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Transformation non lin´eaire du rapport signal sur bruit

3.3 Bruit utile, gains RSB et traitements optimaux

3.3.1 Transformation non lin´eaire du rapport signal sur bruit

En parall`ele de l’exploration du ph´enom`ene non lin´eaire de r´esonance stochastique, je me suis pench´e sur d’autres questions de traitement non lin´eaire du signal n’impliquant pas d’effet de bruit utile. J’ai ainsi ´etudi´e en dehors d’un strict effet de r´esonance stochastique, la transforma-tion du rapport signal sur bruit entr´ee-sortie pour des signaux harmoniques par des filtres non lin´eaires. Les signaux harmoniques sont des signaux de base pour de nombreuses situations de traitement du signal, de codage ou de mesure d’information. Une composante harmonique peut ˆetre elle-mˆeme le signal d’int´erˆet ou elle peut porter une information utile via la modulation d’un de ses param`etres. C’est ainsi un probl`eme courant tr`es important dans de nombreux domaines des sciences exp´erimentales et des techniques d’avoir `a retrouver un signal harmonique cach´e dans du bruit additif. C’est d’ailleurs sur une question de ce type qu’ont d´ebut´e historique-ment, les ´etudes sur la r´esonance stochastique [10]. Un signal de fr´equence νs ajout´e `a un bruit, constitue un m´elange signal-bruit avec une signature tr`es typ´ee dans le domaine fr´equenciel : son spectre de puissance est form´e d’une raie spectrale fine `a la fr´equence νs, qui ´emerge hors d’un fond de bruit large bande. Pour quantifier dans le m´elange signal-bruit la part du signal harmonique et celle du bruit, une mesure adapt´ee est un rapport signal sur bruit (RSB) d´efini `a partir du spectre de puissance comme le rapport de la puissance contenu dans la raie spectrale νs divis´ee par la puissance contenue dans le fond de bruit situ´e autour de νs. Ce RSB mesure la fa¸con dont la raie spectrale νs ´emerge du fond de bruit. Un filtre passe-bande centr´e sur νs utilis´e pour extraire la composante harmonique a une efficacit´e qui est directement reli´ee avec le rapport signal sur bruit [49]. Ainsi, il semble int´eressant, comme pr´etraitement, d’am´eliorer le RSB. Cependant, il est connu qu’aucun filtre lin´eaire n’est capable d’am´eliorer un tel rapport signal sur bruit. En effet, un filtre lin´eaire multipliera la raie spectrale et le fond de bruit `a νs par le mˆeme facteur, le carr´e de sa fonction de transfert `a νs [49]. En cons´equence, tout filtre

lin´eaire, mˆeme dynamique, quelle que soit sa complexit´e et son ordre, laisse le rapport signal sur bruit inchang´e [49]. En revanche, rien n’est connu a priori sur la transformation du rapport signal sur bruit si on consid`ere la classe des filtres non lin´eaires.

Afin de restreindre le champ d’investigation (par d´efinition infini avec les non–propri´et´es comme le non lin´eaire) j’ai choisi d’´etudier des filtres non lin´eaires `a base de simples composants non lin´eaires et facilement implantable en ´electronique. Un deuxi`eme choix m´ethodologique a ´et´e de choisir la classe des composants sans m´emoire `a caract´eristique entr´ee–sortie statique comme celle que j’avais ´etudi´e pour les effets de bruits. Ces composants sont particuli`erement adapt´es dans ce contexte puisque leur comportement est ind´ependant de la fr´equence du signal d’entr´ee. Ainsi, si une transformation utile du rapport signal sur bruit est obtenue par un composant `a caract´eristique statique le b´en´efice de cette transformation est garanti ind´ependemment de la fr´equence νsdu signal harmonique d’entr´ee2. Le calcul du rapport signal sur bruit de l’ensemble des non-lin´earit´es statiques peut ˆetre men´e de fa¸con unifi´e [29] dans le cadre th´eorique suivant. On consid`ere un m´elange signal–bruit additif x(t) = s(t)+ξ(t), o`u le signal utile s(t) est constitu´e d’une seule composante harmonique s(t) = A cos(2πνst + ϕ),et ξ(t) un bruit blanc stationnaire de fonction de r´epartition Fξ(u) et de densit´e de probabilit´e fξ(u) = dFξ(u)/du. Le bruit ξ(t) est un bruit subit sur lequel nous ne souhaitons pas influer volontairement. Ce m´elange x(t) est appliqu´e en entr´ee d’un syst`eme non lin´eaire sans m´emoire [9] de caract´eristique entr´ee–sortie g(·) produisant la sortie

y(t) = g[s(t) + ξ(t)] . (3.9)

