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III. Le transporteur vésiculaire du glutamate 3 : VGLUT3

III.3. VGLUT3 dans les neurones GABAergiques

Le GABA est le principal neurotransmetteur inhibiteur du SNC des vertébrés (Watanabe et al., 2002). Ce NT, qui est activateur lors du développement embryonnaire, ne devient inhibiteur qu’à l’âge adulte (Ben-Ari, 2002).

Les interneurones GABAergiques forment une famille vaste et complexe. En effet, ils présentent une forte diversité morphologique et électrophysiologique (pour revue (Petilla

Interneuron Nomenclature et al., 2008). Dans le cortex et l’hippocampe, les terminaisons

nerveuses des interneurones dits « en corbeille » (basket cells) entourent les corps cellulaires et les dendrites proximales des neurones glutamatergiques pyramidaux. Ces interneurones GABAergiques sont divisés en deux groupes : ceux exprimant la parvalbumine (PV, protéine liant le calcium) et ceux qui expriment la cholécystokinine (CCK, neuropeptide) (Somogyi et al., 2004).

L’ARNm de VGLUT3 n’est exprimé que dans certains interneurones GABAergiques du cortex cérébral, de l’hippocampe et de l’amygdale (Herzog et al., 2001; Fremeau et al., 2002; Gras et al., 2002; Schafer et al., 2002; Omiya et al., 2015). Dans ces interneurones GABAergiques, VGLUT3 est présent :

- dans le soma où il colocalise avec l’acide glutamique décarboxylase (GAD, enzyme qui catalyse la décarboxylation du glutamate en GABA) (Figure 18),

- dans la partie proximale des dendrites et dans les terminaisons axonales où il colocalise avec le transporteur vésiculaire du GABA (appelé VGAT ou VIAAT) (Herzog et al., 2004a; Somogyi et al., 2004).

Figure 18. Les interneurones GABAergiques expriment VGLUT3.

(A-C) Un sous-ensemble de neurones VGLUT3-positif (A, en rouge) sont aussi positifs pour la GAD (B, en vert). (C) Superposition des images A et B montrant la colocalisation de VGLUT3 et GAD. La flèche blanche montre un interneurone positif pour la GAD mais pas pour VGLUT3. Echelle : C = 50 µm (d’après Fremeau et al., 2002).

De plus, la protéine VGLUT3 est enrichie dans les interneurones en corbeille CCK-positifs du cortex cérébral, de l’hippocampe et de l’amygdale (Figure 19) et les interneurones GABAergiques produisant la préprotachykinine B (PPTB, précurseur de la neurokinine B) du néocortex (Somogyi et al., 2004; Hioki et al., 2010; Omiya et al., 2015).

Dans l’amygdale, VGLUT3 est, en effet, présent dans les interneurones en corbeille CCK-positifs exprimant le récepteur aux cannabinoïdes CB1. Dans cette région, ces interneurones forment des synapses particulières puisqu’elles s’invaginent dans les cellules pyramidales, cellules exprimant le récepteur métabotropique du glutamate mGluR5. Ces synapses invaginées libéreraient du GABA, glutamate et CCK. Le glutamate libéré modulerait les fonctions neuronales et synaptiques via un mode de transmission volumique en agissant sur les mGluR5 qui sont largement distribués sur la surface extrasynaptique et somato-dendritique des cellules pyramidales (Omiya et al., 2015). Mais son rôle dans ce circuit reste encore mal compris.

VGLUT3 est également présent dans des interneurones GABAergiques de la strie terminale et du noyau médian du corps trapézoïde mais son rôle dans ces interneurones reste encore à élucider (Gillespie et al., 2005; Kudo et al., 2012).

Figure 19. Les interneurones GABAergiques exprimant VGLUT3 sont CCK-positifs.

