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Du travail libéré au paupérisme : refonder un corps politique

DEUXIEME PARTIE :

I. Du travail libéré au paupérisme : refonder un corps politique

1. Du capitalisme utopique au désenchantement.

En remplaçant les corporations par la généralisation du contrat, les Constituants instituent un nouveau régime du travail, largement favorable aux employeurs. Une fois le travail « libéré » de l'emprise corporatiste, chacun peut trouver à s'employer à sa guise, selon ses compétences. L’État instaure donc une législation qui oblige l'indigent valide à travailler, condition sine qua none pour être un « citoyen utile et vertueux », mais sans s'obliger en retour à lui fournir un emploi – par exemple en intervenant directement dans l'organisation et la distribution du travail, en employant des travailleurs dans des entreprises nationalisées, etc. L'Assemblée Constituante, composée à majeure partie de représentants d'une élite culturelle et bourgeoise, donnait les clefs du développement économique au commerce et à l'industrie, au nom de la « liberté d'entreprendre »397.

Un an avant son Tableau Économique, Quesnay explique avec son article « Grain », que c'est l'entrepreneur, le riche fermier, qui tient le premier rôle dans l'accroissement des richesses du pays. Préfigurant ce que l'on n'appelle pas encore la « théorie du ruissellement », il explique que la loi doit soutenir ces hommes,

car c’est de leurs richesses que doit naître la subsistance de la Nation, l’aisance publique, les revenus du souverain, ceux des propriétaires, du clergé, une grande dépense distribuée à toutes les professions, une nombreuse population, la force & la prospérité de l’état. Ce sont les grands revenus qui procurent les grandes dépenses, ce sont les grandes dépenses qui augmentent la population, parce qu’elles étendent le commerce & les travaux, & qu’elles procurent des gains à un grand nombre d’hommes.398

Ainsi, tout comme l'Encycloṕdie en a théorisé les bases avant que ses conditions pratiques ne soient réunies, « la mise en place d'une législation économique adaptée aux besoins du capitalisme a nettement devancé en France le développement du capitalisme

397On peut ajouter l'article 1781 du Code Civil de 1804, établissant devant la loi la supériorité de la parole du maître en cas de conflit avec le salarié, et obligeant ce dernier à apporter la preuve de sa plainte. Les douanes intérieures sont également supprimées, l'impôt sur l'industrie est réduit à une patente légère et les associations sont proscrites. Enfin, des mesures de contrôle strictes des travailleurs complètent le tableau, comme le livret ouvrier, institué en 1803.

398François Quesnay, « Grain », op. cit., T. VII., 1757, p. 821. Selon cette théorie, l’État doit laisser les riches s'enrichir, sans intervenir pour réduire les inégalités, puisque l'argent ainsi gagné finit toujours par retomber sur les classes les plus pauvres, ce que prétend montrer le zigzag de Quesnay.

industriel »399. En 1804, le Code Civil napoléonien ne fera qu'entériner l'ensemble de ces principes. La fin du XVIIIe siècle a donc été une période charnière qui a transformé la place du travail dans la société, et ouvert une « boîte de Pandore » (Robert Castel), pour les conflits sociaux du siècle suivant. Pourtant, malgré la succession inédite des changements de régime, le XIXe siecle se caract́rise par une stabilit́ mońtaire sans pŕćdent et par une persistance presque sans accroc des fondements de la société bourgeoise et du libéralisme économique.

Reste que les modifications dans la législation bouleverse l'état du monde social : très rapidement en effet, la libéralisation du travail fait voler en éclats les rapports sociaux ancestraux qui liaient ensemble les travailleurs au sein des petits ateliers, des corporations, et dans les cités. Les corporations accordaient des états, régulaient le travail et le commerce et entretenaient des liens quotidiens entre les ordres et les castes : les compagnons logeaient chez les maîtres, ceux-ci recevaient les clients, et l'étroitesse du champ commercial obligeait à de nombreux échanges entre les ateliers. Or, la Révolution a aboli les institutions intermédiaires entre l’État et les individus, laissant la société atomisée : « Il y a un gouvernement, des pouvoirs, mais le reste qu'est-ce que c'est ? Des grains de sable. Nous sommes épars, sans système, sans réunion, sans contact », écrit Napoléon400. Plus trivial, Marx décrit la société comme un « sac de pommes de terre »401. Sans les anciennes tutelles, un état généralisé d'instabilité sociale gagne les villes de France. Il devient indispensable de redéfinir les principes du corps politique, sa figure et les rapports entre ses parties.

