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2.3 Résultats

2.3.4 Valeurs mélodiques des cibles tonales

Les valeurs moyennes def0 pour les trois cibles tonales L1, H et L2 sont montrées dans la g. 2.13. Pour les deux locuteurs, l'excursion des mouvements montants-descendants de f0 est plus importante dans les questions que dans les armations. Chez DD, cela se réalise surtout par une baisse des valeurs de L1 et L2 dans les questions par rapport aux valeurs correspondantes dans les armations. En particulier, les valeurs mélodiques moyennes de L1 et L2 sont respectivement de 109 Hz et de 100 Hz dans les armations, et de 87 Hz et 91 Hz dans les questions. La valeur mélodique de H était de 145 Hz dans les deux modalités intonatives. Chez AS, L1 et H sont respectivement plus bas et plus élevés dans les questions que dans les armations. Spéciquement, L1 et H étaient à 161 Hz et à 189 Hz dans les armations ; et à 143 Hz et à 201 dans les questions. La valeur de L2 était d'environ 143 Hz dans les armations ainsi que dans les questions. De plus, la classe consonantique semble jouer un rôle non seulement dans la détermination de la valeur de L1, mais aussi de H et de L2. En particulier, l'accent montant LH dans son

ensemble semble être plus élevé lorsque l'attaque consonantique est nasale, qu'en présence de la liquide ou de l'obstruante, surtout chez le locuteur DD. La valeur de L2 semble plus stable, bien que la g. 2.13 suggère que dans les questions de DD, il y a un eet de la classe consonantique même sur cette cible.

Les analyses statistiques conrment nos observations. L'ANOVA omnibus du modèle de régression, eectué sur L1 montre un eet signicatif de la modalité intonative pour DD [F(1,64) = 304.71 ; p < .01] et AS [F(1,69) = 230.56, p < .01]. Cela conrme les résultats déjà trouvés par D'Imperio (2000). Cependant, l'ANOVA suggère aussi que la classe consonantique peut inuencer la valeur de L1, car l'eet principal de la classe est signicatif chez DD [F(1,64) = 0.04 ; p < .01] et il est près du niveau de signicativité chez AS [F(1,64) = 3.51 ;p = .03]. Les interactions ne sont pas signicatives.

L'analyse de régression va mieux nous éclaircir sur l'existence de contrastes parmi les niveaux. En premier lieu, la diérence de hauteur de L1 liée à la manipulation de la modalité intonative est signicative pour les deux locuteurs et pour les trois classes de consonnes. L1 est donc plus bas dans les questions que dans les armations en présence de la nasale (DD :t = - 10.41,p< .01 ; AS : t = - 7.8, p< .01), de la liquide (DD : t = -9.93,p< .01 ; AS :t = - 8.83,p< .01) et de l'obstruante (DD :t= - 2.74,p< .01 ; AS : t

= - 9.28, p< .01). Cependant, la grandeur de l'eet dépend de la modalité intonative et du locuteur. La cible L1 est signicativement plus élevée avec la nasale qu'avec la liquide, indépendamment de la modalité intonative chez DD (t = 3.5, p< .01). Chez AS, il n'y a pas de diérences liées à la classe consonantique dans les armations, mais L1 est plus bas avec l'obstruante qu'avec la nasale dans les questions (t = - 3.2, p < .01). Cela explique la raison pour laquelle l'eet de la classe consonantique dans l'ANOVA omnibus a un p de .03, car la baisse du valeur mélodique de L1 est plus importante uniquement avec les obstruantes.

L'ANOVA eectuée sur H nous montre aussi que la manipulation de la modalité intonative est signicative pour AS [F(1,69) = 52.65, p < .01] mais pas pour DD. Le résultat obtenu pour AS est similaire à d'autres découvertes dans de nombreuses langues, selon lesquelles l'augmentation de la fréquence fondamentale, et particulièrement celle du

pic accentuel, est employée pour signaler les questions (Gussenhoven, 2004)10. L'absence d'eet de modalité sur le pic accentuel dans les énoncées de DD n'est pas surprenant, car il est peut-être le résultat d'un rehaussement de l'accent mélodique dans les armations suite à la double focalisation de ces énoncés (par. 2.2.2). La classe consonantique est elle aussi signicative uniquement pour AS [F(1,69) = 52.65,p< .01]. Il n'y a pas d'interaction entre les deux facteurs. L'analyse de regression montre que l'eet de modalité chez AS n'est pas le même selon les classes consonantiques : le H est plus élevé dans les questions que dans les armations seulement lorsque l'attaque consonantique est une consonne nasale (t = 5.84,p < .01) ou une liquide (t = 4.42, p< .01), tandis qu'il n'y a pas d'eets avec l'obstruante (t = 2.23,p = .02). Les diérences inter-classes, à leur tour, sont diérentes selon la modalité intonative : dans les armations la valeur du H est indépendante de la classe, mais dans les questions, H est plus élevé en présence d'une nasale que d'une obstruante (t = 3.72,p < .01).

En ce qui concerne la valeur mélodique de L2, les deux facteurs expérimentaux sont signicatifs uniquement chez le locuteur DD (g. 2.15) : L2 est plus bas dans les questions que dans les armations [F(1,64) = 304.71, p < .01] et l'eet principale de la classe consonantique est signicatif [F(2,64) = 6.09, p < .01]. Aucun eet signicatif n'a été trouvé chez AS. L'eet de modalité chez DD est en réalité signicatif seulement lorsque l'attaque consonantique est une consonne liquide (t = - 6.46, p < .01) ou obstruante (t

= -6.58, p < .01), mais ils ne sont pas signicatifs avec la consonne nasale (t = -2.05, p < .01). De plus, l'eet de la classe consonantique est signicatif uniquement dans les questions, car L1 tend à être plus basse avec un attaque consonantique nasal que liquide (t = -4.11, p < .01) ou obstruant (t = -6.35, p < .01).

Pour résumer jusqu'ici, les valeurs de L1 sont plus basses dans les questions que dans les armations chez les deux locuteurs, ce qui conrme les résultats de D'Imperio (2000).

De plus, les valeurs mélodiques de L1 sont plus élevées en présence d'une consonne nasale en position d'attaque syllabique. Les eets segmentaux sur H et L2, bien que petits et incohérents parmi les locuteurs, soutiennent l'hypothèse que les eets microprosodiques peuvent s'appliquer sur de longues distances.

10. D'Imperio (2000) a trouvé qu'en napolitain le pic def0peut être plus élevé dans les armations à focalisation étroite que dans les questions lorsque les armations sont lues sous emphase.

Nous allons maintenant détailler les résultats de l'analyse de l'excursion tonale entre L1 et H et entre H et L2. En fait, dans le paragraphe précédent, nous avons émis l'hypothèse que le temps de la montée est plus important dans les questions des deux locuteurs, car la diérence mélodique entre L1 et H est plus importante dans cette modalité intonative.

Nos analysent nous conrment, en fait, un eet signicatif de la modalité sur l'excursion tonale pour DD [F(1,64) = 6.77, p< .01] et pour AS [F(1,69) = 394.9, p < .01]. Un eet signicatif de modalité a été trouvé aussi pour l'excursion tonale entre H et L2, chez DD [F(1,64) = 22.53, p < .01] et chez AS [F(1,69) = 66.77, p < .01]. Les eets de la classe consonantique de l'attaque et les interactions ne sont pas signicatifs, ni dans l'ANOVA ni dans la régression.