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Syk est présente dans de nombreux types cellulaires et intervient dans plusieurs processus cellulaires. Son mécanisme d'activation est complexe et se doit d’être finement régulé pour lui permettre d’intervenir de façon spécifique dans la réponse cellulaire.

i. Régulation positive

Tyrosine 131. La phosphorylation de Syk murine sur le résidu tyrosine 130 (Y131 chez

l'humain), localisé dans l'interdomaine A, apporte une charge négative qui interfère et déstabilise la conformation auto-inhibitrice de l'interdomaine A. Les deux domaines SH2 changent alors d'orientation et s'éloignent l'un de l'autre, adoptant ainsi une structure moins affine pour le BCR. Cette phosphorylation provoque ainsi le décrochage de Syk du BCR et sa libération dans le cytoplasme. En effet, le remplacement de la tyrosine 130 par une phénylalanine (Y130F) non chargée augmente la capacité de liaison de Syk au BCR tandis qu'un résidu glutamate (Y130E) portant une charge négative permanente diminue cette capacité de liaison [68, 83]. En plus de son rôle dans la liaison du BCR, la phosphorylation de Syk sur la tyrosine 130 déstabilise l'interaction de l'interdomaine A avec l'interdomaine B et le domaine kinase, entrainant une augmentation de son activité catalytique. Ces résultats suggèrent que le résidu tyrosine 130 est impliqué dans la perturbation de la structure auto-inhibitrice de l'interdomaine A et élimine l'effet inhibiteur imposé

46 par la position des deux domaines SH2 par rapport au domaine kinase [59]. D'autre part, la phosphorylation de la tyrosine 130 ou son « imitation » grâce à un mutant Syk (Y130E) a été décrite pour jouer un rôle dans d'autres voies de signalisation que celle du BCR. En effet, elle permet la liaison de Syk aux fibronectines qui, elles-mêmes, lient les intégrines et permettent l'adhérence cellulaire des cellules B (DT40) [84] ou encore, elle permet à Syk de lier et de phosphoryler les composants des centrosomes aboutissant à la mitose des cellules de cancer du sein (MCF-7) [85].

Tyrosines 348 et 352. Les résidus tyrosine 342 et 346 de Syk chez la souris (Y348 et Y352

chez l'homme) sont situés dans l'interdomaine B, proches du domaine kinase et peuvent être phosphorylés indépendamment l'un de l'autre. De plus, leur taux de phosphorylation semble être dépendant de l’espèce. En effet, la phosphorylation de la tyrosine 346 (équivalent 352 humain) est prédominante in vitro chez la souris [59] alors que la phosphorylation de la tyrosine 348 (équivalent 342 murin) est quant à elle prépondérante chez l’homme [62]. Leur phosphorylation, induite par Syk elle-même ou par les SFKs, renforce la signalisation du BCR en augmentant l'activité enzymatique de Syk d'une part et en créant des sites de liaison qui favorisent l'interaction protéine-protéine d'autre part [59].

Tyrosines 525 et 526. Les résidus tyrosine 525 et 526, situés dans la boucle d’activation du

domaine catalytique de Syk, sont principalement des sites d'autophosphorylation. En effet, leur phosphorylation est indétectable dans des cellules B de poulet (DT40) déficientes en Syk sauvage et exprimant le mutant Syk (K396R) [82]. Cependant, il a été montré dans les mastocytes que les SFKs sont capables de phosphoryler ces deux tyrosines en réponse à l'activation d'un récepteur Fc par un ligand de faible affinité. Les SFKs aideraient alors Syk à initier et à accélérer le processus de signalisation [86]. Dans la conformation inactive de Syk, les tyrosines 525 et 526 (et 530) de la boucle d'activation sont orientées vers le site de liaison de l'ATP. Même si la tyrosine 525 est la plus proche du site d’ATP et donc la plus facilement phosphorylable [63], c'est la phosphorylation de la tyrosine 526 qui est prédominante suite à une stimulation du BCR [62]. Ces résultats suggèrent donc un changement conformationnel significatif en accord avec le modèle d'activation de Syk [63]. Pour la plupart des kinases, la phosphorylation des tyrosines contenues dans la boucle d'activation reflète leur activation complète. En revanche, pour Syk, la mutation d’une ou des deux tyrosines du site actif n'a pas ou peu d'effet sur son activité enzymatique in vitro, suggérant que la boucle d’activation de Syk existe dans un état activable [63, 65]. Pourtant, cette mutation diminue fortement la phosphorylation des substrats de Syk in vivo et crée un déficit majeur dans la

47 signalisation des cellules B ou des mastocytes [65, 87, 88]. Il y a donc un manque de corrélation entre l'effet de la phosphorylation des tyrosines 525 et 526 in vitro et in vivo. Ceci pourrait s'expliquer par une fonction de Syk indépendante de son activité kinase. La phosphorylation des tyrosines 525 et 526 pourrait alors générer un site de liaison de Syk à une ou plusieurs protéines présentes uniquement dans les cultures cellulaires [59].

