• Aucun résultat trouvé

La faible portée de l’accord de reconnaissance

Dans le document L'unité économique et sociale (Page 187-197)

222. Fragilité de la reconnaissance conventionnelle La reconnaissance « par convention » est somme toute très difficile à conclure et à faire perdurer dans le temps. C’est

une reconnaissance relativement fragile par rapport à la reconnaissance « par décision de justice ». Cette fragilité est perceptible sur deux points. D’une part, récemment encore, une

première étape vers la reconnaissance conventionnelle pouvait être franchie par les

organisations syndicales qui estimaient qu’il existait entre plusieurs personnes morales une UES. Aujourd’hui, les organisations syndicales ne peuvent plus prendre l’initiative de

désigner un délégué syndical dans une UES qui n’a pas déjà été reconnue (§ 1). D’autre part, la reconnaissance conventionnelle, lorsqu’elle est effective, est revêtue d’une autorité relative.

L’avenir d’un tel accord semble être toujours relativement incertain (§ 2).

§ 1 –LA FIN DE L’INITIATIVE D’UNE ORGANISATION SYNDICALE

223. L’impact de la loi du 20 août 2008 Jusqu’à la loi du 20 août 2008, la jurisprudence admettait qu’une organisation syndicale puisse désigner un délégué syndical

dans un périmètre qu’elle considérait comme une UES mais qui n’avait pas été reconnue

comme telle de manière officielle, à savoir par convention ou par décision de justice. Il ne

s’agissait pas pour la Cour de cassation d’un troisième mode de reconnaissance. Une telle désignation ne constituait pas une reconnaissance de l’UES mais était considérée comme

valide. De ce fait, cette désignation pouvait permettre aux parties intéressées d’entreprendre

des négociations en vue de la conclusion d’un accord de reconnaissance. La désignation d’un

délégué syndical favorisait la reconnaissance conventionnelle (A).

La loi du 20 août 2008 semble remettre en cause l’ensemble de cette jurisprudence. Les

organisations syndicales ne pourront plus, de manière isolée, émettre l’idée selon laquelle il y

aurait peut-être une UES entre plusieurs personnes morales. La reconnaissance conventionnelle subit véritablement la loi du 20 août 2008 (B).

A – LA JURISPRUDENCE ANTÉRIEURE

224. La notification de la désignation – Jusqu’à présent, la jurisprudence admettait qu’une désignation de délégué syndical pouvait se faire dans une UES qui n’avait pas été

préalablement reconnue625. Pour cela, il fallait respecter certaines conditions ayant trait à la lettre de notification. La Cour de cassation décidait ainsi que « le syndicat qui désigne un délégué syndical auprès de plusieurs personnes, juridiquement distinctes, constituant selon lui une unité économique et sociale, doit indiquer, dans la désignation qu'il notifie au représentant légal de chacune des entreprises concernées, à peine de nullité de la désignation, l'existence et la composition de l'unité économique et sociale revendiquée »626. Selon cette jurisprudence, le syndicat était ainsi tenu de préciser, d’une part, que la désignation du délégué syndical se faisait dans le cadre d’une unité économique et sociale afin

qu’il n’y ait pas de doute possible sur la forme du cadre envisagée, et, d’autre part, quelles

étaient les entités juridiques incluses dans l’UES. En désignant, dans cette lettre, les composantes de l’UES, le syndicat fixait ainsi les contours de l’UES. De manière unilatérale, il décidait qu’il existait effectivement une UES entre plusieurs personnes juridiques et il

délimitait le périmètre de cette UES. Cette démarche du syndicat, nécessaire pour que la désignation du délégué syndical puisse avoir lieu627, pouvait être considérée comme une des

phases initiales à l’accord de reconnaissance.

625

De même, la jurisprudence admettait implicitement qu’une désignation puisse se faire «dans le périmètre de l’UES judiciairement reconnue qui n’a pas le même objet », Cass. soc. 16 avr. 2008, n° 07-60.373, JCP S. 2008, 1439, comm. G. BLANC-JOUVAN.

626

Cass. soc. 26 avr. 2000, n° 99-60.030, Bull. civ. V, n° 155 627

Chaque délégué syndical est désigné par son syndicat en vertu de l’article L. 2143-3 du Code du travail.

