noir" et une prétendue fatalité de la domination des peuples africains par l'impérialisme européen." (A. Noumouni, 1967, pp. 61-62)

Le système éducatif colonial avait, dans ses fondements, pour objectif la dépersonnalisation culturelle de l'africain, la destruction systématique de la conscience et de la fierté nationale.

En réalisant systématiquement la dépersonnalisation culturelle des afri­ cains, en installant par tous les moyens, dans la conscience de ceux qui en bénéficiaient, le complexe d 'infériorité, l'idée de l'incapacité du noir, l'enseignement colonial y a semé un germe très lourd de conséquences. L'édu­ cation coloniale a littéralement gangréné la pensée et l'affectivité de

l'africain et truffé son comportement d'un cortège de complexes et de réflexes anormaux.

Par son caractère assimilateur et par la négation de la culture natio­ nale qu'elle comporte, l'éducation coloniale en général aboutit â une vérita­ ble aliénation du colonisé. y

1.2 Objet de la recherche

Le problème de 1'inadéquation'du sytème éducatif, compte tenu de son am­ pleur, a été au centre de toutes les conférences des ministres de l'éducation nationale en Afrique depuis les indépendances. Ce qui ressort de toutes ces conférences, c'est le caractère impératif d'une nouvelle école en Afrique. Les différentes conférences des ministres de l'Education nationale,des pays d'expression française d'Afrique et de Madagascar, rappellent donc la nécessité de repenser le système scolaire.

La conférence de Kinshasa, en 1968, retenait comme finalité actuelle de l'enseignement primaire "la promotion collective des jeunes et des adultes".

Celle de Bangui, en 1971, en reprenant les conclusions d'un séminaire préparatoire tenu à Yaoundé du 21 au 26 septembre 1970, déclare qu'il faut an­ crer l'école dans le milieu, car par son dynamisme, elle favorisera l'évolu­ tion progressive de ce milieu vers le développement.

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Les spécialistes africains de l'éducation comme Amadou Nohtar N'Bow et l'historien Ki-Zerbo sont pour la réadaptation du système éducatif pour l'in­ tégration de l'école dans l'environnement socio-culturel (I.P.A.N., 1978). Certains intellectuels formés à l'école coloniale sont pour une africanisa­ tion pure et simple des programmes d'enseignement (H. De Leuse, 1971).

Dans la conception de tout un chacun, l'école nouvelle devra établir de nouvelle relation avec un milieu de vie dont elle s'est coupée, à moins qu'elle ne continue de devenir un corps étranger vivant une autre vie que cel­ le de la communauté. Autrement dit, cette école devra être:

"L'héritière du passé (Tradition et colonisation) donc liée à une philosophie de l'homme, à la psy­ chologie des enfants, aux valeurs traditionnelles, soucieuse de bien équilibrer l'apprentissage de savoir-faire et de savoir-être.

Dynamique et ouverte au plus grand nombre, car elle sera l'école d'une société d'évolution rapide, très liée aux impératifs d'africanisation des ca­ dres, articulée au développement culturel, écono­ mique et social. y

Insérée au milieu de vie où elle trouvera ses thè­ mes de réflexion et d'action. (I.P.A.N., Pédago­ gie pour l'Afrique Nouvelle, 1978, p. 19)"

Toutes ces considérations qu'on accorde â l'enseignement en Afrique en général et en Côte-d'Ivoire en particulier témoignent combien de fois l'inadé­ quation du système éducatif, en Afrique en général et en Côte-d'Ivoire en par­ ticulier, est perçu comme un problème sérieux au point de constituer un handi­ cap dans le processus de développement de toute 1 'Afrique en général et de la Côte-d'Ivoire en particulier. C'est la raison pour laquelle une réforme du système éducatif en Afrique Noire s'est avérée comme une nécessité.

Les remarques que formule A. Noumouni (1967), en ce qui concerne la né­ cessité d'une réforme du système éducatif en Afrique Noire, sont basées sur plusieurs points.

Selon lui^ la traduction dans les faits de toute politique donnée dans le domaine de l'éducation, éducation populaire, enseignement et scolarisation, ne peut se faire et ne se fait nécessairement qu'à travers un système détermi­ né d'organisation. Ce qui justifie l'adaptation et la correspondance indispen­ sables entre le système d'éducation, les objectifs généraux qui lui sont

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assignés et les moyens utilisés. Le système actuel d'éducation, tel qu'il existe dans presque tous les états africains, des ex A.O.F. et A.E.F.,

est dans l'essentiel identique au système français. C'est pourquoi, dans sa conception générale, ce système est considéré comme inadapté â la situation des pays africains. La preuve est qu'il est étroitement lié,dans sa concep­ tion,aux particularités de l'histoire du peuple français.

Les critiques que fait A. Noumouni du système actuel d'éducation por­ tent principalement sur sa conception, son organisation, ses programmes, son orientation et sur l'organisation des examens.

La conception générale: Comme nous l'avons déjà dit, le système actuel d'éducation en Afrique Noire est,dans l'essentiel,identique au système fran­ çais et qu'il est étroitement lié,dans sa conception,à l'histoire du peuple français. C'est justement cela qui fait ressortir l'inadaptation de ce sys­ tème aux conditions de l'Afrique Noire actuelle.

L'organisation générale: L'organisation du système d'éducation, telle qu'elle apparaît aujourd'hui dans la majorité des états africains, correspond étroitement à la conception générale que nous avons évoquée, laquelle est, elle-même, liée à l'histoire du peuple français. De plus, sa mise en place s'est faite sur la base de l'ancienne organisation d'avant-guerre, et dans le cadre de la domination coloniale. Il faut se rendre à l'évidence que les di­ vers changements d'appellation ou de titres de tel ou tel service, de tel ou tel haut fonctionnaire, qui ont pu intervenir çà et là, aldrs que l'édifice entier reste en place, ne peuvent être considérés comme une "réorganisation" de l'éducation. Comme conséquence à sa mise en place, tous les défauts déjà révélés dans l'ancienne métropole (le système est caduc), aggravés de nombreux autres inhérents à sa non conformité et à son inadaptation aux conditions et au contexte africains.

