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Chapitre I : Etude bibliographique

3. Mécanique de la rupture en dynamique

3.2. Propagation rapide de fissure

3.2.2. Vitesse de propagation

Figure 3.2.1.a : Evolution linéaire du taux de restitution d’énergie G pour une propagation instable de

fissure avec mise en évidence de l’énergie cinétique

De nombreuses études [118-120] ont montré que les analyses utilisées pour décrire la propagation de

fissure devaient prendre en compte l’effet de l’énergie cinétique. Ainsi, le taux de restitution d’énergie

en dynamique, incluant l’énergie cinétique , s’exprime par la relation (I.47).

3.2.2. Vitesse de propagation

Les travaux de Mott [121] ont cherché à caractériser la relation entre et la vitesse de propagation V

de la fissure. Il considère une fissure, de longueur 2a, au sein d’une plaque infinie, dont le

comportement est élastique, soumise à une contrainte de traction σ. Il suppose que les déplacements

sont proportionnels à la taille de la fissure et aux déformations du fait de la nature élastique du

comportement du matériau. En supposant une épaisseur unité de la plaque, Mott montre que l’énergie

cinétique E

k

s’exprime selon la relation (I.48).

où k est une constante et ρ est la densité du matériau.

A partir de la relation (I.47), nous obtenons la formule (I.49).

où w

f

est le travail à rupture.

D’après les travaux [8, 9, 19], la contrainte à rupture suit la relation (I.50). A l’amorçage, E

k

= 0 et a

0

est la longueur à partir de laquelle il y a rupture (I.51).

Connaissant (I.51) et résolvant l’équation (I.49), différentes études [121-123] ont montré que la vitesse

de propagation de la fissure est donnée par (I.52).

avec

Roberts et Wells [124] ont estimé la valeur de à 0,38. Ainsi, d’après (I.52), les auteurs mettent en

évidence l’atteinte d’une vitesse limite de propagation de fissure de l’ordre de 0,38c

0

lorsque a devient

important par rapport à a

0

. Cette estimation est en bon accord avec les vitesses de propagation

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expérimentales dans les métaux qui varient entre 0,2 et 0,4 c

0

[125]. Freund [126] a montré que la

vitesse de propagation dynamique d’une fissure dans un milieu infini est donnée par (I.53).

c

R

est la vitesse des ondes surfaciques de Rayleigh. Ainsi, selon Freund, la vitesse limite de

propagation de fissure est de 2900 m/s pour un acier où ν = 0,3. Cependant, les valeurs expérimentales

sont bien plus faibles.

L’analyse de Freund conduit à une vitesse limite de propagation plus grande (0,57c

0

) que l’estimation

de Roberts et Wells. La notion de vitesse limite de propagation de fissure remonte aux observations

faites en 1938 par Schardin et Struth sur du verre inorganique en faisant propager une fissure via un

chargement par choc [127]. Cette vitesse limite de propagation est inférieure à . Schardin [128] a

cherché à mettre en évidence l’existence d’une vitesse limite caractéristique du matériau qui peut être

considéré comme une constante physique. Il montre que les vitesses limites de propagation varient

entre et suivant la composition chimique des verres inorganiques. Cotterell [129]

considère que la vitesse limite de propagation est due aux propriétés du matériau. Selon Ravi-Chandar

et Knauss [130], la différence dans les vitesses observées s’explique par les mécanismes de rupture qui

se produise dans la zone effective de rupture. D’autres auteurs ont confirmé l’importance des

mécanismes de rupture pour justifier l’existence d’une vitesse limite de propagation [131-136].

De nombreux travaux se sont intéressés à la rupture dynamique du verre. Cette dernière est à l’origine

de la présence de trois zones distinctes sur la surface de rupture. Dans un premier temps, il y a une

zone miroir qui est lisse, suivi d’une « mist zone » et d’une « hackle zone » pour lesquelles des faciès

de rupture rugueux sont observés. De nombreuses études ont cherché à caractériser une particularité

des faciès de rupture, à savoir les marques coniques qui ont été observées sur différents matériaux au

niveau de la « mist zone » (figure 3.2.2.a).

