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PARTIE I : INTRODUCTION THÉORIQUE

CHAPITRE 3 – L’EXPÉRIENCE UTILISATEUR (UX) : UNE ALTERNATIVE INTÉGRATIVE POUR

4. LES TRAVAUX DE VAN SCHAIK ET LING (2011) SUR L’EXPÉRIENCE D’INTERACTION

Van Schaik et Ling (2011) préfèrent, d'un point de vue conceptuel, parler d’expérience d’interaction plutôt que d’expérience utilisateur. Selon eux, la notion d’expérience d’interaction permet de décrire plus précisément ce qui est étudié, c’est-à-dire l’implication d’une pluralité de facteurs dans une interaction homme-technologie : à savoir l’utilisabilité ainsi que des influences cognitives, socio-cognitives et affectives, notamment. Le travail récent de Van Schaik et Ling (2011) consiste en la proposition d’un modèle qui intègre la perspective de l'expérience utilisateur au sein du cadre de l'acceptation, dans un contexte d’utilisation d’une encyclopédie en ligne. Selon les auteurs, une bonne utilisabilité n'est plus à elle seule suffisante pour garantir le succès d'un système. Cependant, ils pointent le fait qu’une expérience ponctuelle positive pour l'utilisateur pourrait également ne pas être suffisante à elle seule. En effet, utiliser un système technologique de manière répétée dans le temps requiert, au-delà d’une expérience ponctuelle de qualité, l’acceptation du système en jeu par ses utilisateurs. D’après Van Schaik et Ling (2011), cela justifient le besoin de mettre en place une approche intégrative pour l’étude de l’expérience d’interaction avec des systèmes technologiques. Or, les travaux portant sur l’étude de l’expérience utilisateur (par exemple, Hassenzahl, 2004 ; Lavie & Tractinsky, 2004) n’ont pas pris en compte, jusqu’ici, l’acceptation des systèmes en jeu. De plus, Van Schaik et Ling ajoutent que trop peu de recherches manipulent les caractéristiques de l’interface et/ou les caractéristiques de la tâche pour en observer les effets à la fois sur l’expérience d’interaction et sur l’acceptation.

Les auteurs conduisent une expérience qui consiste en la proposition de deux versions différentes d’un site Internet aux participants (N = 128). Une version est hautement utilisable, tandis que l’autre présente des défauts d’utilisabilité. Par ailleurs, les auteurs manipulent le mode d’usage en référence aux travaux d’Hassenzahl et ses collègues (Hassenzahl, Kekez, & Burmester, 2002). Ainsi une partie des participants réalise l’expérience dans un mode « action ». Il s’agit alors

pour eux d’explorer le site web en fonction de leurs propres intérêts. L’autre partie des participants réalise l’expérience dans un mode « but ». Dans ce mode d’usage, ils doivent réaliser un certain nombre de tâches proposées par l’expérimentateur. Outre des comparaisons intergroupes pour analyser l’effet de l’utilisabilité réelle et du mode d’usage sur les variables de l'expérience et de l’acceptation, les auteurs choisissent de tester trois modèles structuraux : un modèle de l’expérience d’interaction (qui renvoie aux propositions d'Hassenzahl (2003)), un modèle de l’acceptation et un modèle intégré expérience-acceptation.

Les principaux résultats des auteurs montrent un effet significatif et positif de l’utilisabilité réelle sur la performance à la tâche, sur l’expérience d’interaction et sur l’acceptation. Plus précisément, les variables dépendantes suivantes ont été significativement influencées par le niveau d’utilisabilité réelle : les qualités pragmatiques perçues, la qualité globale, la facilité d’usage perçue, l’utilité perçue, le plaisir perçu et les intentions d’usage. Par ailleurs, le mode d’usage influence lui aussi significativement l’expérience d’interaction ainsi que l’acceptation. Spécifiquement, les participants engagés dans un mode « action » (exploration libre du site) jugent le système significativement plus positivement sur toutes les variables dépendantes comparés à ceux engagés dans un mode « but », à l’exception des qualités hédoniques et de la beauté.

Par ailleurs, en ce qui concerne le test du modèle de l’acceptation, les auteurs trouvent notamment que l’utilité perçue et le plaisir perçu seraient des déterminants, indépendants, des intentions d’usage. S’agissant du test du modèle d’expérience d’interaction, les auteurs confirment les propositions d’Hassenzahl suivantes : 1) les qualités hédoniques perçues contribuent au jugement évaluatif en termes de beauté ; 2) les qualités hédoniques et pragmatiques perçues contribuent au jugement évaluatif en termes de qualité globale ; 3) l’évaluation en termes de beauté reste stable dans le temps (avant et après usage) contrairement à l’évaluation en termes de qualité globale ; 4) les effets des manipulations expérimentales sur l’évaluation en termes de qualité globale sont médiatisés par les perceptions des qualités hédoniques et pragmatiques. Enfin, concernant le test du modèle intégré expérience-acceptation, les auteurs observent que les perceptions des qualités hédoniques et pragmatiques sont des déterminants, indépendants, des variables de l’acceptation, à savoir la facilité d’usage perçue, l’utilité perçue et les intentions d’usage. En revanche, les évaluations en termes de beauté et de qualité globale ne semblent pas être

des déterminants des intentions d’usage. Dans leur discussion, les auteurs insistent sur l’effet potentiellement puissant du plaisir perçu sur les intentions d’usage. Selon eux, cela tend à suggérer que des éléments intrinsèques aux utilisateurs, tels que le plaisir perçu, sont d’un intérêt significatif pour les recherches mais aussi pour les concepteurs de technologies interactives. Toutefois, les auteurs précisent que l’importance du plaisir perçu pourrait dépendre du type de technologie utilisé. Notamment, il pourrait prendre une importance moindre dans le cadre de systèmes avant tout utilitaires (par opposition à des systèmes hédoniques) employés dans des contextes professionnels, par exemple. Par ailleurs, Van Schaik et Ling (2011) avancent que l’influence potentielle des évaluations (beauté et qualité globale) sur les intentions d’usage pourrait dépendre d’une combinaison de facteurs tels que le mode d’usage, le contexte d’usage, le type de produit en jeu, notamment.

Van Schaik et Ling (2011) estiment que même si la notion d’expérience est devenue centrale aujourd’hui, il n’en reste pas moins, que les nouveaux systèmes interactifs sont encore envisagés comme des outils pouvant potentiellement améliorer la performance humaine. Selon eux, dans ce contexte, la recherche et la conception ne peuvent pas se limiter à la prise en compte de l’expérience en laissant de côté les questions liées à l’acceptation. Celle-ci est encore d’actualité et doit faire partie des préoccupations des chercheurs et des industriels. Les auteurs suggèrent alors que les recherches futures doivent continuer de prendre en compte les caractéristiques du système (par exemple son utilisabilité réelle, sa valeur symbolique, etc.), les caractéristiques des tâches ainsi que certaines différences individuelles ou caractéristiques personnelles. On retrouve ici trois éléments centraux proposés par ailleurs par Finneran et Zhang (2003) dans leur modèle PAT (Person-Artefact-Task) : la personne, l’artefact (le système) et la tâche. Enfin, dans le but d’aboutir à une modélisation plus complète et plus précise de l’expérience d’interaction et de ses conséquences, Van Schaik et Ling recommandent l’intégration des variables de l’expérience utilisateur au sein du cadre de l’acceptation.