2.2 Stabilisation interf´ erom´ etrique, m´ ethode analogique
2.2.2 Verrouillage en phase de deux impulsions
Franges spectrales
Le verrouillage de phase entre deux impulsions visibles engendr´ees par un interf´erom`etre est r´ealis´e en pla¸cant un miroir d’un des bras de l’interf´erom`etre sur une cale pi´ezo´electrique (PZT). La tension de commande de PZT doit ˆetre telle que les mouvements de la cale compensent `a chaque instant les fluctuations de l’air, les vibrations et dilatations du montage interf´erom´etrique, etc. Pour stabiliser le d´elai τ entre deux impulsions, il faut donc pouvoir g´en´erer un signal d’erreur qui refl`ete les variations de la diff´erence de chemin optique c · τ (t) dans l’interf´erom`etre et fabriquer `a partir de ce signal d’erreur une tension de commande pour PZT.
Le signal de r´etroaction analogique, amplifi´e (0-1000 V) pour alimenter la cale pi´ezo´elec- trique de course 3 µm (∼ 10 fs) plac´ee sur notre interf´erom`etre visible, ´etait obtenu sur le montage originel comme indiqu´e figure 2.15.
Les franges d’interf´erences spectrales entre les deux faisceaux visibles colin´eaires sont dispers´ees spatialement avec un r´eseau. Nous mesurons, avec une photodiode Q, l’intensit´e lumineuse Qλ0(τ (t)) `a la longueur d’onde λ0. Le signal `a une longueur d’onde pr´ecise λ0 est
τ
Ti:Sa
PZT
Franges spectrales Réseau Fente Signal d’erreur 340 350 360 370 380 390 400 Fréquence [THz] « niveau » Ligne à retardQλ(τ(t))
0Q
: signalFig. 2.15 – Utilisation des franges spectrales du laser visible (Ti:Sa) pour une stabilisation du d´elai τ entre les deux impulsions colin´eaires. PZT = cale pi´ezo´electrique - Q = photodiode. Les franges spectrales obtenues peuvent ˆetre filtr´ees `a une longueur d’onde λ0 fix´ee `a l’aide d’une fente.
Le signal d’erreur ainsi obtenu est alors utilis´e pour fabriquer la tension de commande de PZT et asservir τ `a une valeur donn´ee (point •).
s´electionn´e en pla¸cant une fente devant la photodiode Q :
Qλ0(τ ) ∝ 1 + cos(2πc/λ0)τ. (2.11)
Le d´elai τ = τ (t) est une fonction du temps refl´etant les fluctuations de chemin optique de l’interf´erom`etre que l’on cherche `a stabiliser. Il existe alors diff´erentes techniques pour r´ealiser le verrouillage en phase des deux impulsions.
1. Verrouillage dynamique : On peut faire osciller PZT `a une fr´equence f (ce qui corres- pond `a un τ (t) domin´e par cos(2πf t)). Le signal d’erreur est fourni par une d´etection synchrone qui d´emodule `a f le signal de la photodiode Q. Ce signal est nul pour des positions de PZT correspondant `a une d´eriv´ee nulle des franges spectrales. Un as- servissement utilisant ce signal d’erreur est donc un asservissement en phase ou en opposition de phase des deux impulsions visibles [98] selon le choix du signe du gain du syst`eme d’asservissement. La soustraction d’une constante `a la d´eriv´ee obtenue permet ´evidemment de s’asservir en fait `a n’importe quelle position, `a l’exception des voisinages des points d’inflexion de l’interf´erogramme (asservissement en quadrature `a ±π
2).
2. Verrouillage statique : Le signal d’erreur est alors simplement fabriqu´e par la soustrac- tion d’une valeur constante r´eglable (niveau) au signal de la photodiode [100].
C’est cette seconde option qui a ´et´e choisie pour la r´ealisation du montage initial, en collaboration avec Lionel Canioni et Bruno Bousquet du CPMOH `a Bordeaux. Apr`es la soustraction de niveau, un signal d’erreur positif conduit `a un mouvement de PZT dans
un sens, un signal d’erreur n´egatif induit un mouvement dans l’autre sens. Ainsi des deux points d’´equilibre par pseudo-p´eriode du signal Qλ0(τ ) o`u le signal d’erreur est nul, l’un est
stable , l’autre instable. La position de PZT est ainsi asservie `a une position arbitraire. Cette position, qui correspond `a une valeur pr´ecise de τ (c’est-`a-dire une valeur pr´ecise de la phase relative ∆φ entre les deux impulsions) est choisie par niveau.
Remarquons que la valeur choisie par niveau doit n´eanmoins se trouver `a une posi-
tion de d´eriv´ee non nulle sur la courbe Qλ0(τ ) pour pouvoir obtenir un signal d’erreur qui
permette un mouvement dans les deux sens. La qualit´e de l’asservissement sera d’autant meilleure que cette d´eriv´ee est grande. Autrement dit, cette m´ethode est efficace pour une diff´erence de phase temporelle ∆φ12entre les deux impulsions autour de π
2, inapplicable pour
un verrouillage en phase ∆φ = 0 ou en opposition de phase ∆φ = π.
