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Dans une vision à long terme

4. CE QUE NOUS DISENT LES PERSONNES ET LES FAMILLES

4.2. AU SEIN DU PERIMETRE DE LA RECHERCHE

4.2.1. SAVOIR

4.2.1.1. ETRE INFORME : une information qui dit, avec humanité, tournée vers un savoir utile, pour avoir accès,

4.2.1.1.5. Dans une vision à long terme

Sauf les évocations du passage par les soins intensifs, puis la revalidation quand elle a lieu dans la suite immédiate, qui suivraient des « protocoles médicaux », il apparait que l’accès aux soins et aux aides sera d’autant plus favorisé qu’il a été pensé le plus tôt possible et/ou qu’il s’inclut dans une vision du parcours envisageant le long terme, ou la possibilité des changements qui peuvent se produire dans une vie. Ceci participe de la capacité d’activer à temps l’aide

opportune, de se situer dans une ligne du temps et d’anticiper, de temporiser, de réactiver, selon l’évolution de la situation. L’après doit s’énoncer pour se réfléchir et s’organiser.

« L’après » est (progressivement) présent à l’esprit des personnes avec le temps qui passe, avec le temps de « récupération » qui avance et avec la prise de conscience qui s’active. De façons différentes à travers le temps, avec l’évolution de l’état, un jour ou l’autre, « l’après » se pose comme une question à investir. Cela doit être rendu possible par l’organisation des soins et de l’aide. Celle-ci doit inclure ce questionnement, d’emblée et tout au long de la vie. C’est par exemple savoir quand on va quitter un service, savoir que l’on va pouvoir compter sur quelqu’un une fois de retour à domicile, savoir sur qui compter pour réfléchir et concrétiser un projet de reprise de travail.

C’est aussi savoir quelle aide solliciter, et pouvoir compter sur la disponibilité d’une aide, à la suite d’un évènement modifiant la situation.

Il apparait donc au travers de nombreux témoignages que « l’après » doit pouvoir se préparer dès (le début de) la revalidation, ou à l’approche du retour à domicile. C’est ce dont rend compte cet extrait.

« Lors d’un de ses premiers retours, on a quand même eu quelques frayeurs. Des petites choses se passaient, pour les déplacements dans la maison, et on devait se débrouiller. On ne nous avait pas assez dit avant. (…) Au retour, on nous demande comment ça a été et on répondait que oui mais bon ce n’était pas si simple. Ça manquait un peu de détails dans la préparation. (…) Les gens ne se rendent absolument pas compte. »

Le témoignage suivant nous projette au-delà du moment de retour à domicile. Il évoque la faiblesse de préparation tant dans sa dimension anticipatrice que tenant compte de la réalité du quotidien à vivre et vécu par la personne, qui se retrouve « seule ».

« A l’hôpital tout est fait pour la personne handicapée, t’es dans une bulle, (…). Quand t’arrives chez toi… Quand je suis revenue à la maison, j’ai pleuré, je ne savais plus faire une tartine à mon fils. (…) On ne cherche pas à savoir comment ça va se passer, il faudrait prendre plein d’exemples concrets. C’est des conneries parfois, mais c’est plusieurs fois par jour. (…) Il faut croire qu’il faut être dans le cas pour savoir. (…) On doit tenir compte de ce que la personne sait encore faire. Pour le retour à domicile, une organisation devrait être là, qui connait la personne depuis le début, et la famille aussi. »

Et de préciser des modalités sur lesquelles s’appuyer : le temps, la connaissance des séquelles, le soutien d’un tiers pour favoriser le cheminement de chacun, et de l’un avec l’autre.

«Ceci nécessite du temps, une présence presque quotidienne car il faut

connaitre ses gens, il faut que chacun se connaisse, il faut apprendre à se faire confiance. (…) Je donne des clefs aux gens mais c’est pas possible, les gens ne vont pas changer leur nature, c’est moi qui m’adapte. (…) Il faut plus expliquer les possibilités de séquelles, à la personne et à la famille. On a l’impression qu’on doit faire son chemin tout seul, c’est « débrouillez- vous ». Je ne dis pas que si on avait posé des questions, on ne nous aurait pas répondu, mais on ne nous dit rien, on est au courant de rien. »

Des tempéraments existent à cette vision à long terme, par exemple après la phase aigüe, comme nous l’indique cette épouse, exprimant un rapport au temps, au jour le jour, quand la question de la vie est en jeu, et plus tard quand les séquelles demeurent importantes.

« Le docteur des soins intensifs nous avait dit d’apprendre à vivre au jour le jour. J’ai gardé ça. J’ai appris à vivre au jour le jour et à penser au jour le jour. Justement pour ne pas trop me projeter. On se protège. C’est usant. »

La préparation de « l’après » doit s’envisager sur plusieurs points. Nous venons d’évoquer le retour à la maison. Cette préparation peut également concerner la question de la reprise du travail qui parfois ne bénéficie d’aucune attention.

« Il aurait peut-être juste fallu qu’on vienne voir à la maison, sur place, comment est-ce que la maison est aménagée. (…) Ce qui a c’est que ça a été brutal et qu’il n’y a pas eu de suivi. » Et d’ajouter : « Au travail, rien n’a été expliqué, donc les gens ne comprenaient pas mes sautes d’humeurs, le fait que je parlais fort. (…), y’en a qui m’ont regardé d’un drôle d’air. Pourtant, j’ai pas l’impression que cela nécessite beaucoup de temps. (…) et les gens ne se rendent pas compte combien le moindre geste nécessite une concentration énorme, que rien que pour marcher il faut de la concentration quand on a tout perdu. A (l’hôpital), quand j’avais monté deux ou trois marches, je dormais le reste de ma journée tellement que je devais me concentrer. »