A Noumouni a identifié trois traits de cette organisation: - son caractère fragmentaire et cela, en deux aspects:

. insuffisance dans le domaine de l'éducation populaire: il s'agit d'une organisation de l'enseignement et de la scolarisation des en­ fants et adolescents, plutôt qu'une organisation de l'éducation au sens large du terme;

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. caractère «complémentaire» des établissements dans différents états africains: rares sont les états africains où l'on trouve de nos jours, sur le plan de l'organisation générale de l'éducation, l'en­ semble des types d'établissement et d'enseignement nécessaires à la formation de cadres de tous les niveaux et dans tous les domai­ nes d'activités;

- le cloisonnement des différents secteurs de l'éducation: il existe un cloisonnement dans le système actuel d'éducation entre les diffé­ rents ordres d'enseignement: primaire, secondaire, technique et pro­ fessionnel, technique supérieure, supérieur et les différentes écoles spéciales de formation de cadres techniques et administratifs subal­ ternes et moyens.

Ce qui en résulte est une véritable anarchie, aussi bien dans l'implan­ tation des différents types d'établissement et de leur utilisation efficace, que du point de vue de la coordination entre les différents secteurs de 1 'édu­ cation. La grande multitude et la variété des établissements: lycées classi­ ques, collèges classiques et modernes, collèges techniques, cours normaux, cours complémentaires, collège d'enseignement général, constituent un trait de l'organisation du système hérité de l'époque coloniale. Avec l'ascension â l'indépendance des pays africains, les politiques éducatives de chacun des gouvernements n'a fait qu'aggraver cet état de fait. On voit naître une mu l­ titude d'établissements qui sont censés donner parfois le même enseignement identique, comportant des cycles coiranuns ou correspondants à des programmes soit identiques, soit assez proches.

- la centralisation administrative excessive: elle constitue le troi­ sième trait qui caractérise l'organisation actuelle de l'éducation dans la plupart des pays africains. Cette centralisation administra­ tive existe autant sur le plan de la gestion que sur celui du contrô­ le. Les populations ne participent pas â la gestion des études.

Les programmes et l'orientation générale du système actu el : Les pro­ grammes de l'enseignement en Afrique Noire sont encore ceux qui avaient cours sous le régime colonial. Dans les anciennes colonies françaises, les program­ mes sont en français. Il faut noter cependant que quelques changements ont été apportés dans certains programmes comme en histoire et en géographie.

(19)

L'organisation générale des examens: La conception et l'organisation générale des examens sont un reflet fidèle de l'orientation générale, du con­ tenu et de la conception même du système actuel d'éducation. Conformément â la conception et â l'organisation non unitaires actuelles de l'enseignement, les examens se divisent en examens de l'enseignement primaire et en examens de l'enseignement secondaire. Ces examens sélectifs constituent de vérita­ bles barrages pour les élèves. Chacun des examens constitue un véritable con­ cours oü seuls les meilleurs élèves peuvent réussir. Ainsi, le travail de l'élève pendant l'année scolaire n'est pas pris en considération. L'élève et l'enseignant ne travaillent que pour l'examen. Ainsi, les programmes sont étudiés dans la perspective du «jour de l'examen».

Suite à ces remarques sur la conception générale, sur l'orientation, sur l'organisation générale et sur les programmes de l'enseignement en Afrique Noire, A. Noumouni, comme beaucoup d'autres spécialistes, suggère la nécessité d'une réorganisation complète du système d'éducation dans son ensemble.

Les suggestions que fait A. Noumouni portent principalement sur une orien­ tation générale juste et concrète de l'éducation et de l'enseignement, et sur une organisation et une structure nouvelles du système d'éducation et d'ensei­ gnement en Afrique Noire.

L'orientation générale juste et correcte de l'éducation et de l'ensei­ gnement qu'il suggère, reposent sur l'identification des objectifs généraux de l'enseignement et sur une conception et une orientation générale de l'éducation conformes aux intérêts et aux aspirations nationales des peuples d'Afrique Noire.

Les objectifs généraux de l'éducation et de l'enseignement: A travers les formes variées qu'ils revêtent dans les diverses sociétés, l'éducation d'une façon générale et l'enseignement en particulier ont toujours eu, pour ob­ jectifs fondamentaux, la formation de ceux à qui ils s'adressent afin de les préparer â s'adapter à la vie sociale, à y jouer le mieux possible le rôle qui leur est ou leur sera dévolu, 3 développer chez eux toutes qualités, potentia­ lités et capacités individuelles, de façon â permettre leur épanouissement et leur utilisation pleine et complète par les classes et couches sociales diri­ geantes ou dominantes, et, en définitive, au profit de la société toute entière,

(20)

11.

sur le plan de son évolution. En effet, sur le plan historique, le système d'éducation correspond, plus ou moins, pour une société donnée, soit à la na­ ture des problèmes politiques, économiques et sociaux qui lui sont posés ou qu'elle se pose, soit aux intérêts politiques, économiques et sociaux des classes ou couches sociales dirigeantes.

L'histoire a prouvé que la conception et l'organisation de l'éducation, dans une société donnée, sont en relation étroite avec ses structures économi­ ques, sociales et politiques. Ce fut d'ailleurs le cas de l'enseignement co­ lonial .