Tyrosines 629 et 630. La queue C-terminale de Syk présente trois résidus tyrosine

successifs aux positions 629, 630 et 631 (Y623, Y624 et Y625 chez le rat). La mutation des 3 résidus (ou des résidus Y624 et 625) entraine une augmentation de la phosphorylation basale sur les autres résidus tyrosines 317 (Y323 humain) et Y519/Y520 (Y525/Y526 humain). Il en résulte une diminution de la capacité de liaison de Syk au motif ITAM du BCR ainsi qu'une diminution de son activité kinase aboutissant à une inefficacité de la signalisation en aval du BCR. Ces résultats suggèrent un modèle dans lequel, à l'état de repos, ces tyrosines, mais surtout les Y624 et Y625, interagissent avec l'interdomaine A et le domaine catalytique afin de maintenir Syk dans une conformation auto-inhibée. Lors de l'activation d'un immunorécepteur, la liaison de Syk au motif ITAM provoque un changement de conformation qui expose les tyrosines de la queue C-terminale et fait passer Syk d'un état auto-inhibé à activé. Les tyrosines 624 et 625 peuvent alors être autophosphorylées, déstabilisant la molécule pour la maintenir dans un état activé [89]. En effet, une autre étude montre que le domaine SH2 de la protéine adaptatrice BLNK se lie alors à la tyrosine 630 de Syk, le complexe BLNK/Syk remplaçant le complexe ppITAM/Syk dans le maintien de l'activation de Syk. De plus, l'interaction entre Syk et BLNK n'étant pas observée quand est exprimé un mutant "kinase dead" de Syk, suggère que la tyrosine 630 est un site d'autophosphorylation [71]. L'ensemble de ces données montre l'importance des résidus tyrosines de la queue C-terminale de Syk dans la régulation de ses fonctions [89].

Sérine 291. En dehors des résidus tyrosine, la séquence de Syk est également composée de

plusieurs résidus sérine et thréonine phosphorylables [62], dont la sérine en position 291 qui est située dans l'insert de 23 acides aminés de l'interdomaine B. Cette sérine est un site de phosphorylation majeur de Syk et régule également des voies de signalisation en aval du BCR. En effet, la phosphorylation de la sérine 291 par la protéine kinase C en réponse à une stimulation du BCR par un anti-IgM ou des PKCs par un mélange PMA-ionomycine aboutit, par exemple, à l'augmentation de l'activation des facteurs de transcription NFAT (Nuclear Factor of Activated T cells) ou Elk-1 dans les cellules B (DT40) [90].

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ii. Régulation négative

La tyrosine 323, située au début de l'interdomaine B, a été décrite pour réguler négativement le signal transmis par le BCR. En effet, la transfection des cellules DT40 avec une construction codante pour la séquence de Syk murine mutée sur la tyrosine 317 (Y323 humaine) aboutit à une augmentation de la phosphorylation de PLCγ2, de l'influx calcique et de l'activité de NFAT en réponse à une stimulation du BCR [82]. Par ailleurs, l’absence de Lyn dans le même modèle cellulaire montre une faible phosphorylation de la tyrosine 317 et une réponse calcique augmentée. Enfin, les cellules de souris déficientes en Syk et exprimant un mutant "kinase dead" de Syk voient leur forme de Syk phosphorylée sur le résidu tyrosine 317. L’ensemble de ces résultats montre que la tyrosine 317 est préférentiellement phosphorylée par Lyn et suggère un mécanisme par lequel Lyn fonctionnerait comme un régulateur négatif de Syk dans la signalisation du BCR [68, 91].

iii. Localisation cellulaire

En dehors des phosphorylations impliquées dans la régulation de l'activité catalytique de Syk, les fonctions de cette kinase peuvent aussi dépendre de sa localisation cellulaire. Décrite comme une kinase cytoplasmique, Syk est également retrouvée dans le noyau dont elle disparaît après un engagement soutenu du BCR. Il est à noter que Syk ne contient pas de séquences NLS (signal de localisation nucléaire) ni NES (signal d'exportation nucléaire). Cependant, une séquence de 6 acides aminés (359 - 364), riche en résidus leucines et située dans l'interdomaine B, permet à Syk de faire la navette entre les deux compartiments. Les acides aminés précédents (332 - 358) constituent une séquence qui renforce ce système de navette [92]. Une autre étude a montré que la mutation de la tyrosine 290 en phénylalanine, située également dans l'interdomaine B, aboutit à la localisation exclusivement cytoplasmique de Syk dans les cellules B ; cette mutation entraînant l'apparition d'une séquence NES dans Syk. Ces résultats sont cohérents avec l’absence du résidu tyrosine 290 dans les protéines Syk B et Zap70 qui sont localisées dans le cytoplasme et le compartiment nucléaire [90]. Ce système de navette permettrait à Syk, activée à la membrane, de transiter vers le noyau où elle phosphorylerait des substrats nucléaires. Le processus d'exclusion nucléaire de Syk, quant à lui, est indirectement dépendant de l'activation des PKCs suite à une stimulation du BCR. De plus, le temps de réponse particulièrement long suggère la synthèse de novo de nouvelles protéines qui interagiraient avec Syk dans le noyau. Syk est une protéine requise à la fois pour la survie et pour l'apoptose des cellules B induites par le BCR. Dans ce contexte, l'un des rôles décrits pour Syk

49 dans le noyau est de rendre les cellules résistantes à l'activation des caspases-3, suite à un stress oxydatif, pendant que la forme cytoplasmique augmente leur activation [92].