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A I NTRODUCTION GENERALE

B.1 A DAPTATION DES PROCESSUS DIGESTIFS ET SPLANCHNIQUES D ' ASSIMILATION AUX VARIATIONS

B.1.4 Métabolisme hépatique

B.1.4.2 Transaminations, désaminations et cycle de l'urée

Le foie est le site majeur du catabolisme de la plupart des AA, seuls les AACLR sont catabolisés principalement au niveau du muscle squelettique.

La première étape de la dégradation des AA consiste généralement en l'enlèvement de leur groupement amine (-NH3) par transamination ou par désamination. Il a été

désamination entraîne la formation d'une molécule d'eau) et transaminases impliquées dans ces réactions étaient sensibles au niveau d'apport protéique, un niveau d'apport élevé entraînant une augmentation de leur activité (Tableaux 10 et 11, Figure 13) permettant au système hépatique de dégradation des AA de répondre à un apport exogène excédant les besoins corporels. Cette stimulation de l'activité des enzymes de dégradation des AA a été démontrée dès le premier repas hyperprotéique. Ainsi, la glutaminase, qui catalyse l'hydrolyse de la glutamine en glutamate et ammoniac, et le système de clivage de la glycine sont stimulés dès le premier repas riche en protéines (Ewart et al., 1992 ; Ewart & Brosnan, 1993). La glutaminase est très fortement associée au cycle de l'urée, car elle génère de l'ammoniac qui est directement utilisé par la carbamoyl-phosphate synthase 1 (CPS-1).

Le cycle de l’urée met en jeu plusieurs AA tels que l’arginine qui est son précurseur immédiat, l’ornithine et la citrulline et de nombreuses enzymes (Figure 14). Il se déroule de part et d’autre de la membrane mitochondriale. L’urée produite est libérée dans le sang pour rejoindre les reins et être excrétée dans l’urine. Elle diffuse aussi librement dans toute l’eau corporelle et une partie se retrouve dans le lumen du côlon pour y être dégradée par les uréases bactériennes. Les principales enzymes impliquées dans ce cycle sont la Carbamoyl- phosphatase 1 (CPS-1), l'Ornithine Transcarbamoylase (OTC), l'Argininosuccinate synthetase, l'Argininosuccinate lyase et l'Arginase, les deux premières étant des enzymes mitochondriales et les trois dernières des enzymes cytosoliques.

Ces enzymes sont sensibles à l'alimentation, leurs activités étant par exemple clairement stimulées par un apport élevé en protéines (Tableau 11) que ce soit en phase post-absorptive ou postprandiale (CPS-1, Rémésy et al., 1997). Schimke (1962) a par ailleurs démontré que, dans le cas d'un passage d'un régime normoprotéique (15% de protéines) à un régime hyperprotéique (60% de protéines) chez le rat, 4 jours seulement étaient nécessaires pour que l'OTC et la CPS-1 atteignent leurs activités maximales. En ce qui concerne l'Arginase, par contre, 8 jours étaient nécessaires. Une augmentation des concentrations en enzymes dans le tissu hépatique était parallèlement observée.

Cette stimulation des enzymes du catabolisme des AA se traduit logiquement par une augmentation de la quantité d'urée produite, puis excrétée dans les urines, que ce soit chez l'animal (Schimke, 1962) ou chez l'homme (Young et al., 2000). La stimulation de l'oxydation des AA est la première réponse de l'organisme à l'augmentation de la teneur en protéines du régime. Elle intervient en effet très rapidement après le début de l'ingestion du régime hyperprotéique (Garlick et al., 1999). De plus, comme il existe des variations de l'excrétion azotée au cours de la journée, cette stimulation est encore plus prononcée en phase

postprandiale (Tomé & Bos, 2000). Young et al. (2000) ont ainsi rapporté l'existence d'une relation linéaire positive (r=0,98 et P<0,01) entre le taux de production d'urée et l'apport azoté alimentaire (Figure 15). La quantité d'urée excrétée est, elle aussi, augmentée lorsque l'apport protéique augmente, tout comme la quantité d'urée hydrolysée, même si pour ce paramètre, les variations interindividuelles sont très importantes (Tableau 12). La quantité d'urée hydrolysée est calculée comme la différence entre la quantité d'urée produite et la quantité d'urée excrétée. Cette hydrolyse est réalisée par la microflore intestinale et produit des ions NH4+ qui sont soit perdus dans les fèces sous forme d'azote libre ou d'ammoniac

(Moran & Jackson, 1990 ; Wrong et al., 1985), incorporés dans les protéines bactériennes (Metges et al., 1999c), ou encore absorbés au niveau intestinal et incorporés dans le pool d'azote métabolique (Giordano et al., 1968 ; Metges et al., 1996, 1999c ; Niiyama et al., 1979).

Forslund et al. (1998) ont démontré, chez l'homme, une multiplication par 2,6 de l'excrétion totale d'azote et par 3 de l'azote excrété sous forme d'urée urinaire lorsque l'apport alimentaire protéique habituel augmentait de 1 à 2,5 g.kg-1.j-1. Ces résultats sont en

contradiction avec ceux de Jackson et al. (1999) qui démontraient une constance de la production d'urée pour des apports protéiques alimentaires variant entre 0,5 et 2,2 g de protéines.kg-1.j-1. La particularité de ces derniers résultats reste d'ailleurs inexpliquée.

La quantité d’azote ingéré n’est pas le seul facteur alimentaire influençant la production d’urée, la nature de la protéine est aussi impliquée. Ainsi, Deutz et al. (1998) ont mis en évidence une production d'urée hépatique accrue (+13 µmol.kg PC-1. min-1) lors d'une

perfusion gastrique de protéines de soja par rapport à une perfusion de caséine (Figure 16), phénomène à mettre en relation avec la qualité nutritionnelle moindre des protéines de soja. Ce résultat peut aussi s’expliquer par la différence de composition en AA entre les 2 protéines (la teneur en méthionine du soja est très faible), d’où un déséquilibre des teneurs splanchniques d’AA et une oxydation stimulée dans le cas du soja. Ainsi, l’ingestion d’un régime déficient en un AAI stimule les voies cataboliques splanchniques par rapport à ce qui est observé lors de l’ingestion d’un régime supplémenté (Nimni & Bavetta, 1961). Une autre explication, mise en évidence par Fouillet et al. (2002), repose sur le fait que les cinétiques digestives des protéines de lait et de soja sont différentes, les vidanges gastriques sont les mêmes mais le transit intestinal est réduit dans le cas des protéines de lait, d’où une absorption différée. L’arrivée plus rapide, dans le cas des protéines de soja, des AA issus de la digestion dans le système, serait à l’origine de la plus forte désamination observée. Cette différence de cinétiques pourrait être due à la libération, dans le cas du lait, de peptides

opioïdes issus de la caséine qui ralentiraient la motilité gastro-intestinale (Daniel et al., 1990).