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DE LA VULNÉRABILITÉ À VISÉE OPÉRATIONNELLE

2.2. É VALUATION DE LA VULNÉRABILITÉ DÉPARTEMENTALE GLOBALE

2.2.3. Vulnérabilité économique

Une grande disparité existe entre les communes en matière de développement économique et de lien avec l’espace littoral et maritime. Cependant, il est rare qu’une commune littorale soit économiquement déconnectée de l’espace littoral, et l’artificialisation du littoral peut être considérée comme un témoin de l’activité humaine sur les littoraux. En 2006, les zones urbaines, industrielles, réseaux de communication et espaces verts (non naturels) recouvrent 13 % des communes littorales, soit 2,7 fois plus que la moyenne métropolitaine. Cette part monte à 27 % à moins de 500 m du rivage (Colas, 2007). La carte 27, réalisée par l’Ifen, d’après les données de la base Corine Land Cover 2000, dessine les contours de l’anthropisation des départements littoraux. NB : D’après la définition retenue dans la base de données Corine Land Cover, le littoral

artificialisé recouvre les zones urbanisées, les zones industrielles ou commerciales et réseaux de communication, les mines, décharges et chantiers et les espaces verts artificialisés non agricoles. Le taux

d’artificialisation du littoral est presque partout supérieur à la moyenne nationale de 4,7 %. Les grandes agglomérations des départements littoraux apparaissent clairement : Rouen - Le Havre, Caen, Brest, Nantes - Saint Nazaire, Bordeaux - bassin d’Arcachon, Montpellier, Marseille, Toulon et Nice. D’autres zones du littoral sont plus densément artificialisées en continu sans présence de grandes agglomérations. C’est le cas du littoral du Nord et d’une partie du Pas de Calais, du sud Finistère, du Morbihan, du nord de la côte vendéenne et charentaise, des Pyrénées Atlantiques, des Pyrénées Orientales et de l’Hérault. Cela traduit le plus souvent une forte activité littorale (tourisme, pêche, etc.).

Carte 27 : L’artificialisation du littoral en 2000

(Source : Ifen d’après Union européenne, Corine Land Cover 2000)

Quels indicateurs permettent d’évaluer la dépendance d’un territoire à son littoral ? Il ne peut s’agir que d’activités qui pâtiraient d’une altération de la qualité du littoral, en cas de pollution maritime par exemple. Nous nous intéresserons à trois secteurs d’activités : l’activité industrielle et portuaire, la pêche et les cultures marines et le tourisme.

Activité industrielle et portuaire

Le long des trois façades maritimes de France métropolitaine, vingt ports de commerce disposent d’un trafic annuel de marchandises supérieur à un million de tonnes (huit sur la façade Manche - mer du Nord, sept sur la façade atlantique et cinq en Méditerranée) pour un trafic total de 351 millions de tonnes en 2003 (Carte 28). Cinq d’entre eux (Marseille, Le Havre, Dunkerque, Calais et Saint Nazaire) concentrent 80 % du trafic. Le Nord, le Pas de Calais, la Seine Maritime, la Loire Atlantique et les Bouches du Rhône ont, par conséquent, une dépendance très forte à la mer (figure 53).

En matière de transport de passagers, quinze ports ont assuré la desserte de 27,5 millions de passagers en 2003 (Carte 29). La façade Manche - mer du Nord assure, à elle seule, près de 65 % des échanges de passagers en raison des échanges très nombreux avec la Grande-Bretagne contre 6,5 % du trafic pour la façade Atlantique et 28,6 % pour la Méditerranée. Le Pas de Calais, avec le port de Calais qui représente à lui seul près de 50 % du trafic passagers national, est donc extrêmement dépendant de l’activité portuaire. La Seine Maritime, la Manche, l’Ille et Vilaine, les Bouches du Rhône, les Alpes Maritimes, la Haute Corse et la Corse du Sud, et, dans une moindre mesure, le Nord, le Calvados, le Finistère et le Var sont également dépendants économiquement de la mer (figure 53).

