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2.2 Le dispositif expérimental

2.2.3 Usinage et accrochage de l’échantillon

Les premiers tests que nous avons réalisés mettent en évidence les précautions à prendre lors de la réalisation et de la fixation d’éprouvettes minces [101]. Les images de la figures 2.3 offrent deux exemples de problèmes typiques que l’on peut rencontrer dans ce domaine. Sur

(a) plis sur un film de traction (b) ondulations sur un bord après

rupture

FIG. 2.3 – Exemple de problèmes rencontrés en traction sur film mince.

l’image 2.3(a) on remarque, grâce à un jeu d’ombres approprié, des plis au niveau de l’accro-chage d’une éprouvette d’épaisseur 18 µm. Ces plis caractérisent une mauvaise répartition du

4. Vitesse maximale :135 µm· min−1soit2,25· 10−6m· s−1.

5. Les accélérations sont paramétrées ; on peut imposer un échelon de vitesse, un asservissement sur le déplace-ment, un asservissement sur la force, etc...

2.2. LE DISPOSITIF EXPÉRIMENTAL 125

serrage7. L’image 2.3(b) montre, quant à elle, des ondulations irréversibles après décharge sur le bord libre gauche de l’éprouvette. Ces ondulations prouvent que ce bord a subi, lors de la traction, un chargement plus important8que son homologue droit. Ces problèmes d’accrochage et d’alignement sont classiques en traction de film mince [102].

Il faut en réalité distinguer chaque cas en fonction des caractéristiques du matériau à étu-dier. Les techniques ne peuvent pas être les mêmes pour un échantillon rigide et un échantillon souple, pour un matériau fragile et un matériau ductile... On notera tout de même une procédure commune à l’ensemble des échantillons minces : il est souhaitable d’utiliser une structure « non déformable » pour monter l’éprouvette sur le mécanisme de traction.

Jankowski et Tsakalakos utilisent, pour un matériau ductile, deux bandes latérales qui sont coupées après montage [103]. Noyan et Sheikh effectuent la traction directement sur le bicouche [104]. Mazza et al. testent des éprouvettes peu élancées en matériau rigide (silicium). Read et Dally testent quatre éprouvettes en parallèles [105]. Ogawa et al. ont opté pour des bandes latérales cassables après montage [106].

Nous présentons pour notre part deux exemples de traction sur des matériaux très différents : – le film de cuivre, matériau très ductile ;

– le film de silicium, matériau extrêmement fragile9.

Un exemple de matériau ductile : le cuivre

Le matériau ductile que nous choisissons est un cuivre électrodéposé utilisé pour réaliser des circuits imprimés. Il se présente sous forme de feuillets10. Pour limiter les dispersions sur les dimensions latérales des éprouvettes, plusieurs feuilles sont placées entre deux plaques d’acier. Nous usinons l’ensemble par électro-érosion selon le modèle de la figure 2.4.

Le pincement d’un matériau ductile entre deux mors ne pose pas de difficulté. Les surfaces doivent être planes et le serrage uniforme. Le problème réside dans sa manipulation.

La solution que nous proposons consiste à utiliser un gabarit de montage des mors sur le banc d’essai. L’éprouvette étant préalablement fixée dans ses mors11, l’ensemble mors-gabarit est mis en place sur le banc d’essai. Puis le gabarit est retiré. Nous montrons le montage inter-médiaire sur la figure 2.5. Le mors supérieur est suspendu verticalement et le mors inférieur est en liaison pivot autour de son centre de gravité. Ceci devrait éviter un moment de flexion dans le plan dû à la masse des mors12. On verra lors de la présentation des résultats obtenus avec ce type d’éprouvette que la qualité de l’amarrage est un facteur important en début de traction.

7. On obtient le même type de plis en étirant un tissu entre les mains. 8. Donc une déformation inélastique plus importante.

9. Tout au moins lorsqu’il est sous forme de film mince.

10. On dispose de trois épaisseurs différentes :18 µm, 35 µm et 70 µm.

11. Cette étape étant la plus délicate puisqu’il est nécessaire de toucher l’éprouvette.

TROU DE CENTRAGE

LUMIÈRE DE PASSAGE POUR LA VIS DE SERRAGE

10 mm

35

m

m

FIG. 2.4 – Forme de l’éprouvette de cuivre.