La désignation provient d’une décision unilatérale du syndicat. Des élections professionnelles n’ont pas à être organisées pour que la mise en place d’un délégué syndical se fasse. L’employeur et les autres organisations

225. Prise en compte de la désignation lors des négociations – La jurisprudence de

la Cour de cassation a évolué sur la question de l’impact de cette désignation sur la reconnaissance d’une UES. Dans un premier temps, la Haute Juridiction permettait

simplement au juge de prendre en compte cette désignation628. Dans un deuxième temps, elle

décidait que l’absence de contestation valait reconnaissance629. Enfin, dans le dernier état de la jurisprudence rendue avant la loi du 20 août 2008, la Cour de cassation « sembl(ait) infléchir sa position »630. Elle affirmait, dans un arrêt du 4 mars 2009, que « si l’absence de contestation dans les délais prévus par l’article L. 2143-8 du Code du travail de la

désignation d’un délégué syndical dans le périmètre d’une unité économique et sociale interdit la remise en cause du mandat du délégué syndical, et constitue un élément que le juge

doit prendre en considération dans l’action en reconnaissance de cette unité, elle n’établit

pas à elle seule son existence »631.

La Cour de cassation distinguait la désignation d’un délégué syndical de la reconnaissance d’UES. Elle exposait alors la validité du mandat du délégué syndical désigné

dans une UES, lequel ne pouvait plus être contesté une fois passée le délai de 15 jours. Ce délai de forclusion632 entraînait l’irrecevabilité d’une demande en opposition à cette

désignation. Mais, bien que la désignation du délégué syndical pouvait se faire dans une UES

qui n’avait pas été préalablement reconnue judiciairement ou conventionnellement, cette

désignation n’équivalait pas à la reconnaissance de l’UES pour les autres institutions

représentatives du personnel. La Cour de cassation fermait ainsi la voie à un troisième mode

de reconnaissance de l’UES.

Pour pouvoir reconnaître une UES entre des personnes juridiques, il fallait alors

procéder à un examen des éléments constitutifs de l’UES. Cet examen pouvait avoir lieu lors de la saisine du juge en vue d’une reconnaissance judiciaire de l’UES, comme cela est indiqué dans l’arrêt du 4 mars 2009. Le juge prenait alors en compte l’absence de contestation de la

628

Le tribunal d’instance a méconnu les exigences de l’article 455 du nouveau Code de procédure civile en ne

précisant pas « en quoi le moyen tiré de la désignation d'un délégué syndical au niveau d'une unité économique et sociale, qui n'avait pas été contestée par l'employeur, ne pouvait être pris en compte pour la reconnaissance de l'existence de cette unité économique et sociale », Cass. soc. 29 janv. 2003, n° 01-60.650, RJS 2003, n° 480 629

La Cour de cassation décide que, en l’absence de contestation de la désignation d’un délégué syndical, «les sociétés avaient ainsi reconnu l’existence d’une unité économique et sociale pour l’exercice du droit syndical » et, que, dès lors, « les élections devaient avoir lieu dans le périmètre de l’unité économique et sociale précédemment délimitée », Cass. soc. 3 mai 2007, n° 06-60.042, RJS 2007, n° 863

630

E. PESKINE, « Unité économique et sociale : qui ne dit mot ne consent pas », Rev. dr. trav. 2009, p. 392 631

Cass. soc. 4 mars 2009, n° 08-60.497, D. 2009, p. 876, obs. B. INES ; Rev. dr. trav. 2009, 392, obs. E. PESKINE ; RJS 2009, n° 448

632

désignation du délégué syndical. Mais, cet examen pouvait également se dérouler dans le

cadre de négociations entre les parties intéressées. En effet, il pouvait s’avérer intéressant,

notamment, pour l’employeur de conclure un accord en reconnaissance d’une UES suite à la désignation d’un délégué syndical. Il était certainement préférable d’avoir une UES reconnue à l’égard de l’ensemble des institutions représentatives du personnel et pouvant servir à

l’application d’autres droits individuels et collectifs, plutôt que d’avoir un délégué syndical désigné dans une UES qui n’existait que pour lui. Dans un souci de simplification des relations collectives, l’employeur pouvait, en quelque sort, s’appuyer sur cette désignation

pour entreprendre des négociations pouvant mener à la reconnaissance d’une UES. Une telle

désignation pouvait être considérée comme un tremplin vers la reconnaissance

conventionnelle d’une UES.

