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U (N )-Yang-Mills quand N tend vers l’infini

Rappelons-nous le chemin parcouru jusqu’`a maintenant. Nous avons d´efini les champs markoviens d’holonomies planaires comme processus index´es par des chemins dans le plan qui satisfont plusieurs axiomes dont le fait d’ˆetre invariants par transformation de jauge. Cette sym´etrie nous avait amen´es `a d´efinir la trans- form´ee de Wilson qui, dans le cas o`u le groupe de structure est le groupe U (N ),

caract´erise la loi des champs d’holonomies planaires invariants par transforma- tion de jauge. Ainsi `a la fin de la section 6.4 `a nous poser la question de la convergence de la transform´ee de Wilson des champs markoviens d’holonomies planaires `a valeurs dans U (N ) quand N devient de plus en plus grand. Il nous avait donc fallu comprendre le comportement de syst`emes de matrices al´eatoires et nous avions alors pu montrer la convergence en distribution du mouvement brownien unitaire UN = (UN

t )t 0 sur U (N ) (exemple 8.3 et th´eor`eme 8.4). Or

par le th´eor`eme 5.2, on peut construire un champ markovien holonomies planaire ⇣

YMUvolN⌘

vol2D(R2) associ´e `a U

N. Dor´enavant, nous n’´etudierons que le cas o`u la

mesure de densit´e vol est la mesure de Lebesgue dx, ainsi nous noterons YMUN la mesure YMUdxN. Nous pouvons donc esp´erer que les mesures YMUN convergent quand N tend vers l’infini au sens de la transform´ee de Wilson : en e↵et c’est un th´eor`eme dˆu `a T. L´evy et d´emontr´e dans [20].

Afin de simplifier l’expos´e, on va coupler de fa¸con quelconque les mesures YMUN : on consid`ere un espace de probabilit´es (⌦,A, P) sur lequel sont d´efinies des variables (hN(l))

l2L0(R2) telles que pour tout entier positif N , (h

N(l)) l2L0(R2) a la mˆeme loi que le processus de projection canonique (h(l))l2L0(R2) d´efini sur ⇣

Mult(P(R2), G), YMUN⌘

. Posons pour tout entier strictement positif N et pour toute boucle l 2 L0(R2),

WN(l) = 1

NTr h

N(l) .

Th´eor`eme 9.1. — Il existe une fonction , appell´ee champ maˆıtre, de L0 dans

R, continue pour la convergence `a points extr´emaux fix´es d´efinie `a la fin de la section 2.1, telle que pour toute boucle l2 L0(R2) :

WN(l) !

N!1 (l)

dans L1(⌦,A, P).

Ce th´eor`eme implique que les transform´ees de Wilson des mesures YMUN con- vergent. En e↵et, la convergence L1 implique la convergence en probabilit´e des

variables. Ainsi, pour toute famille de boucles (li)ki=1 dans L0(R2), Qki=1WN(li)

converge en probabilit´e vers Qki=1 (li). Puisque pour toute boucle WN(l) est la

trace d’une matrice unitaire, elle est born´ee par 1 : par th´eor`eme de convergence domin´ee, EhQki=1WN(l

i)

i

converge vers Qki=1 (li). Or, par d´efinition mˆeme,

E " k Y i=1 WN(li) # = WYMUN(l1, ..., lk),

o`u la transform´ee de Wilson WYMUN avait ´et´e d´efinie dans la section 6.4. Ainsi les transform´ees de Wilson convergent et la transform´ee limite que l’on notera WYMU

v´erifie de plus la propri´et´e de factorisation suivante : pour toute famille (l1, ..., lk) de boucles dans L0(R2), WYMU(l1, ..., lk) = k Y i=1 WYMU(l1) .

Par la suite, nous allons expliquer comment d´emontrer ce r´esultat. Nous

pr´esenterons des arguments proches de ceux propos´es par T. L´evy, puis nous d´evelopperons de nouveaux arguments obtenus dans l’article en pr´eparation [14] qui permettent plus facilement la g´en´eralisation du th´eor`eme 9.1 `a l’´etude asymp- totique d’autres champs de Yang-Mills planaires.

9.1. Convergence sur A↵0(R2). — La premi`ere ´etape consiste `a montrer que

pour toute boucle l 2 A↵0(R2) (c’est-`a-dire affine par morceaux), la variable

al´eatoire WN(l) converge bien vers une limite non-al´eatoire que l’on notera (l).

C’est la partie la plus simple du th´eor`eme : toute boucle l 2 A↵0(R2) peut se

voir comme une boucle trac´ee sur un graphe fini G. Or on a vu que dans ce

cas, la variable hN(l) peut s’´ecrire comme un produit des variables hN

lF F2Fb et ⇣

hN lF1

F2Fb o`u (lF)F2Fb est une base de lassos bas´ee en 0. Ainsi W

N(l) est un

la trace normalis´ee d’un produit de matrices. Rappelons-nous l’´equation (10) : E⇥WN(l)est typiquement une des observables que l’on consid´erait auparavant et

mesure le syst`eme fini-dimensionel de matrices al´eatoires hN

lF F2Fb [ ⇣ hN lF1 ⌘ F2Fb. Au lieu de montrer que WN(l) converge, nous allons expliquer comment prou-

ver que E⇥WN(l)converge. Pour cela, il suffit de montrer que le syst`eme de

matrices al´eatoires ⇣ hN lF F2Fb[ ⇣ hN lF1 ⌘ F2Fb ⌘

N2N converge en distribution non-

commutative.

