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Transition entre le régime d’émission continue et le régime d’émission pulsée 160 d) Discussion

c) Influence de la largeur à mi-hauteur du filtre sur le régime d’émission du laser

IV.6 Transition entre le régime d’émission continue et le régime d’émission pulsée 160 d) Discussion

Sabert et al[16]ont démontré la relation qui existait entre la pente du filtre spectral et la largeur

à mi-hauteur du spectre d’émission d’un laser utilisant un décaleur de fréquence dans la boucle de contre-réaction. Les résultats des simulations présentés dans la section précédente complètent cette observation: le régime d’émission du laser est directement relié au choix du filtre. À ce titre, nous avons démontré que deux facteurs étaient à l’origine des transitions entre le régime continu et le régime de modes déclenchés : le facteur d’asymétrie du spectre (facteur γ) et la largeur à mi-hauteur du filtre spectral. En effet, nos investigations numériques démontrent que dans le cas de l’utilisation d’un filtre Fabry-Perot comme dispositif spectral, le spectre est quasiment symétrique (facteur γ proche de zéro). Dans le cas du réseau de Bragg, les spectres présentent une forte asymétrie. Au-delà du choix d’une technologie, c’est réellement la forme spectrale du filtre qui est importante. La figure 4.25 illustre parfaitement cette affirmation. Il s’agit du spectre du laser et du filtre associé, à savoir un réseau de Bragg (Fig. 4.25 (A)) et le filtre Fabry-Perot (Fig.4.25 (B)).

La réponse spectrale d’un réseau de Bragg est de forme carrée. Autrement dit, la bande passante de ce filtre est relativement large. Compte-tenu du fait que la physique d’un laser utilisant un décaleur de fréquence prévoit que le spectre est toujours situé sur un coté du filtre, la partie uniforme de la bande passante permet au gain d’amplifier de manière substantielle la traîne du spectre.

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En effet, le gain se situant dans la partie centrale du filtre est beaucoup plus important que sur les cotés. L’amplification de la traîne du filtre se produit même dans le cas où le réseau de Bragg est étroit (Fig 4.24 (A)).

Figure 4.26 : Analyse de la dynamique du laser lorsque la puissance de pompe ou la largeur du filtre varie. (A) Analyse lorsque la puissance de pompe varie. (B) Analyse lorsque la largeur du filtre varie.

La figure 4.26 présente le spectre de l’émission laser lorsque la puissance de pompe ou la largeur à mi-hauteur du filtre varie qui sont à mettre en relation avec les figures 4.19 (B) et 4.24 (A). Lorsque la puissance de pompe varie, on constate que le facteur d’asymétrie augmente aboutissant à la création d’un train d’impulsions. Lorsque la largeur du filtre augmente, le facteur d’asymetrie reste constant alors que la largeur à mi-hauteur du spectre augmente et engendre l’apparition du régime impulsionnel. L’analyse de la figure 4.26 permet de confirmer et de mieux appréhender cette dynamique.

Dans le cas où la puissance de pompe augmente, le facteur d’asymétrie mais aussi l’amplitude du spectre augmente (figure 4.26 (A)). En effet, en augmentant la puissance de pompe, on augmente la valeur du gain net du milieu amplificateur. En conséquence l’énergie du spectre se situant dans la traîne du spectre devient de plus en plus importante. Lorsque la puissance de pompe atteint le seuil de 50 mW, l’énergie emmagasinée dans la traîne du spectre est alors suffisante pour induire la dynamique à l’origine du régime de modes déclenchés.

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Si au contraire la puissance de pompe est constante mais la largeur à mi-hauteur du filtre varie, la valeur du gain net est constante au cours des simulations. On remarque, en analysant la figure 4.26 (B), que la largeur à mi-hauteur du spectre augmente alors que le facteur d’asymétrie, lui, reste constant (figure 4.24 (A)). Encore une fois le fait d’augmenter la largeur du filtre entraîne une augmentation de l’énergie située dans la traîne du spectre car la largeur spectrale de cette dernière est de plus en plus importante. Lorsque la largeur à mi-hauteur du filtre atteint la limite de 12 GHz, il y a assez d’énergie accumulée sous la traîne du spectre pour que le décalage en fréquence induise la dynamique responsable du régime impulsionnel.

