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1.2 L ES RÉGIMES JURIDIQUES FRANÇAIS ET CANADIEN : LES SYSTÈMES JUDICIAIRES ET LES

2.2.2 Vers un pouvoir judiciaire dynamique en Haïti

Les règles juridiques qui garantissent l’indépendance judiciaire en Haïti renferment, de façon générale, deux grands problèmes qui sont à la base des lacunes constatées. D’une part, la Constitution reconnait certaines prérogatives discrétionnaires aux pouvoirs publics quant à sélection et la nomination des juges. Et, d’autre part, définissant l’organisation du pouvoir judiciaire, elle prévoit des fonctions politiques aux cours et tribunaux judiciaires qui nuisent au processus décisionnel. Et, concernant les solutions, il importe de s’attaquer, premièrement, aux articles 175 et 177 de la Constitution avant que les lois statutaires ne soient modifiées.

En effet, il s’agirait d’abord à l’article 175 de poser les balises de l’indépendance judiciaire si bien que les pouvoirs exécutif et législatif ne sauraient contrôler les mécanismes relatifs au recrutement et à la nomination des juges. En ce sens, il faudrait responsabiliser le CSPJ en le rendant exclusivement compétent pour recruter les candidats par voie de concours et faire des propositions au Président de la République pour nommer les juges.

Le principe de recrutement par concours, pour reprendre le juriste Gàbor Széplaki-Nagy, serait efficace parce qu’il garantirait le respect des modalités requises dans le cadre de la sélection des candidats, favorisant l’égalité des chances dans l’accès à la profession de

magistrat et un bon niveau de base des personnes recrutées552. Notons que l’auteur arrive

même à croire que ce principe se pose comme l’un des moyens essentiels pour mettre la procédure de nomination à l’abri des influences des décideurs politiques dotés souvent des privilèges importants. Et il ajoute dans ce sens:

La procédure de nomination fait souvent intervenir une instance politique, en général le chef de l’exécutif, parfois le parlement. Si la première nomination ne fait intervenir de telles instances que pour ratifier, authentifier en quelque sorte, un processus de recrutement antérieur, une sélection fondée sur l’appréciation la plus objectif des mérites, il n’y a pas à s’interroger vraiment sur la procédure formelle de nomination. L’acte du chef de l’État vient simplement conférer une« légitimité étatique » à la nomination du juge, et signifie qu’il exercera une fonction d’ordre étatique.»553

552G.SZÉPLAKI-NAGY, préc., Note 85, p.114. 553 Id., p.122.

« En revanche, si dans la procédure de nomination elle-même l’intervention de l’exécutif ou du parlement représente l’exercice du pouvoir discrétionnaire de choisir les juges, cela peut poser des problèmes beaucoup plus délicats du point de vue de l’indépendance des juges.»554

Il mériterait de reconsidérer ensuite l’article 177 de la Constitution en prévoyant les modalités des trois conditions de la fonction judiciaire. Si le constituant y a fait preuve d’un manque énorme en posant l’inamovibilité comme la condition essentielle pendant qu’il reste silencieux sur principes relatifs aux deux autres. En effet, la Cour suprême canadienne, dans Mackin c. Nouveau-Brunswick, a été claire en mettant en exergue la portée des trois conditions statutaires de la fonction judiciaire. Selon la Cour, il est difficile de concevoir la relation d’indépendance devant exister entre le pouvoir judiciaire et les

pouvoirs politiques sans les prendre ensemble555. La Cour prévoit:

« […]En somme, la protection constitutionnelle de l’indépendance judiciaire requiert à la fois l’existence en fait de ces trois caractéristiques essentielles et la perception qu’elles existent. Ainsi, chacune d’elles doit être institutionnalisées à travers des mécanismes juridiques appropriés.»556

Intervenant sur les trois conditions de la fonction judiciaire, la juriste Nicole Duplé pense que la constitutionnalisation du principe de l’indépendance judiciaire tient, dans la pratique judiciaire, d’un régime juridique donné si deux conditions sont remplies : soit que, outre sa définition précise, ses exigences sont posées de façon nette et claire dans le but de s’en remettre aux règles de droit applicables pour poser les conditions objectives relatives à

l’indépendance institutionnelle et individuelle des juges et tribunaux557.

