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II.3 Comportement de particules bioclastiques mono-spécifiques en chute libre

II.4.1 Théorie de la couche limite

II.4.2.3 Vélocimétrie Doppler Acoustique

Les profils de vitesse au-dessus du fond ont été mesurés à l’aide d’un profileur de vitesse acoustique par effet Doppler (ADVP - Nortek Vectrino Profiler) appelé également Vectrino Profiler. Il est composé d’une tête de mesure qui comprend un émetteur central entouré par quatre récepteurs inclinés à 30° vers le centre (Figure II.17). Afin de visualiser l’influence de l’instrument nécessaire aux expériences sur la colonne d’eau, la nappe laser a été placée une nouvelle fois sous la paroi vitrée du canal. Il est apparu que l’instrument acoustique n’influence pas l’écoulement sous-jacent, qui reste laminaire (Figure II.18). L’écoulement est légèrement dévié entre les bras récepteurs de la sonde et des cellules de turbulence se forment au-dessus de la sonde. Cependant, les modifications de l’écoulement restent très locales et n’atteignent pas la zone de mesure qui se situe à 4 cm de l’émetteur. Le Vectrino Profiler fournit quatre valeurs de vitesse, chacune résolue par une paire de récepteurs : la composante horizontale, u, et la première composante verticale, w1, sont calculées à partir du signal provenant des récepteurs 1 et 3. La composante horizontale, v, et la deuxième composante verticale, w2, sont calculées à partir des récepteurs 2 et 4. Le transducteur central envoie un train continu d’impulsions à 10 MHz qui se propage dans la colonne d’eau. Une partie de l’énergie est rétro-diffusée par les particules d’ensemencement en suspension, leur vitesse est supposée égale à celle de l’écoulement. L’effet Doppler induit un décalage de fréquence qui est enregistré par les quatre récepteurs. Le Vectrino Profiler utilise ce décalage pour estimer les différentes composantes du vecteur vitesse (u, v, w1,

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Figure II.18. Visualisation de l’écoulement dans le canal autour de l’instrument grâce à une nappe laser.

w2). La précision des vitesses mesurées par l’appareil fournie par le fabricant est de ± 0,5 % de la valeur mesurée ± 1 mm s−1(NortekAS). La résolution spatiale verticale de l’appareil peut être ajustée entre 1 et 4 mm. La fréquence d’acquisition des données de vitesse peut être choisie entre 1 et 100 Hz (Craig et al., 2011). La fréquence d’échantillonnage a une influence négligeable sur les vitesses moyennes, mais affecte l’estimation de l’intensité turbulente (Ruonan et al., 2016).

De plus, la position du lit sédimentaire par rapport à l’émetteur de l’ADVP est obtenue par l’enregistrement d’un simple écho, par le transducteur central (qui peut également servir de récepteur), à une fréquence de 1 Hz. Le point d’intensité maximale de l’écho est identifié comme la position de la surface rigide. Les mesures de vitesse et de la position du lit sont réalisées simultanément par l’ADVP.

L’ADVP permet de fournir un profil de vitesse de 35 mm de long, entre 40 et 75 mm de l’émetteur (Figure II.17) (Craig et al., 2011). Cependant, la géométrie de la sonde provoque une diminution de la qualité du signal (rapport signal sur bruit : SNR, amplitude et corrélation du signal) de part et d’autre du point de qualité maximale, situé à 50 mm de l’émetteur. C’est à cette distance que les 4 faisceaux montrent un chevauchement maximal créant une zone appelée "sweet-spot" (Figure II.19). Au-dessus en en-dessous de cette zone, le bruit Doppler et la décorrélation du signal augmentent en raison du chevauchement décroissant des faisceaux individuels. Ainsi la qualité du signal dépend de la distance de la tête du transducteur (MacVicar et al., 2014).

Figure II.19. Profils d’amplitude (A), de corrélation (B), de SNR (C) et de vitesse (D) obtenus pour les quatre récepteurs du Vectrino Profiler.

Afin d’observer les conséquences de la décroissance du signal en fonction de la position du sweet-spot sur les mesures de vitesse, deux enregistrements de 4 min ont été effectués le long : (i) d’un profil de 35 mm (ii) et d’un profil de 20 mm en abaissant l’instrument de 10 mm vers le fond. Le sweet-spot est donc situé entre 0,016 et 0,025 m d’élévation dans le cas du profil de 35 mm, et entre 0,004 et 0,013 m dans le cas du profil du 20 mm ce qui permet de le placer plus proche du lit. La figure II.20 montre une différence entre les deux enregistrements entre 1 et 6 % de corrélation et entre 12,5 et 17 dB de SNR, en dehors du sweet-spot. Ces deux paramètres possèdent des valeurs plus importantes pour le profil de 20 mm sur la partie basse du profil, entre 2 et 12 mm, tandis que les valeurs de SNR et de corrélation sont plus importantes dans la partie haute du profil, au delà de 12 mm de hauteur. Ces différences sont dues à la modification de l’emplacement du sweet-spot entre les deux profils, décalés de 10 mm. Ce phénomène induit une sous-estimation de la vitesse moyenne de plus de 10 % dans les 10 mm du profil les plus proches du fond (Figure

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Figure II.20. Comparaison entre les profils de corrélation (A), de SNR (B) et de vitesses (échelle verticale linéaire (C), échelle verticale logarithmique (D)), obtenus pour différents emplacements du sweet-spot. Les données de corrélation et de SNR représentent l’enregistrement par un seul récepteur (récepteur 1). En rouge un profil de 20 mm de hauteur, en vert le profil de 35 mm de hauteur. Les sweet-spots de chaque profil sont dessinés.

