• Aucun résultat trouvé

3. T HERAPIE CELLULAIRE CARDIAQUE

3.4. Autres voies de recherche

3.4.1. Sources alternatives de cellules

Face à ces résultats décevants, des recherches parallèles visant à identifier des cellules souches ou des progéniteurs cardiaques à haut potentiel de régénération cardiomyogénique ont été entreprises. Par ailleurs des études tendent à prouver qu’il existe un renouvellement limité des cardiomyocytes dans le cœur des mammifères au cours de la vie suggérant l’existence de ces cellules souches (Bergmann et al. 2009; Drenckhahn et al. 2008; Hsieh et al. 2007). Plusieurs équipes ont depuis identifié des populations de cellules cardiaques apparemment souches, sur la base de l’expression des marqueurs de surface c-kit (Beltrami et al. 2003) et Sca-1 (Oh et al. 2003) ou sur leur capacité à effluer le Hoechst 33342 (Martin et al. 2004). Etant donné que ces cellules sont capables de se différencier en cardiomyocyte, en cellules endothéliales et musculaires lisses et peuvent être isolées et amplifiées in vitro, elles représentent des candidates intéressantes pour la régénération myocardique (Messina et al. 2004; Torella et al. 2004; Urbanek et al. 2005). Cependant à l’heure actuelle, aucun consensus n’a pu être trouvé sur l’identification formelle de ces différentes populations. En outre le potentiel in vivo de

57

ces cellules en termes de recrutement, d’expansion et de différenciation reste à déterminer (Hansson et al. 2009; Krause et al. 2010).

Une autre alternative pour la thérapie cellulaire est l’injection de cardiomyocytes (ou progéniteurs cardiaques) dérivés de la différenciation de cellules ES. En effet, les milieux utilisés pour différencier des cellules ES en cardiomyocytes sont de mieux en mieux définis. Les cardiomyocytes dérivés de cellules ES présentent l’ultrastructure et l’activité électromécanique de cardiomyocytes fœtaux (Kehat et al. 2001; Mummery et al. 2003). Cette stratégie visant à pré-différencier les cellules ES a pour but non seulement d’engager les cellules vers la voie cardiomyogénique mais également d’éviter une croissance incontrôlée des cellules indifférenciées en vue de la transplantation. En effet, le risque de formation de tératomes est une des restrictions à l’utilisation des cellules ES malgré un fort potentiel de régénération myocardique mis en évidence chez le rat (Hodgson et al. 2004; Laflamme et al. 2007; Tomescot et al. 2007). Les autres limitations liées à l’utilisation des cellules ES sont :

(i) la possibilité de séparer à haut rendement et avec une spécificité élevée les cellules engagées dans la voie cardiaque,

(ii) l’aspect immunogène de ces cellules en allotransplantation,

(iii) les considérations éthiques liées à la production de lignées humaines (Annexe).

Bien que les nouvelles voies de recherche sur les iPS soient en plein essor, des limites importantes rendent leur utilisation en thérapie cellulaire difficile. La première concerne, à l'instar des cellules ES, le risque tératogène inhérent à la présence de cellules très indifférenciées et le deuxième a été mis en évidence récemment et concerne le rejet immunologique de ces cellules après injection dans un animal syngénique (Zhao et al. 2011). Cependant, dernièrement, une équipe est parvenue à reprogrammer une cellule somatique directement en cardiomyocytes grâce à la transfection de trois facteurs selon un procédé proche de celui employé par Yamanaka et al en 2006 (Ieda et al. 2010). Cette reprogrammation directe des cellules en cardiomyocytes, sans passer par un stade pluripotent, présente un bon rendement et permet de s'affranchir de l'étape de différenciation obligatoire des iPS vers le type cellulaire somatique d'intérêt. Néanmoins, si les cellules obtenues de cette manière ne présentent pas de risque tératogène lié à la pluripotence, l'intégration des transgènes comporte toujours des risques tumorigènes.

