3. Régulation transcriptionelle de l’inflammation 59
3.3. La voie de signalisation de voie JNK/AP-‐1 : 68
Le complexe de transcription AP-‐1 est composé des protéines des familles FOS (c-‐Fos, Fra-‐1, Fra-‐2, FosB) et Jun (c-‐Jun, JunB, JunD). Ces facteurs font partie de la super famille des protéines bZIP : leur structure comprend une région basique (b) de liaison à l’ADN et un leucine Zipper (ZIP) responsable de leur dimérisation. Leur séquence primaire contient aussi des domaines de transactivation de la transcription et des sites de phosphorylation ciblés par différentes kinases, ce qui permet leur régulation par divers signaux (Glover and Harrison, 1995; Monje et al., 2003). Au niveau de l’ADN, AP-‐1 se fixe sur les séquences consensus TGACGGTCA aussi appelées TRE (TPA-‐reponsive Element). AP-‐1 peut également interagir avec d’autres protéines de la super-‐famille bZIP comme les facteurs de transcription ATFs (Activating Transcription Factor) et ainsi étendre son activité transcriptionelle. Contrairement aux Fos, les Jun peuvent former des homodiméres et des hétérodiméres avec certains ATF. Ce sont ces nombreuses combinaisons apportées par la variété et l’état d’activation des membres de la famille AP-‐1 qui permettrait d’assurer la spécificité de réponse à différents signaux (infection versus métabolique par exemple). A cela, s’ajoutent des interactions avec d’autres facteurs de transcription présents sur le promoteur des gènes-‐cibles qui apportent un degré supplémentaire de régulation. Par exemple, les facteurs NF-‐ATs (Nuclear Factor of Activated T-‐cells) activent certains promoteurs en coopération avec AP-‐1, sur des sites présentant de faible affinité pour AP-‐1 (Karin et al., 1997).
3.3.2. JNK régulateur majeur de AP-‐1
La régulation d’AP-‐1 intervient aussi bien au niveau de la transcription, la stabilité du messager, la traduction et la stabilité de la protéine. Cependant les modifications post-‐ traductionnelles (principalement phosphorylations) sont celles qui permettent à AP-‐1 d’intégrer rapidement les signaux cellulaires afin d’élaborer une réponse adaptée par l’activation des gènes cibles. Chez les mammifères, JNK (c-‐Jun N-‐terminal Kinase), qui représente un sous-‐groupe de MAP-‐kinase, activé par les cytokines (IL-‐1, TNFα) et le stress cellulaire, phosphoryle Jun (et non Fos), sur les sérines 63 et 73 (Weston and Davis, 2002). En effet, l’activation de la voie des TLRs, par les cytokines par exemple, va
activer la MAP3K (Mitogen Activated Protein-‐3 Kinase) qui phosphoryle et active les deux isoformes de MAP2K : MKK4 et MKK7, qui à leur tour active JNK en la phosphorylant au niveau des résidus thréonine et tyrosine de leur site d’activation. Celle-‐ci va alors phosphoryler la partie N terminale de c-‐Jun présent au niveau des promoteurs de ses gènes cibles. c-‐Jun passe alors d’une conformation d’homodimère à une conformation d’hétérodimère en se liant avec c-‐Fos. Il y a alors la transactivaton des gènes inflammatoires comme le TNFα et l’ IL6. A noter qu’il existe 3 isoformes de JNK : JNK1 (MAPK 8), JNK2 (MAPK9) et JNK3 (MAPK10) (Bogoyevitch, 2006). JNK1 et JNK2 sont exprimées de manière ubiquitaire, JNK3 semble être spécifique uniquement du système nerveux central (Bogoyevitch, 2006).