AXE DE ROTATION DU MORS SUPÉRIEUR MORS SUPÉRIEUR BRIDE DE SERRAGE DU MORS SUPÉRIEUR VIS DE SERRAGE DU MORS SUPÉRIEUR ÉPROUVETTE DE CUIVRE GABARIT DE MONTAGE VIS DE SERRAGE DU MORS INFÉRIEUR BRIDE DE SERRAGE DU MORS INFÉRIEUR MORS INFÉRIEUR AXE DE ROTATION DU MORS INFÉRIEUR 30 m m

2.2. LE DISPOSITIF EXPÉRIMENTAL 127

Un exemple de matériau fragile : le silicium

Comme exemple de matériau fragile, nous choisissons un échantillon de silicium monocris-tallin d’orientation< 100 >. Le procédé d’usinage est identique à celui présenté au paragraphe 2.2.2 en page 21, utilisé pour réaliser les membranes bicouchesSiO2/Si.

Il y a tout de même deux différences :

– l’attaque chimique est effectuée sur les deux faces de manière à perforer le wafer de sili-cium aux endroits désirés ; ceci nécessite la réalisation de deux masques complémentaires ; – l’oxyde de silicium est intégralement supprimé par une attaque chimique au BHF.

Les éprouvettes de silicium monocristallin ont la forme représentée sur la figure 2.6. Cinq

VÉ DE CLIVAGE CADRE 10 m m 5 mm ZONE UTILE ZONE DE COLLAGE

FIG. 2.6 – Éprouvette de silicium solidaire de son cadre.

éprouvettes de ce type sont usinées sur un même wafer (Fig. 2.7). Dans les wafers< 100 >, les directions cristallographiques[¯1¯10] et [¯110] présentent les mêmes caractéristiques mécaniques. Toutes les éprouvettes d’un wafer sont donc considérées identiques.

L’éprouvette est solidaire d’un cadre que l’on cassera après la fixation de l’ensemble sur le banc d’essai. Il est donc possible de la manipuler sans la rompre.

Pour cette application, il n’est plus possible de pincer l’éprouvette. Nous optons pour une fixation par collage13.

Un matériau fragile ne supporte par ailleurs pas le moindre défaut d’alignement14. Les mors utilisés pour le cuivre sont liés à leur support par une liaison pivot glissant. Cette liaison supprime le degré de liberté en rotation autour de l’axe de traction x et de l’axe transversal y. Elle ne convient donc pas à l’éprouvette de silicium. Il semble impératif d’utiliser des liaisons rotules tout en gardant une certaine rigidité.

Notre choix s’oriente vers des roulements rigides à une rangée de billes. Leur rigidité leur permet de servir de support à l’éprouvette et ils offrent un jeu angulaire suffisant pour ne pas contrarier son positionnement. Le montage réalisé est présenté sur la figure 2.815. L’éprouvette

13. Colle epoxy.

CADRE

[¯1¯10] [¯110]

VÉS DE CLIVAGE

ÉPROUVETTE

FIG. 2.7 – Position des éprouvettes de traction sur un wafer< 100 >.

SUPPORT SUPÉRIEUR SUPPORT INFÉRIEUR ROULEMENT SUPÉRIEUR MORS SUPÉRIEUR RONDELLE RECTIFIÉE ÉPROUVETTE DE SILICIUM VIS DE SERRAGE

FIG. 2.8 – Montage de l’éprouvette de silicium.

est collée sur deux rondelles rectifiées et fixées dans les mors par des vis de serrage. Ces mors

2.3. BILAN DU CHAPITRE 2 129

sont encastrés dans la bague intérieure des roulements, ceux-ci étant montés serrés dans leur support respectif. Tous les éléments « massifs » sont dans l’axe des roulements et ne devraient donc pas influer sur la mise en place de l’éprouvette.

2.3 Bilan du chapitre 2

Un mécanisme spécialement adapté à la traction sur film mince a été présenté dans ce cha-pitre. Deux montages sont proposés pour amarrer les échantillons. Nous pensons traiter en pre-mier lieu le cas des matériaux ductiles par des essais sur du cuivre électrodéposé. Puis, dans un second temps, le cas très sensible du silicium monocristallin est envisagé. D’un point de vue mécanique, les performances du banc d’essai sont prometteuses. Une méthode de mesure sans contact est en outre nécessaire pour mesurer le champ de déplacements en surface de l’échan-tillon.