Lors d’un IDM classique, la perte cardiomyocytaire est estimée à un milliard de cellules (Laflamme et Murry 2005). Par conséquent, quelque soit la cellule utilisée en

58

thérapie cellulaire, elle devra être produite en très grande quantité et purifiée facilement. C’est pourquoi il faut poursuivre l’exploration des tissus à la recherche de nouvelles cellules plus performantes et améliorer qualitativement et quantitativement la sélection et la production de cellules. Dans ce but, les techniques de caractérisations phénotypiques et fonctionnelles et de purification des cellules d’intérêt sont à poursuivre.

3.4.2. Voies d'administration et amélioration de la survie cellulaire

Une autre question primordiale pour l’efficacité des cellules souches en thérapie cellulaire concerne la voie d’administration des cellules dans le myocarde. La particularité de cet organe est la répétition et la fréquence de ses mouvements qui entraînent des modifications de pression et de forme à l’intérieur du tissu. L’injection intramyocardique (IM) permet de délivrer les cellules directement au site de la lésion mais cette méthode reste invasive et lourde (opération à cœur ouvert) et peut être sujette à une élimination rapide et à une distribution non homogène des cellules (Hamdi et al. 2009). Moins invasive est l’injection intracoronaire à l’aide d’un cathéter mais cette technique a montré une capacité de prise de greffe des cellules injectées très faible (Hou et al. 2005). L’injection endocardique est également moins invasive que l’injection IM mais nécessite un guidage par repérage électromécanique pour être réalisée (Moscoso et al. 2009). Enfin l’injection intraveineuse met à contribution la capacité des cellules à migrer vers la zone lésée qui attire les cellules circulantes par relargage systémique de facteurs trophiques. Néanmoins la proportion des cellules atteignant la zone infarcie est très faible et les cellules sont disséminées dans tout l’organisme (Freyman et al. 2006). Malgré ces différentes technologies actuellement disponibles, il est difficile de dépasser une prise de greffe des cellules supérieure à 11% des cellules injectées chez la truie 1 heure après inoculation des cellules (Hou et al. 2005) et 15% chez le rongeur 12 semaines après injection (Muller-Ehmsen et al. 2002).

Parmi la fraction de cellules retenues dans le tissu cardiaque, près de 90% meurent dans les jours qui suivent l’injection (Laflamme et Murry 2005; Muller-Ehmsen et al. 2002). Cette mort cellulaire est un phénomène multifactoriel où interviennent essentiellement l’apoptose, mais également la réponse inflammatoire due aux injections elles-mêmes, l’hypoxie en relation avec la faible vascularisation des zones infarcies et la perte des interactions avec la MEC cardiaque (Skuk et al. 2003; Suzuki et al. 2004). Plusieurs stratégies sont envisageables pour augmenter la survie des cellules transplantées. La vascularisation du greffon et du tissu hôte peut être améliorée en associant l’injection de cellules souches à des facteurs angiogéniques comme l'HIF-1α (hypoxia iducible factor-1 α)

59

(Azarnoush et al. 2005) ou le VEGF (vascular endothelial growth factor) (Yau et al. 2005). Par ailleurs les cellules souches injectées peuvent également être manipulées afin d’augmenter leur résistance à la mort cellulaire par expression de facteurs favorisant la survie et la prolifération comme Akt, facteur impliqué dans la voie de signalisation des phosphatidylinositol 3-kinases (Gnecchi et al. 2005) ou Bcl-2 (B-cell lymphoma 2), une protéine anti-apoptotique (Kutschka et al. 2006). Enfin, une possibilité consiste à reconstruire ex vivo une matrice contractile servant de support aux cellules. Ces matrices doivent reproduire au mieux le tissu à reconstruire (biomimétisme) tout en guidant le développement des cellules greffées et en facilitant leur vascularisation et leur intégration au sein du tissu hôte. Des colles à base de fibrine ou des solutions de collagène ont déjà été utilisées (Christman et al. 2004). Le dernier point qui finalisera la greffe cellulaire concerne l’intégration du greffon au tissu hôte par un couplage électromécanique au syncytium fonctionnel par des jonctions de type gap mais également aux autres cellules présentes dans le cœur.

3.5. Mécanismes de régénération médiés par les CSA : exemple du