C'est que ce le sol idéologique qui lui servait de base semble se dérober sous lui. Les idéaux des Lumières, qui établissaient un lien entre liberté économique et égalité politique connaissent, une fois mis en pratique, une désillusion féroce. Le XIXe siècle met fin brutalement à la croyance en un capitalisme utopique, fondement d'un État rationnel, moral et prospère, où chaque individu devait pouvoir trouver sa place à la juste mesure de son mérite et de ses capacités. Force est de constater, face au funeste spectacle du libre-marché et de la concurrence sauvage, que « l'économie a en quelque sorte raté la société »402. Cette première déconvenue laisse place à un « utopisme à rebours » qui cherche à remettre de la verticalité dans le social pour le sauver de l'explosion.

L'autre déception du siècle, consécutive aux Journées de 1848, vient cette fois de la gauche de la République, lorsque le peuple découvre que le suffrage universel masculin est

399Jean-Charles Asselain, Histoire économique de la France du XVIIIe siècle à nos jours. I. De l'Ancien Régime à la Première Guerre mondiale, Seuil, Histoire,1984, p. 120.

400Cité par Robert Castel, Les métamorphoses de la question sociale, op. cit., p. 237.

401« La grande masse de la nation française est constituée par une simple addition de grandeurs de même nom, à peu près de la même façon qu’un sac rempli de pommes de terre forme un sac de pommes de terre », écrit-il dans Le 18 Brumaire de Napoléon Bonaparte, 1851, Paris, Les Éditions sociales, 1969 [en ligne].

impuissant à inverser les inégalités économiques, que le capitalisme n'a fait qu'accentuer. L'écart criant entre « l'égale souveraineté politique de tous et la tragique infériorité de la condition civile de certains » devient de plus en plus difficile à justifier. La réalité sociale affiche un « déficit flagrant au regard de son nouveau fondement politique »403, déficit qu'il devient crucial de combler.

Tandis que d'un côté, les profits s'envolent, de l'autre les salaires sont maintenus au seuil minimal de la reproduction de la force de travail. Le risque de fracture paraît alors inévitable. C'est la grande peur du premier XIXe siècle, qui s'accompagne également d'une part de fantasme. Car si les conditions de vie déplorables de la nouvelle classe ouvrière sont indiscutables404, son effectif semble avoir été exagéré, notamment dans une France incomparablement plus rurale que ses voisins Anglais ou Flamands. Ainsi, sur les 4,4 millions d'ouvriers français en 1848, on compte « seulement » 670.000 prolétaires urbains405. Si la France n'atteint pas le degré de brutalité inouïe de l'industrie anglaise, elle n'en demeure pas moins une nation qui s'industrialise, et prospère également par l'exploitation d'une main-d’œuvre féminine et infantile, dans le textile par exemple. Cela dit, ce nouveau type de travailleur devient l'avant-garde visible et effrayante d'une classe toute entière. Ce fantasme du paupérisme se nourrit indéniablement du mépris et de la crainte des possédants, prenant conscience des inégalités produites par leur enrichissement fulgurant.

Cette hantise se fait d'autant plus prégnante que, contrairement à l'Ancien Régime, cette pauvreté endémique émerge du cœur de la cité. Auparavant, les éléments perturbateurs, les vagabonds, se tenaient à l'écart de la société et de la production : il était possible de les enfermer dans des asiles-prisons, de les exiler aux galères, voire de les exécuter purement et simplement. Pour l'Encyclopédie, est pauvre celui qui « a besoin de l’assistance d’autrui, faute de pouvoir gagner sa vie par le travail. »406 Désormais, une « classe dangereuse » naît de l'organisation même du travail moderne et sa misère est une condition de cet appareil productif : elle est la part d'ombre indispensable à la réussite économique. Pour cette raison, la solution ne peut être la répression pure et simple ; il devient nécessaire d'inventer des procédures de conservation et de formation, sans contrevenir au libre jeu économique nouvellement gagné.

