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D’après les lignes directrices des bonnes pratiques en modélisation, la validation des modèles devrait inclure une comparaison entre modèles indépendants et, si possible, une comparaison avec des données externes (157). Dans notre étude, nous avons comparé les prédictions des effets populationnels de la vaccination contre les VPH provenant de 16 modèles mathématiques dynamiques indépendants. Bien que ces modèles aient été développés pour divers pays, qu’ils varient dans leur structure et qu’ils aient été calibrés avec des données différentes, les prédictions des modèles s’accordent sur les résultats suivants :

- La vaccination des filles seulement a un impact élevé chez les femmes ;

- La vaccination des filles seulement produit une immunité de groupe importante chez les femmes et chez les hommes, même pour une basse couverture vaccinale ; - Les effets de l’immunité de groupe engendrés par la vaccination des filles seulement

sont plus élevés et apparaissent plus vite pour les VPH-18, 6 et 11 que pour le VPH- 16 ;

- Pour un nombre équivalent d’individus vaccinés, augmenter la couverture chez les filles donne de meilleurs effets populationnels qu’inclure les garçons dans les programmes de vaccination ;

- Atteindre une couverture vaccinale élevée (80%) chez les filles et les garçons pourrait permettre d’éliminer le VPH si le vaccin confère une protection à long terme.

Lorsque la couverture vaccinale est élevée, la variabilité entre les prédictions est très faible. Cependant, la variabilité augmente lorsque la couverture vaccinale est basse ou que la durée de protection du vaccin est de 20 ans. Les résultats de la méta-régression ont montré que les prédictions d’efficacité populationnelles de la vaccination étaient significativement plus élevées parmi les modèles qui ne sont pas stratifiés pour l’activité sexuelle, dans lesquels l’immunité naturelle chez les femmes est basse et/ou qui incluent l’histoire naturelle du cancer du col de l’utérus.

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Premièrement, il est connu que le nombre de partenaires sexuels est très hétérogène dans la population; cela a conduit la majorité des modèles développés pour prédire les effets des interventions contre les infections transmises sexuellement à inclure différents niveaux d’activité sexuelle. Dans les modèles qui ne sont pas stratifiés pour l’activité sexuelle, le nombre de partenaires sexuels est homogène dans la population. Ces modèles ne tiennent pas compte de l’hétérogénéité dans l’activité sexuelle et cela peut mener à une surestimation de l’efficacité populationnelle de la vaccination. En effet, les individus qui ont un niveau d’activité sexuelle élevée et qui sont infectés, ont plus de partenaires et peuvent donc transmettre l’infection à un plus grand nombre d’individus. Par conséquent, le R0 est plus grand dans les niveaux d’activité sexuelle élevée. Un R0 plus élevé rend le virus plus difficile à contrôler par la vaccination. La vaccination est donc moins efficace dans les niveaux d’activité sexuelle élevée et cela diminue l’efficacité populationnelle globale de la vaccination. Les modèles stratifiés pour l’activité sexuelle, qui considèrent l’activité sexuelle élevée de certains groupes, prédisent donc des réductions de la prévalence du VPH plus faibles avec la vaccination que les modèles qui ne sont pas stratifiés pour l’activité sexuelle.

Deuxièmement, dans les modèles où l’immunité naturelle est basse, les individus redeviennent susceptibles juste après ou peu de temps après avoir éliminé l’infection. À l’inverse, dans les modèles où l’immunité naturelle est haute, les individus deviennent immunisés après avoir éliminé l’infection. Ils ne peuvent donc plus contracter ni transmettre l’infection et ne participent donc plus à la transmission. Puisqu’une partie de la population est immunisée et ne participe plus à la transmission des VPH, ces modèles requièrent une activité sexuelle, une probabilité de transmission et une durée d’infection plus grandes afin d’atteindre la prévalence observée dans la population. L’augmentation de ces paramètres a pour effet d’augmenter le R0. Comme précédemment, lorsque le R0 est plus élevé, la vaccination est moins efficace. Les modèles où l’immunité naturelle est haute prédisent donc des réductions de la prévalence du VPH plus faibles avec la vaccination.

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Troisièmement, dans les modèles qui n’incluent pas l’histoire naturelle du cancer du col de l’utérus, les individus peuvent uniquement être infectés; alors que dans les modèles qui incluent l’histoire naturelle, les individus peuvent également développer des lésions précancéreuses (CIN1/2/3) puis un cancer. Les personnes qui développent des lésions précancéreuses et un cancer sont toujours infectées. La durée d’infection peut ainsi être beaucoup plus longue dans les modèles qui incluent l’histoire naturelle du cancer du col de l’utérus. Une plus longue durée d’infection signifie que, pour atteindre la prévalence observée dans la population, les modèles qui incluent l’histoire naturelle requièrent un taux d’incidence plus faible dans les groupes d’âges plus élevés (par exemple, les femmes > 30 ans), car une partie des individus infectés le sont depuis longtemps. Un taux d’incidence plus faible dans les groupes d’âges plus élevés fait que les modèles qui incluent l’histoire naturelle du cancer du col de l’utérus prédisent des réductions de la prévalence du VPH plus élevées.

De plus, bien que les résultats étaient rarement significatifs, la méta-régression a également montré que les prédictions étaient plus élevées parmi les modèles qui incluent la probabilité de transmission par acte. Le type de probabilité de transmission (par acte ou partenariat) est lié à la façon de modéliser les partenariats. De manière générale, la probabilité de transmission est modélisée par partenariat dans les modèles où les partenariats sont instantanés et la probabilité de transmission est modélisée par acte dans les modèles qui tiennent compte de la durée des partenariats. La façon de modéliser les partenariats a un impact sur les prédictions du modèle. Dans les modèles qui tiennent compte de la durée des partenariats, les membres d’un partenariat dans lequel au moins un des deux est infecté peuvent continuellement se réinfecter l’un l’autre. Alors que dans un modèle où les partenariats sont instantanés, la réinfection par un même partenaire est impossible. De plus, le délai entre deux partenariats successifs est plus long dans les modèles où les partenariats sont instantanés (Annexe V). Ces deux éléments (réinfection impossible et plus long délai entre deux partenariats) font que les modèles où les partenariats sont instantanés requièrent une activité sexuelle, une probabilité de transmission et/ou une durée d’infection plus grande afin de pouvoir atteindre la prévalence observée dans la population. L’augmentation de ces paramètres a pour effet de rendre la vaccination moins efficace, les modèles où les

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partenariats sont instantanés prédisent donc des réductions de la prévalence du VPH plus faibles avec la vaccination.

Les différents résultats de la méta-régression sont en accord avec les connaissances actuelles sur les maladies infectieuses et avec les résultats d’une étude portant sur l’impact des hypothèses de structures sur la modélisation de l’efficacité populationnelle de la vaccination contre les VPH (169).

Bien que la comparaison avec des données externes ne fait pas partie des objectifs de cette étude, nos résultats sont en accord avec les résultats d’une méta-analyse portant sur l’efficacité populationnelle de la vaccination observée depuis l’introduction des programmes de vaccination : une importante immunité de groupe est observable, peu de temps après la mise en place des programmes de vaccination, dans les pays où la couverture vaccinale est élevée (10). De plus, deux modèles inclus dans notre étude ont démontré qu’ils reproduisaient fidèlement la réduction de la prévalence du VPH-16 et le nombre de consultations pour les condylomes dans les cinq premières années suivant la mise en place du programme de vaccination en Australie (195, 207).

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