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I. 2.1.2.2. Commutation de classe des Ig

I.2.2. Trafic ganglionnaire

Les cellules B2 folliculaires qui sortent de la moelle n'ont pas encore rencontré l'antigène et sont dites naïves. Ces cellules naïves colonisent les nombreux (~450) ganglions du corps humain et peuvent migrer plusieurs heures au sein du réseau folliculaire avant de rencontrer leur antigène spécifique présenté par les FDC [20, 31].

Structure du ganglion

Le ganglion a une architecture hautement organisée avec les zones de la medulla au centre et le cortex à la périphérie. Le cortex comprend lui-même 2 zones: les follicules riches en cellules B et le paracortex, autour des follicules, riche en cellules T et en vaisseaux HEV (High Endothelial Venules) par lesquels les lymphocytes peuvent entrer dans les ganglions (Figure 8). Le ganglion est

31 également irrigué par des vaisseaux lymphatiques: vaisseau afférent pour l'entrée suivi d'un réseau organisé complexe de sinus qui se rejoignent au niveau de la medulla où le liquide lymphatique est filtré avant d'être drainé par le vaisseau efférent [26].

Acteurs cellulaires

Les ganglions sont un carrefour entre les réseaux vasculaire et lymphatique qui permettent la rencontre entre les antigènes qui proviennent de la lymphe et les lymphocytes qui arrivent du sang. Les ganglions sont le siège d'un réseau cellulaire important. Ainsi, la medulla est riche en cellules phagocytaires dont les macrophages et les cellules dendritiques (DC). Outre les cellules hématopoïétiques, le cortex est constitué de cellules résidentes, les cellules stromales. On distingue en particulier les cellules dendritiques folliculaires (FDC) qui présentent l'antigène aux cellules B et les cellules réticulaires fibroblastiques (FRC) qui forment un réseau de fibres réticulaires riches en collagène important pour la migration des cellules immunitaires. Les FDC résident donc préférentiellement dans les follicules au contact des lymphocytes B alors que les FRC occupent le paracortex, formant un réseau de circulation des lymphocytes T et des DC qui arrivent du sang via les HEV formées par des cellules endothéliales spécialisées, les Blood Endothélial Cells (BEC) [27].

I.2.2.1. Entrée dans les ganglions

La migration des cellules B du sang vers le ganglion s'appelle le "homing", elle se déroule en plusieurs étapes: le roulement (rolling), l'arrêt divisé en une étape d'activation et une étape d'adhérence et l'extravasation (transmigration) (Figure 11). Ces étapes vont permettre aux cellules B de migrer, d'adhérer, puis de traverser les HEV, leur principale voie d'entrée.

L'interaction des cellules B avec les HEV est initiée par un récepteur de type L-selectine exprimé par les cellules B, le CD62L, qui reconnait des glycoprotéines sulfatées exprimées spécifiquement par les HEV telles que la PNAd (peripheral lymph node addresin). Ces interactions faibles permettent aux lymphocytes de rouler le long des HEV (étape dite de rolling) à la recherche d'un site pour traverser les BEC. La seconde étape consiste en un arrêt de cette migration par une adhérence plus ferme grâce à l'interaction forte entre les intégrines (VLA-4 et LFA-1) exprimées par le lymphocyte et leurs ligands respectifs (VCAM et ICAM) sur les BEC. La traversée de l'endothélium est régulée par les interactions entre les récepteurs de chimiokines exprimés à la surface des cellules B et leurs chimiokines respectives: CCR7 avec CCL19/21 exprimés par les HEV,

32 CXCR4 avec CXCL12, ou SDF-1 (Stromal cell-derived factor), un couple également très important dans la moelle et CXCR5 avec CXCL13, produit plus spécifiquement par les cellules stromales ganglionnaires (FDC et FRC) [20, 32]. Plusieurs études montrent que le CXCR5 participe aussi à l'entrée des lymphocytes dans les tissus muqueux [33]. Les gradients de chimiokines assurent ainsi l'entrée des cellules B dans le ganglion. Enfin, la trans-migration des lymphocytes met en jeu un mécanisme de diapédèse à travers les jonctions inter-endothéliales [20, 32].

Figure 11. Etapes d'entrée des lymphocytes dans les ganglions (adapté de Von Andrian, 2003) [32]. Les cellules B initient l'étape de roulement le long des vaisseaux HEV (High Endothelial Venules) par la liaison faible entre la L-selectine CD62L qu'elles expriment à leur surface et leur ligand PNAd (peripheral lymph node addresin) exprimé par les HEV. Une adhérence plus ferme entre les intégrines LFA-1 et VLA-4 exprimées par les cellules B et leurs ligands respectifs ICAM et VCAM exprimés par les HEV entraine l'arrêt de la migration. Les cellules B exprimant les récepteurs CCR7, CXCR4 et CXCR5 traversent alors les HEV par un processus d'extravasion en suivant des gradients vers leurs ligands respectifs: le CCL19/21 exprimés par les HEV elles-mêmes et le CXCL12 et le CXCL13 exprimés par les cellules stromales ganglionnaires.

