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La voix de Dieu chez Saint-Augustin

La place de la voix, de la parole de Dieu et ce quelle véhicule est prépondérante chez Saint Augustin.

Il s'interroge sur la différence entre la voix de l'homme et celle du Divin. Ce qui lui permet de tenter d’appréhender l'être de cette dernière. C'est pourquoi il s'efforce d'analyser la voix humaine et celle de Dieu.

Pour lui, les voix humaines commencent et finissent, elles sont inscrites dans le temps.

Il souhaite que Dieu parle, un Dieu éternel, tout comme sa voix, contrairement à celle de l'homme : « Et qu'il parle lui seul, non par ses créatures, mais par lui-même, et que son verbe nous parle, non plus par la langue charnelle, ni par la voix de l'ange, ni par le bruit de la nuée, ni par l’énigme de la parole, mais qu'il nous parle lui seul que nous aimons en tout, qu'en l'absence de tout, il nous parle »279.

Dieu parle à Saint Augustin. Selon lui, la parole de l’Éternel provient des écritures, « qu'elle parle dans le temps ; et le temps n'atteint pas jusqu'à mon Verbe qui demeure en moi dans mon éternité. Ce que tu vois par mon esprit, c'est moi qui le vois, et ce que tu dis par mon esprit, c'est moi qui le dis, mais tu vois dans le temps que je vois, tu parles dans le temps et ce n'est pas dans le temps que je parle. »280

Il s'interroge sur ce qu'est la parole de Dieu. Selon lui, la voix de Dieu laisse place au silence. Mais avant cela, « elle commence et finit, ses syllabes résonnent et s'évanouissent, la seconde après la première, la troisième après la seconde, ainsi de suite, jusqu'à la dernière, et le silence après elle »281. Dès lors, cette voix qui n'est pas éternelle, mais s’évanouit peu à peu est l'expression d'une créature dotée d'un corps qui provient de la volonté de Dieu. Ainsi, une créature transporte sa voix en parole et l'inscrit dans la temporalité humaine.

277 Saint Augustin. Les confessions. Livre 3 chapitre 6. Format Kindle, 2000, (397-401). 278 Ibid, Livre 10 chapitre 6.

279 Ibid, Livre 9 chapitre 11. 280 Ibid, Livre 13 chapitre 29. 281 Ibid, Livre 11 chapitre 5.

La parole de Dieu est humaine et portée par Jésus-Christ, mais la voix de Dieu est immuable et éternelle. C'est une voix intérieure qui parle à l'être humain. Pour lui, la parole divine enseigne, car elle est le principe de la connaissance, elle est la cause et à la fois la voix qui parle. La vraie parole de la Déité est celle transmise par Jésus, le Verbe de Dieu fait chair. Cette parole apprend à l'homme grâce à « l'immuable vérité de Dieu »282, si elle ne le faisait pas elle ne serait pas une parole.

Dieu appelle l'homme par ses paroles : « je suis la voie, la vérité, la vie »283. Elle s'est incarnée dans la chair en la personne du Christ pour promulguer la sagesse du Divin afin qu'elle nourrisse les êtres humains.

Pour lui, le Verbe de Dieu, n'est pas un homme, bien qu'il en ait le corps, mais il est Dieu. Ainsi, il se fait voix au travers d'une enveloppe corporelle.

D'après Saint-Augustin, la voix de celui que Dieu appelle son « fils aimé »284, « retentit et passe, elle commence et finit »285. Puisque cette voix est temporelle, elle est l'expression « d'une créature, organe temporel »286 de l’éternelle volonté de Dieu.

En contrepartie, l'être humain perçoit la voix du Seigneur au travers de son fils, par son corps, par « son oreille extérieure »287qui porte les paroles à l'âme qui possède « une oreille intérieure »288 qui s'approche selon lui, du Verbe éternel et donc de la voix hors temporalité de Dieu : « L'âme a comparé ces accents fugitifs à l'éternité silencieuse de votre Verbe »289. Pour Saint Augustin, le Verbe est la voix intérieure qui lui parle, elle est le principe de tout.

