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Traitement des données récoltées : construction d’une méthode d’analyse de contenu

2. Cadrage théorique retenu pour penser la subjectivation en formation

3.3 Traitement des données récoltées : construction d’une méthode d’analyse de contenu

Retranscription et hiérarchisation des données récoltées

Le dispositif et le terrain de recherche nous ont permis de récolter de nombreuses données et ce fut une étape enthousiasmante du parcours de recherche. Ensuite est venu le temps de la retranscription, effectuée à l’aide d’un programme informatique «Express Scribe». Nous avons ainsi retranscrit les 32 entretiens menés avec les 8 étudiantes dans leur intégralité. Nous avons également retranscrit les points essentiels des entretiens menés avec les superviseurs des groupes observés et avec les autres superviseurs et membres de l’équipe pédagogique (16 entretiens en tout). Ces entretiens ne sont pas rapportés en annexes, pour des questions de confidentialité.

54 La retranscription des données a mobilisé chez nous une réaction contre-transférentielle.5 Nous avons ainsi porté une attention particulière à la phénoménologie du langage, à tout ce que peut évoquer l’acte de dire et ses modalités. Nous nous sommes intéressés aussi au discours non verbal, à tout ce qui venait confirmer ou infirmer les communications verbalisées. La perception des modalités de discours, les débits, les pauses, les moments de confusion et les tics langagiers nous ont donc permis de mettre en lumière pleinement les niveaux d’investissement ou de désinvestissement dans les entretiens des étudiantes et de la chercheuse. (Les entretiens sont repérables en annexes dans leur intégralité, sous forme de retranscription au mot par mot et anonymisés.)

Face à la masse de matériel recueilli, nous nous sommes rapidement aperçus que nous avions une quantité de données excessive qu’il fallait hiérarchiser. Nous avons ainsi décidé de nous centrer sur les entretiens des 8 étudiantes, en les croisant avec ce que nous avions pu observer de leurs groupes sur le terrain. Les données ainsi croisées nous permettent de saisir les résonances et les décalages qui nous renseignent sur les processus de formation à l’œuvre.

Nous verrons ainsi que certaines évolutions sont visibles à l’œil nu, tandis que d’autres ne peuvent qu’être racontées.

Analyse de contenu des données

Sur la base du matériau décrit, nous avons construit une méthode d’analyse des données afin de disposer d’une base de données utilisables, partageables et soutenant la réflexion. Dans notre recherche, « les variables – au lieu d’être des catégories déjà là, dont l’impact est mesuré sur une échelle graduée – deviennent cette fois les inconnues à faire émerger, donc à identifier au milieu d’un problème complexe (confus ou diffus) que l’on cherche à rendre intelligible avant de songer à le résoudre (Morin, 1990). L’enquête, en somme, se rapproche de l’expérience vécue et éprouvée par les acteurs. Pour passer d’un sentiment plus ou moins vague de difficulté à la conceptualisation de ce qui se joue - et pourrait ensuite être déjoué - en situation, le problème subjectivement éprouvé doit être circonscrit, mis à plat, décomposé, formulé à l’aide d’unités de signification à la fois discrètes (isolables les unes des autres) et articulées entre elles dans un modèle mentalement manipulable. C’est à cela que sert une approche inductive, voire une clinique des situations singulières (Cifali, 1994), leur fonction créatrice n’ôtant rien à la nécessité de raisonner méthodiquement » (Maulini, 2013, p. 2).

Nous savons que les conceptions et les modèles internes dont est porteuse la chercheuse donnent du sens à sa compréhension du monde et orientent son activité interprétative. En cohérence avec notre recherche qualitative, nous avons choisi une analyse de contenu d’approche phénoménologique, adaptée aux questions de recherches vastes et

5 Par exemple, les nombreuses pauses, intercalaires et sauts du coq à l’âne rendant la retranscription et la compréhension des réponses laborieuse nous ont aussi fait comprendre que c’était un moyen trouvé par certaines étudiantes pour parler à leurs rythme, face à l’effort de mentalisation qui leur était demandé, nous y reviendrons

55 ouvertes comme les nôtres et qui explore la recherche de sens attribué par les sujets à leur expérience, à l’aide de l’Interpretative Phenomenological Analysis-IPA (Smith, 2009). Cette méthode d’enquête idiographique, relative au singulier, est adaptée pour le traitement en profondeur de peu de cas. Elle nous a permis d’intégrer nos perceptions des contenus non-verbaux des étudiantes - observés et écoutés en entretiens - et de dégager l’axe d’investigation concernant l’impact de la recherche sur la formation.

Nous avons donc repris le matériau brut retranscrit en plusieurs temps afin d’en relever les contenus et les complexités de sens, les meanings, pour Smith. Sur la base des récurrences, des congruences et des discordances, des tensions dans le récit du vécu de formation, croisées avec ce que nous avions pu observer de l’étudiante parlant, nous avons dégagé des grandes catégories thématiques internes à l’entretien singulier, puis transversales aux 4 temps, aux 4 entretiens sur le cours de l’année. Nous avons effectué ce travail de montée en abstraction sur l’ensemble des entretiens des étudiantes, pour que les catégories thématiques soient listées de façon suffisamment représentative, puis reliées entre elles chronologiquement et par affinité de sens, jusqu’à constituer de véritables dimensions du PSF.

Ces dimensions, que l’on retrouve dans l’expérience de toutes les étudiantes, sont suffisamment stabilisées pour être comparables entre elles. Elles permettent de repérer les modalités de positionnement des sujets à l’intérieur de ces dimensions, entre les moments formatifs d’un même sujet (ces fameux 4 temps désignés dans la suite de l’écrit par T1, T2, T3, T4) et entre les sujets. Nous relevons ainsi non seulement l’évolution intra-individuelle mais aussi la dimension diachronique.

L’analyse de contenu nous a permis de raisonner par matrice et de rendre la complexité du matériau davantage intelligible (Revault D’Allones, 1999). Les dimensions de la subjectivation repérées nous ont ainsi permis de nommer les dimensions affective, identitaire, cognitive et comportementale qui qualifient à nos yeux le PSF. Les modalités de positionnement des sujets nous ont permis de penser les passages d’identification et de différenciation à l’intérieur de ces dimensions. Nous verrons que pour la dimension affective nous avons repéré plusieurs sous-variables. Nous avons ainsi classifié les verbatims significatifs relevés dans les discours des études suivant cette organisation par dimensions, tout d’abord de façon artisanale, sous forme de tableaux par mots-clés pour chaque sujet, regroupant les verbatims de chaque catégorie. Ensuite, au vu de la grande quantité de données, nous les avons systématisées à l’aide du logiciel Nvivo©, ce qui a rendu réalisable l’organisation de cette base de données sous forme d’arborescence afin de pouvoir raisonner par matrice. L’analyse a débuté dans une logique monographique pour ensuite aller vers une mise en commun et, à terme, vers la conception d’un modèle. Elle a donc constitué un véritable outil de travail et, successivement, de soutien à l’écriture.

56 3.4 Dégagement des catégories d’analyse du PSF

Rappelons les grandes dimensions du PSF, telles que nous les avons dégagées à l’aide de notre revue théorique et successivement stabilisées lors de l’analyse des données. Nous les décrivons brièvement ici, afin de faciliter la lecture de la suite de notre recherche. Au besoin, le lecteur pourra se référer à cette description opérationnelle au fur et à mesure de la lecture de notre présentation empirique.