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Les deux voies envisageables – Qu’il s’agisse de reconnaître une unité

Dans le document L'unité économique et sociale (Page 89-93)

La reconnaissance possible d’une UES en l’absence de groupe

99. Les deux voies envisageables – Qu’il s’agisse de reconnaître une unité

économique et sociale ou de mettre en place un comité de groupe, la loi offre la possibilité

aux parties intéressées d’utiliser la voie conventionnelle ou la voie judiciaire. L’article

L. 2322-4 du Code du travail vise ainsi la reconnaissance d’une UES «par convention ou par décision de justice » tandis que l’article L. 2333-5 du Code du travail vise la constitution d’un

comité de groupe « soit à la suite d’un accord des parties intéressées, soit, à défaut, par une

décision de justice ».

S’agissant de la voie judiciaire, celle-ci n’est en général actionnée qu’en cas de

désaccord entre les parties. Il y a alors une demande faite auprès du juge de reconnaître une

UES ou de permettre la mise en place d’un comité de groupe. En cas de demande portant sur l’UES, le juge vérifie que les conditions requises sont satisfaites. Il en fait de même en cas de demande de constitution d’un comité de groupe. Le juge ne tranche pas à proprement parler

entre l’UES et le comité de groupe. Il ne décide pas si, au regard des faits de l’espèce, il est

plus opportun de reconnaître une UES ou de mettre en place un comité de groupe264.

Lorsqu’une demande de reconnaissance d’une UES est faite auprès de lui il y répond favorablement dès lors que les critères sont satisfaits sans avoir « à s’expliquer sur les

avantages que présenterait cette reconnaissance »265.

264

Cass. soc. 17 mars 1983, n° 82-60.403, Bull. civ. V, n° 176 265

S’agissant de la voie conventionnelle, elle peut être très intéressante pour décider ce qui sera le plus judicieux à retenir pour les salariés des entreprises. Lorsque les parties intéressées

se réunissent pour négocier d’un nouveau cadre de représentation institutionnelle, il est important qu’elles examinent de près le choix quis’offre à elles. Soit les parties configurent le groupe au sens de l’article L. 2331-1 du Code du travail en vue de mettre en place un comité de groupe. Soit les parties reconnaissent une unité économique et sociale en vue de mettre en place les instances de représentation possibles dans le cadre d’une UES. Il est probable que le

choix s’effectue au regard de la finalité de chacune des institutions représentatives du personnel pouvant être mises en place au niveau du groupe ou de l’UES. Il n’y a pas de

solution unique face à une telle problématique. Chaque situation est spécifique et appelle des réponses adéquates.

2 La finalité des instances de représentation

100. Le choix a priori pertinent de l’UES – Choisir entre l’UES et le comité de

groupe revient plus exactement à choisir entre le comité d’entreprise et le comité de groupe. Les autres institutions qui peuvent être mises en place au niveau d’une UES ne sont pas

concernées par cette problématique. Ni les délégués du personnel ni les délégués syndicaux

n’ont d’attributions «en concurrence » avec celles du comité de groupe. Si un comité de groupe est constitué, ces institutions restent en place au niveau de chaque entreprise du

groupe comme c’était le cas auparavant. De même, si une UES est reconnue au niveau du groupe, les parties devront organiser de nouvelles élections pour les délégués du personnel266 et de nouveaux délégués syndicaux pourront être désignés267. Dans tous les cas, ces institutions sont mises en place au niveau opportun.

C’est au regard du niveau d’implantation du comité d’entreprise que la question du choix entre l’UES et le groupe peut se poser. De prime abord, le comité d’entreprise, institué au niveau de l’UES peut apparaître fortement plus utile que le comité de groupe. Il est à la

fois organe d’information et de consultation en matière économique268 et organe de gestion en matière sociale et culturelle269. Le comité de groupe n’apparaît alors que comme simple

266

Cass. soc. 7 oct. 1998, n° 97-60.517, Dr. soc. 1998, p. 1050, note J. SAVATIER

267

Cass. soc. 29 oct. 2003, n° 02-60.014 ; Cass. soc. 18 déc. 2000, n° 99-60.456 268

C. trav. art. L. 2323-1 et s. 269

organe d’information au niveau du groupe. Il ne fait que recevoir des informations

économiques et n’est en aucune façon consulté directement sur la politique du groupe270.