(A) Un corps cellulaire d’un interneurone (1) dans la couche CA1 de l’hippocampe est marqué par VGLUT3 (A1), la GAD (A2) et la CCK (A3) tandis que le corps cellulaire 2 est juste marqué par la GAD et le CCK. Le soma 3 est immunomarqué seulement par la GAD et les corps cellulaires des cellules pyramidales ne sont pas immunomarqués par VGLUT3. Echelle : 20 µm (d’après Somogyi et al.,

2004).

Il a été montré que VGLUT3 et VIAAT sont localisés sur les mêmes VSs dans le cortex cérébral et l’hippocampe. Ce résultat suggère que ces VSs sont capables de charger à la fois du GABA et du glutamate et donc de libérer dans la fente synaptique ces deux NTs (Zander et al., 2010; Stensrud et al., 2013; Fasano et al., Submitted) (Figure 20). De plus, la libération de glutamate au niveau de la synapse GABAergique déclencherait une réponse

al., 2010; Case & Gillespie, 2011; Stensrud et al., 2015). D’autres récepteurs au glutamate

sont capables de transmettre l’information au niveau des synapses GABAergiques. Il a été montré que le récepteur métabotropique mGluR7 est présent au niveau des terminaisons synaptiques des interneurones en corbeille (Somogyi et al., 2003) et qu’il peut inhiber présynaptiquement la libération de GABA (Summa et al., 2013). De plus, une récente étude menée par notre équipe confirme ce résultat en montrant que VGLUT3, dans les interneurones GABAergiques de l’hippocampe inhiberait la libération de GABA à travers l’activation des récepteurs mGluR du groupe III (Fasano et al., Submitted).

Figure 20. VGLUT3 et VIAAT sont localisés sur les mêmes vésicules.

(A-B) Double marquage en microscopie électronique (« immunogold ») pour VGLUT3 et VIAAT. (A) Micrographie électronique d’une terminaison (term) d’un interneurone GABAergique de la couche CA3 de l’hippocampe formant des synapses symétriques (repérées par un astérisque) sur les dendrites de neurones pyramidaux (dend). VIAAT (larges particules en or) et VGLUT3 (petites particules en or) sont colocalisés sur les mêmes vésicules (encadré, signalées par la tête de la flèche). (B) Terminaisons synaptiques (term) formant des synapses symétriques (astérisques) sur des dendrites (dend) dans le néocortex. Les encadrés sont des zooms de vésicules synaptiques composées de VGLUT3 et VIAAT. Mit = mitochondries. Echelle : A-B = 100 nm et dans les encadrés 25 nm. (d’après Stensrud et al., 2013)

D’après Stensrud et collaborateurs, les terminaisons GABAergiques n’exprimant pas VGLUT3 ont une plus grande quantité de GABA que celles contenant VGLUT3 (Stensrud et

al., 2015). Le glutamate, étant accumulé dans les VSs par VGLUT3 serait moins disponible

pour la production de GABA (Stensrud et al., 2015). Cependant, ces interprétations basées uniquement sur des données anatomiques de microscopie électronique nécessiteraient d’être validées par d’autres approches.

La fonction exacte des réponses glutamatergiques dépendantes de VGLUT3 au niveau des synapses GABAergiques reste non résolue. Cependant, les interneurones GABAergiques du cortex sont bien connus pour avoir un impact majeur dans l’activité des

réseaux neuronaux. Les souris VGLUT3-KO fournissent le premier modèle de souris génétiquement modifiées présentant une épilepsie généralisée non convulsive avec des effets sur le comportement très faible. Ces souris présentent des crises (« seizures ») corticales spontanées (Seal et al., 2008). Ces crises pourraient être causées par l’absence de VGLUT3 qui permettrait un rétrocontrôle inhibiteur glutamatergique sur la transmission GABAergique. Ces données suggèrent ainsi un rôle modulateur de VGLUT3 sur l’excitabilité corticale. Cependant, il faut noter que ces crises corticales spontanées n’ont jusqu’à présent pas été rapportées par de nombreux laboratoires possédant des lignées VGLUT3-KO.