403Ibid., p. 67.

404D'Engels à Dickens, en passant par Eugène Buret et les études réactionnaires de Villermé, les symptômes sont sensiblement similaires ; ce sont surtout les remèdes qui diffèrent.

405Gérard Noiriel, Les ouvriers dans la société française, XIXe -XXe

siècle, 1986, Seuil, Points Histoire. 406Louis de Jaucourt, Encyclopédie, op. cit., T. XII., 1765, p. 209.

2. Paupérisme, tournant moral et philanthropie.

Le problème qui se pose à la bourgeoisie peut être résumé ainsi : comment contenir le grondement de la misère, comment « faire société » sans revenir sur les acquis du libéralisme, ni changer les rapports de production. La question est d'autant plus épineuse que ces moyens de production modernes exigent une population formée, une force de travail quotidiennement recouvrée, et que cette population prolétarisée entend faire valoir sa voix sur la scène politique. La riposte inventée par la bourgeoisie sera la philanthropie, par laquelle elle pourra tout à la fois prendre soin de cette population et assurer une mission de domination et de pacification sociale.

La philanthropie a ceci d'efficace qu'elle se présente comme résolument apolitique, et fait du problème de la misère un problème moral. Elle se trouve d'autant plus confortée dans cette direction par le fait que ce paupérisme est perçu par les classes supérieures comme une dégradation morale inédite, transformant le prolétaire en ennemi de la civilisation. En 1831, le

Journal des débats dépeint les Canuts Lyonnais en barbares, les faubourgs en « nouvelle

Tartarie ». Le prolétariat apparaît comme une condition anthropologique nouvelle : un retour à la sauvagerie d'avant la civilisation, liée à une désocialisation propre à la vie moderne, et urbaine en particulier. Par son asocialité et ses mœurs en rupture totale avec la culture bourgeoise, le monde ouvrier fait l'effet, au début des années 1830, d'une véritable « nation

dans la nation »407.

Ces jugements sont alimentés par les études et descriptions nouvelles des us et coutumes ouvriers. L'enquête sociale, qui prend ses marques à cette époque, et qui va nourrir de ses ŕsultats empiriques les vocations philanthropiques. Cette investigation se caract́rise par « le regard anxieux des classes dominantes – et parmi elles des préposés au fonctionnement social : administrateurs, économistes, médecins, vigies souvent lucides des nouvelles forteresses – sur cette réalité sociale qu'elles produisent et qui les menace en même temps. »408

Avant la création des grands organes de recherches nationaux, ce sont les Académies des sciences qui missionnent les enquêteurs et les envoient à la découverte de cet effrayant exotisme. On se défie de la statistique pour aller constater sur place et résoudre cet apparent paradoxe : pourquoi les régions les plus actives produisent également le plus de pauvreté ? Et comment faire face à ce nouvel état social ?

L'un des points de départ de cette confrontation avec le paupérisme est l'enquête menée en 1820 par Joseph-Marie de Gérando, Baron de l'Empire, publiée sous le titre Le visiteur du

407Daniel Stern, cité par Robert Castel, Les métamorphoses de la question sociale, op. cit., p. 224. 408Michelle Perrot, Enquêtes ouvrières, Edhis, Paris, p. 2.

pauvre. L'enquête et le secours deviennent un outil de moralisation, de normalisation

« morale » des comportements, imposant un rapport fondamentalement inégalitaire entre les partis : « La richesse et la pauvreté sont appelées l'une vers l'autre par une sorte d'alliance qui appartient à une moralité plus élevée. » S'il y a des indigents, c'est pour que les riches aient l'occasion de faire des dons et d'alléger leur âme, et par là de « goûter la volupté sublime de la générosité »409. Selon Gérando, la pauvreté est une « difficile éducation », la richesse un écueil à surmonter et l'harmonie réside dans l'alliance des deux classes, bien supérieure à l'alliance entre les égaux, parce qu'elle est entièrement désintéressée. Et l'auteur de lancer cet appel : « Riche, encore un coup, comprends ta vraie dignité ! Tu n'es pas seulement appelé à être libéral, tu es appelé à une tutelle, à une tutelle libre et de ton choix, mais réelle et active. »410