Le mouvement brownien ´etant invariant par conjugaison par le groupe unitaire U (N ), pour toute face born´ee hN

lF a la mˆeme loi qu’un mouvement brownien arr´et´e au temps dx(F ) et les variables hN

lF F2Fb sont ind´ependantes. Ainsi h

N lF F2Fb [ ⇣ hN lF1 ⌘

F2Fbest le couplage ind´ependant de syst`emes de matrices invariants par con- jugaison par le groupe unitaire, chacun ´etant de la forme ⇣hN

lF, h

N lF1

N2N. D’apr`es

le th´eor`eme 8.2, il suffit donc de montrer que le syst`eme de matrices al´eatoires ⇣ hN lF, h N lF1 ⌘

N2N converge en distribution non-commutative. Vu qu’il a la mˆeme loi

que ⇣UN dx(F ), ⇣ UN dx(F ) ⌘⇤⌘

N2N qui converge en distribution non-commutative (voir

notre discussion apr`es le th´eor`eme 8.4 ), on peut conclure quant `a la convergence de ce syst`eme et donc de E⇥WN(l).

En utilisant le fait que ⇣UN dx(F ), ⇣ UN dx(F ) ⌘⇤⌘ N2N v´erifie la propri´et´e de S-

factorisation, on peut montrer que hN(l), (hN(l))

N2N v´erifie aussi la propri´et´e

de S-factorisation, ce qui implique alors que WN(l) converge en probabilit´e vers

une variable non-al´eatoire. De nouveau, ´etant donn´e que l’on consid`ere des variables al´eatoires born´ees, cela prouve que WN(l) converge dans L1(⌦,A, P)

vers un nombre r´eel (l).

Il reste maintenant `a ´etendre cette convergence pour toute boucle l 2 L0(R2).

9.2. Convergence sur L0(R2). — Consid´erons une boucle l 2 L0(R2) et con-

sid´erons une approximation de l donn´ee par une suite de boucles (ln)n2N, affines

par morceaux et bas´ees en 0. `A la vue des r´esultats expliqu´es jusqu’`a pr´esent, nous pouvons dessiner un tableau de doubles limites (dans l’espace L1(⌦,A, P)) :

WN(l n) n!1 // N!1 ✏✏ WN(l) n!1 ✏✏ (ln) n!1 // (l)

dans lequel, pour l’instant, aucune des deux fl`eches en pointill´es n’a ´et´e d´emontr´ee. Pour ce faire, il nous suffit de montrer que la convergence le long d’une des deux fl`eches pleines est une convergence uniforme, c’est-`a-dire, montrer soit :

sup n E ⇥ | WN(l n) (ln)| ⇤ ! N!10 (25) soit : sup N E ⇥ | WN(l n) WN(l)| ⇤ ! n!10. (26)

9.2.1. Uniformit´e en n. — Dans [20], T. L´evy d´emontre une estim´ee qui lui permet de montrer (25). En e↵et, il montre que pour toute boucle b, affine par morceaux : E⇥| WN(b) (b)| 1 N h `(b)e12`(b)2 + `(b)2e`(b)2 i , (27)

o`u on rappelle que `(b) est la longueur de b. Or si (ln)n2N converge vers l, la

longueur de ln converge vers celle de l, en particulier supn`(ln) < 1, ce qui

permet de conclure quant `a la v´eracit´e de (25).

9.2.2. Uniformit´e en N . — Dans l’article en pr´eparation [14], et dans le chapitre de th`ese “Revˆetements ramifi´es” dans lequel sont r´eutilis´es les mˆemes arguments, nous nous sommes trouv´es confront´es au probl`eme que, dans le cas o`u le processus de L´evy sous-jacent n’´etait pas un processus de brownien, l’in´egalit´e (27) semblait difficile `a obtenir, voire ´etait peut-ˆetre fausse. Il reste donc `a montrer l’uniformit´e

en N des convergences des boucles de Wilson lorsque n tend vers l’infini, c’est- `a-dire la convergence (26). Pour ce faire, on utilise la version quantitative d’un r´esultat de T. L´evy, le th´eor`eme de T. L´evy-Kolmogorov bidimensionnel que l’on a ´evoqu´e dans la section 2.5.2 et que nous allons expliquer dans la suite.

