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2 Valeurs foncières et distances sociales : l'espace résidentiel parisien

Cette étude, menée en 1992-1993, a bénéficié d'un financement de l'Université de Paris 1, dans le cadre du programme interdisciplinaire "Paris", lancé au printemps 1991 par le président Georges Haddad, et piloté par le service Epicure. Cela m'a permis de disposer pendant 3 mois d'une stagiaire ENSAE, qui a assuré la construction de la base, et quelques exploitations statistiques, au printemps 1992. Au cours de l'hiver 1993, 2 étudiants du DESS de "Techniques de décisions dans l'entreprise" de Paris 1 ont effectué les premières analyses de données sur l'année 1982, que j'ai ensuite prolongé sur 1990 au printemps 1993. Elle a donné lieu fin 1993 à publication provisoire sous la forme d'un Cahier du C3E (U19 / [93-9]) qui a tenu lieu de compte-rendu de recherche auprès de la présidence de Paris 1. Cette étude connaîtra en 1995 des prolongements, dans le cadre d'une collaboration avec Smaïl Ibbou, allocataire-moniteur au SAMOS, et qui a travaillé au second semestre 1993 sur l'étude DHV/DREIF présentée plus loin (section III ci-dessous).

1°) L'espace immobilier francilien : une analyse statistique

a) La base IMORIF :

La base porte sur 2 années (1982 et 1990), et 75 zones de l'Ile de France, formées des 20 arrondissements parisiens et de 55 regroupements de communes. Elle comporte des données relatives au marché du logement, au marché des bureaux, au profil socio-économique des zones étudiées, ainsi qu'à leur profil "urbain" (indicateurs de centralité). On a mobilisé les techniques traditionnelles d'analyse de données (ACP et CAH) pour obtenir une description raisonnée de l'espace immobilier d'Ile de France. Compte tenu du contenu de la base, la typologie obtenue repose sur la relation entre niveaux de prix et composition sociale.

b) L'espace parisien

Dans Paris intra-muros, le phénomène massif est l'explosion de la catégorie des cadres, et la tendance à l'extinction de la population ouvrière dans tout l'Ouest et le centre. Il n'y a pas pour autant homogénéisation de l'espace parisien, qui reste marqué par une forte différenciation entre l'est et l'ouest : mais à l'ancienne opposition entre cadres et chefs d'entreprises d'un côté, ouvriers et employés de l'autre, héritée des trente glorieuses, se substitue une opposition entre les premiers et les professions intermédiaires (notamment celles de la fonction publique). Les salariés qualifiés des services publics (éducation, santé, police) prennent la place des ouvriers. Si une forte différenciation sociale de l'espace se maintient donc, il y a par contre homogénéisation accélérée des arrondissements centraux (1° à 9°), dont le type de peuplement et la qualité du patrimoine immobilier tendent à s'aligner

sur ceux des 5° et 6°, depuis longtemps terres d'accueil des cadres et professions intellectuelles supérieures.

c) Paris et ses banlieues

L'opposition entre Paris et banlieues relève d'une triple dimension :

- la première est une dimension socio-économique, qui oppose les beaux quartiers aux quartiers populaires ; la hiérarchie des valeurs foncières et immobilières s'y trouve complètement confondue avec celle des groupes sociaux (CSP INSEE).

- la seconde est une dimension géographique, qui oppose l'espace parisien central (1° et 2° arrondissements) aux périphéries lointaines (Aulnay, Chatou).

- une troisième dimension fait apparaître l'âge et la nationalité des habitants (et accessoirement le taux d'activité) comme variables structurantes de l'espace.

2°) Une classification :

A partir des résultats des ACP, on a cherché à établir un classement des 75 zones IMORIF. Un certain nombre de banlieues ont un classement incertain, qui s'avère très sensible au découpage de la périphérie, à la présence ou non des arrondissements parisiens, et à la liste des variables retenues. Mais le classement des arrondissements parisiens est par contre assez clair, et très stable.

Sur Paris intra-muros, on discerne en 1990 cinq classes :

- les quartiers résidentiels intermédiaires : 12°, 13°, 14°, 15° et 17° ; - les quartiers d'habitat populaire : 10°, 11°, 18°, 19°, 20° ;

- le centre historique : arrondissements 1 à 5 ; - les quartiers bourgeois : 6°, 7°, 16° ;

- les quartiers d'affaires : 8° et 9°.

Lorsqu'on met ensemble Paris et les zones de banlieue, dans une classification en huit groupes, on obtient trois classes parisiennes :

- Paris bourgeois, - Paris centre, - Paris intermédiaire,

et cinq classes de banlieues, caractérisables comme :

- banlieues bourgeoises,

- banlieues intermédiaires supérieures, - banlieues intermédiaires,

- banlieues ouvrières, - banlieues dégradées.

3°) Comportements résidentiels et formation des prix : quelques résultats économétriques

On a cherché d'une part quelles étaient les variables socio-économiques les plus explicatives des prix, d'autre part quelles étaient les variables explicatives de la localisation de chaque catégorie sociale.

a) Prix du sol et différenciation sociale

En l'absence des indicateurs de composition sociale, le prix des logements anciens dépend positivement de la taille des logements et négativement du taux d'occupation. Dès qu'on introduit les variables de composition sociale, les autres variables disparaissent, et le prix des logements dépend positivement de la proportion de cadres et de chefs d'entreprise parmi les actifs, et négativement de la proportion d'étrangers dans la population.

b) Marché immobilier et localisation des groupes sociaux

On fait ressortir deux modèles bien distincts de localisation des cadres et des ouvriers. Les premiers sont "attirés" par les équipements culturels, la présence des chefs d'entreprise, l'orientation sud-ouest, et "repoussés" par les logements sociaux.

Les seconds sont, quant à eux "repoussés" par la présence des cadres et l'orientation ouest (ce qui correspond implicitement à un effet prix), et "attirés" par l'habitat pavillonnaire, la part des étrangers et celle des HLM dans le parc de résidences principales.

Ces différents résultats ont été présentés en avril 1993 aux entretiens de la Villette consacrés à la ville, dans le cadre d'un atelier d'une demi-journée sur la "Cartographie socio-économique de Paris". Un article de synthèse est en cours de rédaction.

SECTION II LES RETOURNEMENTS DU MARCHE