226. Conclusion – Jusqu’alors, la désignation d’un délégué syndical se faisait alors même que l’UES n’avait pas fait l’objet d’une reconnaissance. Cette désignation n’entraînait

pas ipso facto la reconnaissance d’une UES, la jurisprudence ayant clairement refusé que s’ouvre un troisième mode de reconnaissance. Pour autant, cette désignation pouvait

permettre, dans les faits, de déclencher des discussions à propos d’une éventuelle reconnaissance d’une UES au delà du seul délégué syndical. Aujourd’hui, la reconnaissance

conventionnelle semble être privée de cette désignation. La loi du 20 août 2008 ne devrait plus permettre à un syndicat de désigner un délégué syndical dans une UES qui n’a pas été

préalablement reconnue.

B – LES IMPACTS DE LA LOI DU 20 AOÛT 2008

227. Organisation représentative dans l’UES – La loi du 20 août 2008 modifie en profondeur les règles appliquées jusqu’à présent par la jurisprudence s’agissant de la désignation d’un délégué syndical dans une UES. L’article L. 2143-3 du Code du travail fixe les conditions que doivent satisfaire les organisations syndicales pour pouvoir désigner un

délégué syndical. L’organisation syndicale doit tout d’abord être reconnue représentative

« dans l’entreprise ou l’établissement de cinquante salariés ou plus». Il n’y a pas de

disposition légale spécifique visant l’unité économique et sociale. Seuls l’«entreprise » ou

sociale est assimilée à l’entreprise en droit du travail633. Cela signifie donc que l’organisation syndicale doit être représentative au niveau de l’unité économique et sociale pour pouvoir désigner un délégué syndical. Cela implique nécessairement que l’UES ait déjà été reconnue

antérieurement à cette désignation. Il faut, en outre, que des élections professionnelles aient

eu lieu dans ce nouveau cadre, puisque l’organisation syndicale ne peut que désigner un

délégué syndical qui a « recueilli au moins 10% des suffrages exprimés au premier tour des

dernières élections au comité d’entreprise »634.

Il résulte de cette nouvelle législation que la désignation d’un délégué syndical dans une

UES « ne peut être régulière que si l’organisation procédant à cette désignation a été

reconnue représentative dans le périmètre de désignation et donc a atteint le score électoral

requis dans le périmètre de l’UES »635. Ceci implique donc que l’UES soit déjà reconnue. Dans ces conditions, la jurisprudence de la Cour de cassation permettant la désignation d’un délégué syndical dans le cadre d’une UES non reconnue au préalable semble être mise à mal.

Une organisation syndicale ne pourra plus prendre l’initiative de désigner un délégué syndical dans une UES, qui n’avait fait l’objet ni d’une reconnaissance conventionnelle ni d’une reconnaissance judiciaire. L’organisation devra en effet prouver sa représentativité pour

pouvoir procéder à cette désignation. Or, cette représentativité se fera au niveau de l’UES.

Celle-ci aura donc été reconnue en amont, soit par convention soit par décision de justice. La période transitoire se terminant d’ici quelques mois636, la reconnaissance conventionnelle ne devrait plus, par la suite, pouvoir être déclenchée après l’initiative d’un

syndicat souhaitant désigner un délégué syndical dans une UES qui n’était pas déjà reconnue.

Mise ainsi en difficulté, la reconnaissance conventionnelle souffre également de son manque

d’autorité.

633

Cass. soc. 16 oct. 2001, n° 99-44.037, Bull. civ. V, n° 324 634

C. trav. art. L. 2143-3 635

L. PECAUD-RIVOLIER, Y. STRUILLOU, « Chronique des jurisprudences sur la représentation du personnel », Semaine sociale Lamy, n° 1541, p. 6

636

§ 2 –L’AUTORITÉ RELATIVE DE LA RECONNAISSANCE CONVENTIONNELLE 228. Les points de faiblesse de la reconnaissance conventionnelle La reconnaissance conventionnelle semble avoir une faible portée par rapport à la reconnaissance

judiciaire. Son existence est précaire, dans le sens où il s’avère relativement difficile d’obtenir la reconnaissance conventionnelle et de faire fonctionner l’UES suite à une telle

reconnaissance (A). De plus, l’accord de reconnaissance ne vaut qu’entre les parties. Il n’engage qu’elles (B). Les faiblesses de la reconnaissance conventionnelle expliquent, pour une bonne part, pourquoi ce mode de reconnaissance est peu usité en pratique.

