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Chapitre I : Contexte et revue bibliographique

I.2. Spécificités du TiO 2 en tant que photo-anode

I.2.2. a. TiO 2 : une activité influencée par le polymorphisme cristallin

Le dioxyde de titane (TiO2) est un semi-conducteur possédant trois polymorphes : l’anatase (quadratique), le rutile (quadratique) et le brookite (orthorhombique) (Figure I. 13) [116], [117].

Figure I. 13 : Les trois polymorphes naturels du TiO2 (a) Anatase, (b) Rutile et (c) Brookite (les atomes d’oxygène sont représentés par des sphères rouges et ceux du titane par des sphères grises) [94, 95].

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Dans les trois cas, le réseau cristallin est formé d’octaèdres d’oxygène occupés par un atome de titane formant une maille de formule TiO2. Néanmoins, les atomes d’oxygène de l’octaèdre peuvent s’arranger différemment autour de l’atome de titane (Figure I. 13) ce qui confère à chacune de ces trois formes ses propres propriétés physico-chimiques.

Le Tableau I. 2 résume les densités massiques, la dureté à l’échelle de Mohs (par rapport au diamant) et la valeur du gap énergétique de l’anatase, du rutile et du brookite [113], [118]–[120].

Tableau I. 2 : Propriétés physiques et thermodynamiques des trois polymorphes du TiO2.

Forme cristalline Anatase Rutile Brookite Densité (g.cm-3) 3,79 - 3,97 4,23 4,08 - 4,18

Dureté (Mohs) 5,5 - 6 6-6,5 5,5 - 6

Énergie de gap (eV) 3,23 3,06-3,10 3,40 - 3,80

Enthalpie de formation

∆H° (298 K) (kJ.mol-1.K-1) -939,27 -944 -941 Énergie de Gibbs

∆G° (298 K) (kJ.mol-1.K-1) -884,80 -889,90 -885,57

La forme la plus abondante du TiO2 est le rutile. C’est le polymorphe thermodynamiquement le plus stable. Cependant, quand la taille des grains diminue suffisamment, l’énergie libre de formation du rutile (ΔG0) devient moins négative que celle de l’anatase qui devient la phase la plus stable à l’échelle nanométrique. Ce phénomène est dû au fait que l’anatase présente une énergie de surface 15% inférieure à celle du rutile et par suite, à petite échelle, les grains de l’anatase sont thermodynamiquement plus stables que ceux du rutile [121], [122]. La transition de phase commence au niveau des joints de grains puis se propage vers le cœur du matériau. De plus, la température de transition anatase-rutile est d’autant plus petite que la taille des cristallites est faible. La vitesse de conversion anatase-rutile est de même d’autant plus grande que la taille des grains est faible (à l’échelle nanométrique) [121], [123]. En comparant les trois polymorphes, le rutile est la phase la plus abondante, la plus stable thermodynamiquement et présentant l’énergie de la bande interdite la plus faible. Les phases anatase et brookite sont métastables et se transforment irréversiblement en rutile à partir de 600 °C [124]–[126]. D’après la littérature, l’anatase est reconnue comme étant la phase la plus photo-catalytiquement active grâce à la mobilité des paires électron/trou au sein du matériau et la facilité de leur transfert en surface [127].

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L’activité photo-catalytique de la phase brookite reste la moins remarquable parmi les trois polymorphes malgré certaines références qui confirment une bonne activité observée sur des nanoparticules de TiO2 brookite [113], [128], [129].

Commercialement, un mélange anatase-rutile a été développé sur le marché. Ce mélange (dans un rapport anatase : rutile idéalement de 70 : 30 ou de 80 : 20) est appelé Degussa P25 (Evonik). Le P25 est souvent utilisé comme référence photo-catalytique et son activité a été rapportée dans un grand nombre de travaux scientifiques [130]–[133]. Jusqu’à présent, rares sont les composés à base de TiO2 qui présentent une activité photo-catalytique supérieure à la Degussa P25 dans le domaine des UV. Enfin, il est nécessaire de mentionner que le TiO2, sous ses trois polymorphes, est principalement un semi-conducteur intrinsèque de type n parce qu’il renferme souvent des lacunes d’oxygène [134]. De plus, la cristallisation confère au TiO2 un ordre suffisant pour limiter les recombinaisons des paires électron-trou ce qui n’est pas le cas du TiO2 amorphe. Cette cristallisation améliore donc l’activité photo-catalytique du matériau.

Du point de vue des propriétés fonctionnelles, le TiO2 est choisi pour son activité même à l’état pur, non dopé [135]. De plus, pour les applications en électrochimie et en génération d’hydrogène, le TiO2 présente un gap suffisamment large pour provoquer la dissociation de l’eau.

La Figure I. 14 représente les applications du TiO2 en lien avec ses propriétés fonctionnelles.

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Du fait de ses propriétés fonctionnelles remarquables, la gamme des applications du TiO2 est très large. A titre d’exemple, pour l’application des verres autonettoyants [136], une fine couche de TiO2 revêt le verre ordinaire pour dégrader les polluants organiques adhérents en surface.

Une application plus récente du TiO2 est la filtration des eaux usées en eau consommable voire potable. Plusieurs exemples de synthèse, d’optimisation et de test de membranes de TiO2 à porosité contrôlée pour la filtration de l’eau sont cités dans les références [137]–[141].

Les propriétés électroniques exceptionnelles de la phase anatase du TiO2, surtout les faibles taux de recombinaisons électro-trou, font de ce polymorphe un candidat adéquat pour l’application dans les cellules solaires. Des systèmes, appelés cellules solaires à colorants (Dye Sensitized Solar Cells, DSSC), intégrant du TiO2 anatase pur ou modifié et basés sur le principe photo-catalytique, ont été développés [142], [143].

Enfin, du fait des propriétés protectrices du TiO2 contre les UV-A-(315 nm-400 nm), des nanoparticules de TiO2 sont intégrées aux produits cosmétiques, notamment les écrans solaires, afin d’absorber la gamme des UV-A- pouvant engendrer des espèces oxydantes au sein des cellules cutanées et par suite provoquer le cancer de la peau [144], [145]. Tandis qu’en teinturerie, malgré ses bonnes capacités de blanchissement (transparence dans le domaine du visible), il est conseillé de limiter l’usage du TiO2 dans les peintures. En effet, étant un matériau photo-actif dans le domaine des UV, le TiO2 cause la dégradation des molécules organiques contenues dans les colorants [146].

Dans ces travaux de thèse, le TiO2 présente un intérêt comme anode dans la photo-électrolyse de l’eau pour la génération d’hydrogène (comme déjà évoqué dans la partie I.1). Cette application connaît actuellement une révolution dans le domaine de l’énergie. Le TiO2 présente l’énergie de bande interdite la plus convenable pour la génération d’hydrogène à partir de la photodissociation de l’eau. Les travaux les plus récents ont été menés par Liu et al. dans des systèmes à base de photo-anodes en nanotubes de TiO2 décorés par du nitrure de carbone (g-C3N4) [10]. La jonction entre le nitrure de carbone et le TiO2 a diminué le taux de recombinaison des paires électron-trou photo-générées et a accéléré leur migration vers la surface. Il faut également citer les travaux de Chai et al. [147] et ceux de Han et al. [148] sur les photo-anodes 3D à base d’hématite-TiO2 dans lesquelles les trous générés sont facilement transférés à l’interface électrode-électrolyte par le biais de α-Fe2O3.

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