Ainsi, l'oreille humaine est uniquement capable de percevoir la parole de Dieu porté par une créature issue de ce dernier, par une voix temporelle, contrairement à l'âme, qui est proche de la voix éternelle de Dieu, une voix silencieuse. Elle est « sans fin, sans successions, sans écoulement »290, elle est infinie, car Dieu est éternel. Les paroles du Seigneur sont créatrices, portées par ses créatures qui sont passagères, tout comme ses créations. Elles créent le monde et toutes les choses. Il est le créateur de toutes les créatures, « que la lumière soit, et la lumière fut »291 , « et vous avez parlé, et cela fut, et votre seule parole à tout fait »292.

Il s'interroge alors, mais de quelle parole de Dieu s'est-il servi pour « produire le corps »293dont les 282 Saint Augustin. Les confessions. Livre 11 chapitre 8. Format Kindle, 2000, (397-401).

283 Ibid, Livre 7 chapitre 18. 284 Ibid, Livre 6 chapitre 11. 285 Ibid.

286 Ibid.

287 Ibid, Livre 11 chapitre 5. 288 Ibid.

289 Ibid, Livre 11 chapitre 6. 290 Ibid, Livre 11 chapitre 6. 291 Ibid, Livre 13 chapitre 10. 292 Ibid, Livre 11 chapitre 5. 293 Ibid, Livre 11 chapitre 6.

paroles créatrices sont sorties ?

Saint Augustin nous apprend que pour entendre Dieu, il faut s'ouvrir à sa voix, sinon on y reste sourd. C'est un don, un acte volontaire, un acte intérieur aidé par la grâce du Seigneur.

Si l'homme ne s'ouvre pas au « langage de la miséricorde »294du seigneur, il y reste sourd.

Le religieux ne veut pas rester sans entendre cette voix qui, selon lui, s'écoute avec « l'oreille du cœur »295, cette voix qui s'adresse à l'intérieur de l'âme. Ainsi, il demande à Dieu d'ouvrir son oreille et de dire à son âme « je suis ton salut »296. Il adresse une demande au Seigneur. Il souhaite être entendu.

Il souhaite écouter la voix du Divin. Une voix qui lui est « plus douce que la chaîne des voluptés. Donnez moi ce que j'aime, votre voix est mon amour et vous m'avez donné de l'aimer »297.

La voix de Dieu semble, pour le mystique enivrant. C'est une voix qu'il souhaite entendre, qu'il aime et l'attire, une voix qui l'appelle, et qui est porteuse de vérité. Elle l'a dit et l'a porte. Cette vérité n'a pas de langage, pas « d'organe »298, elle est « sans voix, […] sans murmure de syllabe »299. La vérité de l'être Divin ne peut être dite par des mots, elle est sa voix, pas sa parole. Dés lors qu'elle devient parole, elle n'est plus la vérité, car elle ne peut tout dire, elle est manquante et échappe.

Ainsi, il souhaite entendre Dieu et que Dieu l'entende.

Les événements de la conversion de Saint Augustin sont en lien avec cette voix de Dieu, puisqu’il nous expose trois événements majeurs qui l'ont aidé dans sa recherche du Divin. Tout d'abord, deux oracles racontés par sa mère, puis le chant d'une jeune fille.

Ainsi, il évoque le récit d'une vision de sa mère. Puis, il nous fait part de la parole d'un évêque en réponse aux interrogations de cette dernière.

294 Saint Augustin. Les confessions. Livre 10 chapitre 6. Format Kindle, 2000, (397-401). 295 Ibid, Livre 1 chapitre 5.

296 Ibid.

297 Ibid, Livre 11 chapitre 2. 298 Ibid, Livre 11 chapitre 3. 299 Ibid.