Une conception et une orientation générales de l'éducation conformes aux intérêts et aux aspirations nationaux des peuples d'Afrique N o i re: En ce qui concerne l'enseignement général, A. Noumouni a déjà souligné la nécessité d'en finir avec le cloisonnement actuel qui caractérise chacun des secteurs de l'enseignement. Il considère que ce cloisonnement est lié à une conception «malthusienne» et antidémocratique de 1 'éducation, correspondant à une discri­ mination de fait entre les enfants d'origines sociales différentes.

Pour A. Noumouni, la seule voie qui conduit â des changements réels dans le domaine est une conception unitaire de l'enseignement général, qui liquide­ rait une fois pour toute ces défauts, en groupant en un ensemble homogène et continu, l'ensemble des enseignements primaires et secondaires actuels. Cela comporte certains avantages sur le plan des objectifs généraux et particuliers de l'éducation:

- l'organisation et la réalisation d'une formation de base commune â tous les enfants, plus rationnellement conçue, notamment par la déli­ mitation du rôle et des responsabilités de chacun des stades de la scolarité globale, en accord avec les lois du développement de l'en­ fant et de l'adolescent et aussi avec les exigences économiques et sociaux;

- une réorganisation complète et profonde de la structure, des program­ mes, des examens, qui peut être mise à profit, soit pour l'améliora­ tion de la formation donnée aux élèves, soit pour un aménagement de la durée totale de la scolarité globale, permettant ainsi d'accélérer le rythme de scolarisation et de formation des cadres moyens et supé­ rieurs.

(21)

L'organisation et la structure nouvelles du système d'éducation et d'enseignement que suggère A. Noumouni reposent sur les principes suivants.

Pour A. Noumouni, en ce qui concerne l'organisation et la structure du système d'éducation, il ne peut être question de faire table rase de l'expé­ rience des autres pays. Il pense que malgré les différences parfois profon­ des de contexte politique, économique, social et culturel, les formes d'appro­ ches, les solutions théoriques mises en oeuvre constituent une source féconde et inépuisable d'enseignement et de profit. Autrement dit, il pense qu'il ne faut pas hésiter â faire nôtre ce qui nous apparaît bon et valable chez les autres, pourvu que,se faisant,nous le marquions de l'empreinte de notre pro­ pre personaalitéet le conformions â nos conditions concrètes. Comme nous l'avons mentionné ci-haut, pour A. Noumouni, le plus important et plus néces­ saire est une nouvelle organisation et une nouvelle structure pour le système d'éducation en Afrique Noire. A ce propos, il évoque le cas d'un groupe de professeurs africains et de professeurs progressistes français qui ont collec­ tivement élaboré et proposé au gouvernement de la République de Guinée un pro­ jet de réforme de l'enseignement. Selon A. Noumouni, la structure de l'orga­ nisation de l'éducation devra correspondre à un enseignement général unique, un enseignement moyen spécialisé, un enseignement supérieur spécialisé avec, dans chaque cas, deux formes de scolarité: celle à plein temps et celle à temps partiel (cours du soir et par correspondance).

Pour ce qui concerne les programmes et les examens, il part du principe selon lequel les programmes constituent la traduction concrète de la concep­ tion, des objectifs et de l'orientation de l'éducation, et que les examens constituent un moyen incontestable de vérifier et de sanctionner l'accomplis­

sement des différentes tâches à travers les résultats de l'action de l'éduca­ tion chez les apprenants. Pour lui, la formulation des programmes d'enseigne­ ment constitue un travail qui nécessite d'être entrepris collectivement et ce­ la en faisant appel à des spécialistes de différentes disciplines, travaillant dans différents ordres d'enseignement.

Parlant précisément des programmes, A. Noumouni dit qu'ils doivent être conçus dans le cadre de conception unitaire et globale de l'éducation. Pour cela, les programmes doivent être un ensemble homogène et coordonné, tant hori­ zontalement au niveau des classes données, que verticalement, du point de vue

(22)

13.

de la succession des années d'étude pendant la délimitation des responsabi­ lités respective et nécessaire â différents stades de la formation de l'en­ fant et de 1 'adolescent,pour tenir compte de son évolution physique, psychi­ que et mentale au cours de la scolarité ou pour répondre à des objectifs pré­ cis de spécialisation. La conséquence de cette délimitation est une particu­ larisation relative des tâches, moyens et méthodes. En ce sens, on

distingue-- les programmes de l'enseignement élémentaire; - les programmes de l'enseignement moyen général; - les programmes de l'enseignement moyen spécialisé; - les programmes de l'enseignement supérieur spécialisé.

A propos des examens, il considère que pour une conception saine et dé­ mocratique de l'éducation, ils doivent perdre le caractère de moyens de dis­ crimination qu'ils revêtent trop souvent entre les enfants, selon les différen­ tes couches sociales dont ils sont issus. Pour lui, ils doivent constituer, uniquement sur le plan pédagogique, une partie de l'arsenal des moyens et mé­ thodes permettant de garantir et contrôler le niveau des études, le travail des élèves, comme l'efficacité des maîtres, de méthodes et des programmes eux- mêmes.

Parlant de réforme, M. Diabomba (1983) dit que toute réforme implique une remise en cause du système existant, c'est-â-dire qu'on essaie de créer les conditions qui pourraient permettre l'établissement d'un mariage entre l'école et le milieu indigène. La réforme que propose M. Diabomba, tout comme A. Noumouni, n'a pas pour objet le rejet systématique de l'école institution­ nalisée, mais elle devra tenter de modifier le contenu de son enseignement, de sorte à produire des cadres compatibles avec les caractéristiques sociales et technologiques du contexte indigène.

Depuis l'ascension des pays africains à l'indépendance, diverses réfor­ mes ont été tentées au niveau du système d'éducation hérité de la colonisa- ti o n .

