• Aucun résultat trouvé

Transfert de matière et cinétique de sorption

A. Revue bibliographique

III. Sorption aux interfaces solide-liquide

4) Transfert de matière et cinétique de sorption

L’étude de la cinétique de sorption d’une réaction solide-liquide est indispensable pour avoir des prévisions quantitativement correctes dans le temps des performances d’un procédé. Ainsi, plusieurs modèles dans la littérature sont proposés pour décrire les cinétiques

73

expérimentales à corréler avec les mécanismes réactionnels mis en jeu. Ce sont donc des modèles prédictifs quant à la réactivité du sorbant et aux réactions mis en jeu.

a) Modèles de cinétiques chimiques

Classiquement, les équations utilisées pour décrire l’immobilisation de métaux dans les eaux usées par des matériaux naturels sont des équations cinétiques du pseudo-premier ordre et du pseudo-second ordre [HO98]. Ces modèles suggèrent des mécanismes de chimisorption.

i. Modèle de pseudo 1er ordre

L’équation de pseudo-premier ordre développée par Lagergren en 1898 [HO98] est généralement exprimée sous la forme :

(26) Avec Qe et Qt, respectivement les capacités de sorption à l’équilibre et au temps t (exprimées en mgsoluté/gsubstrat), et k1 la constante de vitesse du pseudo-premier ordre (exprimée en min-1). Après intégration et avec les conditions aux limites suivantes : de t = 0 à t = tfinal et de Qt = 0 à Qt = Qe, l’équation 26 devient :

(27)

Pour ajuster l’équation aux résultats expérimentaux, la capacité de sorption à l’équilibre (Qe) doit être connue. Dans de nombreux cas, il est difficile de déterminer exactement la valeur de Qe et comme la chimisorption tend à devenir infiniment lente la quantité sorbée peut être plus ou moins sous évaluée. Aussi, la corrélation avec l’équation du pseudo-premier ordre, largement utilisée dans la littérature, ne correspond pas toujours de manière convenable avec les données expérimentales sur les gammes de temps des différentes études [HO98]. Elle est généralement applicable sur les 20-30 premières minutes du processus de sorption. On peut ajouter que le terme « premier ordre » signifie que la réaction dépend seulement de la concentration en un seul composant, à savoir ici le sorbat.

ii. Modèle du pseudo-second ordre

L’équation cinétique du pseudo-second ordre s’exprime sous la forme suivante :

(28)

Avec, k la constante de vitesse du pseudo-second ordre (en g/mg.min). Avec les mêmes conditions aux limites que pour le modèle du pseudo-premier ordre, la forme intégrée de l’équation 28 est :

74

(29) L’équation 29 peut être arrangée comme suit :

(30) La linéarisation de l’équation 30 donne :

(31) Soit h considéré comme le taux de sorption initial tel que Qt/t tend vers 0, alors il vient :

(32)

L’équation 31 peut donc s’écrire :

(33)

L’avantage de cette équation réside dans le fait qu’il n’est pas nécessaire de déterminer ou d’assigner une valeur effective à Qe. Si la cinétique de pseudo-second ordre est applicable,

c’est à dire que le tracé de la courbe t/Qt = f(t) donne une droite, il est alors possible de

déterminer les paramètres Qe, k et h à partir du coefficient directeur et de l’ordonnée à

l’origine.

b) Mécanismes de transport de matière

Différents phénomènes sont responsables du transport de la matière. La matière peut être transportée par le mouvement du fluide (transport convectif), par diffusion de zones concentrées vers des zones de concentrations plus faibles (transport diffusif) ou encore sous l’effet de force externe (sédimentation sous l’effet de la gravité…). Parmi ceux ci, la diffusion est le mécanisme de transport de la matière sous l'effet d'un gradient de concentration depuis les zones concentrées en matière vers les zones moins concentrées. La loi empirique de Fick décrit ce phénomène en énonçant que le flux de matière N, est proportionnel au gradient de concentration par l'intermédiaire du coefficient de diffusivité D :

(34)

75

Avec, N en kg/m2.s, dc en kg/m3, dx en m et D en m2/s. Dans cette équation, le signe moins

traduit le fait que le transfert se réalise des zones concentrées aux zones diluées (dans le sens opposé aux concentrations croissantes). Le Tableau 9 ci-dessous énonce les ordres de grandeur des diffusivités dans différents milieux :

Tableau 9 : Ordre de grandeur de la diffusivité.

Gaz 10-5 à 10-3 m2/s Liquide 10-10 à 10-9 m2/s

Solide 10-15 à 10-13 m2/s

Le phénomène de transfert de matière par diffusion opère dès qu'il y a une différence de concentration. C'est un phénomène spontané et inévitable (phénomène dispersif) conduisant à un équilibre.

