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Utilisation des images satellitaires de très haute résolution

CHAPITRE 4. UTILISATION DE L’IMAGERIE SATELLITAIRE DANS LA

4.2 Détection et cartographie rapide de dommages Etat de l’art

4.2.2 Utilisation des images satellitaires de très haute résolution

Les images de très haute résolution, apparues à la fin des années 90, ont permis le passage de l’analyse au niveau d’une zone à l’analyse au niveau d’un élément seul, tel qu’un bâtiment. Des éléments encore plus petits, tels que des voitures, peuvent également être aujourd’hui distingués. Cette possibilité de reconnaissance du détail du bâti offre ainsi la possibilité d’une cartographie rapide des dommages post-catastrophe, avec un niveau plus élevé de précision et fiabilité.

L’imagerie à très haute résolution a été utilisée notamment pour l’étude du séisme de Bhuj (Inde) en 2001. Une exploitation des images en provenance du satellite IKONOS appliquées à la cartographie et à l’estimation de dommages sera par ailleurs présentée plus loin dans ce chapitre (c. f. § 4.3).

Dans un premier temps, nous présentons une étude réalisée à l’aide d’une simulation multitemporelle SPOT 5, c’est à dire des images SPOT avec une résolution réduite à 2,5m (André et al, 2001 ; André, 2002 ; GSC, 2001). La méthode utilisée est basée sur l‘exploitation d’une image antérieure au séisme fournie par KVR 2000 et d’une image IKONOS postérieure, toutes les deux ayant subi une dégradation de leur résolution spatiale initiale pour simuler la résolution de SPOT 5. Plusieurs méthodes classiques de détection multitemporelle des changements ont été essayées, telle que la comparaison automatique des réflectances, les différences radiométriques ou encore l’analyse des contours.

Figure 4.2 Comparaison des profils radiométriques avant (en vert) et après (en rouge) sur une zone supposées sans dégâts. On observe toutefois des écarts importants entre les deux profils (source : GSC

2001).

Ces méthodes, utilisées auparavant sur les images à moyenne et haute résolution (c. f. § 4.2.1 annexe 4.2), n’ont pas fourni ici de résultats probants (c. f. fig. 4.2). Des techniques de photo- interprétation ont été également utilisées, basées sur une détection multi - temporelle de changements. Des critères morphologiques tels que les différences entre la forme et le contour d’un bâtiment ou bien d’une zone homogène de bâti ont permis la réalisation d’une cartographie des zones endommagées (c. f. fig. 4.3). Mais, suite à une validation ultérieure à l’aide d’images IKONOS en pleine résolution ainsi que des photographies de terrain, il s’est avéré que des zones interprétées comme affectées étaient en réalité des « bidonvilles ». La

taille réduite des bâtiments typiques de cette zone est sans doute l’une des sources de cette confusion.

Figure 4.3 Cartographies de dommages sur la ville de Bhuj à l’aide des simulations multi - temporelles SPOT 5 (source : André et al, 2001).

La recherche, réalisée dans le cadre d’une étude d’analyse des potentialités du satellite SPOT5 à l’estimation rapide de dommages38, a mis en évidence les perspectives de ce capteur ainsi que ses limites. Dans un contexte de gestion de crise, la résolution de 2,5m n’apporte pas une fiabilité suffisamment élevée, l’efficacité de son utilisation étant sans doute limitée à la détection des grandes zones urbaines totalement détruites.

Figure 4.4 Cartographie des zones affectées suite au séisme de Bhuj, à l’aide d’une image IKONOS (source : Charte Intérnationale, 2002).