131

Chapitre 3

La mesure du champ de déplacements

dans le plan

Nous avons indiqué notre désir de mesurer les déplacements dans le plan, en surface de l’échantillon de traction. Les méthodes optiques permettant de mesurer des déplacements dans le plan sont nombreuses. On peut citer les méthodes interférométriques, offrant une grande sen-sibilité : interférométrie de speckle pour mesurer le déplacement suivant une direction [107] ou deux directions [11], interférométrie holographique [108] ; les techniques de photographie de

speckle [109][110] ; le suivi en temps réel du déplacement d’image speckle [111][112][113] ;

les méthodes utilisant un marquage : mesure du déplacement de matrice de points [114] ou de grilles [115] [116]...

Parmi celles-ci, les techniques de photographie de speckle offrent le meilleur rapport

simpli-cité de mise en œuvre/richesse des résultats. Les récents progrès dans la technologie des diodes

lasers et des fibres optiques permettent en effet de limiter l’appareillage optique à ces seuls composants.

Toujours dans le souci de simplifier le banc d’essai – rappelons que le montage de traction est destiné à des mécaniciens – nous utilisons une caméra CCD en vue d’effectuer un traitement entièrement numérique. Ainsi, la méthode choisie est « la photographie numérique de speckle ». Ce choix étant fait, il reste à développer un traitement numérique satisfaisant. Le but est bien entendu de mesurer le champ de déplacements en surface de l’échantillon, si possible en « temps réel1 ».

Après une brève présentation du phénomène de speckle, nous expliquons l’effet d’un dépla-cement local en surface de l’objet sur l’image speckle. Nous présentons ensuite les trois mé-thodes de calcul que nous avons testées : le calcul par Double TFD, l’Intercorrélation d’Images et le calcul par Régression sur la Phase. Une bonne connaissance des avantages et inconvénients de chacune d’elles nous permet de proposer un algorithme hybride composé de deux étapes :

– l’Intercorrélation d’Images pour estimer le décalage2au pixel près ;

1. On entend ici par temps réel le fait de ne pas faire de pose lors des acquisitions et d’effectuer le calcul du champ de déplacements ayant lieu entre deux acquisitions successives avant l’acquisition suivante.

– la Régression sur la Phase pour calculer le décalage avec une précision subpixel.

Cet algorithme fait l’objet de nombreux tests comparatifs. Nous montrons finalement que les aberrations du système optique sont à prendre en compte.

3.1 Notions essentielles sur le phénomène de speckle

La granularité optique – appelée plus communément par le terme anglais speckle3 – est l’une des premières caractéristiques que l’on remarque à la mise en route d’un laser4. C’est donc depuis les années1960, avec l’apparition des premiers lasers, que l’on s’intéresse à l’étude et à l’utilisation du speckle en métrologie optique.

Lorsqu’une surface optiquement rugueuse5est éclairée par une lumière cohérente, tout l’es-pace où la lumière est diffusée semble éclairé par de petites tâches lumineuses tridimension-nelles. Lorsque l’on regarde l’objet à travers un objectif photographique6, la dimension moyenne des tâches dépend de l’ouverture numérique de l’objectif (Fig. 3.1).

(a) grande ouverture (b) faible ouverture

FIG. 3.1 – Exemple de speckle image.

Ces tâches sont générées par interférences constructives des rayons diffusés par la surface diffusante. En chaque point de l’espace de diffusion, ces ondes s’additionnent, sur la base de l’amplitude complexe du champ, de manière cohérente et aléatoire, et donnent lieu au phéno-mène de speckle. La figure 3.2(a) représente le résultat d’une telle somme dans le plan complexe.

3. On dit aussi « tavelure » en français. 4. Avec la monochromaticité.

5. Dont l’écart-type de la rugosité est strictement supérieur : à la longueur d’onde de la lumière, en transmission (σz> λ) ; à la demi-longueur d’onde de la lumière, en réflexion (σz> λ/2). Avec σz= 1,11Ra pour une rugosité

gaussienne etλ≃ 830 nm pour nos expériences.