Dans le cas de système solide-liquide, les sorbants sont rarement employés sous forme de poudres de faible dimension. La mise en forme des grains de sorbant par agglomération donne naissance à une structure à double porosité avec deux types de pores de nature très distincte. On peut ainsi diviser les sorbants en deux catégories :

Les sorbants homogènes dont la structure poreuse s’étale sur toute l’échelle d’un grain.

Les sorbants hétérogènes à double porosité issus de l’agglomération des cristaux ou des microparticules.

Les gels de silice, les alumines activées et la plupart des charbons actifs font partie de la première catégorie alors que les zéolites, les tamis moléculaires carbonés font partie de la deuxième catégorie. Les analyses décrites ci-après pourront aussi bien s’appliquer aux particules avec une distribution poreuse peu dispersée et des propriétés de transport et de transfert uniformes en leur sein [ZOU06].

Dans la littérature, il est admis que la vitesse de sorption des molécules à la surface d’un sorbant est généralement si élevée que la cinétique globale de sorption sur un grain est contrôlée par la résistance au transfert de matière plutôt que par la cinétique de sorption intrinsèque [RUT84]. Au cours de la sorption d’une espèce sur un solide, le transfert de matière a lieu de la phase fluide vers les sites actifs du sorbant. Ce processus s’opère en quatre étapes :

Cinétique de sorption intrinsèque : les molécules se sorbent en surface avec une vitesse finie.

Le transfert de matière externe (résistance de surface) : les molécules traversent la couche limite de fluide autour des grains du sorbant afin d’accéder à la surface de ceux-ci.

76

Le transfert de matière interne macroporeux : les molécules migrent à l’intérieur des macropores et des mésopores du sorbant, de la surface vers l’intérieur du grain. Ces transferts s’effectuent généralement en phase fluide et pourrait opérer plus difficilement en cas de chimisorption.

Le transfert de matière interne microporeux : les molécules diffusent dans les micropores. On parle généralement de mécanisme de processus activé (saut de molécules sorbées entre les sites de sorption).

La Figure 14 représente une particule de sorbant sphérique à double porosité.

Figure 14 : Schéma d’une particule de sorbant à double porosité [RUT84].

i. Transfert externe

Le transfert de matière externe se fait par diffusion moléculaire au travers de la couche limite de fluide présente autour du grain de sorbant. La diffusion est provoquée par un gradient linéaire de concentration entre la phase fluide et la surface du sorbant. La concentration en soluté dans le liquide à la surface du grain, en équilibre avec la quantité sorbée, est inférieure à la concentration au sein du liquide. L’épaisseur de la couche limite dépend des conditions hydrodynamiques de l’écoulement du fluide autour du grain d’adsorbant. La cinétique est caractérisée par le coefficient de transfert de matière à la surface du grain kf, qui peut être estimé par de nombreuses corrélations empiriques données dans la littérature [WAK78] valables pour des systèmes gazeux et/ou liquides. La cinétique de transfert dépend de la surface externe des grains de sorbant et donc de leur diamètre (cas des particules sphériques).

77

ii. Transfert interne macroporeux

Le transfert de matière interne macroporeux met en jeu divers mécanismes dont l’importance varie selon les propriétés du sorbant. Ainsi, dans les macropores et les mésopores, ces différents phénomènes peuvent agir en parallèle comme la diffusion moléculaire, la diffusion de Knudsen et la diffusion de surface.

Diffusion moléculaire

La diffusion moléculaire a lieu dans les pores selon le même mécanisme que dans la phase fluide mais dans ce cas elle est influencée par la structure poreuse de l’adsorbant (Figure 15). Le coefficient de diffusion poreux Dp prend en compte l’orientation aléatoire et les variations de taille des pores au travers d’un facteur de tortuosité τ généralement compris entre 2 et 6. Dp est lié au coefficient de diffusion moléculaire de l’espèce en phase liquide, DM par l’équation 35. DM peut être estimé par la formule de Stokes-Einstein ou à partir de corrélations semi-empiriques comme celle de Wilke et Chang développée en 1955. L’ordre de grandeur de DM est de 10-10 à 10-8 m2.s-1.

Figure 15 : schéma représentant la diffusion moléculaire [KRI93].

Pour un système liquide, quand la taille des molécules est très faible par rapport à

celle des pores, la limitation cinétique provient essentiellement de la diffusion moléculaire :

Dp = DM/τ (35)

Avec Dp et DM respectivement la diffusion poreuse et moléculaire en m2/s et τ le facteur de tortuosité des pores.

Le facteur de tortuosité τ doit être considéré comme un paramètre empirique et peut être déterminé expérimentalement. La valeur de τ se situe généralement entre 2 et 6 et doit diminuer avec l’augmentation de la porosité [RUT84]. En général, une trop grande valeur (τ ≥ 6) signifie la présence d’autres mécanismes de transfert tandis qu’une valeur trop faible indique l’implication de la diffusion de surface.