Il faudrait, deuxièmement, revoir logiquement les lois statutaires et l’accent devrait être premièrement mis sur l’article 15 de la loi portant le statut de la magistrature dans le cadre de la redéfinition du rôle limité que le législateur a reconnu au CSPJ dans le processus de nomination. En ce qu’il appartient à ce dernier de donner uniquement son avis au Président

de la République558. Encore, il serait nécessaire de modifier l’article 49 de la même loi

pour mettre le budget à l’abri de l’influence du gouvernement, et ce, référant à la perception de la Cour suprême canadienne de la gestion du budget du pouvoir judiciaire.

554 Id.

555Mackin c. Nouveau-Brunswick (Ministres des Finances) ; Rice c. Nouveau-Brunswick (2002) A.C.S.no13,par.40. 556Id.

557 N.DUPLÉ, préc., Note74, p.88.

En effet, il est obligatoire, selon la Cour, de confier cette gestion à un organe indépendant composé des membres des trois pouvoirs de l’État et une commission indépendante, plutôt que le Ministre de la justice, serait chargée de payer aux juges.

Comme l’explique la juriste Nicole Duplé, de telles mesures seraient effectives si l’organe interposé entre les deux pouvoirs pour gérer le budget peut être efficace au point que sa

composition et son indépendance conditionne sa crédibilité559. Et ladite juriste poursuit en

disant que: « si [celui-ci] est [établi] ses recommandations ne pourront être écartées à la légère ni par l’exécutif, ni par le législatif.»560 Seulement, l’auteure montre que cette garantie ne saurait déboucher sur le résultat escompté sans rompre tout lien entre le pouvoir judiciaire et le gouvernement.

De même, le CSPJ, aux articles 4 et 22 de la Loi liée à sa création, devrait se composer exclusivement de juges nommés par leurs pairs sous la base de leur mérite, de leur intégrité et de leur expérience. De même, il se révèlerait pertinent que ledit organe soit chargé de l’exécution de ses décisions suite aux délibérations et de l’administration centrale du pouvoir judiciaire; en s’occupant de la préparation du budget, de l’administration des tribunaux, de la discipline judiciaire et de la promotion des juges.

Nous opterions davantage pour que le CSPJ soit composé des magistrats nommés par leurs pairs en ce que l’intégration des membres de l’exécutif dans l’organe administratif d’un pouvoir judiciaire d’un État donné, comme le démontre le juriste Fall, est susceptible de l’empêcher de s’acquitter de sa mission essentielle. C’est-à-dire « garantir le respect des règles de fonctionnement du service public de la justice et la protection des magistrats contre les éventuelles pressions du pouvoir politique »561. Il s’agit de deux principes dont

le respect, pour reprendre ledit juriste, passent, au niveau dudit organe, par la garantie du

processus de recrutement et de la nomination de ses membres562. Or, cette garantie, à

comprendre Duplé, s’impose s’agissant de mettre le Conseil en condition pour accomplir

559 N.DUPLÉ, préc., Note74, p.90.

560Id.

561A.B. FALL, préc., Note 112, p.58. 562 Id., p.59.

sa tâche consistant en la protection de la fonction de juger des juges contre la révocation arbitraire563.

L’article 192 de la Loi constitutionnelle de 2011 devrait être enfin modifié s’agissant de rendre le CSPJ plus efficace dans le cadre de l’accomplissement de sa mission par rapport aux pouvoirs publics. Ce qui signifie qu’il serait nécessaire de le détacher du rôle consistant à désigner trois de ses pairs pour représenter le pouvoir judiciaire dans le Conseil Électoral Permanent. Car un tel rôle serait d’autant plus politique qu’elle tendrait à nuire à l’apparence d’indépendance et d’impartialité dont les juges et tribunaux devraient faire preuve dans l’exercice du processus décisionnel. Puisque l’institution, dans le cadre du processus de désignation de ces membres, serait énormément exposée à l’influence pernicieuse des acteurs politiques qui chercheraient à les corrompre pour contrôler les éventuelles élections.

