• Aucun résultat trouvé

7.5 Outils pour la manipulation des descriptions sonores au format SDIF dans

7.5.4 Visualisation : SDIF-Edit

Afin de pouvoir utiliser les fichiers SDIF dans l’environnement de composition, la possibilit´e de visualiser les donn´ees qu’il renferme est n´ecessaire. Elle permettra un contrˆole et une ´evaluation des r´esultats des processus d’analyse, et constituera une ´etape pr´ealable au traitement de ces donn´ees. La grande quantit´e d’information contenue dans les analyses et autres descriptions sonores implique en effet des m´ethodes d’extraction et de r´eduction n´ecessitant une connaissance en pr´ecision de la structure et de la localisation des donn´ees. SDIF-Edit [Bresson, 2003]3est une application permettant la visualisation et l’´edition de fichiers SDIF. Initialement, il s’agit d’une application ind´ependante ´ecrite en C++ avec OpenGL, qui a ´et´e int´egr´ee dans OpenMusic en tant qu’´editeur pour les objets SDIFFile. Les probl´ematiques de la repr´esentation des donn´ees SDIF sont diverses ; la princi-pale ´etant la flexibilit´e du format de laquelle r´esulte la n´ecessit´e de s’abstenir de tout a priori quant au contenu (nature des donn´ees, interpr´etation, taille) du fichier que l’on va visualiser. SDIF-Edit propose ainsi une repr´esentation g´en´erique (ne tenant pas compte du type des donn´ees visualis´ees), lui assurant de pouvoir traiter n’importe quel fichier. Cette repr´esentation est une “grille” tridimensionnelle qui permet une visualisation des diff´erents param`etres et de leur ´evolution temporelle (voir figure 7.15). Dans cet espace, l’utilisateur peut se d´eplacer, se focaliser sur des zones d’int´erˆet, ´editer les donn´ees selon diverses proc´edures. Cette repr´esentation g´en´erale en 3D a ´egalement ´et´e compl´et´ee par

3

Figure 7.15: SDIF-Edit : une application pour la visualisation de fichiers au format SDIF.

une navigation de plus haut niveau permettant la s´election d’un type de donn´ees parmi celles que peut renfermer un mˆeme fichier, et par diverses propositions de repr´esentations alternatives, parfois plus adapt´ees `a certains types de donn´ees (courbes, mini-sonagramme, etc.)

Si les possibilit´es de traitement des donn´ees sont limit´ees `a l’int´erieur de cet ´editeur (tout au plus une modification manuelle des valeurs), il semble que l’outil de simple visua-lisation qu’il repr´esente s’av`ere utile dans le contrˆole des processus d’analyse et de synth`ese sonore. On pourrait ´egalement s’avancer en supposant que la visualisation et la navigation en trois dimensions dans cet espace virtuel de donn´ees, au moment d’un passage du do-maine du signal vers celui du symbolisme, puisse inspirer des choix esth´etiques bas´es sur une appr´eciation visuelle.

Les caract´eristiques et fonctionnalit´es de SDIF-Edit sont trait´ees plus en d´etail dans [Bresson et Agon, 2004].4

4

L’application est distribu´ee et document´ee par l’interm´ediaire du forum Ircam [Bresson, 2006a]. Elle a re¸cu en 2006 le prix sp´ecial du jury au concours de logiciels musicaux LoMus organis´e par l’Association Fran¸caise d’Informatique Musicale.

7.6 Conclusion

Nous avons pr´esent´e dans ce chapitre un certain nombre d’outils permettant la mani-pulation de donn´ees de description sonores de bas niveau, notamment `a l’aide des formats standards. En particulier, le format SDIF nous semble proposer une g´en´eralit´e suffisante pour lier ces donn´ees relatives `a des processus d’analyse et de synth`ese sonore avec des processus musicaux de plus haut niveaux.

La figure 7.16 illustre cette id´ee. Il s’agit d’un processus de synth`ese par FOF utili-sant des outils ´evoqu´es dans le chapitre pr´ec´edent (une fonction de synth`ese appelant le synth´etiseur chant). Des donn´ees musicales symboliques y sont converties en param`etres de synth`ese sous la forme de structures de donn´ees SDIF : l’´etat d’un banc de FOF `a diff´erents moments d´etermin´es est ainsi d´ecrit par des courbes, et la fr´equence fondamen-tale est issue d’une s´equence musicale. Ces donn´ees format´ees sont ensuite transf´er´ees au syst`eme de synth`ese par l’interm´ediaire d’un fichier SDIF pour produire un signal num´erique.

Figure 7.16: Un processus de synth`ese par FOF dans OpenMusic. Des structures de donn´ees symboliques (a) sont converties en param`etres de synth`ese sous la forme de struc-tures SDIF (b) puis transf´er´ees au programme de synth`ese (c) pour calculer un son (d).

Compl´ementairement `a la d´emarche consistant `a convertir syst´ematiquement les donn´ees de bas niveau en structures symboliques, simples et structur´ees, les outils pr´esent´es dans ce chapitre permettent la programmation visuelle et le calcul symbolique sur ces mˆemes donn´ees, constituant une premi`ere modalit´e de navigation entre le domaine sym-bolique et celui du signal sonore.