M. Diabomba (1983) a recensé quelques tentatives de réformes. Nous

n'examinerons que les approches. Les différentes tentatives ont été effectuées au Cameroun et au Mali. L'Institut pédagogique du Cameroun (I.P.C.) a identifié

(23)

quatre raisons pour lesquelles la réforme de l'éducation s'avérait nécessaire: - la première est d'ordre historique: le Cameroun a hérité de deux

systèmes éducatifs étrangers;

- la deuxième est d'ordre pédagogique et technique; - la troisième est d'ordre économique;

- la quatrième est d'ordre social.

Pour satisfaire cette nécessité de réforme de l'enseignement au Cameroun, le I.P.C. a opté pour les recommandations faites par la Commission interna­ tionale de 1 'UNESCO sur le développement de l'éducation, à savoir:

"1. "Insister sur le fait que l'éducation doit être considérée comme un domaine politique où l'importan­ ce de l'action politique est particulièrement déci­ sive."

2.

Il convient de repenser sérieusement les objec­ tifs, les modalités et les structures de l'éducation de façon â optimiser la mobilité professionnelle et â susciter en permanence le désir d'apprendre et de se former.

3. C'est pourquoi la Commission a mis l'accent sur deux notions fondamentales: l'éducation permanente et la cité éducative. En effet, il faut aller enco­ re au-delà de la révision nécessaire de systèmes éducatifs et penser au plan d'une cité éducative. Telle est la vraie dimension du défi éducatif de de­ main.

4. La très forte demande d'éducation afférente d'une part à l'institution d'une véritable éducation per­ manente ne pourra pas être satisfaite aux instruments aux possibilités illimités de la nouvelle technologie. 5. Si l'on accepte l'idée qu'il faut repenser l'édu­ cation dans son ensemble et tous ensemble, alors se fait jour plus que jamais la nécessité d'une coopéra­ tion internationale et d'une solidarité mondiale." (A. Diabomba, 1983, pp. 65-66)

Quant au ministère de l'Education du Mali, par sa réforme, il vise: "1. Un enseignement tout à la fois de masse et de

(24)

15.

2. Un enseignement qui puisse fournir avec une éco­ nomie maximum de temps et d'argent, tous les cadres dont le pays a besoin pour ses divers plans de déve­ loppement.

3. Un enseignement qui garantisse un niveau culturel nous permettant l'établissement des équivalences des diplômes avec les autres états modernes.

4. Un enseignement dont le contenu sera basé non seu­ lement sur nos valeurs spécifiquement africaines et maliennes, mais aussi sur les valeurs universelles. 5. Un enseignement qui décolonise les esprits."

(M.. Diambomba, 1983, p. 80)

Son projet examine tour à tour les différents aspects de l'enseignement qui sont:

- la structure; - la législation;

- les programmes, les horaires et les examens; - les débouchés;

- les cadres. »

L'autre projet de réforme au Mali concerne l'expérience d'alphabétisa­ tion fonctionnelle présentée par Mamadou Diabaté, sélectionné par M. Diambomba (1983).

Mamadou Diabaté la décrit comme ayant, dans un premier temps, un objec­ tif économique. En plus de ce premier objectif, elle en vise d'autres qui sont:

"- Jeter un pont sûr au-dessus du gouffre qui sé­ pare sur le plan technique et mental les cadres et ceu/ qu'ils ont la mission d'encadrer.

- D'exhumer et d'enrichir notre patrimoine culturel dont 1 'agonie fait des progrès tous les jours avec chaque vieux qui meurt.

- De remédier dans une large mesure â l'insuffisan­ ce de la scolarisation en absorbant une partie du lourd reliquat de futurs analphabètes que celle-ci laisse tous les ans.

- De donner â une plus grande partie de notre peu­ ple la possibilité de connaître les droits et de­ voirs du citoyen, pour pouvoir jouer véritablement

le jeu de la démocratie." (M. Diambomba, 1983, pp.

(25)

Il faut remarquer que certains de ces objectifs ont disparu de 1 'élabo­ ration des programmes d'alphabétisation. Ce sont ceux qui touchent la politi­

que et la culture.

La remarque que 1 'on peut faire de ces différentes réformes est leur caractère parcellaire. Ceci est aussi valable pour la réforme de l'enseigne­ ment primaire en Côte-d'Ivoire qui a fait la promotion de l'enseignement télé­ visuel au primaire.

Nous pensons que ce n'est pas en s'attaquant de façon individuelle aux problèmes inhérents au système d'éducation actuel,que l'on peut prétendre ré­ sorber la crise des systèmes d'éducation en Afrique Noire. Ainsi, avons-nous proposé une autre approche, différente de celle jusque-là en vigueur. Nous proposons l'approche systémique en lieu et place de l'approche analytique. L'approche systémique se révèle être un instrument qui permet de mettre à jour les caractéristiques inattendues de toute organisation, assurant ainsi leur efficacité.

Dans les pages qui suivroht, nous justifierons notre choix. Pour mieux comprendre et mieux apprécier la situation du système d'éducation de Côte- d'Ivoire, nous avons jugé nécessaire de présenter les faits saillants qui ont marqué son développement et les idéologies qui y sont sous-jacentes.

(26)

CHAPITRE II

CARACTERISTIQUES DE

L'ENSEIGNEMENT PRIMAIRE PUBLIC DE LA COTE-D'IVOIRE

Le système éducatif Ivoirien a une histoire. On ne peut pas parler d'emblée du système actuel sans faire sa genèse, car nous pensons que c'est à travers son histoire que nous pourrons 1 'appréhender le mieux pour comprendre son état actuel. L'historique <iu système éducatif actuel nous permettra de saisir l'origine des problèmes culturels qu'on lui connaît aujourd'hui et de comprendre le caractère impératif d'une prise de conscience de la situation, quant à trouver des solutions adéquates.

Vouloir parler de la genèse de l'enseignement en Côte-d'Ivoire, c'est automatiquement faire allusion à l'histoire même de l'enseignement colonial en Afrique. Ce qui nous amènera â considérer, dans le présent chapitre, les politiques coloniales en matière d'enseignement, les programmes d'enseignement et les organisations du système d'éducation coloniale.