Au libéralisme économique des Lumières s'ajoute, comme une conséquence imprévue, la charge de l'accompagnement du pauvre. Et cette tutelle est certes économique, mais aussi et surtout morale : « Ah ! Il y a une indigence de l'âme et de la raison, plus fatale encore que la faim ! »411

Gérando innove également dans sa méthodologie. Il part de l'observation empirique afin de donner à la philanthropie une assise scientifique, à partir de laquelle il cherche à établir une « technologie de l'assistance » tournée vers l'efficacité, à travers un examen méticuleux des besoins des nécessiteux. La pratique de la charité s'en trouve rationalisée : on ne donne plus au hasard, on répartit efficacement l’aumône, en fonction de la décence du demandeur. Ce dernier est-il vraiment indigent ? N'a-t-il pas une famille pour lui venir en aide ? Quelles sont les fautes qui l'ont mené à la pauvreté ? Comment ces écarts de conduite peuvent-ils être corrigés ? Le secours aux pauvres s'accompagne d'un arsenal technique pour percer l'opacité de la réalité sociale : la philanthropie se caract́rise par un souci d'extraire du peuple une vérité, condition ultime de la stabilité sociale. A travers ces investigations de terrain s'invente un nouveau regard sur la pauvreté, et avec lui un type de visite aux pauvres et à l'atelier qui n'a plus pour but le loisir ou la méditation, mais l'efficacité du secours et la définition d'une conduite normale.

Une génération plus tard, Frédéric Le Play deviendra le chef de file de ce courant réformiste conservateur mêlant enquête sociologique et encadrement moral, philanthropie et façonnage des mœurs et des désirs. Il en sera l'ambassadeur dans les hautes sphères du pouvoir comme auprès des industriels. Son premier recueil d'envergure, Les ouvriers

euroṕens, regroupant plusieurs dizaines d'enquêtes de terrain à l'échelle d'un continent, est 409Joseph-Marie de Gérando, Le visiteur du pauvre, Colas, Paris, 1820, p. 3.

410Ibid., pp. 9-10. 411Ibid., p. 10.

considéré par Benjamin comme le grand œuvre du mouvement philanthropique du Second Empire. Selon lui, ce courant a entretenu la « fantasmagorie qui domine les débuts du prolétariat » : « l'illusion selon laquelle la tâche de la révolution prolétarienne serait d'achever, main dans la main avec la bourgeoisie, la tâche de 1789 »412. Le Play, bientôt nommé Commissaire général de l'Exposition Universelle de 1867 par Napoléon III, a été le grand théoricien scientifique de cette fantasmagorie du social.

3. Frédéric Le Play et la réforme sociale : entre harmonie de classe et morale chrétienne.

a. De la technique au social : un changement de paradigme.

Pour comprendre la part centrale qu'occupe ce courant social dans l'Exposition de 1867, il faut donc revenir sur le parcours de ce père fondateur de l'école sociologique traditionnelle. Très impliqué dans les exhibitions de 1855 à Paris et 1862 à Londres, Le Play, proche conseiller de Napoléon III, bénéficie d'une forte audience dans les milieux autorisés. L'édition de 1867 lui permettra d'exposer ses idées à un public de masse, sans équivalent à l'époque. Nommé commissaire général, il commence à y travailler dès 1865, dans la foulée de son livre-programme, La ŕforme sociale en France413. Il n'est pas exagéré de voir dans l'exposition une mise à l'épreuve pratique de son programme social : enquêtes sociologiques, logements modèles et produits bon marché témoignent de l'emprise de la pensée de l'auteur sur l'organisation de l'événement.

