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Les transitions de phase d’équilibre

1.3 La transition vitreuse : une transition dynamique ?

2.1.2 Les transitions de phase d’équilibre

Le diagramme de phase colloïdal

Prétendre à une description physique exhaustive des ferrofluides est évidemment illusoire, puisque ces systèmes complexes sont des dispersions de nanoparticules magnétiques, tapis-sées d’ions citrates en surfaces, dans un solvant qui contient des contre-ions et des co-ions. Nous adopterons donc le point de vue à un composant (dénommé également “gaz de soluté”) en considérant un ferrofluide comme une dispersion de nanoparticules magnétiques chargées (on ne discutera pas ici l’effet de la couche d’ions citrate) dans un solvant considéré comme un continuum, dont la concentration en sel écrante plus ou moins les interactions électrostatiques entre particules. Dans une telle approximation, une dispersion colloïdale diluée s’apparente à un gaz de particules, dont les propriétés physiques dépendent des grandeurs thermodyna-miques comme le volume, la densité, la température. . . Une différence notable avec les sys-tèmes moléculaires est que la pression pertinente à considérer est la pression osmotiqueΠ de

la solution7, qui traduit l’intensité des répulsions entre nanoparticules.

Tout comme dans le cas des systèmes moléculaires, un changement de température peut en-gendrer des transitions de phases dans les dispersions colloïdales. Dans le cas des colloïdes chargés, les transitions de phases peuvent également être obtenues en modifiant l’état d’inter-action entre colloïdes. Si par exemple la force ionique est augmentée (les répulsions électro-statiques sont davantage écrantées) et les attractions de Van der Waals peuvent produire une condensation du gaz de particules8

Ces transitions de phases ont été étudiées dans les ferrofluides par DUBOIS, COUSIN et.

7La pression osmotique d’une solution est la surpression due à la présence des nanoparticules chargées en solution

8L’application d’un fort champ magnétique extérieur peut également, en modifiant la nature des interactions dipolaires, induire une transition de phase. De petites goutelettes de phases concentrées apparaissent alors et s’allongent dans le sens du champ magnétique. Nous avons pris soin dans cette étude d’utiliser des supsen-sions monophasiques, en travaillant avec des champs magnétiques inférieurs à ce champ seuil. Ce phénomène est également minimisé lorsque les répulsions entre nanoparticules sont importantes, c’est à dire à basse force ionique

al. [123–125]. Ces auteurs ont déterminé, par observation au microscope optique, les seuils de transition gaz-liquide dans les ferrofluides en variant la force ionique des dispersions, puis, les reportant dans le plan Π − Φ ont ainsi établi la ligne de coexistence. Le diagramme de

phase des ferrofluides présente de fortes similarités avec les diagrammesP − V des systèmes

moléculaires9. Nous avons représenté figure 2.2 le diagramme des phases colloïdal des ferro-fluides. Au sommet de la courbe de coexistence (croix noires) une région critique est observée expérimentalement (voir les photos du bas de la figure 2.2), au voisinage de laquelle de larges fluctuations de densité sont observées. Les mesures de diffusion de rayonnement ont permis de mesurer la compresssibilité osmotique des ferrofluides au voisinage de cette région critique et ont confirmé la présence d’une transition de phase du second ordre. Loin de cette région, la transition gaz-liquide est du premier ordre. Les mesures de diffusion de rayonnement per-mettent également de caractériser la nature du potentiel d’interaction entre nanoparticules. A haute pression osmotique, celui-ci est globalement répulsif (de type Yukawa) alors qu’il est attractif (de type Lennard-Jones) à basse température.

Une application pratique de cette transition liquide-gaz est la technique de “tri en taille”, uti-lisée par les chimistes de notre laboratoire. Il est possible d’induire une condensation d’une partie d’un ferrofluide en ajoutant du sel. La partie liquide, plus riche en grosse particules peut être isolée, et permet de réduire la polydispersité des suspensions. Grâce à cette méthode, nous avons pu utiliser des ferrofluides avec des distibutions de tailles de particules variées.

Enfin, le diagramme des phases montre l’existence d’un état solide10, à fortes fractions volu-miques. Il y a, au regard du diagramme des phases, deux types de transitions vers l’état solide : la première à haute pression osmotique, à partir de l’état fluide (pour lequel le potentiel est globalement répulsif), la seconde à partir de l’état liquide (potentiel attractif). Nous avons étudié ici uniquement le premier type de transition, en utilisant des échantillons soumis à de fortes répulsions électrostatiques.

9Π est l’équivalent de P , φ l’équivalent de 1/V

FIG. 2.2 –En haut : diagramme de phase colloïdal des dispersions de nanoparticules de maghémite citratées, dans le plan pression osmotique (Π), faction volumique de nanoparticules (φ). V est le volume moyen d’une nanoparticule. Le symbole (G) désigne la phase gaz, (L) la phase liquide, (G+L) la zone de coexistence gaz-liquide et (S) la phase solide, non cristalline. Les croix noires (données extraites de [119]) constituent la courbe de coexistence gaz-liquide, avec un point critique (PC) en son sommet. Les lignes pointillées noires sont des guides délimitants les différentes phases. La ligne pointillée verte correspond au gaz parfait de nanoparticules (annulation du second coefficient du virielA2). Les symboles rouges correspondent au ferrofluide A aux diffé-rentes fractions volumiques que nous avons principalement utilisées dans cette étude. Le symbole rouge plein est un ferrofluide vitreux dont nous étudierons les propriétés dynamiques dans le chapitre 3. En bas : clichés de microscopie optique de ferrofluides biphasiques. De gauche à droite : (i) des gouttes de phase liquide dans une phase gaz majoritaire, (ii) la région critique ou d’importantes fluctuations de densité sont observées et (iii) des gouttes de phase gaz dans une phase liquide majoritaire

La technique de compression osmotique

Expérimentalement, un ferrofluide peut être mis dans un état précis du diagramme de phase par une technique de compression osmotique, dont un schéma est représenté figure 2.3. Initialement dans un état Πi; Φi; [cit]librei , le ferrofluide est introduit dans un boudin formé

par une membrane semi-perméable qui est immergé dans une solution de polymère dissous11, à une force ionique donnée. La membrane est perméable à l’eau et aux ions, mais ni aux polymères ni aux nanoparticules. La fraction massique de polymères,W = mpolymeremtot permet donc d’imposer la pression osmotiqueΠbain du bain de compression, la concentration d’ions libres dans le bain permettant elle d’imposer sa force ionique12[cit]bain.

FIG. 2.3 –Schema d’un bain de compression osmotique.

Trois à quatre semaines plus tard, le système a équilibré sa pression osmotique et sa force ionique. Le ferrofluide est sorti de son boudin de compression, et l’on considèrera que son état final vérifie

Πf errofbainet[cit]libre

f = [cit]bain.

11Nous utilisons du dextran de masse M=500 kg.mol−1

La fraction volumique du ferrofluide est alors déterminée par dosage du fer.