101. L’éventuel choix judicieux du groupe – Et, pourtant, le rôle du comité de

groupe n’est pas anodin loin s’en faut. Cette institution permet à l’ensemble des comités d’entreprise et des comités d’établissement, mis en place au plus proche des pouvoirs

décisionnels « locaux» d’avoir des informations utiles et complètes concernant le groupe. Le pouvoir des comités d’entreprise se voit ainsi renforcé. De plus, alors que pour la mise en

place du comité de groupe, on s’appuie sur les institutions déjà en place pour simplement ne rajouter qu’un niveau supplémentaire aux institutions déjà présentes, la reconnaissance d’une

UES peut entraîner un chamboulement important au niveau des institutions représentatives du personnel. De nouvelles élections doivent avoir lieu271 sans que, pour autant, une meilleure protection des droits des salariés en soit garantie.

Face à l’existence d’un tel choix, la confrontation entre l’UES et le groupe peut parfois

se révéler difficile pour l’UES. Le fait de donner la possibilité de choisir entre l’UES et le groupe, c’est-à-dire entre l’entreprise et le groupe d’entreprises, révèle le caractère éphémère de l’entreprise en droit du travail. L’UES-entreprise n’existe pas de manière absolue. C’est la

volonté de choisir son instance de représentation qui justifie la reconnaissance de l’UES. L’UES-entreprise devient un moyen pour les institutions représentatives du personnel de

s’exprimer.

102. Conclusion –Dans ce premier titre, une part importante a été donnée à l’examen des premiers arrêts de la Cour de cassation portant sur la notion d’«unité économique et sociale ». Il apparaît nettement, à la lecture de ces arrêts très instructifs, que les points de repères fixés par la jurisprudence durant ces premières années constituent des lignes toujours

efficaces et utiles aujourd’hui. Sur certains points, il y a eu très peu de changements depuis les années 1970. L’UES était initialement un regroupement de personnes morales et ceci n’a pas évolué depuis lors. Il est certain que, dans les premiers temps, le lien entre l’UES et l’entreprise était clairement affiché. Dans un même arrêt, les termes d’«unité économique et sociale» et d’«entreprise » pouvaient être utilisés comme synonymes. Il y avait une

270

Les articles L. 2332-1 et L. 2332-2 du Code du travail, seuls articles portant sur les attributions du comité de groupe, visent uniquement « les informations » que doit recevoir le comité de groupe.

271

« la reconnaissance judiciaire d'une unité économique et sociale impose la mise en place des institutions représentatives du personnel qui lui sont appropriées » décide la chambre sociale de la Cour de cassation (Cass. soc. 26 mai 2004, n° 02-60.935, Bull. civ. V, n° 142 ; JSL, 2004, n° 148, 14, obs. J-E. TOURREIL ; RJS 2004, n° 936, 2e esp. ; Dr. soc. 2004, p. 915, obs. J. SAVATIER ; RJS 2004, n° 936).

assimilation entre l’entreprise et l’UES. Aujourd’hui, le lien entre l’UES et l’entreprise n’est

certes plus aussi clairement affiché par les juges, mais pour autant, ce rapport étroit entre les deux demeure toujours. La notion d’UES renvoie indéniablement, s’agissant de ses conditions tout du moins, à la notion d’entreprise. Les contours de l’UES sont ceux d’une entreprise selon le degré d’indépendance existant entre les personnes morales appelées à intégrer une

UES. Si cette indépendance est trop forte, il n’y a pas de possibilité de reconnaître une UES puisque les caractéristiques d’une entreprise ne peuvent être relevées. En revanche, si l’indépendance dûe à la personnalité juridique attachée à chaque société est contrebalancée

par une relation étroite entre personnes morales, la reconnaissance d’une UES peut être envisagée. L’UES constitue ainsi une forme d’entreprise en droit du travail, mais qui diffère

du groupe au sens de comité de groupe. Alors que le groupe rassemble des entreprises, l’UES

constitue elle-même une entreprise parmi d’autres. Cependant, il ne suffit pas que l’UES soit constituée de différentes personnes morales et qu’elle ne soit pas mise en place à un niveau où

existe déjà un groupe au sens de comité de groupe pour qu’elle soit reconnue. Encore faut-il

Titre II

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