Carte 28 : Les principaux ports français (> 1 MT/an) et leur trafic annuel (Source : Ministère Équipement, DTMPL, 2004)

Carte 29 : Les principaux ports français et leur trafic passagers (> 100 000 p/an) hors desserte côtière en 2003

Figure 53 : Le trafic de marchandises et passagers dans les principaux ports français en 2003 (d’après Ministère de l’Équipement, DTMPL, 2004)

Les principaux ports de commerce sont le plus souvent des complexes industrialo- portuaires qui disposent d’industries lourdes à proximité immédiate de l’interface terre-mer. La présence d’installations industrielles à risque, dites ‘sites Seveso16’, constitue de fait un facteur à prendre en compte dans l’analyse de la vulnérabilité d’un département littoral à l’aléa « pollution maritime accidentelle ». En effet, si une pollution par hydrocarbures n’a que peu d’effet sur l’activité industrielle d’un port, excepté l’éventuelle paralysie totale ou partielle du port, et, par voie de conséquence, l’approvisionnement en matières premières et l’évacuation des produits transformés, il n’en va pas de même pour les pollutions chimiques. Ainsi une pollution chimique, a fortiori s’il y a risque d’explosion, pourrait avoir un effet désastreux sur un complexe industrialo-portuaire avec de potentielles réactions en chaîne d’une installation à l’autre.

La Direction de Prévention des Pollutions et des Risques (DPPR) du Ministère de l’Intérieur tient à jour le recensement des sites Seveso. Au total, en France métropolitaine, quarante-quatre communes littorales ont au moins un site Seveso sur leur territoire et cent vingt six sites Seveso se répartissent dans les communes littorales de métropole en 2002 (figure 54). Leur répartition reprend celle des principaux ports de commerce (Carte 30). Notons que, parmi les dix communes métropolitaines ayant au moins cinq sites Seveso sur leur territoire, six sont littorales :

ƒ Fos sur Mer (Bouches du Rhône) : quatorze sites ƒ Martigues (Bouches du Rhône) : douze sites ƒ Port la Nouvelle (Aude) : huit sites

ƒ Gonfreville l’Orcher (Seine Maritime) : huit sites ƒ La Rochelle (Charente Maritime) : six sites ƒ Dunkerque (Nord) : 6 sites

Les départements exposés sont, par conséquent, le Nord, la Seine Maritime, la Charente Maritime, l’Aude, et les Bouches du Rhône, et dans une moindre mesure, le Pas de Calais, le Calvados, le Finistère, le Morbihan, les Landes, l’Hérault, le Var, la Corse du Sud et la Haute Corse.

Figure 54 : Les communes littorales et les sites Seveso en 2002 (d’après Ifen, Observatoire du littoral, 2004, d’après DPPR 2002)

Carte 30 : Répartition des sites Seveso en France en 2002 (Source : Ifen, Observatoire du littoral, 2004, d’après DPPR 2002)

La présence de centrales nucléaires sur la façade littorale constitue également un facteur d’aggravation de l’exposition au risque, en cas de risque d’explosion à proximité d’une centrale ou de pollution maritime pouvant contaminées les prises d’eau de mer pour le refroidissement des réacteurs. On dénombre cinq centrales nucléaires littorales en France métropolitaine :

ƒ une dans le Nord (Gravelines) ;

ƒ deux en Seine Maritime (Penly et Paluel) ; ƒ une dans la Manche (Flamanville) ; ƒ une sur l’estuaire de la Gironde (Blayais).

20 % de l’électricité produite en France est ainsi produite sur le littoral. À ces cinq centrales nucléaires s’ajoute le site de retraitement des déchets nucléaires de La Hague dans la Manche.

Pêche et cultures marines

La pêche et les cultures marines sont nécessairement liées à la qualité des eaux littorales et sont les premières à être directement impactées par une pollution maritime. Cette activité se répartit sur l’ensemble du littoral métropolitain (Carte 31) avec toutefois une plus forte densité dans les quatre départements bretons, en Loire Atlantique, Vendée et Charente Maritime. Au total, 242 368 tonnes de produits de la pêche et de l’aquaculture ont été mises en vente dans les halles à marée de France métropolitaine en 2006 (figure 55). Le premier port de pêche français est Boulogne sur Mer dans le Pas de Calais. Les départements les plus concernés par l’activité pêche sont le Pas de Calais, la Manche, les Côtes d’Armor, le Finistère, le Morbihan, la Loire Atlantique, la Vendée et la Charente Maritime. Les productions conchylicoles étant comptabilisées par région de production, il n’est donc pas possible de dissocier la part revenant à chaque département (figure 56). La Bretagne réalise à elle seule plus d’un tiers de la production conchylicoles, contre près d’un quart en Normandie - mer du Nord, un quart en Pays de la Loire - Poitou Charentes et à peine plus de 10 % en Méditerranée.