Dans cette situation, x(t) et y(t) sont des signaux al´eatoires cyclostationnaires [108] de p´eriode Ts= 1/νs, dont les spectres de puissance sont une raie spectrale νs´emergeant d’un fond de bruit large bande. Le rapport signal sur bruit peut alors s’exprimer comme

Rout= ¯

¯hE[y(t)] exp(−ı2πt/Ts)i¯¯2

hvar[y(t)]i∆t∆B . (3.10)

avec l’esp´erance de sortie E[y(t)]

Y1 = ¿ E[y(t)] exp ³ − ı Tst ´À , (3.11)

o`u la moyenne temporelle s’´ecrit

h...i = 1 Ts

Z Ts 0

... dt . (3.12)

et la variance instationnaire `a l’instant t var[y(t)] = E[y2(t)] − E[y(t)]2 qui fait intervenir

E[y(t)] = Z +∞ −∞ g(u)fξ[u − s(t)]du , (3.13) et E[y2(t)] = Z +∞ −∞ g2(u)fξ[u − s(t)]du . (3.14)

2Cette ind´ependance vis `a vis de la fr´equence avec des composants statiques est vrai tant que l’hypoth`ese d’un bruit physique mod´elisable par un mod`ele de type bruit blanc est valide, c’est `a dire tant que la dur´ee de correlation du bruit physique est petite devant la p´eriode Ts = 1/νs et tout autre temps caract´eristique du processus. Si l’hypoth`ese de bruit blanc n’est plus valide, l’amplification du gain en rapport signal sur bruit peut encore se produire mais la description th´eorique d’un tel gain sort du cadre de validit´e de l’ ´Eq. (3.16) et est a priori plus compliqu´e `a mener. D’autres limitations naturelles en fr´equence peuvent se produire en pratique avec les limitations physiques des composants qui pr´esentent tous une fr´equence de coupure.

Dans l’´Eq.(3.10), ∆t repr´esente la p´eriode d’´echantillonnage de la mesure. Le bruit blanc mod´elise ici un bruit large bande avec une dur´ee de corr´elation beaucoup plus petite que les autres ´echelles de temps (Tset ∆t), et une variance finie σ2

ξ. De fa¸con similaire, le rapport signal sur bruit pour l’entr´ee x(t) est

Rin= A 2/4

σξ2∆t∆B . (3.15)

Le gain rapport signal sur bruit entr´ee–sortie `a travers la non-lin´earit´e g(·) s’exprime donc

G = Rout Rin = ¯ ¯hE[y(t)] exp(−ı2πt/Ts)i¯¯2 hvar[y(t)]i σξ2 A2/4 , (3.16)

Les ´Eqs. (3.12)–(3.14) donnent acc`es au gain RSB G de l’´Eq. (3.16) pour une non-lin´earit´e de forme arbitraire g(·) et une densit´e de bruit fξ(u) de forme ´egalement arbitraire.

Illustrons le propos avec un quantifieur sym´etrique `a 3 niveaux dont la caract´eristique g(·) entr´ee–sortie s’´ecrit g(u) =    −1 for u ≤ −λ , 0 for −λ < u < λ , 1 for u ≥ λ , (3.17)

Dans ce cas, les ´Eqs. (3.13) et (3.14) s’ecrivent

E[y(t)] = 1 − Fξ[λ − s(t)] − Fξ[−λ − s(t)] , (3.18) et

E[y2(t)] = 1 − Fξ[λ − s(t)] + Fξ[−λ − s(t)] . (3.19) Ceci conduit aux r´esultats de la Fig. 3.5 si ξ(t) est un bruit centr´e gaussien. La Fig. 3.5

0 0.1 0.5 1 1.5 2 0 0.1 0.2 0.3 0.4 0.5 0.6 0.7 0.8 0.9 1 1.1 1.2

amplitude efficace du bruit σξ

G

max

λ

opt

Figure 3.5 : Seuil optimal λopt pour le param`etre λ du quantifieur de l’´Eq. (3.17), et le gain entr´ee–sortie du rapport signal sur bruit Gmax `a λopt, en fonction de l’amplitude efficace σξ du bruit (en prenant l’amplitude maximum de la composante p´eriodique s(t) `a A = 1) du bruit gaussien centr´e ξ(t).