Dans le cas du filtre Fabry-Perot, le pic de transmission est beaucoup plus étroit. La partie du spectre pouvant être amplifiée par un gain maximal est plus réduite et ne permet pas de développer une grande asymétrie. Un spectre parfaitement ou quasiment symétrique est synonyme de régime d’émission continu pour le laser. La nature même du filtre Fabry-Perot ne permet pas de développer un spectre asymétrique et donc le régime d’émission ne peut être que continu. Le choix d’un filtre Fabry-Perot comme dispositif de sélection spectrale est la garantie d’obtenir un régime d’émission continue pour le laser. Il est donc tout à fait normal, au regard des simulations précédentes, que les auteurs[12], [17]-[19] qui ont utilisé ce type de filtrage dans leur configuration laser n’ont jamais observé le

régime impulsionnel que nous avons décrit au cours de ce chapitre.

L’utilisation d’un réseau de Bragg pour assurer le filtrage en longueur d’onde est plus complexe. En effet, les deux régimes d’émission sont alors possibles, le régime continu mais aussi le régime impulsionnel. Le réseau de Bragg tend à rendre le spectre du laser asymétrique grâce à une amplification substantielle de la traîne de ce dernier. Cette forme du spectre favorise alors le régime de modes déclenchés. Cependant, nous avons démontré qu’il était possible d’obtenir un régime continu avec ce type de filtre (figure 4.23 (B)). Le paramètre, responsable de la sélection de ces régimes, est la largeur à mi-hauteur du filtre.

IV.7 Conclusion 163

IV.7 Conclusion

Nous avons consacré ce chapitre à l’étude expérimentale et théorique du régime d’émission à modes déclenchés passif observé dans un laser à fibre en anneau dont la cavité contient un filtre et un décaleur acousto-optique. Ce chapitre nous a permis de mettre en avant plusieurs aspects novateurs.

Le régime de modes déclenchés passif avait déjà été observé avec des lasers à fibre utilisant l’erbium comme milieu de gain. L’origine de ce régime avait été imputée au concept de paires d’ions provenant d’un dopage important du milieu de gain. Les agrégats ainsi formés se comportaient alors comme un absorbant saturable induisant un régime d’émission impulsionnel. À l’aide d’un protocole expérimental relativement simple, nous avons démontré que le concept de paires d’ions n’était pas à l’origine du régime de modes déclenchés observé dans notre expérience. C'est pourquoi nous avons entrepris une étude théorique.

Notre modèle repose sur la propagation d’ondes progressives, principe couramment utilisé dans le domaine de la physique des lasers afin de simuler un régime d’émission en modes déclenchés. Ce formalisme a été légèrement modifié afin qu’il prenne en compte le décaleur de fréquence. Nous avons porté une attention particulière au choix de la méthode de résolution numérique afin de limiter le temps de calcul.

Une première série de simulations nous a permis de démontrer que l’origine de ce régime n’était pas reliée à une modulation des pertes de la cavité contrairement au régime classique de modes déclenchés, où la nature impulsionnelle est imputée à la modulation des pertes de la cavité. Des investigations plus approfondies nous ont permis d’identifier et de comprendre la dynamique de ce régime, qui se trouve dans un processus de modulation du spectre. Un phénomène d’auto-injection redistribue l’énergie à l’intérieur du spectre du laser. Nous avons démontré que la forme du spectre ainsi que son amplitude varie au cours du temps alors que les pertes de la cavité ainsi que le gain demeurent constants. Le décaleur de fréquence est à l’origine de ce phénomène. Sous certaines conditions, le décalage en fréquence induit un gain pour l’ensemble du spectre, on parle alors de bilan d’énergie positif. C’est à dire que l’énergie perdue, car injectée dans une bande de longueurs d’onde où

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l’atténuation domine, est plus faible que celle injectée vers le centre du spectre laser, là où le gain est maximal. Ce phénomène apparaît lorsque le spectre est large, peu puissant et fortement asymétrique. On assiste alors à l’augmentation de l’amplitude du spectre et donc à la naissance d’une impulsion.

Lorsque le spectre devient étroit et moins asymétrique, le bilan d’énergie devient alors négatif, c’est-à-dire que l’énergie perdue est plus importante que celle qui est injectée vers le centre du spectre. L’intensité totale du spectre et l'amplitude de son maximum ainsi que la puissance de sortie du laser, diminuent on assiste alors à la décroissance de l’impulsion. Au regard de nos simulations numériques, nous avons décidé d’identifier ce régime comme étant un régime d’émission en modes déclenchés passif à modulation de fréquence par analogie au régime d’émission en modes bloqués à modulation de fréquence.