II.20 ; MacVicar et al., 2014 ; Brand et al., 2016). Finalement, dans une gamme de 10 mm autour du sweet-spot, le signal est constant, de meilleure qualité et la vitesse moyenne obtenue ne montre pas de déviation en comparaison avec d’autres techniques de mesures (ADV – Zedel et Hay, 2011 ; Brand et al., 2016, PIV – Craig et al., 2011, Figure II.21).

Il est important de faire attention à la base du profil car les vitesses moyennes enre- gistrées à l’interface eau-sédiment sont biaisées par d’importants échos sur le fond, qui interfèrent avec le signal émis. L’extension de la région d’interférence dépend du type de matériel testé (rugosité, porosité) et a été estimée entre 3 et 5 mm au dessus du fond (Rusello et Allard, 2012 ; Wengrove et Foster, 2014 ; Koca et al., 2017).

Concernant la turbulence de l’écoulement, Brand et al. (2016) ont montré que les composantes de la vitesse verticale sont très sensibles au bruit et à la décorrélation du signal, ce qui peut affecter l’estimation de la turbulence, en particulier proche du fond.

Figure II.21. Comparaison des profils de vitesse obtenue par le Vectrino Profiler avec l’ADV (A – Brand et al. (2016)) et la PIV (B – Craig et al. (2011)).

Cependant, ils montrent que la contribution du bruit est différente pour les composantes verticales w1 et w2, et recommandent d’utiliser seulement w1 pour le calcul de la tur- bulence dans la direction u, puisque u et w1 sont obtenus à partir du même système de faisceaux.

b) Méthodologie d’acquisition des profils de vitesse

Il est tout d’abord nécessaire d’effectuer l’ensemencement de l’écoulement par des microsphères creuses en verre (Sphericel 110P8 - Potters Industry), recommandées par le constructeur, pour pouvoir enregistrer les profils de vitesses. Elles possèdent un diamètre médian de 10 µm et une densité de 1,10 g cm−3. Étant donné qu’un profil total de 35 mm ne fournit pas un signal de bonne qualité sur toute la longueur du profil, une autre méthode a été utilisée. Des profils d’environ 25 mm ont été obtenus dans la couche limite en empilant cinq profils de 10 mm (autour du sweet-spot) avec des zones de chevauchement d’environ 5 mm entre chaque profil (Figure II.22). La position du lit sédimentaire, déterminé par l’ADVP, permet de replacer tous les profils par rapport au niveau de référence donné par la surface plane du lit. La région d’interférence située à l’interface eau-sédiment est différente en fonction des profils, son étendue peut varier mais les points de mesure s’y situant ne sont pas pris en compte dans les interprétations.

Le Vectrino Profiler a été configuré avec la fréquence maximale de l’appareil (100 Hz) couplée à sa résolution spatiale optimale (1 mm) afin d’estimer les propriétés turbulentes

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Figure II.22. Protocole d’obtention d’un profil par empilement de cinq profils de 10 mm.

de l’écoulement. La fréquence d’échantillonnage a une influence négligeable sur les vitesses moyennes, mais affecte l’estimation de l’intensité turbulente (Ruonan et al., 2016).

Dans le but d’estimer efficacement la durée minimum nécessaire à chaque enregis- trement, un test de convergence a été établi sur la vitesse moyenne de l’écoulement à 1 cm au-dessus du fond. Une durée de 300 secondes pour le test a permis d’observer une stabilisation de la courbe au bout de 90 secondes (Figure II.23). Pour chaque profil de vitesse, une durée d’échantillonnage de 120 secondes a donc été retenue. Ainsi, pour un profil complet qui comprend cinq enregistrements, la durée totale d’une expérience est

Figure II.23. Test de convergence de la vitesse moyenne horizontale (u) de l’écoulement à 1 cm au-dessus du fond.

d’environ 10 minutes. En raison du grand nombre d’expériences réalisées (8 espèces de mollusques, 5 tailles de grains, jusqu’à 10 réplicats par échantillon), seuls les 3 premiers cm de la colonne d’eau ont été échantillonnés avec le Vectrino Profiler. Ceci est suffisant pour estimer u∗ à partir de la loi de la paroi, mais malheureusement les profils de vitesse

ne capturent pas systématiquement toute l’étendue de la couche logarithmique et par conséquent, son épaisseur ne peut pas toujours être déterminée.

Les données ont finalement été filtrées, en ne conservant que les valeurs ayant une SNR supérieure à 20 dB et une corrélation de la paire de faisceaux utilisés pour le calcul de u et w1 supérieure à 80 %. Ces valeurs ont été utilisées d’après les normes recommandées par le constructeur (Figure II.24).

Dans le cas du calcul de la contrainte turbulente, il est nécessaire d’obtenir les valeurs de fluctuation de vitesse en deux dimensions (u’ et w’). Le Vectrino Profiler fournit deux valeurs de vitesse verticale w1 et w2. Initialement τturb a été calculé en utilisant w comme

moyenne arithmétique de w1 et w2. Les profils de contraintes qui en découlaient étaient incohérents, et plus particulièrement pour les données proches de l’interface eau-sédiment. Suivant les recommandations de Brand et al. (2016) seul w1 a été utilisé pour le calcul de la contrainte de Reynolds (Équation II.14).

τturb = ρu0w10 (II.14)

Les profils obtenus sont plus cohérents (Figure II.29). Cependant, il faut être très prudents avec ces données car l’estimation de la turbulence est plus sensible aux effets de bruit et

Figure II.24. (A) Exemple de données filtrées (points verts : valeurs filtrées, points rouges :

Profils de vitesse moyenne et contrainte critique de cisaillement – loi de la paroi

de décorrélation que la vitesse moyenne.