Aussi, dans la littérature, plusieurs auteurs ajoutent le terme de porosité dans l’expression de Dp [BAI07 ; CHI00]. Ce dernier cité, utilise alors le paramètre (ε/τ) comme

« fitting » dans sa résolution. On parle alors de coefficient de diffusion effectif De :

78

La diffusivité moléculaire d’un liquide peut être estimée à partir de la viscosité du liquide en utilisant la formule de Stokes-Einstein (Eq. 37) [KAR92] ou celle de Wilke-Chang (Eq. 38) [WIL55] :

(37)

Avec k la constante de Boltzmann (1,3806488.10-23 J.K-1), η la viscosité (1,002.10-3 Pa.s) et σ

le diamètre des molécules qui peut être assimilé par défaut au diamètre de Van der Waals [KAR92].

(38) Avec T la température (K), фB le facteur d’association du solvant B (pour l’eau фB=2,26), MB la masse molaire du solvant B (g/mol), η la viscosité du solvant (cP) et VbA le volume molaire au point d’ébullition standard en cm3/mol (pour l’eau, VbA = 75,6 cm3/mol).

Diffusion de Knudsen

La diffusion de Knudsen intervient lorsque le libre parcours moyen des molécules est plus grand que la taille des pores. Les collisions avec les parois sont alors fréquentes et influencent significativement la diffusion (Figure 16). La diffusivité de Knudsen peut être déduite de la théorie cinétique des gaz [RUT84]. Le coefficient associé est le coefficient de diffusion de Knudsen Dk. Ce phénomène n’intervient pas dans les systèmes en phase liquide lorsque la taille des molécules est très inférieure au diamètre des pores, ce qui est généralement le cas dans les macropores et les mésopores.

Figure 16 : schéma représentant la diffusion de Knudsen [KRI93].

Diffusion de surface

Les molécules sorbées sur les parois des pores peuvent migrer en passant d’un site actif à un autre, c’est la diffusion de surface (Figure 17). C’est un processus activé et fortement dépendant de la température, proche de la diffusion dans les micropores. Sa contribution peut être considérée comme négligeable compte tenu de la faible mobilité des

79

molécules sorbées. Ce phénomène est estimé par le coefficient de diffusion de surface Ds qui

est déterminé expérimentalement [KAR92].

Figure 17 : schéma représentant la diffusion de surface [KRI93].

Dans le cas où la cinétique est contrôlée par le transport macroporeux, il existe un gradient de concentration dans les macropores et les mésopores, de la surface du grain vers le centre. En revanche, la concentration dans les micropores, ou les cristaux du sorbant, est considérée uniforme sur tout le grain. La cinétique de sorption dépend donc de la taille du grain (cas des particules sphériques).

iii. Transfert interne microporeux

Dans les micropores, les molécules sont toujours très proches des parois et ne peuvent échapper à leur influence. Ainsi, la diffusion a lieu de la même manière que la diffusion de surface, c’est à dire par saut des molécules d’un site actif à l’autre. Cependant, alors que la diffusion de surface dans les macropores et les mésopores est un phénomène bi-dimensionnel, la diffusion microporeuse est un phénomène tri-dimensionnel car les parois des pores sont très proches les unes des autres. Ce mécanisme est également appelé diffusion intracristalline dans le cas d’un sorbant cristallin comme les zéolithes et le coefficient de diffusion associé est noté Dc. Si la cinétique est limitée par le transfert microporeux ou intracristallin, il existe un gradient de concentration le long des micropores. En revanche, la concentration dans les macropores et les mésopores de l’adsorbant est uniforme sur l’ensemble du grain. La cinétique de sorption ne dépend donc pas du diamètre du grain mais de la taille des cristaux dans le cas d’un sorbant hétérogène composé de cristaux agglomérés.

Conclusion

La sorption est le phénomène par lequel des molécules présentes dans un fluide (sorbat) viennent se fixer à la surface d’un matériau (sorbant) par l’intermédiaire d’interactions physiques et/ou chimiques. Les matériaux présentant des capacités de sorption importantes ont une structure poreuse très développée ce qui crée une grande surface spécifique. Cette structure poreuse se caractérise par la distribution de tailles des pores qui varie selon le type de sorbant. Les isothermes d’équilibre de sorption permettent d’obtenir des informations sur l’affinité des molécules pour le matériau et sur la capacité de rétention de ce dernier. Les modèles de Langmuir et Freundlich permettent de représenter la plupart des isothermes de sorption en phase liquide dans le cas d’un seul composé. En ce qui concerne le

80

transport de matière dans les procédés de sorption il se divise en plusieurs étapes : le transfert externe, le transfert interne macroporeux et le transfert interne microporeux. La vitesse intrinsèque de sorption étant très rapide devant les vitesses de diffusion des molécules, la cinétique globale de sorption est contrôlée par les phénomènes de transfert.

81

B. Techniques et méthodes