Concernant, troisièmement, les principes liés à l’organisation du pouvoir judiciaire, il importerait de reconsidérer notamment les règles posées à l’article 173 de la Constitution si bien que l’appareil judiciaire comprendrait formellement trois branches : soit 1) les juridictions judiciaires pour connaitre le litige privé; 2) les juridictions administratives pour trancher le litige public; 3) le tribunal constitutionnel pour, non seulement, trancher les questions relatives aux litiges constitutionnel, politique, mais contrôler la conformité des lois interprétées par le Parlement avec la Constitution. D’abord, il serait encore plus pertinent de prendre une telle mesure que l’intégration de la juridiction administrative (CsCCa) dans le système judiciaire représenterait, à notre avis, un véritable danger pour l’indépendance judiciaire. Parce que la Constitution prévoit la compétence de la Cour de cassation pour se prononcer sur les arrêts de la CsCCa pendant qu’elle reste silencieuse sur le degré d’indépendance dont doit bénéficier une telle juridiction.

Delà il y a lieu de se demander comment la Cour de cassation procède pour garantir à la fois l’indépendance des cours et tribunaux judiciaire et administratif si en principe, comme le prévoit, la Cour suprême canadienne, les deux types de juridictions ne sont pas appelés à jouir du même degré d’indépendance. Soit que, selon la Cour dans Océan Port Hotel, les

tribunaux judiciaires sont constitutionnellement obligés d’assurer les dimensions institutionnelles et individuelles d’indépendance et tel n’est pas le cas pour les tribunaux administratifs qui ne sont pas constitutionnellement séparés de l’exécutif. Puisqu’ils participent de ses instruments pour réaliser sa politique gouvernementale via le Parlement qui est compètent pour déterminer la composition et l’organisation susceptibles de leur

permettre d’exercer leur fonction564. D’où l’une des idées percutantes de la Cour:

« Même si certains tribunaux administratifs peuvent parfois être assujettis aux exigences de la Charte relatives à l’indépendance. Ce n’est généralement pas le cas. Ainsi, le degré d’indépendance exigée d’un tribunal administratif donné est fonction de l’intention du législateur et, en l’absence de contraintes constitutionnelles, il convient de respecter ce choix. »565

Comme le comprend encore la Professeure Nicole Duplé, les décisions des tribunaux administratifs sont liées à leur fonction juridictionnelle qui se rapporte au processus d’application de la loi, soit:« […] l’exigence d’indépendance devient considérablement plus élevée lorsqu’il s’agit des juges et des juridictions qui contrôlent la légalité des actes de ces mêmes « tribunaux administratifs.»566

De même, la création d’un tribunal constitutionnel, dotée éventuellement des compétences définies ci-dessus, serait un atout en ce qu’elle contribuerait à limiter les influences des pouvoirs publics sur les cours et tribunaux judiciaires. Notons que, dans ce cadre, la Loi constitutionnelle de 2011 a beau porter la création d’un Conseil constitutionnel, mais elle ne s’est pas véritablement attaquée au problème posé par l’organisation du pouvoir judiciaire. Pour formuler autrement, elle a préconisé le pouvoir du Conseil de décider des questions complexes de droit telles que contrôler la constitutionnalité de la loi, trancher le litige politique et les conflits éventuels entre les différents tribunaux. Pourtant, le Conseil est non seulement inactif, mais ladite loi ne touche pas à la problématique liée à la prérogative discrétionnaire du Parlement d’interpréter, au regard de la Constitution de 1987, les lois par voie d’autorité567.

564 Océan Port HotelLtd.c.Colombie britannique [2001]2R.C.S.781. 565 Id.

566 N.DUPLÉ, préc., Note74, p.88. Prière de noter que les guillemets sont de l’auteure. 567 Voir la Constitution., préc., Note 9, art.128.

Soit que, souverain, le parlement est susceptible de mettre en question l’effectivité de la légalité (rule of law) en interprétant la loi au point que le processus décisionnel soit soumis aux influences des pouvoirs publics qui s’attaqueraient au droit des citoyens à un procès équitable. En effet, se dégage dans le droit canadien de nombreuses réflexions doctrinales convergeant dans ce sens. Par exemple, selon les juristes Pierre Issalys et Denis Lemieux, la soumission de tous les citoyens à la loi requiert que la souveraineté du parlement soit limitée s’agissant de l’interprétation de la loi. En ce que le législateur est susceptible de changer cette situation et de décider que des règles diverses s’appliqueront relativement

aux justiciables568. De même, selon lesdits juristes, il peut décider: « que les mêmes lois

s’appliqueront différemment à certaines catégories de personnes, ou encore que différents tribunaux pourront trancher les litiges selon le statut juridique d’une partie»569.