3.3.3. La voie JNK et l’inflammation métabolique
Les JNKs jouent un rôle majeur dans diverses voies métaboliques comme par exemple la mort cellulaire (en particulier dans les neurones) (Price et al., 2003), mais aussi dans le cancer où les JNKs sont impliquées dans l’induction des tumeurs (Min et al., 2014; Mingo-‐Sion et al., 2004). Les JNKs sont aussi impliquées dans la mise en place de la résistance à l’insuline dans le cadre du diabète de type 2 (Kaneto et al., 2007). En effet, des études biochimiques ont montré que JNK est capable de phosphoryler IRS-‐1 (insulin receptor substrate-‐1), une protéine clef qui permet la transduction du signal de l’insuline, au niveau de la sérine 307 (Lee et al., 2003). Cette phosphorylation empêche la transduction du signal insulinémique induisant ainsi une résistance à l’insuline. L’invalidation de JNK1 chez les souris sous régime gras, induit une diminution de l’adiposité, une amélioration de la sensibilité à l’insuline. A noter que l’invalidation de JNK2 n’a aucun effet sur ces paramètres (Yu et al., 2008). En accord avec ces résultats, les souris invalidées pour JNK1 uniquement dans les adipocytes, prennent du poids de la même manière que les souris contrôles sous régime gras (Sabio et al., 2008) . Cependant, ces souris présentent une amélioration de la sensibilité à l’insuline. Elles présentent également une diminution de la stéatose hépatique et une amélioration de la sensibilité à l’insuline hépatique. De plus ces souris sont protégées contre l’augmentation de l’expression d’IL-‐6 dans le tissu adipeux ainsi qu’au niveau sérique (Sabapathy, 2012). Comme détaillé dans le paragraphe dédié, les cellules immunitaires en général et les macrophages en particulier jouent un rôle central dans l’inflammation métabolique
observée lors de l’obésité (Solinas et al., 2007). L’invalidation de JNK1 dans les cellules myéloïdes protège les souris mises sous régime gras contre la prise de poids et la résistance à l’insuline (Solinas et al., 2007) . A l’inverse, une autre étude montre que l’invalidation de JNK1 dans les macrophages n’améliore pas la résistance à l’insuline induite pat l’obésité (Sabio et al., 2008).
L’ensemble de ces résultats suggèrent donc i) que c’est l’activité JNK dans les cellules adipeuses, et non dans les cellules myéloïdes, qui aurait un impact sur la régulation de l’homéostasie glucidique, ou ii) que la combinaison de JNK1 et JNK2 est requise pour obtenir un impact entier des cellules myéloïdes sur l’inflammation du tissu adipeux et ces conséquences métaboliques. En 2013, une étude est venue conforter la deuxième hypothèse. En effet, l’équipe de J.Davis a créé des souris invalidées pour JNK1 et JNK2 dans les cellules myéloïdes (Han et al., 2013). Mises sous régime gras, bien qu’ayant la même prise de poids que les souris contrôles, les souris KO étaient protégées contre l’hyperglycémie et l’hyperinsulinémie. Au niveau du tissu adipeux, les souris KO avaient une infiltration de macrophages moins importante que les souris sauvages sous régime gras. De plus, les auteurs de cette étude ont montré que JNK était nécessaire à la polarisation des macrophages en un phénotype pro-‐inflammatoire. JNK semble donc un acteur majeur dans la mise en place de l’inflammation métabolique (Han et al., 2013).
3.4. Les facteurs de transcriptions IRFs
La famille des facteurs de transcription IRFs (interferon-‐regulatory factor) a été initialement identifiée comme régulateur des gènes de l’interféron de types I suite à une infection bactérienne ou virale (Honda and Taniguchi, 2006). Aujourd’hui, plusieurs études ont montré que les IRFs jouaient plusieurs rôles cruciaux dans la maturation et la polarisation des cellules immunitaires et plus particulièrement dans les macrophages (Gunthner and Anders, 2013).
Les IRFs sont une famille de neuf membres (Tableau 2). Chaque IRF contient un domaine d’interaction à l’ADN bien conservé, de 120 acides aminés, localisé au niveau de l’extrémité N-‐terminale. Cette région reconnait une séquence consensus de l’ADN appelée ISRE (IFN-‐stimulated response element). Dans la région C-‐terminale des IRFs, exception faite pour IRF-‐1 et IRF-‐2, se trouve une séquence permettant l’interaction avec d’autres protéines. Outre la régulation de la voie des interférons, les IRFs sont