Figure 55 : Quantités par département de produits de la pêche et de l’aquaculture mis en vente dans les halles à marée en 2006

(Source : Site Internet de l’OFIMER, 2007)

Huîtres Moules Total Creuses Plates Bouchot Autres

Normandie - mer du Nord 27 000 - 22 000 - 49 000

Bretagne Nord 26 000 1 500 18 000 500 46 000 Bretagne sud 17 500 200 3 000 - 20 700 Pays de la Loire 9 500 - 10 600 - 14 800 Poitou Charentes 27 500 2 500 2 500 35 300 Arcachon - Aquitaine 8 500 - - - 8 500 Méditerranée 10 000 - - 6 000 16 000 Total 126 000 4 200 53 600 9 000 192 800

Figure 56 : Prévision de production conchylicole en France par secteur géographique en 2007 (Source : Site Internet du Comité national de la conchyliculture, 2007)

Tourisme

Le tourisme est l’une des activités principales des départements littoraux. En 2004, le tourisme représentait en France métropolitaine près de 200 000 entreprises pour un chiffre d’affaires de 66,8 milliards d’euros, le littoral étant à l’origine de 26,4 % de la consommation touristique (Insee, 2006). Ceci représente près de 200 000 emplois dans les départements littoraux en 2003, soit 46 % des emplois maritimes. La répartition spatiale des campings (Carte 32), composante importante de l’offre touristique, montre clairement le rôle prépondérant joué par les zones littorales dans cette offre. La part du tourisme dans l’activité des départements littoraux n’est, cependant, pas homogène sur l’ensemble du territoire métropolitain (carte 33). NB : Certains

indicateurs touristiques n’existent qu’au niveau régional. Il n’est, par conséquent, pas toujours possible de distinguer la part de chaque département. Les régions du pourtour méditerranéen (Languedoc

touristique française, ce qui représente l’équivalent d’un revenu par habitant lié aux recettes touristiques supérieur à 2 000 € en 2005. Les régions de la façade atlantique (Bretagne, Pays de la Loire, Poitou Charentes, Aquitaine) et la Basse Normandie constituent une seconde catégorie de régions qui a perçu entre 1 500 et 2 000 € par habitant en 2005 par le biais des recettes touristiques. Les trois régions les plus septentrionales du littoral français (Nord Pas de Calais, Picardie et Haute Normandie) ne représentent, quant à elles, que 5,7 % de la consommation touristique nationale pour un revenu par habitant inférieur à 1 000 €. On peut ainsi déterminer le degré de dépendance des régions littorales françaises à l’activité touristique comme étant :

ƒ très élevé en Méditerranée ;

ƒ élevé sur la façade atlantique et les côtes de Basse Normandie ;

ƒ moyennement élevé sur la Haute Normandie, la Picardie et le Nord Pas de Calais.

Carte 32 : Concentration spatiale des campings en 2002 (Source : Insee, Direction du Tourisme, 2005)

Carte 33 : La consommation touristique régionale en France en 2005 (Source : Insee, Direction du Tourisme, 2006)

L’Observatoire du littoral a consacré l’une de ses ‘fiches indicateurs’ à l’offre touristique des communes littorales métropolitaines, leur capacité d’accueil par types d’accueil (Observatoire du littoral, Ifen, 2005). Il analyse la capacité d’accueil des 883 communes littorales métropolitaines en prenant en compte les paramètres suivants :

ƒ le tourisme marchand défini par le nombre de chambres d’hôtels, le nombre d’emplacements de campings, le nombre d’habitations légères louées à une clientèle de passage, le nombre de lits des établissements du tourisme social ou associatif et le nombre de lits de résidence de tourisme ;

ƒ le tourisme résidentiel défini par le nombre de lits en résidences secondaires.

