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II.3 Comportement de particules bioclastiques mono-spécifiques en chute libre

II.3.2 Vitesse de chute de particules bioclastiques mono-spécifiques

Chaque combinaison diamètre/espèce est caractérisée par des débris de forme et d’épaisseur très variées impliquant une dispersion des vitesses de chute assez importante. Le nombre de mesures (20 à 40 essais par combinaison) permet d’obtenir la tendance de l’évolution des vitesses en fonction de la taille des particules. Pour faciliter l’interpréta- tion des données expérimentales, les valeurs des vitesses de sédimentation moyennes sont utilisées (Tableau II.3, Figure II.9).

Les billes en verre présentent des vitesses de chute inférieures à celles de sphères parfaites car les billes possèdent des irrégularités et de la rugosité en surface. Cependant, les valeurs de vitesse de chute des particules biogéniques sont clairement inférieures à celles des billes en verre de référence. Il existe un facteur allant de 2 à 10 en fonction de l’espèce : pour un diamètre de 6,3 mm, les billes chutent à 0,55 m s−1, alors que les débris de Ruditapes ont une vitesse de 0,20 m s−1 et les Anomia de 0,066 m s−1. Des variations

II.3 Comportement de particules bioclastiques mono-spécifiques en chute libre dans un fluide au repos

Figure II.9. (A) Vitesse de chute en fonction du diamètre de tamis pour chaque espèce. Les symboles colorés correspondent aux vitesses de chute moyennes mesurées dans le tube de sé- dimentation. Les lignes colorées représentent des courbes de régressions calculées à partir de l’équation. II.3. (B) Vitesse de chute en fonction du diamètre de tamis pour des billes de verre sphériques.

significatives sont observées entre les espèces, particulièrement pour des diamètres de grain élevés (Figure II.9) : plus le diamètre de grain est grand, plus la différence de vitesse entre espèces est importante. Anomia possède les vitesses de chute les plus faibles avec une valeur de 0,066 m s−1 pour la fraction de 6,3 mm, tandis que pour la même taille de grain, Ruditapes et Crepidula chutent le plus rapidement, à environ 0,20 m s−1, c’est-à-dire que leurs vitesses de sédimentation sont trois fois plus importantes que celles d’Anomia. Entre ces limites inférieures et supérieures, Cerastoderma, Scrobicularia, Mytilus, Ostrea et Magallana ont des vitesses intermédiaires (entre 0,114 et 0,125 m s−1). Pendant la chute, les particules décrivent différentes trajectoires, de la chute verticale rectiligne à fortement oscillatoire, dépendant de la forme, de l’angularité et de la surface de rugosité des grains (Figure II.10, Maiklem (1968)). La trajectoire de chute influence directement les vitesses de chute moyennes, mais le nombre de réplicats pour un même échantillon tend à lisser les différences de trajectoire entre les particules. Les écarts observés sont donc associés à

Figure II.10. Trajectoire de chute des particules bioclastiques selon quatre modes : Chute verti- cale, hélicoïdale, en feuille morte ou sur deux plans.

des variations de forme, de densité et d’épaisseur des débris. De plus, les espèces dont les vitesses de sédimentation sont les plus élevées sont également les espèces les plus denses, composées d’aragonite et dont la structure interne est compacte. De la même manière, les espèces chutant le moins vite sont celles dont les densités sont les plus faibles, composées de calcite et dont la structure interne comprend des feuillets. L’espèce Mytilus possède des vitesses intermédiaires entre ces deux groupes car elle est composée à la fois d’aragonite et de calcite avec une structure interne mixte compacte. Les vitesses de sédimentation des huîtres, Ostrea et Magallana, sont plus élevées que celles d’Anomia car seuls les essais sur les débris assez denses pour chuter ont pu être réalisés. Les valeurs représentent une moyenne entre les deux structures observées mais en se rapprochant néanmoins des vitesses de chute des feuillets de calcite. Les vitesses de chute sur la partie poreuse seule n’ont pas été mesurées dans cette expérience.

La figure II.11 représente les régressions sur les vitesses de chute obtenues dans cette étude ainsi que les données expérimentales de Braithwaite (1973). Son étude a porté sur l’analyse de fragments de coraux, d’algues, de bivalves, de micro-gastéropodes, d’échino- dermes, de foraminifères, de bryozoaïres ainsi que du quartz, tous échantillonnés dans un environnement tropical (Seychelles). L’ensemble de ces données permet de comparer le comportement des bioclastes de mollusques d’eaux tempérées par rapport à des carbo- nates d’eaux chaudes. Les vitesses de chute les plus importantes correspondent aux billes de verre, suivies par le quartz dont la forme ressemble le plus à une sphère. La plupart des vitesses de chute obtenues par Braithwaite (1973) ont tendance à diminuer lorsque

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le diamètre de grain augmente (coraux, micro-gastéropodes, foraminifères, bryozoaïres). Ainsi, l’ensemble des vitesses des espèces de la présente étude, excepté les Anomia, in- terceptent ou se superposent aux courbes des carbonates d’eaux tropicales. Ruditapes et