I.2.2.2. Trafic intra-ganglionnaire

Les lymphocytes circulants entrent donc dans les ganglions au travers des HEV. Ils sont alors dirigés vers les follicules ou le paracortex (Pc) suivant un gradient de chimiokines transportées par les FRC qui se divisent en conduits folliculaires et paracorticaux (Figure 12). Ainsi, les conduits paracorticaux transportent du CCL19 et du CCL21 qui attirent les cellules T et les DC dans la zone paracorticale et les cellules B longent les conduits folliculaires qui transportent du CXCL13 et sont attirées également par le CXCL13 exprimé par les FDC présentes dans les follicules [27].

Après avoir migré à l'intérieur du ganglion pendant plusieurs heures à la rencontre d'un antigène, les cellules B qui n'ont pas trouvé une cible suffisamment affine passent dans les sinus corticaux, rejoignent le sinus médullaire ou éventuellement le SCS et quittent le ganglion par le

33 vaisseau lymphatique efférent. Le passage des lymphocytes du cortex au réseau de sinus lymphatiques se fait grâce à un gradient de Sphingosine-1-Phosphate (S1P) et à son récepteur couplé aux protéines G, le récepteur 1 de la S1P (S1PR1). En effet, le sang et la lymphe sont concentrés en S1P alors que la concentration ganglionnaire est faible. De plus, les lymphocytes régulent l'expression membranaire de S1PR1, soit négativement au cours de leur entrée, soit positivement pour la sortie vers le sinus lymphatique [20].

Les cellules qui ont rencontré leur antigène spécifique prolifèrent et forment des CG. Seuls les clones avec l'affinité la plus élevée sont sélectionnés pour survivre dans les CG [22]. Plus l'affinité du BCR pour l'antigène est forte, plus le BCR est capable de s'oligomériser rapidement, c'est-à-dire de former des "microclusters" regroupant plusieurs récepteurs. Plus les microclusters sont importants, plus l'amplification du signal intracellulaire est important et la réponse efficace [34]. La signalisation résultant de l'activation du BCR induite par un antigène protéique spécifique est plus soutenue que lorsqu'elle est induite par un ligand [35].

I.2.2.3. Trafic membranaire: Le BCR et sa signalisation

Dans les cellules B naïves, le BCR peut être sous forme de monomère et exclu des radeaux lipidiques ou pré-assemblé sous forme de complexes oligomériques au niveau des radeaux lipidiques et générer un niveau de signalisation basal. Après liaison d'un antigène, les complexes de BCR sont réorganisés et redirigés au sein de la membrane plasmique [36, 37].

Figure 12. Trafic cortical des lymphocytes B (Gonzalez et al., 2011) [27]. Une fois dans les ganglions, les lymphocytes B rejoignent le sinus sous-capsulaire (SCS) puis migrent le long des

conduits folliculaires (FRC) qui

transportent du CXCL13 et jusqu'aux follicules dont les cellules dendritiques folliculaires (FDC) expriment également du CXCL13.

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Spreading

L’évènement le plus précoce de l'activation des cellules B naïves est le regroupement de BCR en microclusters dans des domaines particuliers de la membrane plasmique appelés radeaux lipidiques. Ils permettent l'accumulation de protéines de signalisation et facilitent ainsi leurs interactions [17, 38]. En effet, la signalisation du BCR consiste en une cascade de phosphorylations et l'accumulation d'antigènes coïncide avec l'accumulation de tyrosines phosphorylées. C'est au niveau des microclusters que le BCR, phosphorylé par Lyn, est capable de recruter la kinase Syk, un effecteur clé de sa signalisation, alors que les régulateurs négatifs restent exclus des radeaux lipidiques. Syk est alors capable de recruter d'autres effecteurs tels que les protéines BLNK, Btk, PLCγ2 ou encore Vav, formant ainsi un microsignalosome. La formation des microclusters est indépendante de la signalisation du BCR mais le cytosquelette, impliquant l'actine et les protéines ERM (Ezrin-Radixin-Moesin), joue un rôle crucial dans le maintien de son intégrité et son organisation. Des co-récepteurs du BCR, tels que le CD19 ou les intégrines, régulent la réorganisation du cytosquelette et participent à l'activation des cellules. Le CD19 est une protéine transmembranaire contenant 9 résidus tyrosines capables de recruter des effecteurs de la signalisation du BCR tels que Vav ou PI3K, il joue ainsi un rôle d'adaptateur important dans l’amplification du signal à travers le BCR [39]. En effet, la cellule B nécessite d'accumuler de nombreux microsignalosomes afin d'atteindre un seuil d'activation suffisant. Pour se faire, elle induit un signal de propagation des microsignalosomes, appelé "spreading", proportionnel à l'affinité et à la densité de l'antigène. Ce phénomène de spreading est lui aussi dépendant du cytosquelette mais également de la signalisation [26].

Internalisation

Le spreading et les microsignalososmes sont au maximum après 3 minutes de stimulation. Ensuite, la cellule enclenche une phase de contraction plus longue impliquant un nouveau réarrangement du cytosquelette. Il en résulte la formation de la synapse immunologique qui consiste en un regroupement (ou cluster) central des BCR, encerclé par un anneau de molécules d'adhérence telles que LFA-1 et VLA-4. La synapse agit comme une plateforme pour l'internalisation de l'antigène qui est nécessaire au recrutement de cellules T helper ainsi qu'à l'activation maximum des cellules B [26]. Après 15 minutes de stimulation, les microsignalosomes se dissocient [5].

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