Figure 3.2.2.a : Marques coniques observées sur du verre (a), du polystyrène (b) et du polyuréthane (c)

[137, 138]

Ces marques s’expliquent par l’interaction de fissures. Smekal [139] considère qu’une première fissure

se propage, puis un défaut en amont du front de fissure va constituer un germe de fissure secondaire à

cause du champ de contrainte local. La deuxième fissure n’est généralement pas dans le même plan

que la première. Lorsque les deux fronts de fissure interagissent en temps et en espace, le ligament de

matière les séparant se rompt en formant des marques coniques sur le faciès de rupture. Yang et

Ravi-Chandar [140] justifient l’origine de ces marques par la présence de microcavités prenant naissance sur

des nanodéfauts du fait de la propagation rapide de la fissure principale. Fineberg et al [141, 142] ont

montré que des fissures se propageant au-delà de dans du PMMA sont associés à des

oscillations de la vitesse de propagation dues à la formation de microfissures à partir de la fissure

principale. Les auteurs suggèrent que l’instabilité du trajet de fissuration est la raison d’une vitesse

limite de propagation du fait de l’augmentation de l’énergie nécessaire à la propagation de la fissure.

Des études de Guerra et al [143-145] sur la rupture fragile du PMMA ont mis en évidence trois

régimes de vitesse :

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- : des marques coniques sont observées,

- : il y a la présence de marques coniques ainsi que des micro-branchements de fissures

sur les surfaces de l’éprouvette.

Figure 3.2.2.b : Evolution de la densité de marques coniques et de l’énergie à rupture en fonction de

la vitesse de propagation de la fissure [143, 145]

La figure 3.2.2.b montre la variation de la densité de marques coniques et de l’énergie à rupture

selon la vitesse de propagation de la fissure. Les vitesses de propagation sont obtenues à l’aide de

jauges à brins, le calcul du facteur d’intensité des contraintes est réalisé à l’aide de calculs EF en 2D et

l’énergie à rupture est calculée selon la formule (I.54).

où K(c) est le facteur d’intensité des contraintes quasi-statique pour une fissure de longueur c.

Les auteurs montrent que l’énergie de rupture augmente fortement à partir de la vitesse

(figure 3.2.2.b). Ils considèrent que les marques coniques sont rendues

possibles à partir du moment où plusieurs microfissures ont le temps de se développer en amont du

front de la fissure principale. Ces microfissures en amont du front de fissure principal s’expliquent par

la nucléation et l’activation de sites secondaires du fait de champ de contrainte en pointe de fissure.

Chaque microfissure se développe radialement et leur intersection provoque la formation de marques

coniques. La figure 3.2.2.c montre la vitesse de la fissure principale et des fissures microscopiques

pour des niveaux de chargement croissants de a à f. Les auteurs montrent que toutes les microfissures

se propagent à la même vitesse d'environ 200 m/s, indépendamment du niveau de force appliquée pour

ouvrir la fissure principale. Le comportement observé à l'échelle microscopique est très différent de

celui observé à l’échelle macroscopique, où la vitesse de propagation augmente avec la force, celle-ci

pouvant atteindre 450 m/s. Ce n'est que par un effet géométrique de rencontre de ces multiples

microfissures que la rupture globale est finalement si rapide. Finalement, lorsque la vitesse de

propagation macroscopique est supérieure à , la fissure principale progresse via la coalescence de

microfissures se propageant à une vitesse . Les auteurs considèrent que les microfissures permettent

d’augmenter la vitesse macroscopique de propagation. Ce type de mécanisme ne peut pas être exclu

pour les aciers. Cependant, il est plus délicat d’identifier des sites secondaires sur les faciès de rupture

d’acier que sur du PMMA où des marques coniques sont nettement distinctes.