Th´eor`eme 9.2. — Notons dx la mesure de Lebesgue sur le plan. Consid´erons un groupe m´etrique complet tel que les translations et l’inversion (g 7! g 1)

sont des isom´etries. Donnons-nous H, une fonction multiplicative sur les boucles affines bas´ees en 0 `a valeurs dans : H 2 Mult(A↵0(R2), ). Supposons qu’il

existe une constante K 0 telle que pour toute boucle simple l 2 A↵0(R2) de

longueur `(l) K 1 et qui entoure un domaine D, l’in´egalit´e :

d (1, H(l)) Kpdx(D) (28)

est v´erifi´ee. Alors la fonction HN admet une unique extension sur P(R2) qui est

multiplicative, c’est-`a-dire dans Mult(P(R2), ) et qui est r´eguli`ere.

De plus, pour toute boucle l 2 L0(R2), il existe une approximation de l par des

boucles affines par morceaux (ln)n2N telle que | `(l) `(ln)| ! n!1 0 et :

d ⇥H(l), H(ln)

 K`(l)34 |`(l) `(ln)|14 . (29)

Nous donnons la version quantitative ici, c’est-`a-dire l’in´egalit´e (29), qui apparaˆıt dans la preuve du th´eor`eme de T. L´evy-Kolmogorov bidimensionnel mais pas dans son ´enonc´e(85). Grˆace `a ce th´eor`eme, on peut ´etendre un champ

d’holonomies planaire d´efini sur les chemins affines par morceaux en un champ d’holonomies planaire r´egulier. Pour cela, ´etant donn´e une mesure de proba- bilit´e µ sur Mult(A↵0(R2), G) on applique le th´eor`eme de T. L´evy-Kolmogorov

bidimensionnel avec :

– = L1(Mult(A↵

0(R2), G), µ; G), c’est-`a-dire les variables int´egrables

d´efinies sur (Mult(A↵0(R2), G) `a valeurs dans G.

– d (X, Y ) = µ (d(X, Y )), o`u X et Y sont dans et dG est une distance sur

G invariante par translations et inversion.

– H est l’application qui `a une boucle affine par morceaux l bas´ee en 0 associe la variable al´eatoire :

H(l) :Mult(A↵0(R2), G)! G

h7! h(l). Si le champ d’holonomies µ v´erifie :

d (1, H(l)) = Z Mult(A↵0(R2),G) dG(e, h(l))µ(dh) K p dx(D), (85)Th´eor`eme 3.3.1 dans [23].

pour toute boucle simple affine par morceaux bas´ee en 0 et entourant un do- maine D, alors on peut ´etendre H continˆument. Pour toute boucle l2 L0(R2) on

peut d´efinir une variable al´eatoire H(l), d´efinie sur un espace de probabilit´e (en l’occurrence Mult(A↵0(R2), G) muni de µ) telle que pour toutes boucles l1 et l2,

presque sˆurement : H(l1l2) = H(l2)H(l1) et H(l11) = (H(l1)) 1. Ceci permet alors

par un argument de limite projective `a la Kolmogorov-Carath´eodory, de d´efinir une mesure de probabilit´e, not´ee aussi µ, surMult(L0(R2), G) telle que pour toute

famille de boucles, la famille des projections canoniques (h(l1), ..., h(ln)) a la mˆeme

loi que (H(l1), ..., H(ln)). La continuit´e de H implique que pour toute famille de

boucles (ln)n2N bas´ees en 0 et convergeant vers l 2 L0(R2),

Z

Mult(L0(R2),G)

dG(h(ln), h(l)) µ(dh) ! n!10.

La version quantitative permet quant `a elle de montrer l’uniformit´e (26). En e↵et, en utilisant les mˆemes notations :

sup N E ⇥ | WN(ln) WN(l)| ⇤  sup N E  1 NTr(H(ln)) 1 NTr(H(l))  sup N E ⇥ dU (N )(H(ln), H(l)) ⇤ (Cauchy-Schwarz)  sup N d (H(ln), H(l)) ,

o`u dU (N ) est la distance sur U (N ) donn´ee par

dU (N )(U1, U2) =

1

NTr ((U V )(U V )

) .

On voit alors qu’un contrˆole uniforme des constantes KN n´ecessaires `a

l’application de l’in´equation (29)(86), permet alors d’obtenir l’uniformit´e voulue

des convergences. Ceci permet alors de boucler le tableau de doubles limites et permet aussi de montrer que la fonction est continue.

Remarque 9.1. — Comme nous le montrons dans l’article en pr´eparation [14], on peut construire directement le champ maˆıtre, c’est-`a-dire ( (l))l2L0(R2) en suiv- ant la construction des champs markoviens d’holonomies expliqu´ee dans le chapitre de th`ese [Champs] mais en utilisant un mouvement brownien libre (voire un pro- cessus de L´evy libre multiplicatif ) au lieu d’un processus de L´evy, et en rempla¸cant la notion d’ind´ependance par la notion de libert´e.

(86)Que l’on obtient dans [14] ainsi que dans le chapitre de th`ese “Revˆetements ramifi´es” dans

10. Marches al´eatoires sur S(N ), S(N )-Yang-Mills pour N grand et