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Formation et caractéristiques des cellules hybrides issues de la coculture

1. Impact de la coculture sur les cellules hMADS et les cardiomyocytes murins adultes

1.2. Formation et caractéristiques des cellules hybrides issues de la coculture

Quarante huit heures après l’initiation de la coculture entre les cellules hMADS et les cardiomyocytes murins, des colonies de petites cellules rondes ont été détectées ayant une morphologie différente des deux types cellulaires en présence (Figure 18A). Nous avons voulu déterminer si ces cellules étaient bien des cellules hybrides issues de la fusion entre les cellules hMADS et les cardiomyocytes murins adultes. Pour ce faire, nous avons utilisé le système Cre/LoxP qui permet l’expression d'une enzyme, la β-Galactosidase (β-Gal), uniquement dans les cellules fusionnées (Figure 14). Une coculture entre des cellules hMADS, transduites au préalable par la recombinase Cre, et des cardiomyocytes de la lignée murine ROSA26R a été réalisée. L’ADN de ces souris ROSA26R porte le locus LacZ, codant pour le gène de la β-Gal inséré entre deux sites loxP (Soriano 1999). Si les cellules hMADS exprimant la Cre fusionnent avec les cardiomyocytes ROSA26R, la recombinase va reconnaître et exciser les sites loxP contenant le codon stop ce qui va entraîner l’expression de la β-Gal dans les cellules fusionnées. Après 2 jours de coculture, les petites cellules rondes identiques à celles détectées lors d’une coculture classique ont pu être identifiées comme exprimant la β-Gal après coloration en bleu en présence du substrat de l’enzyme, le X-Gal (Figure 18B). Le marquage au X-Gal a été réalisé également dans une coculture entre des cellules hMADS non transduites par l’adénovirus contenant la Cre et des cardiomyocytes ROSA26R afin d’écarter la possibilité d’une expression endogène de la β-Gal de la part des cellules hMADS (Figure 18C).

De plus ce résultat sur la fusion et l’expression de la β-Gal a été confirmé en immunocytochimie (ICC) par la co-expression de la β-Gal associée au marqueur cardiomyogénique précoce, GATA-4 (Figure 18D). L’expression de GATA-4, qui est un facteur de transcription spécifique de la voie myocardique, suggère que ces cellules hybrides appartiennent au lignage cardiaque. Une fois de plus la présence de β-Gal non spécifique a été vérifiée et exclue à l’aide d’un marquage sur une coculture entre des

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cellules hMADS non transduites par la Cre cocultivées avec des cardiomyocytes ROSA26R et qui a révélé l’absence de l’enzyme au sein des cellules GATA-4 positives (Figure 18E).

Figure 18. Détection des cellules hybrides au sein de la coculture après fusion. (A) Colonie de

petites cellules rondes (flèche) avoisinant des cellules hMADS (tête de flèche noire) et des débris de cardiomyocytes (tête de flèche blanche) apparaissant après 48 heures de coculture. (B) Détection de cellules hybrides par marquage au X-Gal après 48 heures de coculture entre des cellules hMADS Cre+ (tête de flèche noire) et des cardiomyocytes ROSA26R. (C) Contrôle négatif du marquage au X-Gal réalisé avec des cellules hMADS non transduites (tête de flèche noire). (D,E) Co-immunomarquage de la β-Gal (Cy-5, blanc) et de GATA-4 (Cy-3, rouge) sur une coculture de 7 jours entre des cardiomyocytes ROSA26R et des hMADS Cre+ (D) ou des hMADS non transduites (E).

(D,E) La flèche indique des débris de cardiomyocytes autofluorescents ; les noyaux ont été contre

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Une caractérisation immunocytochimique (ICC) plus approfondie de ces cellules hybrides nous a permis d’affiner leur phénotype. La détection de GATA-4 après 7 jours de coculture a été combinée à d’autres marqueurs cardiomyogéniques, fibroblastique, musculaire lisse ou de prolifération. Les cellules GATA-4 positives ont montré une expression concomitante de plusieurs marqueurs cardiomyogéniques précoces comme les facteurs de transcription NKX2.5 et MEF-2C (Myocyte Enhancer Factor-2C) (Figure 19).

Figure 19. Expression de marqueurs cardiomyogéniques précoces par les cellules hybrides.

Les cellules GATA-4+ (Cy-3, rouge) expriment NKX2.5 (FITC, vert) (A) et MEF-2C (FITC, vert) (B) détectés par immunocytochimie après 7 jours de coculture. Les noyaux ont été contre colorés au Hoechst 33342 (bleu) ; barres d’échelle : 50 µm.