Né en 1806, diplômé de Polytechnique en 1825, puis de l’École des Mines en 1827, Le Play est l'une des figures de proue de cette « génération de 1830 » qui maîtrise parfaitement les avancées technologiques de son temps, et prétend organiser la société sur des bases scientifiques. On ne s'étonnera pas de trouver dans ses rangs nombre de saint-simoniens, comme Michel Chevalier ou Jean Reynaud. Si Le Play s'est toujours tenu à l'écart de cette doctrine, il ne cessera d'échanger et de collaborer avec ses adeptes. Les émeutes de Juillet 1830, et plus encore les Journées de 1848, ont sur lui un effet déterminant : le corps social, instable et perclus de vices, a besoin d'être réformé414.

412Walter Benjamin, « Paris, Capitale du XIXe siècle », Œuvres III, op. cit., p. 65.

413Frédéric Le Play, La Réforme sociale en France, déduite de l'observation des peuples européens, Plon, Paris, 1864, 2 vol.

À cette fin, il lui paraît de plus en plus urgent d'en comprendre scientifiquement les lois. Conforté dans cette opinion par les changements de régimes successifs, Le Play, ingénieur de formation (il occupe la chaire de métallurgie à l’École des Mines jusqu'en1840), entend privilégier l'étude de terrain, au plus près des besoins réels des populations415. Tout comme la méthode expérimentale a mis fin à de nombreux débats dans le champ des sciences dures, l'observation des faits et la vérification des données empiriques doivent éteindre à leur tour, « par le cachet de l'évidence », les polémiques enflammées par le jeu des idéologies. À l'ambition technique de ses prédécesseurs Gérando et Villermé (avec qui il partage un fond de moralisme conservateur), il ajoute un cadre analytique rigoureux et original, qu'il ne cesse de mettre à l'épreuve lors de ses très nombreux voyages. De la solidité de cette méthode d'investigation dépendent les résultats obtenus et le programme fixé pour parvenir à réformer efficacement la société, et garantir « l'harmonie, condition indispensable du progrès » et seule « vraie voie de la civilisation »416. Il développe donc une « ingénierie du social », appliquée non plus tant au gouvernement des choses qu'à la conduite des hommes. En faisant prévaloir l'étude de cette gouvernementalité humaine sur le seul progrès mécanique, il renverse le paradigme saint-simonien de son époque. Ce renversement s'avérera décisif lors de l'organisation de l'Exposition de 1867, où un débat l'oppose à Michel Chevalier, l'économiste officiel de l'Empereur417, convaincu que le Jury International doit primer le progrès et les inventions techniques. Le Play insiste au contraire pour instaurer un « Nouvel ordre de récompenses », visant à mettre à l'honneur les grandes réussites d'harmonie sociale dans l'industrie. Comme il l'écrit dans sa Réforme sociale,

on peut contester, en effet, que la cŕation d'une fabrique soit un fait ḿritoire, si elle fournit une nouvelle occasion de d́velopper le pauṕrisme. Au contraire, lors meme qu'on étranger à la politique et aux lettres, j'ai voulu, sous le poids d'une grande épreuve, retrouver le secret d'un gouvernement qui n'aurait plus l'effusion du sang pour début et pour terme. En 1830, une blessure, offrant peu de chances de guérison, me tint suspendu pendant une année entre la vie et la mort. (...). A la vue du sang versé par la révolution de Juillet, je vouai ma vie au rétablissement de la paix sociale dans mon pays. Je n'ai jamais oublié ce vœu. » Frédéric Le Play, La méthode sociale, Mame et fils, Tours, 1879, p. IX.

415« Pour retrouver le secret des gouvernements qui procurent aux hommes le bonheur, fondé sur la paix, j'ai appliqué, à l'observation des sociétés humaines, des règles analogues à celles qui avaient dressé mon esprit à l'étude des minéraux et des plantes. J'ai construit un mécanisme scientifique, en d'autres termes, j'ai créé une méthode qui m'a permis de connaître personnellement toutes les nuances de paix et de discorde, de prospérité et de souffrance que présentent, en Europe, les sociétés contemporaines. » Frédéric Le Play, La méthode