Nous avons enfin consacré la dernière partie de ce chapitre à l’étude des transitions entre le régime d’émission continue et celui de modes déclenchés observés dans le chapitre précédent. En effet, de nombreuses publications traitant des lasers utilisant un décaleur de fréquence et incluant un filtre Fabry-Perot comme dispositif de sélection spectrale ne présentaient pas de régime d’émission en modes déclenchés. Une étude numérique a permis d’établir que le choix du filtre était fortement corrélé au régime d’émission du laser. En effet, ce choix influence deux paramètres : l’asymétrie du spectre et sa largeur à mi-hauteur. Lorsque le réseau de Bragg est utilisé, le spectre est fortement asymétrique ce qui est responsable de l’émission en régime impulsionnel. La nature même d’un filtre Fabry-Perot empêche la formation d’une asymétrie dans le spectre ce qui assure par la même occasion un régime d’émission continue.

Nous avons aussi démontré que le régime d’émission continue pouvait apparaître et ceci même lorsqu’un réseau de Bragg était utilisé comme dispositif de sélection spectrale. Le paramètre primordial est alors la largeur à mi-hauteur du filtre. La réponse spectrale d’un réseau de Bragg conjugué au gain du laser induit une asymétrie au spectre. Cependant le régime d’émission devient impulsionnel uniquement lorsque le spectre est assez large pour générer des pertes suffisantes pour interrompre le processus laser. La largeur du spectre étant directement proportionnelle à la largeur du filtre, un choix éclairé du réseau de Bragg permet alors d’assurer un régime d’émission continu.

IV.7 Conclusion 165

Bien qu’un filtre Fabry-Perot assure un régime d’émission continue, ce dernier implique quelques inconvénients comme la dégradation de la platitude du spectre de sortie[19]. La technologie

des réseaux de Bragg permet le contrôle de la force du filtre au cours de l’écriture. On peut donc envisager d’adapter la réponse du filtre en fonction de celle du milieu de gain. Dans le chapitre suivant, nous allons donc utiliser cette propriété afin de réaliser une source fortement multi-longueurs d’onde couvrant toute la bande C de l’erbium et émettant en régime continu avec une platitude du spectre de sortie acceptable.

IV.8 Bibliographie 166

IV.8 Bibliographie

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[11] B. A. E. Saleh et M. C. Teich, “Fundamentals of photonics”, Wiley interscience, 1991.

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[13] J-N. Maran et S. LaRochelle, “Temporal characterization of a multiwavelength Erbium- doped fiber laser with frequency-shifter feedback”, Proc. SPIE, Vol. 4833, pp. 855-861, 2002.

IV.8 Bibliographie 167

[14] W.H. Press, S.A. Teukolsky, W.T. Vetterling et B.P. Flannery, “Numerical recipes in C”, Cambridge University Press, 1999.

[15] A. Chandonnet et G. Larose, “High power Q-Switching erbium fiber laser”, Opt. Eng., Vol. 32, pp. 2031-2035, 1993.

[16] H. Sabert et E. Brinkmeyer, “Pulse generation in fiber lasers with frequency shifted feedback”, J. Lightwave Technol., Vol. 12, pp. 1360-1368, 1994.

[17] R. Slavìk, S. LaRochelle et M. Karasek, “High-performance adjustable room temperature multiwavelength Erbium-doped fiber ring laser in C-band”, Opt. Comm., Vol. 26, pp. 365-371, 2002.

[18] R. Slavìk et S. LaRochelle, “Frequency shift in a fiber laser resonator”, Opt. Lett., Vol. 27, pp. 28-30, 2002.

[19] S.K. Kim, M.J. Chu et J.H. Lee, “Wideband multiavelength erbium doped fiber ring laser with frequency shifted feedback”, Optic. Comm., Vol. 190, pp. 291-302, 2001.

[20] J-N. Maran, S. LaRochelle et P. Besnard, “An erbium-doped fiber laser simultaneously modelocked on more than 24 wavelengths at room temperature”, Opt. Lett., Vol. 28, pp. 2082-2084, 2003.

[21] Abramowitz. M. et Stegun, I. A. Handbook of Mathematical Functions with Formulas, Graphs, and Mathematical Tables, 9th printing. New York: Dover, p. 928, 1972.

CHAPITRE

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