A –L’EXISTENCE PRÉCAIRE DE LA RECONNAISSANCE CONVENTIONNELLE

229. Difficulté d’obtenir l’unanimité des parties – L’existence précaire de la reconnaissance conventionnelle tient à la règle de l’unanimité fixée par la Cour de

cassation637. Il faut que l’ensemble des parties à l’accord se mettent d’accord sur le principe de l’existence d’une UES et sur la composition de l’UES pour qu’il y ait véritablement une reconnaissance conventionnelle de l’UES. Or, cette unanimité n’est pas forcément facile à

obtenir.

Certes, le fait qu’il n’y ait pas d’unanimité des parties à l’accord pour reconnaître une UES ne signifie pas pour autant qu’il n’y a pas de reconnaissance de l’UES. Dès lors qu’il n’y a pas de contestation judiciaire opérée par l’une des parties non signataires ou que cette partie,

qui n’a pourtant pas signé l’accord, participe aux élections dans le nouveau cadre «sans faire de réserves »638, il y a lieu de considérer l’UES comme reconnue. La reconnaissance conventionnelle n’est pas forcément mise à mal par l’absence d’unanimité des parties.

Mais, malgré cela, en l’absence d’unanimité des parties à l’accord, la saisine éventuelle du juge plane sur les parties. La reconnaissance conventionnelle implique l’unanimité des parties. Lorsque tel n’est pas le cas, elle ne peut, en général, pas se faire, ou tout du moins,

637

Cass. soc. 23 juin 1988, n° 87-60.245, 87-60.250, Bull.civ. V, n° 392 638

Lamy Social – Droit du travail, charges sociales, sous la direction de A. DUPAYS et C. GIRODROUX, Lamy Wolters Kluwer, Rueil-Malmaison, 2012, n° 3736

elle est susceptible d’être contestée auprès du juge. Il en résulte que la reconnaissance par

convention est assez rare en pratique639.

230. Contestation devant le juge L’existence précaire de la reconnaissance

conventionnelle vient également du fait que cette reconnaissance peut être contestée devant le juge640. La reconnaissance judiciaire met un point final au désaccord qu’il y avait entre les parties intéressées. De nombreux arrêts révèlent la tentative de reconnaissance

conventionnelle en amont de la saisine du juge ou la contestation par l’une des parties non signataires de l’accord en reconnaissance de l’UES641. Cela signifie que, dans un certain nombre d’arrêts, une demande de reconnaissance judiciaire d’une UES est formulée suite à

l’échec d’une reconnaissance conventionnelle.

Cela se comprend au regard, d’une part, des parties appelées à signer l’accord et, d’autre part, au regard des lourdes répercussions qu’entraîne une telle reconnaissance. S’agissant des

parties à l’accord, il y a, d’un côté, un ou plusieurs employeurs et, de l’autre côté, des

organisations syndicales représentatives642. Les enjeux ne sont pas les mêmes pour les parties

intéressées. Dans les premiers temps de la notion, les employeurs n’entendaient pas accepter

la reconnaissance d’une UES643. La conclusion d’un accord apparaissait donc difficile dans un tel contexte. Aujourd’hui, tel n’est plus le cas. Les employeurs semblent même demandeurs d’une telle réorganisation sociale. «Maintenant, la mise en place d’une unité économique et sociale est l’un des procédés utilisables dans l’optique d’une organisation sociale d’ensembles complexes. (…) L’unité économique et sociale apparaît alors comme l’une des pièces du « mécano social » mis en œuvre au titre de l’organisation des entreprises. À l’utilisation d’abord défensive de l’unité économique et sociale s’ajoute ainsi une utilisation,

en quelque sorte, constructive. »644 Les employeurs essaient de tirer partie de l’UES. Pour

autant, des contentieux perdurent entre les parties à l’accord. Ces litiges sont susceptibles de porter davantage sur les conséquences qu’entraîne la reconnaissance d’une UES. En effet,

d’autre part, les effets d’une UES peuvent être plus ou moins étendus selon la volonté des

parties, lesquelles doivent parvenir à se mettre d’accord sur ces répercussions. Un simple

639

A. CERATI-GAUTHIER, « Quid de la demande d’une salariée en vue de la reconnaissance d’une UES ? », Les Cahiers Lamy du CE, 2004, n° 30

640

Pour une illustration, Cass. soc. 16 déc. 2008, n° 07-43.875, Bull. civ. V, n° 255 641

À titre d’exemple, Cass. soc. 14 juin 2005, n° 04-60.431 642

Cass. soc. 23 juin 1988, n° 87-60.245, 87-60.250, Bull.civ. V, n° 392 643

V. infra, n° 32 et s. 644

désaccord met fin à la reconnaissance conventionnelle. Se profile alors la phase judiciaire et

l’éventuelle reconnaissance judiciaire.