Limitations Comme le montre la figure 2.16, cette technique est de plus en plus difficile `
a appliquer aux grand d´elais o`u les franges, espac´ees de 2π/τ , se rapprochent. La taille de la fente utilis´ee et sa distance au r´eseau d´eterminent donc la r´esolution spectrale pour la d´etection des franges, c’est-`a-dire le plus grand d´elai accessible.
740 760 780 800 820 840 860 880
τ=1 ps
τ=6 ps
Longueur d'onde [nm]
Fig. 2.16 – Limites de la stabilisation par franges spectrales : le contraste des franges chute `a grands d´elais.
Par ailleurs, des fluctuations de puissance de la source femtoseconde peuvent fausser le syst`eme.
Enfin, dans le cas d’un asservissement statique utilisant le signal de l’´equation 2.11, le pas temporel d’´echantillonnage ∆τ est n´ecessairement un multiple de la p´eriode optique T0, correspondant `a une longueur d’onde λ0 `a l’int´erieur du spectre du laser. Autrement
dit, la fr´equence d’´echantillonnage Ω´ech = ∆τ2π est dans le spectre du laser. Nous expliquons
dans l’annexe B qu’un signal dont le support spectral est celui du spectre du laser (par exemple un interf´erogramme temporel caract´erisant la source laser) ne sera jamais correcte- ment ´echantillonn´e dans ce cas.
Nous avons donc opt´e pour une technique utilisant une r´ef´erence stable et ind´ependante : une diode laser de longueur d’onde λdiode. Le faisceau de la diode se propage dans l’in-
terf´erom`etre en sens inverse du faisceau visible issu de l’oscillateur Ti:Sa comme indiqu´e figure 2.17. Franges temporelles τ
λdiode
Q1Ti:Sa
τ τ Signal d’erreur PZT Franges temporelles « niveau »Fig. 2.17 – Sch´ema exp´erimental pour la stabilisation et le contrˆole d’un interf´erom`etre (d´elai τ ) au moyen d’une diode laser contrapropageante de longueur d’onde λdiode. Le signal d’erreur est obtenu par la soustraction de niveauau signal Q1(τ ). Les points d’´equilibre stable y sont signal´es par
des disques, les points d’´equilibre instable sont signal´es par des cercles. La photodiode Q1 d´etecte des franges temporelles
Q1(τ ) ∝ 1 + cos(2πc/λdiode)τ (2.12)
o`u le d´elai τ = τ (t) est une fonction du temps. Ces franges peuvent servir de nouveau signal de r´etroaction pour la cale pi´ezo´electrique [101].
Le d´elai maximal accessible n’est plus limit´e par la r´esolution spectrale du syst`eme comme dans le cas pr´ec´edent mais par la longueur de coh´erence (li´ee `a la largeur spectrale) de la diode laser.
La stabilisation statique du signal par cette technique fournit un d´elai τ (τ2 dans l’exp´e-
rience de spectroscopie bidimensionnelle de la section 3.2) connu `a mieux que
δτ ∼ λdiode/(c.20) ∼ 0.1 fs (∼ 30 nm). (2.13)
Cette pr´ecision13, `a comparer avec la stabilit´e requise de l’´equation 2.10, donne une
pr´ecision meilleure que 12π sur la diff´erence de phase temporelle ∆φ14 entre deux impulsions
`
a 800 nm.
13. estim´ee en utilisant la trace d’une figure de Lissajous sur une oscilloscope voir page 75 14. Les fluctuations sur la diff´erence de phase entre les impulsions sont bien sˆur donn´ees par
δ[∆φ(λTi:Sa)] = 2π · δτ
λTi:Sa
D´etection des franges temporelles : photodiodes Les franges temporelles des sources continues d´ecrites section 2.1.3 sont d´etect´ees par des photodiodes optimis´ees en collabo- ration avec Xavier Solinas (LOB). Il s’agissait de trouver un compromis entre une bande passante de l’ordre de 15 kHz (n´ecessaire pour suivre toutes les variations des franges tem- porelles) et un gain suffisant pour d´etecter un faisceau de quelques microwatts dans le cas du syst`eme `a 980 nm (section 2.2.5 page 89). Pour faciliter le traitement des signaux en- suite fournis `a l’´electronique d’acquisition ou de comptage, ces photodiodes sont ´equip´ees d’un gain variable et d’une soustraction d’une tension constante avant l’amplification, tr`es utiles pour les franges de faible contraste sur fond continu `a 980 nm. Enfin, pour limiter les effets spatiaux de perte de contraste des franges temporelles (dus `a un mauvais alignement mais aussi `a un mouvement de translation imparfait de la cale pi´ezo´electrique), les faisceaux continus sont focalis´es sur des surfaces de d´etection que nous avons choisies aussi grandes que le bruit de la lumi`ere ambiante le permettait.