Dans cette étude, nous insérons le cas de la Côte-d'Ivoire dans celui de l'Afrique en général. Bien que indépendante comme plusieurs autres états depuis les années 60, la Côte-d'Ivoire appartenait à un des deux regroupements régionaux que comptait l'Afrique française 3 l'époque. Il y avait l'Afrique occidentale française (A.0.F . ) qui regroupait huit territoires. C'était: le Soudan (devenu Mali), la Haute-Vol ta, le Sénégal, la Mauritanie, la Guinée, le Niger, le Dahomey (devenu Bénin) et la Côte-d'Ivoire. Il y avait aussi l'Afrique équatoriale française (A.E.F.) qui regroupait: le Congo, le Gabon, 1 'Oubangui-Chari (devenu la République Centre-Africaine) et le Tchad.

(27)

En fait, cette organisation en regroupements régionaux n'était que stra­ tégique. En effet, partout ailleurs, ce sont les mêmes systèmes politiques, économiques et éducatifs français qu'on retrouvait. Ceci pour dire que les problèmes Ivoiriens,en matière d'enseignement,ne sont pas particuliers â la C ô t e - d 'Ivoire,mais â l'ensemble des colonies africaines, aujourd'hui états indépendants.

2.1 Structure de l'enseignement primaire dans la période coloniale (R. M i l l et, 1970)

C'est au début de ce siècle que le système colonial, pour des raisons avant tout politiques, créa puis développa peu à peu un enseignement public. Jusqu'alors, existaient seulement les écoles coraniques et celles des missions chrétiennes (au Sénégal, pays le plus anciennement scolarisé, le premier collège fut fondé en 1843 par l'abbé Boilat).

Le système institué était^, en bref, le suivant:

- L'enseignement primaire élémentaire était donné dans les écoles à classe unique de village dirigées par des moniteurs. Les programmes portaient sur les "rudiments de la langue française et du calcul" et sur "l'initiation aux travaux agricoles".

- Les écoles régionales situées dans les chefs-lieux de cercle (pour l'Afrique occidentale française) ou de districts (pour l'Afrique équa­ toriale française) étaient des écoles primaires â cycle complet. El­ les recevaient les meilleurs élèves du cours élémentaire 2e année sé­ lectionnés dans toutes les écoles du secteur par un véritable petit concours. Elles préparaient au certificat d'études primaires (C.E.P.), d'un niveau plus faible de l'examen français, qui donnait accès le plus souvent aux écoles professionnelles ou à l'enseignement du second degré. Le cours moyen deuxième année était presque toujours dirigé par un instituteur du cadre français qui remplissait en même temps les

r

fonctions de directeur.

- Les écoles urbaines dans les chefs-lieux de colonies et dans les grands centres analogues (écoles régionales).

(28)

19.

- L'enseignement primaire supérieur (E.P.S.) et l'enseignement techni­ que furent pendant longtemps limités à quelques écoles fédérales. En 1924, Roume, alors gouverneur général de l'A.O.F., réorgani­

sa la structure du système, reformula les programmes et les contenus d'ensei­ gnement comme ceci :

"... J'ai fixé cette organisation nouvelle de la façon suivante:

1. un enseignement primaire élémentaire donné dans les

écoles régionales ou urbaines et les cours d'adul­ tes;

2. un enseignement primaire supérieur donné â l'école

primaire supérieure établie en principe au chef- lieu de chaque colonie;

3. un enseignement professionnel donné:

a) dans une école professionnelle ou dans des ate­ liers des services publics;

b) â défaut, dans les sections annexées 3 l 'E.P.S. ; 4. un enseignement spécial de formation technique,

distribué dans les écoles établies au chef-lieu du groupe 3 Dakar:

a) l'école William Ponty destinée 5 former des ins­ tituteurs et des candidats 3 l'école de médecine; b) l'école de médecine rattachée 3 l'Hôpital indi­

gène et destinée 3 préparer des médecins, des pharmaciens et des sage-femmes auxiliaires pour le service de santé; une section, annexée 3 l'Ins­ titut zootechnique 3 Bamako, en plein centre d'éle­ vage, prépare les vétérinaires auxiliaires pour le service zootechnique;

c) l'école des Pupilles mécaniciens de la marine qui forme des mécaniciens pour la marine de l'état et la marine marchande;

Ces différents degrés d'enseignement forment les palliers superposés auxquels les élèves n'accèdent qu'après une sélection par concours.

5. Enfin, des enseignements spéciaux, répondant 3 des sentiments humanitaires, 3 des préoccupations de poli­ tique indigène ou 3 des nécessités locales, sont don­ nés dans des orphelinats de métis, dans les medersas et dans des établissements d'enseignement secondaire 3 programmes métropolitains." (A. Noumouni, pp. 47-48)

/.

(29)

Ainsi donc, la structure fédérale fut la plus généralement supprimée et l'organisation scolaire confiée à chaque colonie. A l'échelon fédéral, un directeur (ou inspecteur) général assisté d'un conseil supérieur de l'ins­ truction publique administrait l'ensemble du territoire et un chef de servi­ ce était placé sous sa dépendance auprès de chacun des pays composant la fé­ dération.

Chaque territoire était divisé en un certain nombre de secteurs scolai­ res de dimensions variables, dont le chef était un instituteur métropolitain chargé à la fois de la direction de l'école régionale et de l'inspection des écoles rurales de son secteur.

Cette décentralisation n'entraîna nullement un changement des structu­ res et la même articulation subsista de la base au sommet. Cependant, le nom­ bre des écoles de village augmenta et elles virent grossir leurs effectifs: d'écoles à classe unique, elles se transformèrent en écoles à 2, 3 ou 4

clas-0 y*g

ses, mais toujours limitées aux quatre premiers cours (cours préparatoire 1 et 2e année).