231. Conclusion – La reconnaissance de l’UES s’obtient dans la grande majorité des cas par décision de justice. Il y a dès lors un déséquilibre entre les deux modes légaux de

reconnaissance. En exigeant l’unanimité des parties en matière de reconnaissance

conventionnelle, la Cour de cassation limite fortement la réussite de ce mode de reconnaissance de l’UES. Dans la pratique, la reconnaissance conventionnelle s’efface au

profit de la reconnaissance judiciaire.

Cela semble a priori étonnant car la reconnaissance d’une UES n’est pas véritablement

une création. Il s’agit de la révélation d’un état de fait645. Cette réalité économique et sociale

ne devrait pas faire l’objet de remises en cause par les parties. C’est un état qui s’impose à

elles. Mais, en vérité, il n’en est rien. La réalité des personnes morales est bien plus complexe

qu’il n’y paraît. Et, la souplesse dont fait preuve la Cour de cassation dans l’interprétation des critères de l’UES montre bien que la reconnaissance d’une UES n’est pas forcément si

évidente que cela à obtenir. Et, lorsque tel est le cas, la reconnaissance ne vaut qu’entre les

parties.

B –L’ACCORD DE RECONNAISSANCE LIMITÉ AUX PARTIES

232. Parties tenues par l’accord – En l’état actuel du droit, l’accord reconnaissant une UES doit obtenir l’unanimité des parties par référence aux règles qui gouvernent le protocole préélectoral. La reconnaissance de l’UES devient ainsi une disposition de nature électorale. À ce titre, elle doit être admise par toutes les parties intéressées pour s’imposer à

elles et au juge646. L’accord reconnaissant l’UES n’a alors d’autorité qu’envers les parties et le

juge. Cette unanimité et cette référence aux règles du protocole préélectoral ne permet dès lors

645

« L’UES n’est pas une création, c’est un état de fait », M. COHEN, « Débat autour de l’unité économique et

sociale », Semaine sociale Lamy, n° 1081, p. 6646 « si les dispositions de nature électorale ne s'imposent au juge et aux parties qu'en cas d'accord préélectoral unanime, l'accord collectif qui a pour objet d'améliorer le fonctionnement des institutions représentatives dans l'entreprise, signé par au moins une organisation syndicale représentative dans l'entreprise, a force obligatoire », Cass. soc. 23 juin 1999, n° 96-44.717, Bull. civ. V, n° 302 646

« si les dispositions de nature électorale ne s'imposent au juge et aux parties qu'en cas d'accord préélectoral unanime, l'accord collectif qui a pour objet d'améliorer le fonctionnement des institutions représentatives dans l'entreprise, signé par au moins une organisation syndicale représentative dans l'entreprise, a force obligatoire », Cass. soc. 23 juin 1999, n° 96-44.717, Bull. civ. V, n° 302

pas d’opposer la reconnaissance conventionnelle à tous647. Sa portée est somme toute relative. Seules les parties et le juge sont tenus par l’accord et peuvent s’en prévaloir. Le risque est alors de voir l’UES cantonnée dans son rôle premier : constituer uniquement un cadre pour les élections professionnelles.

Or, la jurisprudence entend prendre en considération l’émancipation de l’UES. Dans un

arrêt important du 16 décembre 2008648, la Cour de cassation dispose, sans ambiguïté, qu’«un accord collectif reconnaissant une unité économique et sociale peut étendre ses effets au delà des institutions représentatives du personnel et créer des obligations pour les différentes

entités juridiques composant l’UES », même si cet accord « ne peut faire d’une unité économique et sociale l’employeur des salariés ». Le contenu de l’accord reconnaissant une

UES n’est pas limité à la seule représentation du personnel. Il est possible de faire de l’UES l’espace d’exécution de certaines obligations définies expressément dans l’accord. Cette

liberté dévolue aux parties offre des perspectives intéressantes. La contractualisation de ce qui

est déjà permis par la loi et la jurisprudence en matière d’UES est envisageable, avec l’adaptation de ces règles à chaque cas d’espèce. Mais, l’UES ne pourrait-elle pas devenir

l’entreprise en droit du travail au regard des dispositions de l’accord reconnaissant l’UES ? À

Dans le document L'unité économique et sociale (Page 187-197)