Chapitre 8

Analyse du signal sonore

Nous avons ´evoqu´e dans le chapitre 3 le probl`eme de l’information “perdue” par la suppression de l’interm´ediaire humain et m´ecanique (interpr`ete/instrument) dans la chaˆıne de production sonore, qui est un aspect important du probl`eme g´en´eral du contrˆole de la synth`ese sonore. Pour obtenir des sons satisfaisants avec la synth`ese, il faut en effet fournir aux dispositifs de synth`ese des donn´ees suffisamment riches et structur´ees ; or ces donn´ees, g´en´eralement proches du niveau du signal (ou de celui que nous avons qualifi´e de “subsymbolique”), repr´esentant souvent des fonctions du temps complexes et pr´ecises, peuvent difficilement ˆetre appr´ehend´ees enti`erement dans une pens´ee musicale.

Une m´ethode r´epandue pour l’obtention et la g´en´eration de valeurs complexes pour les param`etres de synth`ese sonore consiste `a les extraire de signaux naturels. Ces signaux assurent en effet la richesse et la diversit´e du mat´eriau, qui pourra ˆetre manipul´e et trans-form´e avant d’ˆetre redirig´e vers la synth`ese sonore. Cette insertion des donn´ees issues de sons ou d’analyses sonores dans les processus compositionnels fera l’objet des outils propos´es dans ce chapitre.

8.1 Le son comme source de mat´eriau musical

[Boesch, 1990] distingue deux approches dans les syst`emes informatiques de composi-tion (et par extension de synth`ese sonore) : une premi`ere qui s’appuierait sur des algo-rithmes (dans l’optique des syst`emes de composition automatique, puis de CAO), et une deuxi`eme sur des donn´ees. Cette deuxi`eme approche consiste `a tirer parti de mat´eriau (mu-sical) existant (de sons, par exemple) pour le travailler et produire des formes d´eriv´ees de ce mat´eriau. L’auteur se r´ef´erait alors principalement `a l’approche de la musique concr`ete ; c’est cependant une id´ee analogue qui dirige de nombreux processus utilis´es dans la mu-sique ´electroacoustique contemporaine.

Aux premi`eres heures de l’´electroacoustique, la musique concr`ete s’est en effet int´eress´ee `

a la manipulation de sons naturels pris dans leur totalit´e (ce qui ´etait l’unique possibi-lit´e avec les moyens de l’´epoque) pour construire des sons nourris par la richesse et la

complexit´e naturelles des enregistrements. Les m´ethodes de synth`ese modernes ont par la suite permis une plus grande ductilit´e du mat´eriau, mais il est alors devenu plus difficile de cr´eer des structures sonores complexes in abstracto, sans mat´eriau initial.

Dans ce contexte, la structure interne de sons naturels peut donc encore s’av´erer utile, et les diff´erentes techniques de traitement et d’analyse des signaux sont capables de fournir des quantit´es d’information et de connaissances sur les sons qu’il est possible d’introduire dans des processus de synth`ese [Risset et Mathews, 1969].

Nous avons vu dans le chapitre 1 que les techniques de synth`ese “spectrales” ´etaient fr´equemment li´ees plus ou moins directement `a des m´ethodes d’analyse du signal. Outre l’int´erˆet scientifique de la d´emarche d’analyse/resynth`ese pour l’identification et la compr´e-hension du rˆole des diff´erents param`etres, cette d´emarche est donc ´egalement utilisable par les musiciens pour pallier la complexit´e du ph´enom`ene sonore et des probl`emes qui en retournent dans la cr´eation de sons de synth`ese. Les syst`emes comme le vocoder de phase, l’analyse additive ou l’analyse source/filtre, permettent d’extraire des donn´ees, de les traiter num´eriquement, de cr´eer ´eventuellement des hybridations avec des donn´ees ext´erieures, provenant d’autres sons, et de resynth´etiser enfin des sons nouveaux `a partir de ces donn´ees [Risset, 1991] [Arfib et Kronland-Martinet, 1993].

Cette m´ethodologie d’analyse/transformation/synth`ese s’est donc largement d´evelopp´ee dans les pratiques compositionnelles, l’analyse fournissant des donn´ees sonores naturelles (r´eservoir de formes temporelles, d’organisations spectrales, ou autres) assurant, mˆeme `a l’issue d’´eventuels traitements musicaux, la richesse et la coh´erence des sons synth´etis´es [Risset, 1993] [Stroppa et al., 2002].

Dans les syst`emes temps r´eel, la captation sonore ou gestuelle permet ´egalement une int´egration directe de donn´ees naturelles dans les processus de synth`ese.

L’approche de la CAO, cependant, aura tendance `a privil´egier une vision plus globale sur le mat´eriau et consid´erera ces donn´ees comme des structures statiques utilis´ees comme mat´eriau initial dans les processus de composition.

Enfin, notons que sans mˆeme parler de synth`ese, l’analyse sonore peut aussi simple-ment ˆetre utilis´ee comme r´eservoir de formes, hauteurs, structures temporelles, r´eins´er´ees dans une logique instrumentale : c’est l’une des id´ees principales du courant de musique spectrale, illustr´ee dans le domaine instrumental par G´erard Grisey, Tristan Murail, et bien d’autres.