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Chaque colonie (sauf la Mauritanie et le Niger) eut désormais son école primaire supérieure avec trois actions: fils de chefs, préparation aux mé­ tiers d'instituteur et de médecin auxiliaire, agents de cadres locaux (pos­ tiers, infirmiers, agents des travaux publics).

L'école primaire supérieure recevait les élèves des cours moyens deuxiè­ me année de la colonie reçus au concours d'entrée. Une autre sélection inter­ venait après l'E.P.S. pour diriger les meilleurs élèves vers les lycées fédé­ raux et l'école normale William Ponty.

Peu à peu, l'enseignement secondaire et l'enseignement technique, à leur tour, seront abandonnés aux colonies et les plus importantes se verront installer au chef-lieu, lycée, collège, école normale, école technique.

En 1931, l'école de village fut modifiée profondément pour l'adjonction de champs, de plantations, de troupeaux, de basse-cours pour l'enseignement agricole auquel était consacré la moitié de l'horaire. Mais cet enseignement agricole obligatoire ne pouvait que se borner à reproduire les façons cultu­ rales traditionnelles en raison du manque de matériel moderne, de graines et

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21.

Cet enseignement visait autant â la formation de bons artisans, pour ceux qui ne poursuivaient pas leurs études, qu'à l'acquisition d'une instruction générale moyenne, pour ceux qui voulaient concourir aux écoles supérieures. En effet, on trouvait, plus ou moins bien organisés, des ateliers de travaux pratiques auprès de chaque école rurale et urbaine, et un pré-apprentissage des travaux du bois, du fer ou de la forge, ainsi que des sections ménagères dans les écoles régionales. On trouvait également des centres d'apprentissage, des écoles professionnelles, des écoles d'agriculture et des ateliers ou éco­ les d'arts appliqués.

Ainsi s'organisait l'enseignement en Afrique Noire jusqu'en 1948.

A partir de 1948, période qui correspond à la fin de la deuxième guerre mondiale, le système éducatif en Afrique Noire prend un tournant décisif. Sui­ te aux pressions exercées de part et d'autre par les étudiants et les popula­ tions africaines, l'impérialisme européen, sortant affaibli de la guerre, fera des concessions. Les populations africaines sont catégoriques quant à la mise en place, dans les colonies africaines, d'un système éducatif identique à c e ­ lui de la France. Personne ne voulait de l'enseignement au rabais dispensé, jusque-là, dans les écoles africaines. On exige l'instauration d'un enseigne­ ment de niveau et de qualité égals â celui des écoles françaises. Ce fut l'ori­ gine de la réorganisation de l'enseignement en A.O.F., 24 ans après celle ef­ fectuée par Roume.

A partir de 1948, c'est un enseignement secondaire de type français

qui se développa. D'abord, furent ouverts des cours secondaires parallèlement aux écoles primaires supérieures. Puis, dans un deuxième temps, des collèges classiques et modernes se substituèrent aux E.P.S. Cette mesure fut certaine­ ment préjudiciable à la formation des cadres moyens africains. En effet, les E.P.S. n'étaient pas seulement des écoles supérieures d'enseignement général, mais aussi et bien plus des écoles de formation de cadres: enseignement, san­ té, douane. Il s'ensuivit une crise dans la qualité du recrutement des fonc­ tionnaires.

Par la suite, l'enseignement secondaire se confirma. Des lycées s'ou­ vrirent et un personnel enseignant français qualifié vint en plus grand nombre. de plants sélectionnés, de conseils techniques les plus élémentaires.

(31)

Parallèlement, et pour doubler le premier cycle de l'enseignement secondaire et remplacer un peu les E.P.S., furent créés des cours complémentaires devenus maintenant collèges d'enseignement général.

Ainsi, â la veille de l'indépendance des états africains, se trouva im­ planté un enseignement complet de type métropolitain se présentant de la façon suivante:

1. L'enseignement primaire, qui dure six ans comme par le passé. Il conduit au certificat d'étude primaire qui équivaut au diplôme fran­ çais correspondant.

2. L'enseignement secondaire. Les E.P.S. ont été érigés en collèges modernes, les écoles normales et les cours normaux en établissements d'enseignement secondaire tout en continuant de former les institu­ teurs. L'enseignement secondaire comprend:

- les lycées;

- les collèges classiques et modernes; - les cours normaux et école normale.

Les écoles normales dispensent un enseignement général conduisant au baccalauréat suivi d'une année de formation professionnelle.

3. L'enseignement technique et professionnel. Les anciennes écoles professionnelles deviennent des collèges techniques et des centres d'apprentissage. De nouvelles écoles sont créées, à savoir: les collèges techniques agricoles, les centres d'apprentissage, d'agri­ culture.

a) Les collèges techniques d'industrie. On y dispense en même temps un enseignement général secondaire et un enseignement technique, théorique et pratique. On y prépare le Certificat d'aptitude professionnelle (C.A.P.) d'industrie et le Brevet d'enseignement industriel (B.E.I.) qui correspond à des spécialités d'ouvriers et de techniciens.

b) Centres d'apprentissage d'industrie pour la formation d'ouvriers qualifiés. L'enseignement pratique conduit au C.A.P.

c) Centre d'apprentissage d'agriculture et collèges techniques d'a- qriculture pour la formation de cadres de différents niveaux

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techniques: aide-conducteur d'agriculture, moniteur d'agricul­ ture.

d) L'école technique supérieure pour la formation des cadres tech­ niques: surveillants et dessinateurs des travaux publics, géo­ logues, topographes pour les services des travaux publics et des mines.

4. L'enseignement supérieur. L'enseignement supérieur comprend les grandes écoles et les universités pour la formation des cadres.