une d´egradation syst´ematique mais relativement faible (notamment `a fort niveau σξ de bruit) du rapport signal sur bruit quand le param`etre λ du quantifieur est optimis´e. En pr´esence de bruit non gaussien, les r´esultats de la Fig. 3.6 indiquent la possibilit´e cette fois de gain en rapport signal sur bruit sup´erieur `a un. Ces r´esultats sont particuli`erement int´eressants puisqu’ils s’accompagnent d’une compression du signal d’entr´ee qui est ici quantifi´ee sur seulement 3 niveaux. Sur le mˆeme mode, les r´ef´erences [37] et [35] analysent les transformations du rapport

0 0.5 1 1.5 2 2.5 3 3.5 4 0 0.5 1 1.5 2 2.5 3 3.5 4

amplitude efficace du bruit σξ

G

max

λ

opt

A

0 0.5 1 1.5 2 2.5 3 3.5 4 0 0.1 0.2 0.3 0.4 0.5 0.6 0.7 0.8 0.9 1 1.1 1.2 1.3 1.4 1.5 1.6 1.7

amplitude efficace du bruit σξ

G

max

λ

opt

B

Figure 3.6 : Similaire `a la Fig. 3.5, except´e pour la densit´e du bruit fξ(u) qui est uniforme centr´e (A), centr´e laplacien (panel B).

signal sur bruit d’un signal p´eriodique par d’autres non-lin´earit´es statiques usuelles chez les composants ´electroniques comme les non-lin´earit´es `a saturation douce ou dure. Ces ´etudes sont syst´ematiquement men´ees en observant l’influence du bruit pris gaussien ou non-gaussien. Un r´esultat ´etonnant que montre [37] et [35] est la possibilit´e en optimisant le param`etre de saturation d’obtenir un gain du rapport signal sur bruit entr´ee-sortie sup´erieur `a 1 mˆeme en pr´esence de bruit gaussien. Tr`es peu de syst`emes non lin´eaires sont capables d’amplifier le rapport signal sur bruit d’un sinus noy´e dans un bruit blanc gaussien large bande comme d´ecrit dans [35]. L’amplification du rapport signal sur bruit est une question qui a ´et´e soulev´ee tr`es tˆot en traitement du signal [48, 12]. Pour des conditions plus restreintes d’un bruit gaussien `a bande ´etroite [48, 12] obtient un gain RSB maximum de 2 avec un comparateur. Dans le cadre moins restreint d’un bruit blanc gaussien large bande, les gains en RSB rapport´es sont ´egalement modestes : [68] fait ´etat d’un gain maximum en RSB de 1.2 avec un syst`eme non lin´eaire dynamique bistable, [24] rapporte un gain maximum en RSB 1.25 obtenu `a l’aide d’un ensemble de syst`emes non lin´eaires dynamiques bistables coupl´es en r´eseau. L’´etude [35] montre que le gain en RSB peut culminer `a 1.4 pour une simple non-lin´earit´e statique `a saturation optimalement ajust´ee.

L’amplification d’un sinus noy´e dans du bruit dans [37, 35] est bas´ee sur la s´election et l’optimisation de non-lin´earit´es statiques. Alternativement, une autre approche qui peut aussi mener `a l’amplification du rapport signal sur bruit dans des syst`emes non lin´eaires est l’injection volontaire de bruit [68, 25, 32] via la r´esonance stochastique. La diff´erence entre ces deux approches peut se pr´esenter de la fa¸con suivante. Pour une forme de non-lin´earit´e donn´ee, et un niveau de bruit σξ fix´e, la meilleure chose `a faire pour le rapport signal sur bruit, chaque fois que cela est possible, est de fa¸conner la non-lin´earit´e de fa¸con optimum en jouant sur les param`etres ajustables (le seuil du

quantifieur, le niveau de saturation, . . . ). Si on a la possibilit´e de r´epliquer les non-lin´earit´es en r´eseaux comme dans la Fig. 3.1, alors une injection volontaire de bruit peut permettre de fa¸conner la caract´eristique entr´ee–sortie du composant d´eterministe ´equivalent dans un sens qui am´eliore le rapport RSB comme je l’ai montr´e dans les ´etudes [36, 26, 32, 14] (voir [14]).