3.1. NOTIONS ESSENTIELLES SUR LE PHÉNOMÈNE DE SPECKLE 133 n− 1 n Im Re 1 2 3 A i− 1 i φ

(a) somme den ondes

niveaux de gris nombre de pixels 0 0 64 128 192 400 800 1200

(b) histogramme d’une image speckle numérique FIG. 3.2 – Effet statistique du speckle.

Les propriétés statistiques du speckle ont été étudiées en détail [117]. On retiendra que sa distribution statistique est gaussienne sur la base de l’amplitude complexe du champ électrique, que l’intensité obéit à une loi exponentielle négative et que le contraste7 est de 1. La figure 3.2(b) représente l’histogramme des pixels de l’image speckle expérimentale de la figure 3.1(b). On peut remarquer la dissymétrie de la courbe en faveur des faibles niveaux de gris ce qui

7. On parle de contraste d’une image speckleC = σI/I où σIest l’écart-type de l’intensité , ou bien de visibilité

était attendu compte tenu de la distribution statistique de l’intensité du speckle. Dans certaines conditions expérimentales8, il est possible de déposer de la poudre blanche9lorsque le contraste du speckle ou l’intensité de la lumière diffusée ne sont pas suffisants.

Soit le repère,Ro(xo,yo,z), lié à l’objet. Les dimensions moyennes du grain de speckle, dans une direction normale au diffuseur sont, en propagation libre, en adoptant les notations de la figure 3.3 [118][119] : ( Sxq = Syq = 1,22·λ·do φo Sz = 8·λ·do2 φo2

pour une surface diffusante circulaire (3.1)

avecSk(m) : dimension moyenne du grain suivantk, λ (m) : longueur d’onde,

do(m) : distance objet,

φo(m) : diamètre de la surface diffusante ;

et (

Sxq = Syq = λ·do

Lo

Sz = 8·λ·do2

Lo2

pour une surface diffusante carrée (3.2)

oùLo(m) est le coté de la surface diffusante.

SOURCE SPECKLE OBJET φo do Sz Sxq Sk k Syq xo yo z xq yq

FIG. 3.3 – Formation du speckle en propagation libre.

8. Pour un matériau poli-miroir par exemple.

9. Comme en projection de franges, nous pulvérisons l’échantillon avec une poudre granulaire fine jouant le rôle de diffuseur.

3.1. NOTIONS ESSENTIELLES SUR LE PHÉNOMÈNE DE SPECKLE 135

Comme cela a été précédemment précisé, le fait d’intercaler une lentille modifie le speckle10. On parle alors de speckle dans l’image11. Soit le repère,Ri(xi,yi,z), lié à l’image. Les dimen-sions moyennes du grain de speckle deviennent conformément aux notations de la figure 3.4 :

( Sxi = Syi = 1,22·λ·di φL = 1,22· λ · (1 + GT)· F# Sz = 8·λ·di2 φL2 = 8· λ · (1 + GT)2· F#2 (3.3)

avecSk(m) : dimension moyenne du grain suivantk, λ (m) : longueur d’onde, di(m) : distance image, φL(m) : diamètre de la lentille, GT : grandissement transversal, F# : Nombre d’Ouverture. SOURCE SPECKLEIMAGE OBJET LENTILLE φL η ξ M ~ Uo(M ) ~ Ωi(M ) do di Sz Sxi Syi xo yo z xi yi

FIG. 3.4 – Formation du speckle à travers une lentille.

Puisque nous nous intéressons aux déplacements dans le plan, la dimension moyenne sui-vantz nous importe peu. Par contre, l’utilisation d’une caméra CCD pour enregistrer le speckle impose de respecter le théorème d’échantillonnage de Shannon suivant xi et yi. La dimension moyenne dans le plan image a ainsi été définie en fonction de la taille d’un pixel [120][121] :

Sxi ≥ 2,4 · Txi et Syi ≥ 2,4 · Tyi (3.4)

oùTki(m) est la taille du pixel du capteur CCD suivantk. 10. La diffraction introduite par la lentille intervient.

Les relations 3.3 gouvernant les dimensions moyennes du grain sont donc très importantes du point de vue expérimental. Elles permettent d’ajuster la dimension du grain en fonction du capteur CCD. Nous donnons un exemple de speckle image numérisé sur la figure 3.5.

10 20 30 40 50 60 10 20 30 40 50 60

FIG. 3.5 – Speckle image échantillonné et numérisé.

3.2 Influence d’un déplacement de corps rigide sur le speckle