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2. Aspects cliniques de la maladie osseuse de Paget

2.2 Présentation clinique de la maladie osseuse de Paget

2.2.3 Traitement et suivi

La première indication pour un traitement dans la MOP est le soulagement des symptômes associés à la maladie. Par ailleurs, la douleur osseuse est le seul symptôme pour lequel il a été démontré qu’un traitement

médicamenteux apporte un réel bénéfice clinique au patient (Selby, Davie et al. 2002). Les patients asymptomatiques, mais particulièrement à risque de développer des complications devraient également recevoir un traitement. Ces patients incluent notamment ceux qui ont une MOP dans les os longs, le crâne, la colonne ainsi que dans les os adjacents aux articulations portantes telles que la hanche et le genou. Cependant cela demeure une recommandation controversée, car il n’a pas été prouvé que les médicaments indiqués dans la MOP aient la capacité de prévenir les complications associées avec la maladie (Siris, Lyles et al. 2006). Les patients qui doivent subir une chirurgie à un site pagétique actif peuvent également recevoir un bisphosphonate dans les jours précédant l’intervention pour limiter l'abondance des saignements per- opératoires, dus à l’hypervascularisation de l’os pagétique. Finalement, un traitement médical devrait être considéré chez les patients souffrant d’hypercalcémie, classiquement à la suite d’une immobilisation prolongée (Singer 2009). Les patients qui ont une forme non active de la MOP, qui sont asymptomatiques ou qui ne sont pas à risque de développer des complications ne nécessitent pas d’intervention thérapeutique. Un suivi médical régulier, incluant la mesure des niveaux de PAL totales et des radiographies des os pagétiques, est généralement suffisant (Bolland and Cundy 2013).

Le but principal de la thérapie par bisphosphonates est d’atteindre la rémission, qui se définit par la normalisation des PAL totales. Le traitement vise également à diminuer les douleurs osseuses, normaliser les lésions ostéolytiques et rétablir l’architecture osseuse, en plus de prévenir les récurrences et les complications associées à la maladie (Josse, Hanley et al. 2007). Cependant, il n’existe actuellement aucun traitement pour guérir la maladie. Étant donné que les ostéoclastes sont les premières cellules affectées dans la MOP, la thérapie repose sur l’utilisation d’agents pharmacologiques qui inhibent la résorption osseuse. Le premier agent utilisé était la calcitonine, une hormone peptidique sécrétée par les cellules parafolliculaires de la thyroïde qui, en se liant à son récepteur à la surface des ostéoclastes, inhibe l’activité de ces derniers. Cependant, ce traitement n’est plus utilisé en raison de son efficacité mitigée et ses effets secondaires potentiellement importants (Reid 2012). Actuellement, les bisphosphonates sont les antirésorptifs de choix pour traiter la MOP. Ces agents sont des analogues du pyrophosphate inorganique, et lient les hydroxyapatites qui composent la matrice minérale osseuse, plus particulièrement dans les sites où le remodelage osseux est actif. Lors de la résorption, l’acidification du milieu entraîne la dissociation des bisphosphonates contenus dans la matrice minérale, qui seront par la suite absorbés par les ostéoclastes (Roelofs, Thompson et al. 2006). Il existe deux types de bisphosphonates, qui diffèrent au niveau de leur composition chimique et de leur mécanisme d’action. Les bisphosphonates simples (étidronate, clonodrate et tiludronate) ne contiennent pas de groupement azoté. Lorsqu’ils sont absorbés par les ostéoclastes, ces bisphosphonates sont transformés en analogue toxique de l’adénosine triphosphate (ATP), causant l’apoptose des ostéoclastes et inhibant par le fait même leur activité. Les bisphosphonates qui contiennent un groupement azoté (pamidronate, alendronate, ibandronate, risedronate et acide zolédronique) sont plus

puissants que les précédents. Leur effet antirésorptif provient de leur action directe sur la voie du mévalonate. En effet, ces bisphosphonates inhibent l’enzyme farnésyl-pyrophosphate synthase, empêchant ainsi la prénylation des protéines qui sont cruciales pour la survie et la fonction des ostéoclastes (Rogers, Crockett et al. 2011). Actuellement, il y a quatre bisphosphonates qui sont approuvés pour traiter la MOP au Canada : deux qui s’administrent de façon orale (risedronate et étidronate), et deux de façon intraveineuse (acide zolédronique et pamidronate) (Josse, Hanley et al. 2007). Cependant, l’acide zolédronique représente actuellement le traitement le plus efficace dans la MOP. En effet, une étude a déterminé qu’après 6 mois, une seule perfusion intraveineuse de 5 mg entraîne la normalisation des PAL totales chez 89% des patients, et augmente de façon considérable leur qualité de vie (Reid, Miller et al. 2005). Après un suivi de 6,5 ans, seulement 0,7% de ces patients ont eu une rechute (définie par une ré-augmentation du taux des PAL totales), suggérant une efficacité à long terme pour ce bisphosphonate (Reid, Lyles et al. 2011). De plus, il est généralement très bien toléré, le seul effet secondaire ayant été répertorié est le développement d’une réaction de type Influenza dans les trois jours suivant l’injection chez environ 40% des patients (Pazianas and Abrahamsen 2011). L’autre traitement le plus utilisé au Canada est le risédronate 30 mg die per os pour deux mois consécutifs, pouvant être répété aux six mois si besoin. Ce traitement est parfois source d’effets secondaires gastro-oesophagiens et nécessite souvent d’être répété plusieurs fois lors du suivi. Les autres bisphosphonates ne sont plus régulièrement utilisés dans cette indication.

Le suivi thérapeutique s’effectue en mesurant les niveaux des PAL totales puisqu’elles corrèlent bien avec l’activité de la maladie. Généralement, une diminution de 25% de ces marqueurs biochimiques représente une réponse significative au traitement (Selby 2006). Les PAL totales devraient être mesurées environ tous les 6 mois jusqu’à leur normalisation, et aux 12 mois par la suite (Britton and Walsh 2012). De plus, des radiographies des lésions ostéolytiques devraient être effectuées un an après l’initiation du traitement pour évaluer la progression de la maladie (Singer 2009). Un deuxième traitement peut être offert chez les patients qui ont une rechute, c’est-à-dire lorsque les symptômes de la maladie réapparaissent ou lorsque les PAL totales augmentent à nouveau au-dessus des limites normales ou de plus de 25% par rapport aux taux le plus faible connu pour ce patient, et ce indépendamment des valeurs de référence. Ce deuxième traitement devra cependant être administré au moins six mois après le traitement initial (Selby 2006).