Une deuxième étude devant conduire à la cartographie de dommages suite au séisme de Bhuj a été réalisée avec des images IKONOS dans le cadre la Charte Internationale « Espace et catastrophes majeures » (c. f. annexe 4.4). L’analyse, basée uniquement sur la photo- interprétation, a permis la détection de quelques bâtiments supposés endommagés, avec deux niveaux de dommages : les constructions totalement ruinées et partiellement ruinées (c. f. fig. 4.3). Malheureusement, les auteurs ne présentent pas les critères qui ont permis la détection des dommages. Nous ne disposons pas non plus d’une carte de dommages sur l’ensemble de l’agglomération urbaine, afin de pouvoir comparer les résultats avec notre propre estimation de dommages (c. f. § 4.5). Toutefois, la ville ayant été fortement touchée, comme nous avons pu le constater suite aux rapports des missions en retour d’expérience et d’après les photographies prises sur le terrain au lendemain du séisme, cette détection de dommages nous semble fiable même si elle reste incomplète.

Récemment, de nouvelles perspectives d’une reconnaissance automatique de dommages ont été proposées par André (2002). Ainsi, une méthode basée sur la détection des anomalies morphologiques des bâtiments semble pouvoir extraire les constructions endommagées, avec un niveau élevé de fiabilité. L’imagerie post – événement fournie par IKONOS est appliquée dans cette étude. Tout d’abord, le bruit est éliminé à l’aide d’un filtre centre connexe (Mering et Parrot, 1994). Ensuite, les bâtiments sont extraits un par un dans un format « vecteur », tâche simplifiée par l’application d’une technique spécifique, appelée dilatation géodésique (Serra, 1982), qui facilite la séparation des bâtiments des autres éléments tels que les espaces non construits et les voies de communication. Une enveloppe convexe des bâtiments extraits est ensuite produite (c. f. fig. 4.5) par fermeture morphologique (Serra, 1982).

a) b)

Figure 4. 5 a) Extraction des contours des bâtiments ; b) le calcul de l’enveloppe convexe de chaque objet (source : André, 2002).

On se propose ici de détecter les anomalies morphologiques que l’on considère comme des indicateurs pertinents de l’endommagement d’un bâtiment par un séisme. Quatre indices relatifs aux formes et contours des objets sont calculés pour la mise en évidence de dommages, car on considère ici que ceux-ci sont caractérisés notamment par des déformations

des contours et des formes des bâtiments. Les quatre indices utilisés sont appelés ainsi «l’indice de rugosité », «l’indice de compacité », «l’indice de surface » et «l’indice de périmètre » (André et al, 2003). Sur la base du traitement de zones test, où les bâtiments réellement détruits ont été détectés à l’aide de la photo-interprétation et validés par des rapports de terrain, des seuils qui séparent les objets endommagés de ceux non endommagés ont été fixés sur les valeurs de ces quatre indices. La séparation n’étant pas toujours très nette, un principe de travail a été adopté dans l’étude, afin d’obtenir une haute fiabilité des résultats : au moins 95% des éléments considérés comme endommagés sont réellement endommagés. Ainsi, même si d’autres éléments non détectés peuvent être en réalité détruits, il reste une probabilité minime (inférieure à 5%) qu’il subsiste des éléments non endommagés parmi les éléments détectés. (c. f. fig. 4.6).

Figure 4.6 Séparation des éléments endommagés à l’aide du seuillage des valeurs des indices de surface et de périmètre. Figurent en rouge les éléments sûrement endommagés. On observe ainsi qu’en bas et à droite par rapport aux lignes vertes se trouvent exclusivement des éléments endommagés (source : André

et al, 2003).

Grâce à cette méthode semi–automatique on a pu mettre en évidence les constructions endommagées suite au séisme de Bhuj, sur plusieurs zones-test (c. f. fig. 4.7).

Figure 4.7 Bâtiments endommagés (en rouge) détectés par les seuils réalisés sur les indices de contours et forme (source : André et al, 2003).

La même approche a été appliquée sur une zone non affectée afin de tester la validité de la méthode, en utilisant les mêmes seuils. Ainsi, des zones-test sur San Diego (Etats – Unis) et sur Athènes (Grèce) ont été analysées, et les seuils appliqués n’ont pu distinguer aucun éléments présentant des anomalies morphologiques, ce qui indique une certaine robustesse de la méthode.