Crepidula suivent l’évolution des vitesses de chute des micro-gastéropodes, Cerastoderma

et Scrobicularia, suivent l’évolution des courbes des bivalves et des bryozoaïres, tandis que Mytilus, Ostrea et Magallana atteignent les vitesses de chutes des foraminifères et des bryozoaïres dans le cas des diamètres de tamis les plus élevés. Anomia reste l’espèce dont les vitesses de chute sont les plus faibles, peu importe le diamètre. De manière plus générale, la courbe des bivalves d’eau chaude se situe à peu près au centre des courbes des bivalves provenant de la Manche. Les espèces de bivalves issues de l’étude de Braithwaite (1973) n’ont pas été déterminées, mais les données semblent correspondre à une moyenne de plusieurs espèces comme le montre la position de la courbe par rapport aux espèces de bivalves issues de cette étude (toutes les espèces sont des bivalves excepté Crepidula qui est une espèce de gastéropode). Les résultats semblent donc être cohérents bien que des différences majeures existent entre espèces. La figure II.11 montre l’importance de consi- dérer, si possible, chaque espèce dans les études sur le comportement hydrodynamique plutôt qu’une moyenne, car il existe des différences inter-spécifiques non négligeables.

Figure II.11. Comparaison des vitesses de chute des huit espèces de cette étude avec les résultats de Braithwaite (1973) en fonction du diamètre de tamis.

II.3.3

Coefficient de trainée de particules bioclastiques mono-

spécifiques

Les résultats des vitesses de chute ont permis le calcul du coefficient de trainée pour chacune des espèces (Tableau II.2) grâce à l’équation II.3. Ce paramètre varie fortement en fonction de la forme des débris. Les valeurs obtenues dépendent de l’espèce : Anomia a le plus fort coefficient (CD ≈ 30) tandis que Ruditapes et Crepidula ont les plus faibles

coefficients, de 3,5 et 4 respectivement.

La figure II.12 représente le coefficient de trainée en fonction du nombre de Reynolds de grain. Les courbes empiriques pour différents facteurs de forme sur des graviers de Alger et Simons (1968) sont présentées ainsi que les points pour différentes formes géo- métriques provenant de Göğüş et al. (2001). Les billes de verre, sphériques, devraient avoir un facteur de forme égal à 1. Cependant, la présence d’irrégularités sur les billes implique une diminution de leur facteur de forme, d’où la présence du point sous la courbe égale à 0,9. Les billes ne sont pas des sphères parfaites mais s’en rapprochent. Les valeurs des coefficients de chaque espèce sont toutes présentes au-dessus des courbes. Seuls Ru-

ditapes et Crepidula se situent au niveau des prismes rectangulaires étudiés par Göğüş et al. (2001). Ce résultat peut s’expliquer dans un premier temps par la forte densité et

la structure compacte de ces particules mais également par l’épaisseur des débris qui est plus importante que pour les autres espèces. Anomia se remarque par sa valeur extrême : la forme et la faible épaisseur de ces débris ainsi que sa structure en feuillets impliquent

Tableau II.2. Coefficients de trainée calculées par régression des données expérimentales de

vitesse de chute par l’équation II.3.

Espèces Coefficient de trainée

CD Crepidula 4, 02 ± 0, 43 Scrobicularia 8, 22 ± 1, 61 Cerastoderma 6, 65 ± 1, 30 Ruditapes 3, 54 ± 0, 15 Mytilus 8, 56 ± 1, 01 Anomia 29, 8 ± 1, 54 Magallana (feuillets) 7, 24 ± 0, 77 Magallana (craie) - Ostrea (feuillets) 8, 01 ± 0, 91 Ostrea (craie) -

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un fort coefficient de trainée, très éloigné des coefficients mesurés pour des graviers. Les autres espèces sont regroupées à une position intermédiaire entre Anomia et les prismes rectangulaires. Le coefficient de trainée permet de démarquer les débris bioclastiques des particules silicoclastiques, ou de formes géométriques basiques, en mettant en évidence la complexité de leur comportement. La forme, l’épaisseur, la structure interne, la composi- tion minéralogique et la densité des débris coquilliers sont les paramètres essentiels à la compréhension de leur comportement dans un fluide.

Figure II.12. Coefficient de trainée CD en fonction du nombre de Reynolds de grain (Re). Les

courbes noires représentent les facteurs de formes obtenus par Alger et Simons (1968) sur des particules de type graviers. Les valeurs pour différentes formes géométriques obtenues par Göğüş et al. (2001) ont également été ajoutées.

Les particules bioclastiques possèdent un comportement particulier dans un fluide au repos, qui diffère fortement de celui de particules sphériques ou silicoclastiques. Les vitesses de chute des bioclastes issus des huit espèces de mollusques sont deux à dix fois plus faibles que pour des billes sphériques. Les variations inter-spécifiques sont également très importantes car les vitesses peuvent être deux à trois fois plus importantes en fonction de l’espèce. Les ordres de grandeur des vitesses de chute des huit espèces sont cohérents avec celles des carbonates d’eaux chaudes. Les différences entre espèces observées sont expliquées par les variations des paramètres de densité, de forme, d’épaisseur des débris et de composition minéralogique. Plus une particule est dense, épaisse et arrondie, plus la vitesse de chute est élevée. Au contraire, plus un débris est plat, léger et fin, plus la vitesse de sédimentation est faible. L’importance du paramètre de forme est mis en avant par le coefficient de trainée qui est très fort pour l’ensemble des particules bioclastiques. Au regard de leurs faibles vitesses de chute, les particules bioclastiques sont capables d’être maintenues en suspension avant de sédimenter sur le lit sédimentaire.

II.4 Comportement de lits bioclastiques mono-spécifiques sous courant unidirectionnel

II.4

Comportement

de

lits

bioclastiques

mono-

spécifiques sous courant unidirectionnel