2.2 Politiques coloniales en matière d'éducation en Afrique occidentale française

2.2.1 Avant les deux guerres

De façon générale, en Afrique, la création des premières écoles corres­ pondait au début de la période d'administration des colonies. Ainsi, les pre­ mières écoles, qui ont vu le joyr avec l'installation de l'administration colo niale, poursuivaient-elles la production d'un personnel subalterne indigène nécessaire à la bonne marche de l'administration coloniale. Ainsi, l'école de vait contribuer â la formation de:

- commis et interprètes; - employés de commerce;

- infirmiers de santé et infirmiers vétérinaires; - instituteurs et moniteurs;

- médecins auxiliaires et vétérinaires auxiliaires.

Les déclarations suivantes, qui sont celles de Maurice De Lafosse que cite A. Noumouni dans 1 'Education en Afrique (1967), illustrent clairement la politique éducationnelle de la France en Afrique â cette époque:

"Il ne s'agit plus seulement de doter nos écoles de maîtres indigènes destinés à suppléer au manque de maîtres européens. Il s'agit encore de doter toutes les branches de l'administration, de l'indus­ trie, de l'agriculture, des services d'hygiène et d'assistance, d'un personnel indigène apte â secon­ der un personnel européen trop restreint et, dans une

(33)

"Ces agents, ouvriers, employés, aides médecins, re­ crutés parmi les indigènes, appelés à exercer parmi leurs compatriotes des métiers ou des fonctions aupa­ ravant réservés aux Européens, méthodiquement prépa­ rés â exercer ces métiers ou fonctions et non plus chargés au petit bonheur, après un apprentissage plus ou moins empirique, d'emplois au-dessus de leurs con­ naissances et de leurs moyens, ne voit-on pas quelle influence ils pourront avoir sur l'évolution des so­ ciétés indigènes?"

"Ce sera une source de confiance de la part des popu­ lations encore si distantes de nous-mêmes, dans des principes et des méthodes que nous ne saurions imposer par la force et que nous n'arriverons que bien diffi­ cilement à instaurer par la seule vertue de la persua­ sion, si la propagande était faite directement par mous."

"De même qu'il nous faut des interprètes pour nous fai­ re comprendre des indigènes, de même il nous faut des intermédiaires appartenant aux milieux indigènes par leurs origines et au milieu européen par leur éduca­ tion, pour faire comprendre aux gens du pays et pour leur faire adopter cette civilisation étrangère pour laquelle ils manifestent, sans qu'on leur en puisse te­ nir rigueur, un misonéisme bien difficile à vaincre."

(A. No u mouni, 1967, p. 45)

(N.B.: Pas souligné dans le texte original)

Ainsi, la politique éducationnelle de la France en Afrique à cette épo­ que, telle que l'a définie Maurice De Lafosse, se résumait essentiellement par une intention de produire, de façon exclusive, un personnel subalterne autoch­ tone et d'imposer la civilisation occidentale â ceux-ci. Voilà en quelque sorte ce â quoi se destinait l'enseignement colonial.

2.2.2 Entre les deux guerres

La victoire des alliés sur l'Allemagne en 1918, avec la participation active des troupes africaines surtout, furent la cause d'une nouvelle politi­ que éducationnelle, d'une restructuration du système éducatif et d'une recon­

(34)

Les objectifs de la nouvelle organisation

Les leçons tirées de la première guerre amènent la France à vouloir s'attacher les populations africaines, comme le dit Noumouni,

"Il s'agit non seulement de pousser le plus loin pos­ sible l'exploitation économique des colonies, mais aussi d'y renforcer la domination politique par une aliénation plus complète de leurs populations, par une sujétion permettant de s'assurer leur "loyalisme". Dans le cadre d'une telle politique, un rôle de pre­ mier ordre était tout naturellement dévolu 5 l'ensei­

gnement colonial en tant qu'arme d'oppression cultu­ relle et de dépersonnalisation." (A. Noumouni, 1967, pp. 46-47)

Donc, cette intention de s'attacher la population africaine amena des transformations que subit le système éducatif colonial jusqu'à sa forme défi­ nitive en 1924, celle que le gouverneur-général Roume lui donna.

La déclaration faite par M. Brevié alors gouverneur-général de l'A.O.F. devant le conseil de gouvernement, nous dévoile l'idéologie qui soutendait cette nouvelle organisation:

"Le devoir colonial et les nécessités politiques et économiques imposent à notre oeuvre d'éducation une double tâche: il s'agit d'une part de former des ca­ dres indigènes qui sont destinés â devenir nos auxi­

liaires dans tous les domaines, et d'assurer 1 'ascen- sion d*une élite soigneusement choisie; il s'agit d'autre part d'éduquer la masse pour 1a rapprocher de nous et transformer son genre de vie... Au point de vue politique, il s'agit de faire connaître aux indi­ gènes nos efforts et nos intentions de les rattacher à leur place, à la vie française. Au point de vue économique enfin, il s'agit de~préparer les producteurs et les consommateurs de demain.1' (A. Noumouni ,1967, p. 54)

(N.B.: Pas souligné dans le texte original)

Comme la déclaration de M. Brevié, les autres extraits ci-dessous i11 us trent aussi bien la politique coloniale en matière d'éducation.

"Article 5: la fréquentation scolaire revêt un carac­ tère obligatoire pour les fils de chefs et de notables." "Article 9: les meilleurs élèves de l'école prépara­ toire, ceux qui comprennent et parlent le français, sont dirigés sur l'école élémentaire la plus.voisine

(35)

pour entrer directement au C.E. Les autres, la plus grande majorité, sont rendus à la famille et remplacés par un effectif au moins égal de jeunes recrues, de façon à permettre au plus grand nom­ bre d'enfants de s'initier à la compréhension~ët à l'usage du français parlé."

