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Vitesse terminale des gouttes

2.4 Modélisation de la propulsion

2.4.2 Vitesse terminale des gouttes

Une goutte mise en mouvement sur une surface en forme de toit d’usine atteint rapidement une vitesse constante. Pour une goutte d’éthanol sur un toit à 350C, cette vitesse est de l’ordre de 10 cm/s La figure 2.11 montre la dépendance de la vitesse terminale en fonction du rayon du contact entre la goutte et le plan.

Fig. 2.11: Vitesse terminale V d’une goutte d’éthanol en caléfaction sur une surface en forme de toit d’usine (T = 360◦C), en fonction de son rayon équatorial R. Le pas du toit d’usine est λ = 1.5 mm. Si

R < λ aucun mouvement n’est observé. Pour des rayons de goutte compris entre 2 et 7 mm, la vitesse

Lorsque le rayon est plus petit que le pas du réseau, la goutte ne bouge pas. Puis, quand le rayon croît la vitesse augmente rapidement avant d’atteindre ce qui semble être un plateau ou une légère décroissance.

Nous allons présenter deux hypothèses sur l’origine possible de la force s’opposant au mouvement.

Dissipation visqueuse

La première source de dissipation à laquelle on peut penser est la force visqueuse exercée sur la goutte par le film de vapeur.

Fv∼ ηVe R2

Si on équilibre cette force par la force de propulsion, la vitesse limite est donnée par l’expression :

V ∼ F o ηa

Cette expression prédit une vitesse terminale indépendant de la taille de la goutte ce qui peut correspondre à nos mesures (fig.2.11). Avec les valeurs estimées si dessus (F0 10−4µN , η = 2.10−5P a.s, a ≈ 3µm), on trouve V ∼ 2m.s−1. Cette valeur est supérieure d’un facteur dix à celle observée expérimentalement. Comme l’écoulement est complexe, nous avons effectué un raisonnement en loi d’échelle, nous ne pouvons pas espérer estimer les préfacteurs ; il est possible qu’il ne soient pas de l’ordre de 1.

Cependant, lorsque la goutte est en mouvement on observe que des ondes se propagent à la surface de la goutte (fig.2.8). L’énergie dissipée par ces ondes pourrait être une source de freinage, interne cette fois.

Dissipation par les ondes capillaires ?

Comme nous l’avons vu sur la figure 2.1, quand la goutte est en mouvement on observe des ondes capillaires se propageant à sa surface. La viscosité du liquide fait s’atténuer ces ondes avec un temps caractéristique [7] :

τ = λ2o 2νl

λo est la longueur d’onde et νl la viscosité cinématique du liquide. Ici, le pas du réseau du substrat fixe la longueur d’onde à 1, 5mm. Pour une goutte d’éthanol, τ = 160ms. Comme on peut le voir sur la figure 2.12, la vitesse de propagation des ondes est la même que celle de la goutte (le mouvement de sa surface ressemble à celui d’un engrenage). On peut donc estimer le temps nécessaire pour qu’une onde libérée à l’arrière de la goutte entre à nouveau en contact avec le sol. En notant L la longueur de la goutte, τo = VL pour une goutte de longueur centimétrique se déplaçant à 10cm/s, τo = 100ms ce qui est du même ordre de grandeur que τ . Une onde créée par le passage de la goutte sur la "crémaillère" est atténuée sur la taille de la goutte.

Un premier modèle simple pour estimer l’énergie dissipée consiste à dire que toute l’énergie de surface créée sous la goutte est perdue dès que les ondes sont émises.

Fig. 2.12:Rapport entre la vitesse Vondesde propagation des ondes capillaires autour d’une goutte d’eau

sur un toit d’usine et la vitesse de déplacement de la goutte Vgoutte.

L’énergie de surface créée par un pas du réseau dépend de la hauteur des marches h et la largeur 2R de la goutte :

E1pas∼ 2σhR

À chaque pas franchi, l’énergie E1pas est perdue ce qui revient à dire que la goutte subit une force Fondes= E1pasλ . Pour une goutte de largeur 2 pas de réseau, cette force vaut 150µN . On peut remarquer qu’elle est du même ordre de grandeur que la force de propulsion. Notons tout de même que cette estimation est surévaluée car seule une fraction de l’onde est réellement atténuée.

On peut remarquer que Fondesest indépendante de la vitesse. Elle se comporte donc comme un frottement solide à la différence près qu’elle est nulle à vitesse nulle. Le bon équilibre des forces donnant la vitesse limite serait donc :

F − Fondes= Fv

Afin de tester cette hypothèse, nous avons effectué une expérience préliminaire qui consiste à observer le freinage d’une goutte sur une surface possédant un motif similaire à celui du toit d’usine mais symétrique : un créneau (fig.2.13). Ce profil ne provoque pas d’auto- propulsion et permet de mesurer directement la force de freinage.

Fig. 2.13: Goutte en caléfaction posée sur une surface en forme de créneau. Le pas du réseau est 3mm et la hauteur des marches 300µm.

Une goutte en caléfaction est lancée sur cette surface à une vitesse V0. Tant que la surface est plane, aucun freinage n’est mesurable, par contre sa vitesse décroît très rapidement lorsqu’elle rencontre les créneaux (fig.2.14).

Fig. 2.14:Vitesse V d’une goutte d’éthanol (70µL) en caléfaction en fonction de la position z sur une surface. Lorsque z < 0, la surface est plane et pour z > 0, la surface à une forme de créneau (fig.2.13). Tant que la surface est plane (z < 0), aucun freinage n’est mesurable, par contre sa vitesse décroît très rapidement lorsqu’elle rencontre les créneaux.

La relation entre la position et la vitesse est d’abord linéaire avant que l’effet de la gravité se fasse sentir aux faibles vitesses. Lorsque la hauteur moyenne de la goutte diminue, la goutte accélère et ralentit quand la hauteur moyenne augmente. Finalement, la goutte s’arrête dans ce qui est pour elle un minimum d’énergie potentielle de gravité.

Le premier régime où la vitesse dépend linéairement de la position correspond à une force de freinage visqueuse et non pas au freinage sec que notre modèle prévoyait. Donc ou bien l’hypothèse que toute l’onde est dissipée sur un tour est fausse, ou bien le freinage supplémentaire n’est pas dû aux ondes mais à l’écoulement tortueux du gaz sous la goutte.

La force de freinage observée est de la forme : Ff rein= −αV

α vaut 180µN.m−1.s pour une goutte d’éthanol de rayon équatorial 3, 1mm (fig.2.14). La force de propulsion d’une goutte de même rayon a été mesurée par déflexion de fibre et vaut 10µN (fig.2.4). L’équilibre de la force de propulsion et du freinage par les ondes donne une vitesse terminale de 4, 5cm/s dont l’ordre de grandeur correspond à la vitesse observée (fig.2.11). Le pas de la surface en créneau utilisée est deux fois plus important que celui du toit d’usine ce qui peut expliquer le facteur 2 entre la vitesse mesurée et cette estimation.