Aussi, cette question fait l’objet de débats dans la doctrine juridique haïtienne. En effet, lors du célèbre Colloque International MICIVIH-PNUD tenu à Port-au-Prince, le constitutionnaliste Monferrier Dorval a reconnu que cette prérogative du parlement pose problème au point qu’il constitue un véritable obstacle à l’effectivité de la légalité. Autrement formulé, il limite le pouvoir des juges de décider équitablement des affaires

judiciaires570. D’où en effet l’idée du juriste Carré de Malberg Raymond cité par le

constitutionnaliste:« tout pouvoir institué est par essence limité et ne saurait être considéré

comme souverain.»571

De même, le juriste Léon Saint-Louis est d’avis que le législateur peut abuser de ses privilèges pour nuire au processus décisionnel, s’attaquant aux droits et libertés fondamentales des citoyens. En ce que, puisque la loi interprétative va incorporer la loi interprétée, le juge sera dans l’obligation de l’appliquer, et ce, sans tenir compte des dangers éventuels pour les droits et les libertés publiques. Et ce qui s’est en effet produit, selon ledit juriste, lors de l’interprétation de la loi prévue à l’article 295 de la Constitution de 1987 qui définit le cadre d’application des réformes dans l’administration publique et dans la Magistrature. Autrement dit, les juges allaient se conformer au vœu du parlement à

568Pierre ISSALYS et Denis LEMIEUX, préc., Note 328, p.1325. 569 Id.

570MISSION CIVILE INTERNATIONALE OEA/ONU, préc., Note 251, p.70.

571Carré de Malberg RAYMOND, Constitution à la théorie générale de l’État, p.616 in Chevalier, p.33, dans MISSION CIVILE INTERNATIONALE, id.

la lettre en appliquant la loi interprétée et les personnes, qui interviennent dans l’administration publique, ont assisté à la violation de leurs droits garantis par la

Constitution572.

Comme le démontre encore les juristes Pierre Issalys et Denis Lemieux, la prérogative du Parlement d’interpréter la loi avait été d’autant plus préoccupante dans le régime juridique canadien que les décideurs ont pris des mesures plus ou moins satisfaisante pour la

limiter573. En effet, la Charte canadienne, enchâssée dans la Loi constitutionnelle de 1982,

l’a atténuée en ce qu’elle a prévu de façon nette et claire que les droits à l’égalité qu’elle

consacre prime toute loi postérieure à son adoption574. Et ce principe, pour reprendre

lesdits juristes, s’étend, depuis 1986, aux lois adoptées antérieurement575. De même, la

Charte, pour les reprendre, est allée encore plus loin576 en ce qu’elle porte que tout doute,

dans le cadre de l’interprétation de la loi, doit être profitable au justiciable»577.Ce qui fait

dire aux deux juristes que: « [la Charte] assujettit expressément le gouvernement et ses mandataires à son application»578.

S’agissant en effet du régime juridique haïtien, la solution à cette difficulté peut être différente considérant notamment ses particularités par rapport à celui de l’État canadien. Mais, à notre avis, il serait nécessaire d’implanter une Cour constitutionnelle et lui reconnaitre entre autres le pouvoir de contrôler la constitutionnalité de la loi interprétée avant qu’elle ne soit publiée. Un tel contrôle serait encore plus efficace qu’il favoriserait l’effectivité de la légalité et inspirerait confiance à la société ; parce que ladite Cour se poserait comme un simple arbitre indépendant qui déciderait de la conformité de ladite loi à la Constitution, contrairement au législateur qui se révèle à la fois juge et partie (il est compétent pour interpréter la loi qu’il avait lui-même adoptée).