"Article 2: l'enseignement primaire élémentaire a pour objet essentiel de rapprocher de nous le plus grand nombre possible d'indigènes, de les fa- mil iariser avec notre langue, nos institutions et nos méthodes, de les conduire insensiblement au progrès économique et social par une évolution pru­ dente de leur propre civilisation."

"Article 32: l'enseignement primaire supérieur a pour but de distribuer un enseignement général qui se propose dans chaque colonie:

1. de donner un complément d'instruction à des fils de notables indigènes appelés plus tard à se­ conder comme chef notre administration;

2. de préparer des candidats aux écoles du gouver­ nement général en vue de former les agents indi­ gènes de cadres généraux;

3. de former directement les agents des cadres lo­ caux; le nombre et le caractère des sections va­ rient selon lesr besoins des colonies."

"Article 64: le français est seul en usage dans les écoles. Il est interdit aux maîtres de se servir avec les élèves des idiomes du pays." (A. Noumouni,

1967, p. 55)

(N.B.: Pas souligné dans le texte original)

Autrement dit, l'enseignement colonial de l'entre deux guerres avait pour mission, comme par le passé, de former des cadres subalternes parmi les autochtones et de civiliser les populations africaines.

2.2.3 De 1945 à I960

La constitution du 27 octobre 1946, en instituant l'union française après l'abolition de l'indigènat, proclamait que, fidèle à sa mission tradi­ tionnelle, la France entend conduire les peuples dont elle a pris la charge à la liberté de s'administrer eux-mêmes et de gérer démocratiquement leurs affaires. Simultanément, les différentes colonies prenaient la dénomination nouvelle de Territoires d'outre-mer, et déclarées partie intégrante de la République française. Leurs habitants acquiérant ainsi le statut de citoyen de l'union Française, puis de citoyen Français.

(36)

27.

En fait, ils étaient citoyens français dans la forme. Car, pour être citoyen â part entière et prétendre à une quelconque égalité avec ses conci­ toyens français de France, le colonisé devait se laisser assimiler sur le plan culturel.

La conclusion que l'on peut tirer, vu ces différentes politiques colo­ niales d'éducation, c'est que sur le plan culturel, les cultures africaines en général et la culture ivoirienne en particulier, ont été carrément rejetées d'autant plus que la civilisation et la culture occidentales étaient privilé­ giées au détriment de celles-ci.

2.3 Programmes d'enseignement du système colonial

Les programmes d'enseignement du système éducatif colonial qui ont pour objectif la réalisation concrète d'une intention politique coloniale ont été conçus et adaptés pour justement satisfaire des fins politiques.

Les politiques en matière d'éducation qui jonchent le système d'ensei­ gnement colonial se résument en line dépersonnalisation culturelle de l'afri­ cain. Ceci se justifie par le fait que la langue française soit utilisée com­ me seule langue d'enseignement et que les langues locales soient reléguées au second plan. De façon globale, les programmes de l'enseignement colonial ont constitué un puissant facteur d'aliénation et d'acculturation dans la'mesure oü aucune prise en considération n'est faite pour l'environnement socio­

culturel de l'apprenant (H. De Leuse, 1971). Compte tenu de l'ampleur des re­ tombées de cet enseignement colonial aujourd'hui, en terme de dépersonnalisa­ tion culturelle, objectif que poursuivait le système, on peut reconnaître son efficacité et s'accorder pour dire qu'il a atteint ses objectifs.

2.4 Structure actuelle de l'enseignement primaire public en C 5 t e - d 'Ivoire

La réforme de 1948 a constitué un tournant décisif vers la "copie" du modèle européen dans tous les pays africains d'expression française en général et en C S t e - d 'Ivoire en particulier.

(37)

28.

D'une façon générale, le système d'éducation actuel est caractérisé par l'inexistence d'une politique cohérente en matière d'éducation culturelle. Le système éducatif hérité de l'ancienne puissance coloniale avait été conçu, adapté et appliqué dans le cadre d'objectif précis sur le plan politique, éco­ nomique, social et culturel par la puissance colonisatrice (Ki-Zerbo, 1960).

En Côte-d'Ivoire, comme dans la plupart des pays africains, tout porte à croire que 1 'éducation est poursuivie en dehors de tout plan ou objectif cohé­ rents. Jusque-là, l'éducation n'a pas réussi dans les domaines politique, éco­ nomique et social à liquider les conséquences de la domination coloniale.

La Côte-d'Ivoire, comme la majorité des pays africains, depuis son acces­ sion à l'indépendance, a apporté peu de changements appréciables quant aux con­ tenus de l'enseignement et aux programmes du système d'éducation d'alors. C'est au niveau de l'histoire, de la géographie et de l'instruction civique qu'ont été effectués les premiers et seuls changements. Le français, devenu langue

y

officielle de la Côte-d'Ivoire, continue d'être la langue d'enseignement. Les manuels produits en France sont toujours les mêmes (A. Noumouni, 1967).

Ce que l'on constate, après tout ce qui a été dit, c'est la quasi inexis­ tence d'élément culturel propre à l'environnement socio-culturel de l'enfant. Ceci nous permet de faire l'hypothèse que le système actuel, hérité de la colo­ nisation, poursuit toujours les objectifs qui lui avaient été assignés par le colonisateur: civiliser l'africain.

Sur le plan structurel, le système éducatif de la Côte-d'Ivoire s'orga­ nise comme ceci: le primaire, le secondaire, le supérieur.

Le système de l'enseignement primaire qui nous intéresse se compose d'un ministère, de directions régionales, des inspections primaires et d'écoles.

Figure

Figure  1:  L'effet  retour  ou  «feed-back»  principe  de  la cybernétique.
Figure  2:  Des  systèmes  ouverts.
Figure  4:  Aspect  structural  et  fonc­
Figure  6:  Rétroaction  positive  et  rétroaction négative.
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