Cette analyse aboutit à une typologie de communes littorales en six classes (cartes 34 et 35) : ƒ Capacité faible : pas d’accueil particulier ;

ƒ Capacité moyenne : camping et résidences secondaires ;

ƒ Capacité forte : résidences secondaires, associatives et camping ; ƒ Capacité forte : offre de plein air importante et résidences secondaires ; ƒ Capacité très forte : résidences secondaires et hôtellerie ;

ƒ Capacité très forte : résidences secondaires et résidences de tourisme.

L’étude montre que les différents types d’accueil coexistent le plus souvent au sein d’une même commune, et que les résidences secondaires constituent le type d’accueil touristique prépondérant sur le trait de côte (70 % de l’offre touristique). Le littoral métropolitain est, cependant, caractérisé par une forte variabilité de l’offre touristique sur son linéaire côtier, avec une nette opposition entre les côtes du Nord et du sud de la France, la situation de la Corse étant spécifique :

ƒ Littoral de la mer du Nord et de la Manche : alternance de secteurs à l’offre touristique variée (côte d’Opale, secteur de Deauville, côte d’Émeraude, côte de Granite rose, etc.) avec des secteurs à l’offre touristique plus faible (côte d’Albâtre, nord Cotentin, etc.). ƒ Littoral atlantique et façade méditerranéenne continentale : offre touristique forte à très

forte sur l’ensemble du linéaire, à l’exception des marais atlantiques ou des estuaires, les communes arrière-lagunaires languedociennes et les communes industrielles des Bouches du Rhône. Opposition entre la façade atlantique marquée par une part importante du tourisme d’entrée de gamme (plein air, mobil homes et résidences associatives) et la façade méditerranéenne dotée d’une offre haut de gamme importante (hôtels et résidences de tourisme).

ƒ Littoral de la Corse : capacité d’accueil plus faible que les communes de la façade méditerranéenne continentale. Capacité d’accueil et variété des types d’accueil plus grande en Corse du Sud qu’en Haute Corse.

Carte 34 : Capacité d’accueil touristique des communes littorales sur les façades maritimes Manche - mer du Nord et atlantique en 1998

Carte 35 : Capacité d’accueil touristique des communes littorales en Méditerranée en 1998 (Source : Ifen, Observatoire du littoral, 2005)

Les données collectées par l’Ifen et disponibles à l’échelle départementale sur le nombre de chambres d’hôtel, d’emplacements de campings et de résidences secondaires dans les communes littorales (http://eider.ifen.fr/Eider/tables.do), permettent de définir une vulnérabilité touristique globale par département (figure 57). Les résidences secondaires constituent la plus grande part de la capacité touristique des communes littorales sauf dans le Nord et les Landes. La plus grande capacité touristique littorale est détenue par les Alpes Maritimes et le Var, suivie de près par l’Hérault et la Vendée (figure 58). Le Calvados, les départements de la façade atlantique, les Pyrénées Orientales et l’Aude viennent ensuite. Peu de départements ont une capacité d’accueil faible : le Nord, la Somme et la Seine Maritime. L’Eure et le Gard sont une catégorie à part en raison de la faible longueur de leur linéaire côtier. Les Bouches du Rhône disposent également d’une capacité d’accueil touristique plus restreinte à cause du développement de l’activité industrielle.

Figure 57 : Capacité d’accueil touristique des communes littorales

(d’après Ifen, Ministère du Tourisme d’après fichiers d’hébergements touristiques)

La figure 59 illustre la place du littoral dans l’économie touristique des départements littoraux. L’évaluation de la dépendance au littoral de l’économie touristique départementale reflète l’impact que pourrait avoir une pollution maritime sur l’économie locale. Le tourisme est très fortement en lien avec le littoral (à plus de 60 %) dans tous les départements littoraux métropolitains, à l’exception de l’Eure et du Gard en raison de l’étroitesse de leur littoral et des départements du Nord, de la Somme et de la Seine Maritime. La part des communes littorales dans l’offre hôtelière de la façade atlantique (de la Loire Atlantique aux Pyrénées Atlantiques) et de l’ouest de la façade méditerranéenne continentale est plus réduite. Ceci s’explique notamment par la présence de pôles urbains (Nantes, Bordeaux, Montpellier, etc.) ou touristiques (Carcassonne, montagne, etc.) non littoraux d’importance au sein de ces départements, qui contrebalancent la part du littoral.

CAPACITÉ