Du reste, condition sine qua non pour un véritable État de droit, l’indépendance judiciaire s’impose dans le droit international et l’État qui incarne la souveraineté doit prendre les

572 L.SAINT-LOUIS, préc., Note 377, p.17.

573 P. ISSALYS et D. LEMIEUX, préc., Note 328, p.1327. 574Charte, préc., Note 319, art.7.

575 P. ISSALYS et D. LEMIEUX, préc., Note 328. 576Id.

577Charte, préc., Note 319, art.1.

mesures susceptibles d’en assurer la garantie. Il s’agit surtout de poser les garanties constitutionnelles ou statutaires tel que les juges et tribunaux interprètent la règle de droit nationale conformément aux balises internationales de l’indépendance judiciaire. Ce qui signifie que les garanties constitutionnelles ou statutaires de la fonction judiciaire doivent être prévues au point que les juges jouissent de l’indépendance institutionnelle et individuelle des juges. Cependant, l’étude des règles juridiques, dans lesquelles sont définies les garanties de la fonction judiciaire en Haïti, n’est pas moins révélatrice, en ce qu’elles contiennent de nombreuses lacunes facilitant la dépendance du pouvoir judiciaire des pouvoirs publics. Aussi, les ingérences des pouvoirs publics dans le processus décisionnel sont d’autant plus néfastes qu’elles sont défavorables à l’effectivité d’une justice efficace dans la société. De ce fait, dans le cadre d’une véritable réforme, la modification de la Constitution s’imposerait pour, d’une part, adapter les règles juridiques relatives à l’indépendance judiciaire aux principes universels. Et, d’autre part, repenser l’organisation du pouvoir judiciaire tel que le système judiciaire se composerait de trois grandes branches : soit les tribunaux judiciaires et administratifs pour trancher respectivement le litige privé et public; et une Cour constitutionnelle pour décider des questions constitutionnelles, politiques et contrôler la conformité de la loi interprétée, par le législateur, avec la Constitution.

CONCLUSION

Somme toute, aucun régime juridique ne peut prétendre, à l’ère de la mondialisation, résoudre les problèmes confrontés en matière d’indépendance judiciaire sans référence aucune aux balises internationales. Ce qui sous-tend que, s’agissant de trouver une solution à la problématique de l’indépendance judiciaire, le régime juridique haïtien ne saurait passer outre les balises internationales et certaines mesures prises dans les grandes institutions judiciaires internationales pour garantir ledit principe. En fonction de ce postulat, nous sommes partis des balises internationales de l’indépendance judiciaire pour poser le problème des règles juridiques liées à l’indépendance judiciaire en Haïti. Ce faisant, nous avons utilisé deux illustrations nationales assurant la mise en œuvre des balises internationales, soit les régimes juridiques français et canadien. Toutefois, le droit canadien a été notre étalon de mesure pour proposer les pistes de solution au problème constaté sur le terrain étant donné qu’il s’est posé comme le régime juridique qui a mis spécifiquement en œuvre les instruments internationaux utilisés pour mener cette recherche.

En effet, on a voulu répondre à la question posée dans l’introduction : est-ce que les règles juridiques sont susceptibles de garantir, tel qu’elle est prévue dans les balises universelles, l’indépendance judiciaire? En guise de réponse, on pourrait répondre que les règles juridiques liées à la fonction des juges haïtiens comportent de nombreuses lacunes nuisant à l’indépendance judiciaire. Concernant l’hypothèse, nous avons supposé que les lacunes des règles juridiques qui garantissent l’indépendance judiciaire peuvent être un facteur explicatif de la problématique du dysfonctionnement des institutions judiciaires haïtiennes en facilitant les ingérences des pouvoirs publics dans le processus décisionnel.

Cette hypothèse a certes été vérifiée positivement. Toutefois, il se révèle nécessaire de présenter ici les grandes idées permettant de la confirmer. En effet, les règles juridiques qui garantissent l’indépendance judiciaire en Haïti participent énormément de cette problématique. Soit qu’elles portent certaines conditions liées à l’indépendance institutionnelle et individuelle des juges qui sont révélées inopérantes dans la pratique

judiciaire. Concernant d’abord l’inamovibilité (la seule condition essentielle de la fonction judiciaire prévue par la Constitution), les pouvoirs exécutif et législatif abusent des prérogatives discrétionnaires dans le cadre de la sélection et de la nomination des juges si bien que beaucoup de juges sont nommés et révoqués souvent arbitrairement.

Ensuite, le législateur a beau poser, à défaut des balises constitutionnelles, les conditions