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Les cellules hybrides se sont révélées négatives pour le marqueur de l’α-SMA (α

smooth muscle actin) (Figure 20A) et pour le marqueur fibroblastique P4HB (prolyl four hydroxylase subunit beta) (Figure 20B). Le phénotype cardiaque de ces cellules hybrides

semble bien confirmé.

Figure 20. Les cellules hybrides possèdent un phénotype uniquement cardiaque.

L’immunocytochimie après 7 jours de coculture n’a pas révélé de cellules GATA-4+ (Cy-3, rouge) exprimant également le marqueur de cellule musculaire lisse α-SMA (FITC, vert) (A) ou le marqueur fibroblastique P4HB (FITC, vert) (B). Les flèches indiquent des cellules hMADS indifférenciées exprimant P4HB. Les noyaux ont été contre colorés au Hoechst 33342 (bleu) ; barres d’échelle : 50 µm.

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A l’inverse, la présence de marqueurs cardiaques tardifs comme la desmine, la troponine cardiaque I (cTnI) ou l’α-actinine sarcomérique n’a été détectée que dans moins de 5% des cellules exprimant GATA-4 (Figure 21) suggérant que les cellules hybrides ont plutôt un phénotype de progéniteur cardiaque.

Figure 21. Cellules hybrides et expression de marqueurs cardiomyogéniques tardifs.

Immunocytochimie sur des cocultures de 7 jours. De très rares cellules ont été trouvées exprimant la desmine (FITC, vert) (A), la troponine cardiaque I (FITC, cTnI, vert) (B) et l’α-actinine sarcomérique (FITC, vert) (C) en association avec GATA-4 (Cy-3, rouge). Les noyaux ont été contre colorés au Hoechst 33342 (bleu) ; barres d’échelle : 50 µm.

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L'hypothèse du phénotype progéniteur des cellules hybrides a été renforcée par la présence du marqueur de prolifération Ki67, toujours associé à GATA-4 (Figure 22A) et également présent lors d’un triple marquage associant la β-Gal, GATA-4 et Ki67 (Figure 22B). Il est important de noter que les cellules hMADS cultivées seules ont été testées et se sont révélées négatives pour l’ensemble des anticorps utilisés à l’exception de P4HB et Ki67.

Figure 22. Capacité de prolifération des cellules hybrides. Immunomarquage de Ki67 (FITC, vert (A) et Cy-5, blanc (B)) sur des cocultures de 7 jours en association avec GATA-4 (Cy-3, rouge) (A) et

β-Gal (Cy-3, rouge) / GATA-4 (FITC, vert) (B). Les noyaux ont été contre colorés au Hoechst 33342 (bleu) ; barres d’échelle : 50 µm.

Après avoir caractérisé les cellules hybrides en termes de marqueurs cellulaires, nous avons analysé les capacités de prolifération des cellules hybrides. Le temps de doublement et la prolifération des cellules hybrides ont été analysés à partir de cocultures

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entre des cellules hMADS-Cre+ et des cardiomyocytes ROSA26R. Nous avons montré que le temps de doublement des cellules hybrides β-Gal+ / GATA-4+ est environ de 24h heures par comptage de celles-ci entre J2 et J5 post-coculture. L'évolution au cours du temps des capacités prolifératives des cellules hybrides a ensuite été analysé à l’aide d’un marquage au MTT pratiqué entre jour 8 (J8) et jour 14 (J14) sur des cocultures préalablement déplétées en cellules humaines par traitement à l’ouabaïne. Les résultats obtenus ont confirmé non seulement la capacité de prolifération des cellules hybrides mais révèlent également que ce potentiel est limité dans le temps (inférieur à 14 jours) (Figure 23).

Figure 23. Prolifération des progéniteurs au sein de la coculture mesurée par MTT (courbe verte). Une coculture non traitée (courbe bleue) et des cellules hMADS traitées à l’ouabaïne (courbe

rouge) ont fait office de contrôles.

Au regard de l'expression de gènes cardiomyogéniques précoces et non tardifs et du potentiel de prolifération, l’ensemble de ces résultats a suggéré que la fusion cellulaire entre des cellules hMADS et des cardiomyocytes murins adultes post-mitotiques a aboutit à la formation de cellules hybrides qui possèdent des caractéristiques de progéniteurs cardiaques.